Des centaines de millions d’humains cherchent aujourd’hui les voies d’un avenir le plus possible émancipateur, démocratique, pacifique, écologique, contribuant aux potentialités de bonheur pour chacun et pour tous. Pour cela, il est nécessaire de sortir d’un capitalisme lamentablement jemenfoutiste sauf pour l’intérêt des hyper-riches, ignoblement injuste, terriblement pillard, horriblement guerrier, non respectueux des droits et menaçant la planète.
Le socialisme n’apporte pas toutes les réponses mais des pistes qui doivent être nécessairement connues et discutées. Lors de la sortie du Parti Socialiste et de la création du Parti de Gauche Jean-Luc Mélenchon prônait « le retour à un socialisme historique, basé sur le militantisme ». Je suis en accord avec cet adossement au socialisme historique qui présente aujourd’hui plusieurs intérêts :
A l’heure où la-plupart des grands élus et dirigeants du Parti Socialiste, en France comme ailleurs renient cet héritage et veulent qu’il se fasse "hara-kiri" (François Hollande), des millions d’humains continuent à porter cette petite flamme transmise par les générations passées : le socialisme. Que gagnerions-nous à jeter le bébé avec l’eau du bain, à répudier ce drapeau connu pour un autre bien plus flou ? De plus, n’importe qui comprend que "socialisme historique" renvoie à une réalité bien plus défendable (défense des ouvriers et milieux populaires, précurseur du féminisme comme du pacifisme, mise en place du droit du travail, de la retraite et de la sécurité sociale...) que le quinquennat de François Hollande.
Je crois nécessaire de ne pas se focaliser sur un identifiant politique seul mais intégrer les apports de plusieurs expériences et traditions historiques pour mieux affiner notre programme, notre stratégie, nos références. L’intérêt du socialisme historique, c’est justement de les englober toutes.
« Toute pensée qui s’élève et qui cherche vers l’avenir rencontre un des souffles, un des courants de la pensée socialiste. » (Jean Jaurès, 9 juillet 1905). Bien sûr.
A l’heure actuelle, les capacités politiques, oratoires et tactiques de Jean-Luc Mélenchon ont permis la progression de PRS, du PG puis aujourd’hui de LFI. Il ne sera remplacé par aucun autre individu solitaire car sa percée médiatique est également liée à un contexte qui ne reviendra pas. Nous devons donc préparer la suite tant qu’il peut y aider et engager une réflexion sérieuse sur nos références théoriques et historiques. Seules, celles du socialisme historique le permettent.
Actuellement encore, concomitamment à une importante poussée sociale, la gauche radicale a le vent en poupe en Europe (Syrisa, Podemos, Die Linke, PTB, Corbyn...) et dans d’autres régions du monde. Je sais par expérience que ce type de situation ne dure pas et qu’ensuite, il ne sert guère de tirer les bilans. C’est dans le feu de l’action qu’il faut agir sciemment. Je suis persuadé que les leçons du socialisme historique sont nécessaires pour cela.
Le texte ci-dessous n’est qu’une première ébauche très incomplète, parfois même seulement un plan détaillé.
A) NOTES INTRODUCTIVES ET METHODOLOGIQUES
Dans le résumé de leur ouvrage "Mélenchon, le plébéien", Lilian Allemagna et Stéphane Alliès le décrivent comme "un homme lancé dans une quête : la défense du " socialisme historique " contre la " social-démocratie " qu’incarnent François Hollande ou Martine Aubry." Je partage ce point de vue à condition de le tempérer par un éclairage. Notre but n’est pas de définir un dogme, fut-il le socialisme historique, mais d’oeuvrer à une amélioration du rapport de force face au capitalisme, face à l’extrême droite, en soutien des luttes et des partis politiques impliqués dans ce rapport de force. « On cherche à déclencher une dynamique en actant une rupture. » expliquait-il lors de la création du PG. Il prônait « le retour à un socialisme historique, basé sur le militantisme ».
Le texte du congrès de fondation du Parti de Gauche précise bien cette perspective stratégique « Nous avons l’ambition de contribuer à la réinvention de la gauche en élaborant un programme qui synthétise le meilleur des histoires des gauches et du mouvement ouvrier et qui sache aussi tirer les leçons de leurs échecs passés, en expérimentant des pratiques politiques et militantes nouvelles. Nous voulons être un creuset où se mêlent les cultures politiques issues du socialisme historique, de l’histoire de la lutte des classes et des révoltes populaires, de l’apport des combats féministes, antiracistes, écologistes, laïques et altermondialistes. Et nous voulons faire de cet alliage nouveau le cœur d’une majorité alternative et d’un projet de gouvernement, appuyé sur l’intervention et la mobilisation des citoyens, afin de changer radicalement de société et de changer la vie vraiment. »
Quelle autre référence permettrait comme le « socialisme historique » de se poser en héritiers de l’épopée extraordinaire du « meilleur des histoires des gauches et du mouvement ouvrier », des mouvements sociaux qui sont partis à la conquête du ciel, du combat quotidien des syndicalistes qui ont arraché des avancées sociales dans chaque entreprise, chaque branche et parfois une nation entière ?
Quelle autre référence permettrait aujourd’hui d’organiser, débattre et combattre politiquement ensemble des militants souvent chevronnés venus de courants aussi divers que la gauche de la social-démocratie, l’altermondialisme, le communisme du PCF, l’écologie, les communismes trotskistes, le socialisme républicain, l’anarchisme, le populisme de gauche et j’en passe ?
