Années 2010 2020 Compétitivité, austérité, précarité et combativité

mercredi 28 octobre 2020.
 

A) L’effondrement du Rana Plazza, symbole du capitalisme actionnarial assassin

Cette année 2013 a été marquée par d’innombrables drames provoqués par la guerre du profit générée par le mode de production capitaliste.

* Le 24 avril 2013 dans la capitale du Bangladesh, Dacca, plusieurs milliers de travailleurs sont ensevelis sous les décombres de leur lieu de travail. Cet immeuble construit au moindre coût (absolument pas comme usine) portait des machines au moindre coût. C’est ici que de grandes entreprises capitalistes faisaient travailler au moindre coût des milliers de salariés, surtout des femmes, quatorze heures par jour, pour quelques dizaines d’euros mensuels. A Dacca et dans sa banlieue, d’innombrables entreprises menacent en permanence de s’effondrer (75 travailleuse tuées à Savar en 2005, 18 à Dacca en 2006, 35 en 2010 à Tazreen) ou de prendre feu (112 morts à Tazreen le 24 novembre 2012).

Bangladesh : Des torrents de sang sur les vêtements des grandes marques européennes

Quiconque connaît les conditions de travail dans ces usines du capitalisme actionnarial mondialisé (au Bangladesh comme au Mexique ou en Colombie, à Haïti comme au Sri Lanka et ailleurs) peut constater le retour du despotisme d’usine comme rapport social apparenté au fascisme. Toute hausse minime des bourses impose ce prix du sang. Au 19ème siècle, Karl Marx définissait ainsi l’exploitation des travailleurs par le capital « Dans sa passion aveugle et démesurée, dans sa gloutonnerie de travail extra, le capital dépasse non seulement les limites morales, mais encore la limite physiologique extrême de la journée de travail. Il usurpe le temps qu’exigent la croissance, le développement et l’entretien du corps en bonne santé. Il vole le temps qui devrait être employé à respirer l’air libre et à jouir de la lumière du soleil […]. Ce qui l’intéresse uniquement, c’est le maximum qui peut en être dépensé dans une journée. Et il atteint son but en abrégeant la vie du travailleur, de même qu’un agriculteur avide obtient de son sol un plus fort rendement en épuisant sa fertilité. » (Chapitre 10 du Capital)

B) Pollutions, malbouffe, catastrophes naturelles...

La recherche du profit maximum par un coût du travail minimum constitue la logique intrinsèque fondamentale du capitalisme.

Cela explique le drame du Rana Plazza mais aussi :

- l’accélération des pollutions et menaces environnementales sur la planète

- le développement de la malbouffe avec ces scandales nauséabonds de l’année 2013 concernant les trafics sur la viande de cheval. Une étude récente du Corporate Europe Observatory conclut que 60% des membres de l’Agence Européenne de sécurité des aliments ont des liens directs ou indirects avec les firmes qu’ils doivent contrôler. Décidément, l’Union européenne est bien un agent de la mondialisation capitaliste. "La fraude est au coeur du système" constate Fabrice Nicolino.

Cheval : la fraude qui rapporte ! Chômage : la "tricherie" qui tue !

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Malbouffe : la Commission européenne veut maintenant nous faire manger des poulets américains traités au dioxyde de chlore, chlorure de sodium acidifié, phosphate trisodique, acides peroxydés ... (3 articles)

- le pillage des richesses naturelles des pays d’Afrique en particulier, générant un exode vers l’Europe qui se termine souvent mal comme nous l’a rappelé cette année le naufrage de Lampedusa (366 repêchés sans vie).

Lampedusa : Horreur et Indignité de l’Europe capitaliste

- une accélération du nombre et de l’ampleur des catastrophes naturelles avec en particulier le typhon qui a ravagé les Philippines

Les Philippines après Haiyan : incurie des possédants, urgence de la solidarité

C) Austérité, compétitivité, délocalisations, licenciements...

La recherche du profit maximum par un coût du travail minimum constitue la logique intrinsèque fondamentale du capitalisme.

