4 avril 1871 Le général communard Emile Victor Duval est fusillé par la vermine des Versaillais

jeudi 16 février 2023.
 

Comme militant ouvrier et en tant que dirigeant militaire de La Commune, Emile Victor mérite une reconnaissance éternelle.

1) Emile Victor, militant ouvrier, socialiste révolutionnaire

Fils d’une blanchisseuse, il se fait connaître très tôt par son activité inlassable dans les associations mutuellistes ouvrières.

Ouvrier fondeur en fer, il contribue à organiser le monde ouvrier parisien, 25 ans avant la reconnaissance de la liberté syndicale. Au début de l’année 1870, il anime durant 4 mois, une grève des fondeurs qui se termine victorieusement.

Adhérent de la Première Internationale (Association Internationale des Travailleurs), il est condamné à 2 mois de prison lors du 3ème procès de celle-ci à Paris. Il anime le Club Démocratie Socialiste qui adhère en novembre 1870 à l’AIT.

Emile Victor fait partie des blanquistes, ce courant républicain issu de la Révolution française, premier groupe au monde à se réclamer du communisme (bien avant Marx). Il est actif dans les groupes de combat de ce mouvement politique révolutionnaire.

2) La guerre de 1870 et le siège de Paris

Le 19 juillet 1870, la France du Second Empire déclare la guerre à la Prusse pour des raisons futiles. Le général Leboeuf se porte garant de l’état de préparation de l’armée française. "Nous sommes prêts et archi-prêts, il ne manque pas à notre armée un bouton de guêtre."

19 juillet 1870 Napoléon 3 déclare stupidement la guerre à la Prusse

En début de conflit, les troupes françaises sur le Rhin ne comptent que 265 000 soldats contre 800000 pour la Prusse et les 4 Etats allemands.

Cette guerre franco-allemande de 1870 est rapidement marquée par une domination militaire de l’Allemagne, que ce soit d’un point de vue numérique, technique ou stratégique, aidée en cela notamment par l’incompétence des dirigeants militaires français, à l’image du maréchal Bazaine, mais aussi de Napoléon III, venu s’enfermer à Sedan. Les officiers formés en Afrique, plus baroudeurs que techniciens, agissent dans le désordre. L’état-major allemand a compris l’importance de la concentration d’artillerie alors que l’état-major français en est encore au rôle de la cavalerie durant le 1er empire.

L’armée française de 1870 était commandée par des branquignoles réactionnaires

Après plusieurs autres défaites, Napoléon III capitule à Sedan le 2 septembre 1870 avec 39 généraux, près de 100 000 soldats, 650 canons , 10 000 chevaux, 553 pièces d’artillerie, 66 000 fusils.

2 septembre 1870 à Sedan Capitulation de Napoléon 3 avec son armée

Le 4 septembre 1870, Paris se soulève sans violence, proclame la république et la création d’un gouvernement de défense nationale. Emile Victor Duval est alors élu au Comité central républicain des Vingt arrondissements.

Du 17 septembre 1870 au 26 janvier 1871, malgré les privations et le froid, les Parisiens défendent leur ville face aux armées allemandes. Celles-ci occupent symboliquement les Champs-Elysées du 1er au 3 mars.

Le 18 mars 1871, Adolphe Thiers et les militaires, en accord avec les Prussiens, décident de reprendre à la population de Paris les canons qui ont permis la défense de la ville durant le siège. Mais les soldats des régiments de ligne fraternisent avec la population. Les Gardes nationaux des arrondissements bourgeois, appelés en renfort, préfèrent, dans leur grande majorité, rester chez eux. Un soulèvement populaire répond à la tentative de putsch menée par l’armée ; Emile Victor Duval s’y distingue particulièrement à la tête de groupes bien organisés qui s’emparent de toute la rive gauche de la capitale.

L’épopée de la Commune de Paris vient de commencer.

3) Emile Victor Duval est fait prisonnier lors de la sortie du 3 avril 1871

Conscients de leur échec, Thiers et les généraux décident un repli sur Versailles, où ils rassemblent les forces militaires nécessaires pour écraser les défenseurs de Paris. Le 1er avril, Thiers annonce qu’il dispose d’"une des plus belles armées que la France ait possédées." Aussitôt des troupes régulières marchent vers Courbevoie où des gendarmes se distinguent déjà en fusillant les prisonniers.