Quelle autre référence permettrait aujourd’hui d’offrir aux jeunes qui nous rejoignent un projet d’organisation « qui sache tirer les leçons des échecs passés, en expérimentant des pratiques politiques et militantes nouvelles » ?
Quelle autre référence permettrait tout simplement d’écrire dans son texte de fondation « Nous voulons être un creuset où se mêlent les cultures politiques issues du socialisme historique, de l’histoire de la lutte des classes et des révoltes populaires, de l’apport des combats féministes, antiracistes, écologistes, laïques et altermondialistes » ?
J’avais mis en ligne sur ce site un petit texte pour argumenter la nécessité de ne pas abandonner l’utilisation du concept "socialisme" aux vendus, traîtres et tartuffes.
Ne laissons pas le socialisme aux vendus, traîtres,ou tartuffes et insignifiants
Depuis, de jeunes adhérents du PG m’ont donné pour avis que le socialisme est à présent assimilé aux politiques de François Hollande et Manuel Valls, aux lois Macron et El Khomri, qu’il est donc préférable de se revendiquer d’un autre terme.
L’état des courants progressistes dans le monde ne me paraît pas pousser à cet abandon de la référence théorique au socialisme. Depuis 70 ans, j’ai vu sombrer tout essai de regroupement aux fondements politiques peu clairs si au moins un noyau n’apporte pas du recul sur la dimension politique tactique par exemple.
Le socialisme n’est pas la propriété des félons qui profitent de ce nom pour tromper les peuples : Strauss-Kahn, Hollande, Valls, Blair, Schröder, Lamy, Zapatero, Craxi, Papandréou et autres.
Je constate qu’aujourd’hui des forces nouvelles, malgré leurs faiblesses, se lèvent de par le monde utilisant ce drapeau du socialisme. C’est le cas par exemple de Camila Vallejo au Chili, de Morales en Bolivie et de Chavez au Venezuéla, de Bernie Sanders aux USA et de Jeremy Corbyn en Grande Bretagne.
Le rapport de force politique de la gauche et du mouvement ouvrier ne me paraît pas aujourd’hui suffisamment stabilisé pour que l’on puisse se passer de références claires comme la gauche et son union nécessaire sur un vrai programme de défense des milieux populaires, le rôle des syndicats et des partis, l’autonomie des associations et mouvements sociaux, services publics et initiatives privées, objectifs pour lesquels le socialisme historique apporte beaucoup d’expériences, y compris au travers de certaines erreurs.
De même, Paul Ariès (théoricien de la décroissance) emploie 32 fois le mot socialisme dans l’introduction de son ouvrage Le socialisme gourmand (2012) « Le socialisme (ou le communisme) reste un horizon possible pour notre temps. Ce livre est un appel à faire scission d’avec le capitalisme... afin de créer... ici et maintenant des "petits bouts" de socialisme, dans l’espoir de permettre un basculement vers un autre monde... Il ne peut y avoir de Bien-vivre, de société bonne qui ne soit socialiste ; il ne peut davantage exister de socialisme qui ne soit celui du Bien-vivre... »
Le mouvement socialiste, porté par les revendications, les aspirations et le haut idéal de centaines de millions d’humains, constitue, jusqu’à présent, la plus belle épopée du processus d’émancipation.
Divers courants s’en sont réclamés depuis deux siècles : le républicanisme révolutionnaire d’un Blanqui, la social-démocratie (Jaurès, Otto Bauer, Rosa Luxembourg, Olof Palme, Allende...), le communisme (Marx, Lénine, Trotsky...), le socialisme libertaire (Bakounine, Durruti...), le conseillisme (Internationale Communiste Ouvrière, d’Anton Pannekoek), l’anarcho-syndicalisme (syndicalisme révolutionnaire), le bordiguisme, Mao Tsé Toung, Che Guevara, Sankara et Mandela ("Ne m’attachant à aucun système social autre que le socialisme"), la théologie de la libération, le populisme de gauche...
Dans le texte ci-dessous, socialisme est employé comme concept générique comprenant tous ces courants nés en opposition au capitalisme pour soutenir les luttes ouvrières, affermir les droits démocratiques et porter un projet d’émancipation humaine.
De la prochaine grande montée de luttes populaires et de victoires progressistes naîtra probablement un nouveau mot pour s’identifier mais nous n’en sommes pas là.
Quiconque veut aujourd’hui lutter contre les oppressions, les exploitations, les dangers environnementaux du capitalisme, quiconque veut participer à construire un autre monde, quiconque veut critiquer les expériences progressistes passées doit nécessairement connaître et se référer au socialisme : à ses expériences, à ses orientations, à ses courants, à ses principaux théoriciens...
Nous devons bien sûr prendre également en compte tout ce que des mouvements ont apporté plus récemment, en matière de féminisme, d’écologie, d’émancipation sexuelle et culturelle, d’autogestion, de services publics...
Là où il y a une volonté, il y a des chemins pour arriver. Nous avancerons, fut-ce par des sentiers improbables. Avec beaucoup d’autres, nous franchirons la montagne des doutes. Oui, un autre monde est possible.