Cela explique le drame du Rana Plazza mais aussi :

- les politiques d’austérité pour rembourser une prétendue dette volontairement créée par le capital financier pour empocher des rentes au détriment des Etats. La troïka FMI UE Banque centrale européenne applique ses politiques d’austérité depuis six ans en Grèce ; résultat : un effondrement de 40% du revenu disponible des ménages, un taux de chômage de 28%.

La vraie origine de la dette publique : les baisses d’impôts

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Les peuples ne doivent pas payer un euro pour les banques et les spéculateurs rapaces

- la dégradation des conditions de travail (quand verrons-nous un président de la république assister aux obsèques d’un accidenté du travail ? d’un suicidé du travail ?...) qui permet au patronat et aux rentiers de privatiser les profits (bénéfices d’entreprises) et socialiser les pertes ( sécurité sociale...). Le "mal travail" coûte en France 80 milliards d’euros par an dans notre pays.

Capitalisme et esclavagisme de salariés : la mise à mort du travail 1

Le travail à en perdre la vie… (Par Brigitte Font Le Bret, psychiatre)

"Harcelé à perdre la raison", ou la terrible souffrance du jardinier municipal

- les nombreux plans de licenciements en Europe et particulièrement en France.

L’entreprise pharmaceutique Sanofi en est un bon exemple. Elle arrose ses actionnaires (3,5 milliards d’euros en 2013) aux dépens de l’emploi (4000 suppressions de postes entre 2008 et 2013) et des salaires (0% d’augmentation annoncé pour 2014).

Chez Sanofi, Mélenchon plaide pour une loi "contre les licenciements boursiers"

L’entreprise EADS (Airbus) n’est pas en reste. Pour atteindre "10% de taux de marge" en 2015 et ainsi réaliser une "politique de dividendes ambitieuse", la direction veut réduire de façon draconienne le "coût du travail" par des licenciements (5800 annoncés) et surtout une dégradation des acquis sociaux au nom d’accords de dits de compétitivité.

EADS bradé : C’est Florange et Gandrange multiplié par cent !

L’année sociale 2013 dans notre pays a été marquée par la grève longue (4 mois et demi), justifiée et minoritaire (environ 10%) des ouvriers de PSA Aulnay contre la fermeture de leur entreprise (3000 salariés). Malgré les mensonges et la dureté de leur direction, malgré le lâchage complet du gouvernement, malgré des médias les présentant comme des casseurs, ils ont tenu et obtenu des acquis significatifs (amélioration du plan d’accompagnement, 20000 euros de prime...).

PSA Aulnay sous Bois : Sauver l’emploi et changer la production (PG septembre 2012)

L’année sociale 2013 dans notre pays se termine par une grève sur une revendication d’augmentation dégressive des salaires (2,5% pour les ouvriers, 2% pour les agents de maîtrise, 1,3% pour les cadres). Le groupe Total a empoché 12 milliards de bénéfice en 2012 et profite au maximum de l’optimisation fiscale ; son patron Christophe de Margerie a gagné 4,9 millions d’euros ; alors... qu’ils ne viennent pas pleurer.

D) Précarité

Année après année, les Français riches s’enrichissent (les 500 Français les plus fortunés ont accru leurs revenus de 25% en un an soit 66 milliards d’euros).

La masse des Français, elle, se précarise et s’appauvrit.

Le nombre de smicards a augmenté de 500000 en un an pour dépasser les 3 millions fin 2013.

Sur trois ans, les revenus des 10% les plus pauvres ont baissé de 3,7%

En 2013, le pouvoir d’achat du revenu disponible brut a baissé en moyenne de 0,9% d’après l’INSEE

Fin 2013, 8 617 000 personnes vivent dans notre pays sous le seuil de pauvreté avec moins de 977 euros par mois.

Fin 2013, 5 182 500 personnes sont inscrites à Pôle emploi.

En 2013, le pourcentage d’embauches en Contrats à Durée Déterminée atteint le plus haut niveau jamais connu en France (82,4% au premier trimestre 2013 dans les entreprises de 10 salariés ou plus, selon des données publiées par le ministère du Travail).