Les dirigeants de la Commune sont indécis sur l’attitude à adopter. Marcher sur Versailles tant que l’armée réunie par Thiers n’est pas au complet, serait logique. Mais, les troupes parisiennes sont-elles capables de battre les unités de l’armée ? Finalement, le 3 avril, à trois heures du matin, 40000 soldats de la Commune s’avancent vers Rueil (Bergeret), vers Meudon (Eudes) et le plateau de Chatillon (Duval).

Seule, la colonne de Duval va combattre de façon organisée et inquiéter les Versaillais. Voici comment Lissagaray en rend compte dans son Histoire de la Commune de 1871

"A l’extrême gauche Duval avait passé la nuit du avec six ou sept mille hommes sur le plateau de Châtillon. Le 3, vers sept heures, il forme une colonne d’élite, s’avance jusqu’au Petit-Bicêtre, dissipe les avant-postes du général Du Barail et envoie reconnaître Villacoublay qui commande la route. L’officier annonce que les chemins sont libres et les fédérés s’avancent sans crainte, quand, près du hameau, la fusillade éclate. Les hommes se déploient en tirailleurs. Duval, au milieu de la route, à découvert, donne l’exemple. On tiraille plusieurs heures. Quelques obus suffiraient pour déloger l’ennemi, Duval n’a pas d’atillerie ; déjà, les cartouches manquent, il en envoie chercher à Châtillon.

" Les fédérés qui occupent la redoute de Châtillon, confondus dans un désordre inextricable, se croient déjà cernés. Les envoyés de Duval prient, menacent, ne peuvent obtenir ni renforts, ni munitions. Un officier ordonne la retraite. Duval, abandonné, est assailli par la brigade Derroja et toute la division Pellé, 8000 hommes. Il se retire avec les braves sur le plateau de Châtillon... Le 4 avril, à cinq heures, le plateau et les villages voisins sont enveloppés par la brigade Derroja et la division Pellé. "Rendez-vous, vous aurez la vie sauve" fait dire le général Pellé."

4) Emile Victor Duval fusillé

Extraits du Journal Officiel de la République française sous la Commune

Mort du général Duval

La Vérité publie le récit suivant d’un témoin qui a vu mourir le général Duval :

« Les généraux Duval, Henri et près de 1000 gardes nationaux avaient été cernés dans la redoute de Châtillon, et contraints de mettre bas les armes. Jusqu’à ce qu’un tribunal quelconque eut statué sur leur sort, ils étaient prisonniers de guerre, c’est-à-dire sacrés.

Les fédérés ont été conduits entre deux rangs de soldats jusqu’au petit Bicêtre, petit groupe de maisons situées sur le rebord de la route de Choisy à Versailles ; un combat très vif a eu lieu ici le dix sept septembre, une grande fosse surmontée d’une croix noire indique l’endroit unique où les victimes de cette journée ont été enterrées.

C’est à cet endroit que le général Vinoy, arrivant de Versailles avec son état-major, rencontra la colonne des prisonniers ; il donna l’ordre de s’arrêter, et, descendant de cheval :

Il y a parmi vous, fit-t-il, un Monsieur Duval qui se fait appeler général ; je voudrais bien le voir.

C’est moi, dit Duval, avec fierté en sortant des rangs.

Vous avez aussi deux chefs de bataillon avec vous ?

Les deux officiers désignés sortirent des rangs.

Vous êtes d’affreuses canailles, dit Vinoy, vous avez fusillé le général Clément Thomas et le général Lecomte ; vous savez ce qui vous attend. Capitaine, reprit le signataire de la capitulation de Paris, s’adressant au commandant de l’escorte, faites former un peloton de dix chasseurs, Monsieur, passez dans le champ à côté.

Les trois officiers de la Commune obéirent simplement, ils sautèrent un petit fossé, suivi du peloton funèbre. Le général et le commandant furent acculés contre une petite maisonnette qui, ironie du sort, portait sur sa façade l’inscription suivante : Duval, horticulteur.

Le général Duval et ses compagnons d’armes ont mis eux-mêmes habit bas, et deux minutes après ils tombaient foudroyés, aux cris de : Vive la commune !

Vinoy et son état-major assistaient impassibles à cette triple exécution. Quant aux officiers, ils étaient touchés et émus de tant de courage et de sang-froid. »


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