"En même temps qu’il organise la lutte révolutionnaire de la classe exploitée par le vieux monde, le socialisme prépare par cela même, une révolution d’idéal." (Jean Jaurès)
premier collectif humain s’affirmant défenseur de la classe et groupes sociaux opprimés
premier collectif humain à avoir nommé et essayé d’analyser le mode de production en place : le capitalisme. Antiquité comme féodalité n’avaient abrité un seul penseur à la hauteur d’un tel objectif.
premier collectif humain à se donner pour objectif : une société meilleure sur terre
premier collectif humain à essayer de construire une théorie critique générale de l’économie, de l’histoire, de la philosophie, de la sociologie, de la politique comme outil pour avancer vers une société meilleure sur terre
premier collectif humain à essayer de s’organiser en parti dont la fonction consiste en particulier à penser et agir comme porteur des intérêts historiques de l’humanité (liberté, égalité, écologie, fraternité, citoyenneté...)
premier collectif humain à poser pour perspective complémentaire émancipation humaine en général, émancipation de groupes sociaux, nationaux ou de genre et émancipation individuelle
premier collectif humain à tenter d’allier combat politique immédiat, théorie et perspective historique
premier collectif humain vraiment universaliste
Aucun progressiste, aucun militant, aucun politique se disant socialiste, ne peut passer à côté de sa responsabilité individuelle : ai-je contribué réellement à faire avancer ce projet collectif du socialisme ? A plus forte raison, aucun mouvement, aucun parti, aucune génération ne peut s’abstenir du même bilan exigeant. Comment jauger si l’on a été utile en fonction des fondements du socialisme.
Depuis le début de cet article j’emploie "le socialisme" au singulier. Pourquoi pas "les socialismes" vu leur diversité historique et actuelle ? parce que ce texte se veut politique plus qu’historique, insistant justement sur les fondements du socialisme qui ne se réinventent pas au gré des échéances électorales.
Généralement, un plan doit suivre un ordre logique dans lequel chaque partie apporte des éléments pour introduire la suivante.
Le socialisme, comme toute réalité historique, est bien plus complexe. Il est autant un héritage qu’une promesse, une démarche rationnelle qu’une réaction morale, une philosophie que le camp social des salariés conscients. Les luttes, son idéal, son histoire, son anticapitalisme... constituent des points de départ comme d’arrivée. Les opposants au socialisme choisissent toujours un à deux mots qu’ils déconstruisent, jamais la cohérence d’ensemble ; ainsi, François Furet définit le socialisme par un concept ( l’égalité) et une méthode (la rupture) afin d’argumenter sa mort.
Lecteur, ne me reproche pas le plan ci-dessous ; sinon, tu peux aussi commencer au milieu (anticapitalisme) ou par la fin (matérialisme historique, écosocialisme).
B) La naissance du socialisme
B1) Les résistances face à la misère (famine, froid, maladies...) comme terreau du socialisme
Longtemps, l’espérance religieuse en la venue prochaine d’un Messie salvateur a apporté une croyance sécurisante aux pauvres ; les deux exemples les plus intéressants sont ceux des taborites tchèques et de la guerre des paysans en Allemagne.
Hussites et taborites tchèques : révolution médiévale flamboyante
Cette espérance motivait encore les prêtres des guérillas latino-américaines comme Camilo Torres.
15 février 1966 Mort de Camilo Torres, prêtre guerrillero colombien
Dès ses premiers pas au 16ème siècle, l’économie de type capitaliste se développe de façon totalement contradictoire à l’intérêt général. Ainsi, au début du 16ème siècle, les nobles anglais chassent les paysans des communaux (terres collectives) et les enclosent pour faire paître des moutons dont la laine est vendue à l’industrie textile. Des centaines de milliers de paysans sont réduits à la mendicité et au vagabondage ; l’Etat national se construit pour tenir en laisse ces miséreux : de 1544 à 1547, l’Angleterre pratique environ 70000 exécutions de nécessiteux .
En France, le premier grand édit de libéralisation économique est pris par Turgot en 1774. Il s’agit de la liberté du commerce des grains. Des spéculateurs en profitent pour stocker afin de faire monter les prix des farines et du pain ; les prix ne cessent dès lors de monter. Un immense mouvement social secoue tout le pays au printemps 1775, obtenant le retour à un rôle de l’Etat. Durant la Révolution française, robespierristes et babouvistes puisent des exemples et arguments dans cet évènement.
Peu à peu, un projet politique naît des résistances populaires, des chartistes anglais aux canuts français, des tailleurs allemands aux ouvriers agricoles italiens, celui de la république sociale, du socialisme.
Etudions à présent une grève décisive dans la naissance d’un socialisme de masse en France : celle de Decazeville en 1886. Il s’agit effectivement d’une lutte due à la faim, au froid, au désespoir. En 1878, les salaires courent de 150 à 200 francs par mois. De 1878 à 1886, la Compagnie des houillères et fonderies de l’Aveyron pousse à des réductions pour préserver les profits des actionnaires. Le patron, nommé Watrin, touche 10% sur toute réduction de la masse salariale ; de 180 francs en moyenne, le salaire tombe à 33 francs. Le 26 janvier 1886, les salariés reçoivent des bulletins de paie sur lesquels la Compagnie a encore pratiqué une nouvelle baisse de 34%. La grève explose aussitôt. Un cortège de femmes marche sur la mairie où s’est réfugie le patron et le tue. L’armée occupe massivement le Bassin houiller. La répression est extrêmement dure. Cependant, le 12 juin la grève tient toujours et le patronat cède sur quelques revendications salariales. C’est au travers de ce type de grève que naît le socialisme comme courant politique soutenant les travailleurs face à la bourgeoisie et au républicanisme lié à elle.