En 2013, le travail imposé du dimanche a marqué des points

Arrêtons-là cette liste qui pourrait prendre des pages et des pages.

Où passe l’argent ainsi pris dans les poches des gens honnêtes et travailleurs ? dans l’évasion fiscale, dans les paradis fiscaux, dans les yachts de luxe...

Jérôme Cahuzac restera le symbole de l’argent facilement gagné, facilement caché tout en alignant mensonges sur mensonges en tant que ministre chargé de la lutte contre l’évasion fiscale.

La précarisation de la société et la trahison de la gauche prétendue réformiste nourrit une exaspération sociale et politique qui fait les beaux jours de l’extrême droite dans presque tous les pays d’Europe. La réapparition de cette mouvance dans les élections et dans la rue conduit à des régressions sociales comme le recul considérable vécu en Espagne en matière de droits des femmes à maîtriser leur corps, à avoir un enfant "Si je veux, quand je veux".

E) Combativité sociale gâchée par la trahison politique du gouvernement Ayrault ?

Il est évident que l’ANI, l’accord sur la formation professionnelle (le patronat ne paiera plus que 1% de la masse salariale contre 1,6% auparavant), la contre-réforme des retraites constituent des défaites du mouvement ouvrier.

Les choix politiques du gouvernement et l’aide qu’il reçoit de certains syndicats expliquent ces reculs.

En effet, la combativité sociale reste forte. En 2013, elle a été symbolisée :

- par la lutte des Fralib qui atteint 1130 jours ce 31 décembre

- par la lutte des Continental (Xavier Mathieu) et l’invalidation des 680 licenciements par la justice prud’homale que le gouvernement refuse de faire appliquer

- par la résistance des cheminots et postiers face aux plans de rentabilisation et de concurrence promus par l’Union européenne...

F) Où va le monde ?

Sur ce site, nous avions caractérisé l’année 2011 comme une année révolutionnaire et la période comme marquée par une hausse de la combativité malgré une absence préjudiciable d’alternative politique crédible.

2011, année révolutionnaire

Deux ans plus tard, ce diagnostic n’est pas infirmé.

Il est vrai que le processus d’intégration des directions de la social-démocratie européenne et mondiale dans la sphère d’intérêts et d’influence des privilégiés capitalistes, affaiblit notre rapport de forces... Cependant :

* Lors des périodes de recul, même les grands mouvements sociaux se terminent par des échecs et reculs historiques. Tel a été le cas par exemple de 1979 à 1991 pour la révolution iranienne, pour les mineurs anglais, pour les aiguilleurs du ciel aux Etats Unis, pour les mobilisations en Europe de l’Est, pour l’Afghanistan...

Les révolutions arabes n’ont pas jusqu’à présent connu de défaite radicale. La combativité et la politisation se poursuivent même dans des pays aussi importants que la Turquie, l’Egypte et la Tunisie.

* Les régimes progressistes d’Amérique latine maintiennent, cahin caha, une orientation qui ne correspond pas aux intérêts du capitalisme mondial et particulièrement des USA.

* En Europe, la germination d’une gauche radicale significative se poursuit.

* En France, les élections municipales puis européennes donnent au Front de Gauche l’occasion de percer dans le champ politique pour mieux exprimer les aspirations de notre peuple, pour mieux présenter une alternative politique de gauche à la crise que vivent notre pays et toute l’Europe.

Je ne peux terminer ce petit récapitulatif de l’année 2013 sans saluer la mémoire :

- de Hugo Chavez. A une époque où tous les prétendus réformistes prétendent qu’une seule politique est possible, celle imposée par le capitalisme, il a impulsé, lui une politique qui a permis de réduire la pauvreté au Vénézuéla de 49,4% en 1999 à 27,8% en 2010.

- de Nelson Mandela que nous avions soutenu, dans la mesure de nos moyens, dans les années 1960 et 1970 à une époque où la droite et les médias le classaient parmi les terroristes, où le capitalisme français entretenait d’excellentes relations avec le capitalisme blanc d’apartheid, à une époque où les ouvrages racistes du Cap fleurissaient dans les établissements de l’Education nationale

Jacques Serieys


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