B2) L’opposition morale au capitalisme comme point de départ du socialisme
Le socialisme commence au moment où un individu, un groupe dit NON à une injustice.
C’est le point de vue que défendait par exemple Léon Blum « De quoi est né le socialisme ? De la révolte de tous les sentiments blessés par la vie, méconnus par la société. Le socialisme est né de la conscience de l’égalité humaine alors que la société où nous vivons est tout entière fondée sur le privilège. Il est né de la compassion, de la colère que suscite en tout coeur honnête ce spectacle intolérable : la misère, le chômage, le froid, la faim. » (Pour être socialiste, 1919)
Le Manifeste électoral du peuple (8 novembre 1848) en soutien à la candidature de Raspail pour les élections présidentielles argumentait le socialisme à partir du même point de départ « Le socialisme n’est point pour nous un système ; c’est tout simplement une protestation. »
Le socialisme est né dans la lutte contre l’exploitation souvent terrible des ouvriers de par le monde. Il est né d’un refus de voir des enfants mourir d’épuisement au fond des mines, mourir de faim, de froid et de maladie dans des caves ignobles. Il est né du refus de l’oppression et de l’exploitation des femmes. Il est né du refus de la guerre et des générations de jeunes gens fauchés à la fleur de l’âge. Il est né du refus de la colonisation qui se poursuit aujourd’hui par la main mise des multinationales sur les richesses naturelles de nombreux pays. Sur tous ces sujets, malgré faiblesses et trahisons, les seuls courants politiques conséquents depuis deux siècles se sont réclamé du socialisme.
B3) Le socialisme naît dans le sillage de la révolution industrielle générée par le capitalisme
Les premières occurrences du mot socialisme datent de 1922 à 1935 (Robert Owen, Pierre Leroux, Charles Fourier, Étienne Cabet, Blanqui...).
Voici par exemple ce qu’écrivait Victor Considérant, un socialiste fouriériste ( premier député à avoir défendu le droit de vote des femmes), à cette époque. "Où sont les hommes libres ? Vous faites semblant de regarder comme libres ces masses innombrables de prolétaires sans capitaux, sans instruments de travail et qui sont contraints de par la mort qui plane incessamment sur eux et leur famille, de trouver chaque jour un maître... La guerre industrielle, succédant à la guerre militaire, a constitué un servage, non plus personnel et direct, mais indirect et collectif, la domination de la classe des possesseurs de capitaux, de machines et d’instruments de travail sur les classes déshéritées."
Les conditions de vie des ouvriers en France (par Ange Guérin, 1835)
B4) L’héritage culturel : Racines, précurseurs et références antérieures du socialisme
Nous venons de voir comment la classe ouvrière, le mouvement ouvrier ont constitué le terreau sur lequel le socialisme a pu se développer. Il serait cependant erroné de ne voir que cet aspect.
Le socialisme représente aussi une étape de la pensée :
héritière des avancées intellectuelles de l’Antiquité et du Moyen Age (« la "gauche avicénnienne", d’origine islamique, par exemple, s’approcha du matérialisme » précise Ernest Mandel).
Aristote, penseur politique de la polis comme société démocratique
Averroès, philosophe musulman, géant de la pensée
héritière de l’humanisme de la Renaissance, de ses philosophies rationalistes-naturalistes (Galilée, Descartes, Spinoza).
héritière de l’imaginaire utopique qui fleurit depuis l’Antiquité et a connu un moment d’épanouissement en France entre 1700 et 1789 (150 ouvrages)
Thomas More, auteur de L’Utopie (un texte magnifique et précurseur au début du 16ème siècle)
héritière de l’espérance en un monde meilleur sur terre longtemps portée par toutes sortes de millénarismes religieux
Les évangiles : un religiosité humaniste, morale, égalitaire, révolutionnaire
Moyen Age : Société, Communes, soulèvements populaires et millénarisme
héritière des opposants à l’absolutisme et au carcan idéologique clérical,
héritière de l’économie politique des 17è et 18è siècles
héritière enfin et surtout des Lumières (Rousseau, Kant, Hegel...) et de la Révolution française.
Il est également redevable aux sciences des découvertes qui ont permis une compréhension plus rationnelle du monde (astronomie, géographie de la terre, biologie, structure de la matière, techniques...). Enfin, le développement du capitalisme a joué un rôle majeur dans l’explosion de la rigidité totalitaire des idéologies religieuses du Moyen Age, dans le développement d’une économie génératrice d’une certaine rationalité quotidienne et d’une monnaie commune apportant une forme d’égalité dans les rapports humains par rapport aux castes et ordres étanches précédents.
Dès sa naissance en Europe, le socialisme bénéficie de trois sources principales (Révolution française, mouvement ouvrier britannique, philosophie allemande) qui puisent elles-mêmes fort loin dans la chaîne du progrès humain à l’échelle planétaire.
Aux 19ème puis 20ème siècles, le socialisme a continué son oeuvre (souveraineté populaire, droits politiques juridiques et sociaux, refus de la guerre et des colonies...) comme avant-garde du mouvement démocratique et social.
Racines profondes et diverses du socialisme dans les sociétés anciennes
Homme, humanité et humanisme de l’Antiquité au socialisme, la recherche d’un idéal pour l’humanité
Insistons ici sur l’apport des philosophes des Lumières et de la Révolution française
Robespierre
Babeuf
B5) Révolution française, république sociale et socialisme
L’historien Michel Winock considère qu’à partir de la Révolution française « Le socialisme d’imagination devient un socialisme d’action. La Révolution occupe le centre de l’histoire européenne de 1789 à 1799, voire 1815, provoque une réflexion, offre une réserve de références, une tradition. Trois apports :
une technique du pouvoir (le gouvernement révolutionnaire, le salut public, plus tard la dictature du prolétariat)
une technique du contre-pouvoir : un pouvoir populaire, des assemblées siégeant en permanence, la minorité la plus politisée du peuple de Paris, artisans, compagnons, boutiquiers .. (les sans culottes). Démocratie directe, mandat impératif, révocabilité des élus, manifestation de masse, voire insurrection armée.
une technique de prise du pouvoir : Babeuf et la Conspiration des Egaux. Une organisation clandestine dirige une insurrection au moment choisi et prend le pouvoir au nom du peuple...
Pour les socialistes français de la Troisième République le socialisme est le parachèvement de la Révolution. »
Révolution française, république et socialisme
Jean Jaurès défend l’héritage des révolutionnaires de 1789 1794 avec plus d’enthousiasme « Ils ont donné à la France et au monde un si prodigieux élan vers la liberté que, malgré la réaction et les éclipses, le droit nouveau a pris définitivement possession de l’histoire. Ce droit nouveau, le socialisme le revendique et s’y appuie. Il est au plus haut degré un parti de démocratie, puisqu’il veut organiser la souveraineté de tous dans l’ordre économique comme dans l’ordre politique. Et c’est sur le droit de la personne humaine qu’il fonde la société nouvelle, puisqu’il veut donner à toute personne les moyens concrets de développement qui seuls lui permettront de se réaliser toute entière... Ainsi le socialisme se rattache à la Révolution sans s’y enchaîner. Et c’est pourquoi nous avons suivi d’un esprit libre et d’un cœur fervent les héroïques efforts de la démocratie révolutionnaire. »
C1) De la République politique à la République démocratique, laïque et sociale
Le premier courant socialiste organisé naît de la révolution montagnarde de 1793. Il s’agit de la Conjuration des Egaux. Après que les membres de cette avant-garde aient été guillotinés ou marginalisés, des personnalités comme Buonarotti, Blanqui, Raspail... poursuivent le combat.
La Commune de Paris de 1871 illustre parfaitement la nature socialiste de la République démocratique, laïque et sociale à laquelle aspirent les républicains avancés comme les militants du mouvement ouvrier.
Dans la seconde internationale, les partis mettent également en avant la perspective d’une République sociale, en particulier en France, en Allemagne, en Autriche, en Italie, en Espagne...
C2) L’émancipation des travailleurs sera l’oeuvre des travailleurs eux-mêmes
Plutôt que de longs développement, voici un extrait des statuts de la Première Internationale (AIT) rédigés par Karl Marx :
Considérant :
Que l’émancipation de la classe ouvrière doit être l’oeuvre des travailleurs eux-mêmes ; que la lutte pour l’émancipation de la classe ouvrière n’est pas une lutte pour des privilèges et des monopoles de classe, mais pour l’établissement de droits et de devoirs égaux, et pour l’abolition de toute domination de classe ;
Que l’assujettissement économique du travailleur au détenteur des moyens du travail, c’est-à-dire des sources de la vie, est la cause première de la servitude dans toutes ses formes, de la misère sociale, de l’avilissement intellectuel et de la dépendance politique ;
Que, par conséquent, l’émancipation économique de la classe ouvrière est le grand but auquel tout mouvement politique doit être subordonné comme moyen ;
Que tous les efforts tendant à ce but ont jusqu’ici échoué, faute de solidarité entre les travailleurs des différentes professions dans le même pays et d’une union fraternelle entre les classes ouvrières des divers pays ;
Que l’émancipation du travail, n’étant un problème ni local ni national, mais social, embrasse tous les pays dans lesquels existe la société moderne et nécessite, pour sa solution, le concours théorique et pratique des pays les plus avancés ;
Que le mouvement qui vient de renaître parmi les ouvriers des pays industriels avancés de l’Europe, tout en réveillant de nouvelles espérances, donne un solennel avertissement de ne pas retomber dans les vieilles erreurs et de combiner le plus tôt possible les efforts encore isolés ;
Pour ces raisons, l’Association Internationale des Travailleurs a été fondée...
L’émancipation sociale des travailleurs (Jean Jaurès)
C3) L’association contre l’individualisme capitaliste
Le mot socialisme lui-même éclaire ses fondements. Il vient du latin socius ; employé comme adjectif, il signifiait uni, associé, partagé, mis en commun ; employé comme nom commun, il désignait l’élément social constitutif de l’humain. Dans la même famille latine, nous pouvons noter sociābĭlis (sociable), socĭālĭtās (sociabilité), socĭālĭtĕr (amicalement), socĭātĭo (association), socĭennus (camarade), socĭĕtās (mise en commun, communauté, société), les verbes socĭo, assocĭo, consocĭo (joindre, unir, associer).
Face au capitalisme, le socialisme affirme l’objectif de socialiser les grands moyens de production, de transport et d’échange selon le principe de l’association. « C’est cet idéal de paix, de justice, d’humanité et de travail associé que le socialisme propose à l’âme des foules. » (Jean Jaurès, Conférence de Buenos Aires, 5 octobre 1911) « Le socialisme, dans son principe le plus général, c’est l’intervention de la société dans les rapports économiques que crée, entre les hommes, l’existence de la propriété. » (Jean Jaurès, 1895)
Ce projet socialiste repose nécessairement sur une conception de l’humanité pour laquelle "l’homme n’est pas seulement un loup pour l’homme", une compréhension du monde qui valorise les expériences historiques de solidarité, de partage, de communauté politique.
C4) La démocratie jusqu’au bout
Au 19ème siècle, la classe dominante capitaliste cherche surtout à maintenir sa domination et ses profits. Aussi, elle s’allie généralement avec les conservateurs pour massacrer les mouvements sociaux et rester maîtresse des institutions politiques. Face à cette privatisation du pouvoir, le socialisme porte l’objectif clair d’une véritable république, d’une démocratie jusqu’au bout, comprenant le suffrage universel et l’investissement politique des citoyens.
Telle est l’orientation de Marx dans la première revue dont il est le rédacteur en chef (la Rheinische Zeitung, « Gazette rhénane »). Plusieurs de ses formules sont connues dont La démocratie est l’énigme résolue de toutes les Constitutions. Ici, la Constitution est incessamment ramenée à son fondement réel, à l’homme réel, au peuple réel ; elle est posée non seulement en soi, d’après son essence, mais d’après son existence, d’après la réalité, comme l’œuvre propre du peuple. La Constitution apparaît telle qu’elle est, un libre produit de l’homme. Pour lui donc, la démocratie doit être réalisée comme "l’oeuvre propre du peuple" ; il introduit ici un changement d’approche colossal par rapport à Aristote, Cicéron, Bodin et autres philosophes politiques classiques porteurs d’un éloignement entre le peuple réel et la maîtrise des institutions. De plus, ce peuple auteur de sa constitution démocratique doit être le peuple réel dont celui des hommes réels, salariés d’entreprise qui doivent pouvoir être citoyens dans la cité et dans le travail. La démocratie ne peut trouver donc son achèvement que dans une société où les hommes, librement associés, s’émancipent de l’exploitation économique capitaliste, s’émancipent eux mêmes des carcans, répressions et aliénations imposés par ce système.
> Cette démarche de la démocratie jusqu’au bout est également celle de Jean Jaurès pour qui « République et socialisme sont indivisibles et, à la limité, se confondent. » (Jean Jaurès, discours de Limoges, 8 octobre 1905) Ses discours et textes puisent sans cesse dans le substrat de la démocratie antique et de la révolution française.
C5) Le socialisme, UN IDEAL (de justice, de citoyenneté, d’émancipation, d’universalisme)
* un idéal universaliste. Dans les statuts de la Première Internationale signalés plus haut, Marx écrit : « Toutes les sociétés et individus y adhérant reconnaîtront comme base de leur comportement les uns envers les autres et envers tous les hommes, sans distinction de couleur, de croyance et de nationalité, la Vérité, la Justice et la Morale. »
* un idéal de justice « Qu’est ce que la Justice ? L’essence de l’humanité. Qu’a-t-elle été depuis le commencement du monde ? Presque rien. Que doit-elle être ? Tout. » (Proudhon) "Tant qu’il me restera un souffle, je l’emploierai à combattre pour les faibles contre les puissants, pour le peuple contre ceux qui l’oppriment, pour la justice sociale, contre l’iniquité et contre l’injustice" (Jaurès) "L’objet du socialisme est l’établissement d’une société universelle fondée sur la justice" (Blum)
* un idéal de citoyenneté "Que le suffrage universel s’affirme et s’éclaire, qu’une vigoureuse éducation laïque ouvre les esprits aux idées nouvelles, et développe l’habitude de la réflexion ; que le prolétariat s’organise et se groupe... et la grande transformation sociale qui doit libérer les hommes de la propriété oligarchique, s’accomplira..." (Jaurès) Le socialisme est une "conception radicalement démocratique de la citoyenneté" (Balibar)
* un idéal d’émancipation (sociale, féminine, culturelle, éthique, juridique, politique, sexuelle, individuelle et universelle...)
Toute personne qui participe, même momentanément, à la lutte socialiste, rejoint l’épopée collective pour l’émancipation humaine commencée aux temps préhistoriques et dont le socialisme constitue le dernier maillon depuis deux siècles. Plusieurs types de société se sont succédé dans l’histoire humaine, mais ce sont toujours les nouveaux riches qui ont remplacé les anciens. Le socialisme se fixe pour but de construire une société la plus juste possible, sans exploitation et oppression d’une classe sociale sur les autres. Victor Hugo voit dans l’utopie socialiste "la vérité de demain".
Pour bien comprendre le capitalisme comme pour proposer un autre projet de société, le socialisme a essayé dès sa naissance de forger des analyses, de les confronter à la réalité et à la critique, de les mettre en cohérence.
Il a construit une compréhension du monde intégrant le passé (ses racines culturelles) et l’avenir à long terme (une utopie)
C6) Le socialisme, une utopie
Le socialisme est un mouvement réel contre l’ordre existant des choses, c’est à dire l’action concrète de millions, millions et millions d’hommes contre leurs revenus trop faibles pour vivre dignement, contre leurs conditions de travail et de vie, contre les dictatures, contre le système politique prétendu démocratique dans lequel chaque milliardaire pèse bien plus que des milliers de citoyens, contre les oppressions et discriminations...
D1) De 1789 à 1848
Révolution française et socialisme
Manifeste des Enragés présenté devant la Convention le 25 iuin 1793 (Jacques Roux)
Manifeste des Egaux (Sylvain Maréchal, 1796)
D2) Le mouvement ouvrier naissant
Angleterre : le premier mouvement ouvrier et socialiste de masse
Les canuts de Lyon, première grande insurrection ouvrière du 21 novembre au 3 décembre 1831
D3) Du républicanisme au socialisme
5 juin 1832 : Les funérailles du général Lamarque. Une insurrection républicaine et révolutionnaire
D4) Révolutions du 19ème siècle
27, 28 et 29 juillet 1830 : les "3 glorieuses" d’une révolution réussie puis confisquée
Révolution française de 1848 "C’était beau" (22, 23, 24 février)
La Commune http://www.gauchemip.org/spip.php?r...
D5) Marx, marxisme et Première Internationale
L’actualité des idées de Marx ( par Alain Bihr)
28 septembre 1864 Fondation de la Première internationale ouvrière ( Karl Kautsky)
D6) La 2ème internationale
2ème Internationale http://www.gauchemip.org/spip.php?r...
D7) Révolution russe et Komintern
http://www.gauchemip.org/spip.php?r...
E) SOCIALISME : UN MOUVEMENT POLITIQUE, CONSCIENCE DES ASPIRATIONS HUMAINES ET DES LUTTES
Dans sa définition du communisme comme " le mouvement réel qui abat l’ordre existant des choses", Marx ajoute "et sa conscience". En effet, d’elle-même une lutte locale n’atteint pas naturellement une dimension consciemment anticapitaliste, rationaliste critique, internationaliste et socialiste. D’elle-même une lutte locale ne crée pas naturellement un bilan du passé pour mieux agir au présent dans la perspective à venir du genre humain. D’elle-même une lutte locale ne génère évidemment pas une théorie critique générale de l’économie, de l’histoire, de la philosophie, de la sociologie, de la politique comme outil pour avancer vers une société meilleure sur terre. De plus, le champ politique de la société a évidemment une spécificité que ne remplacent pas les seules luttes ouvrières.
Le syndicalisme a pour fonction de défendre l’ensemble des salariés ; pour cela il porte des revendications communes en évitant de créer des divisions inutiles sur les références idéologiques. Il peut évidemment intervenir sur le champ politique mais doit sans cesse tenir compte du niveau de combativité et de conscience des salariés pour ne pas s’isoler face au patronat.
Le socialisme doit lui aussi éviter de se marginaliser sur le champ politique mais son rôle de porteur de l’intérêt général de l’humanité peut entrer en contradiction avec par exemple son intérêt électoral à court terme. Cette fonction lui crée d’autres obligations qu’au syndicat.
Le socialisme essaie d’apporter une conscience articulant passé, présent et avenir, une conscience ouverte, critique, sans cesse à enrichir et même reformuler.
Parmi les questions essentielles sur lesquelles le socialisme essaie d’apporter des éléments utiles de réponse, nous pouvons pointer :
les leçons à tirer des luttes et révolutions passées
l’analyse des cycles politiques et de leurs conséquences
l’analyse des processus de radicalisation et de conscientisation...
Qu’est ce que le socialisme ? Quelques définitions héritées de l’histoire du socialisme
Les premiers socialistes
L’anarchisme
Le syndicalisme révolutionnaire
La social-démocratie
Social-démocratie, socialisme républicain et socialisme révolutionnaire en France
Le stalinisme
Le trotskisme
Le maoïsme
F) UN CAMP SOCIAL
Qui engage et perpétue à un niveau de masse la lutte contre l’ordre existant des choses ? Essentiellement des personnes en situation d’exploitation et d’oppression. Ainsi, le mouvement socialiste naît de la fusion entre pensée socialiste et mouvement ouvrier. Le socialisme aurait périclité depuis bien longtemps sans ce lien originel avec son camp social : la classe ouvrière, le salariat, les milieux populaires.
Dans le mode de production tributaire, le rapport d’exploitation au profit de la classe possédante passait par un tribut payé par chaque village de paysans, paysans généralement soumis à une domination personnelle.
Dans le mode de production esclavagiste, le rapport d’exploitation passait par l’accaparement total de l’esclave et de son travail par le propriétaire.
Dans le mode de production féodal, le rapport d’exploitation passait à la fois par des corvées sur le domaine seigneurial et par des prélèvements sur les récoltes des serfs qui restaient dans un statut de domination personnelle.
Dans le mode de production capitaliste, le rapport d’exploitation s’articule autour du procès de valorisation du capital avec :
un nouveau type de classe dominante qui accapare les moyens de production, qui accapare le procès technique de production et impose une domination sur le lieu de travail : le despotisme d’usine plus ou moins agrémenté de paternalisme et de gestion intelligente du personnel.
un nouveau type de classe exploitée, le prolétariat (salariat), qui doit nécessairement être juridiquement "libre" pour vendre sa force de travail sur le marché de l’emploi. Cette force de travail est une marchandise particulière puisque le niveau du salaire est dépendant du rapport de forces social entre patronat et salariat.
La théorie socialiste ne différencie pas les classes sociales de façon sociologique mais essentiellement en fonction de ce rapport d’exploitation capital / travail.
Je continue à penser que les ouvriers d’usine constituent le coeur du salariat. Ceci dit, le salaire et le statut dépendant du rapport de force social, les cheminots par exemple ont réussi à maintenir un rapport de force social qui les place dans l’avant-garde du prolétariat.
Les employés de banque, du commerce ou de l’informatique par exemple, placés par certains parmi les "nouvelles classes moyennes" relèvent du salariat car ils participent autant que des ouvriers d’usine à la valorisation du capital.
Par contre, il est certain que de grands chefs d’entreprise, salariés de multinationales font partie du patronat par leur fonction et leurs revenus.
Le rôle des socialistes est de contribuer à l’unité :
d’une part entre les salariés de divers statuts, de diverses branches, de diverses villes, de divers niveaux de combativité et de conscience
d’autre part entre les salariés et les couches sociales ayant intérêt à un front commun face à la domination du capital, couches sociales que l’on peut englober dans le concept de peuple. Léon Trotsky englobait ces couches sociales dans le Front unique social à construire pour gagner une hégémonie sociale et politique.
F4) Le 20ème, siècle du mouvement ouvrier puis du capitalisme transnational
Au début du 20ème siècle, les syndicats et partis du mouvement ouvrier progressaient si rapidement que l’horizon du socialisme paraissait se rapprocher chaque matin. Qu’est-il advenu pour que les récoltes d’automne soient aussi piètres eu égard aux promesses du printemps ? Le capitalisme a su jouer :
sur les guerres qui permettent de privilégier l’unité militaire de la nation contre les espérances progressistes
Causes de la Première Guerre Mondiale : capitalisme, nationalisme et responsabilité des Etats
surtout sur le fascisme dont l’objectif majeur était la destruction du mouvement ouvrier organisé, étant entendu que libéralisme et fascisme ne sont que deux faces d’un même objet, le capitalisme.
Fascismes de 1918 à 1945 : naissance, caractéristiques, causes, composantes, réalité par pays
Dans les années 1968, la roue de l’histoire mettait à nouveau les perspectives émancipatrices à l’ordre du jour. Quels moyens de résistance le capitalisme a-t-il utilisé pour sortir renforcé de ce moment difficile à partir des années 1980 :
à nouveau les guerres pour remplacer les luttes de classes par des luttes de races
à nouveau le fascisme et régimes dictatoriaux pour casser le mouvement ouvrier par des coups d’état militaires (en Indonésie, en Bolivie, au Chili, en Argentine...)
Parmi les pratiques plus sophistiquées, notons :
une stratégie d’endormissement, d’éclatement puis de privatisation des économies d’URSS et d’Europe de l’Est
l’intégration de couches politiciennes et bureaucratiques de partis et syndicats ouvriers pour remplacer les luttes de classes par des luttes de places.
l’éclatement et la précarisation du salariat par la sous-traitance, un chômage de masse, l’intérim et contrats précaires
le dépassement du cadre national par une mondialisation dépassant l’horizon des sociaux-démocrates et républicains aux cuisines politiciennes trop exigües.
la maîtrise des outils monétaire et médiatique...
F5) Syndicalisme, luttes ouvrières et mouvement ouvrier
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Syndicalisme
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G) SOCIALISME = ANTICAPITALISME
G1) Le capitalisme porte la misère comme la nuée porte l’orage (exemple de la Grande-Bretagne du 19ème)
Les conditions de vie des milieux populaires du 19ème siècle présentent un aspect effroyable. Ainsi en Angleterre :
A Liverpool, la durée moyenne de la vie était en 1840 pour les classes supérieures de 35 ans, celle des gens d’affaires et des artisans aisés, 22 ans, celles des ouvriers, des journaliers et domestiques en général de 15 ans seulement.
A Manchester par exemple, plus de 57 % des enfants d’ouvriers meurent avant d’avoir atteint l’âge de 5 ans
Logement : « Leurs demeures sont entassées et chaque recoin littéralement bondé de monde, malades et bien portants dorment dans une seule et même pièce, sur une seule et même couche... (aussi) chaque apparition de l’épidémie de typhus, en Écosse comme en Irlande, a pour cause une période de privations - crise économique ou mauvaise récolte - et que c’est presque exclusivement la classe laborieuse qui supporte la violence du fléau. »
Donnant un débouché politique à ces constats d’Engels (La situation de la classe laborieuse en Angleterre), Karl Marx affirme « Les conceptions théoriques des communistes ne reposent nullement sur des idées, des principes inventés ou découverts par tel ou tel réformateur du monde. Elles ne sont que l’expression générale des conditions réelles d’une lutte de classes existante, d’un mouvement historique qui s’opère sous nos yeux. »
H) UN SOCIALISME RATIONALISTE CRITIQUE
Ce concept de socialisme rationaliste critique a été créé par Marx.
Il présente l’avantage de situer le socialisme dans la trajectoire complexe du progrès de la connaissance rationnelle.
héritier critique des progrès techniques et scientifiques de la Chine classique, de l’Antiquité méditerranéenne comme des civilisations arabes et pré-colombiennes
héritier critique de la philosophie dont évidemment Aristote (observation de la nature, logique...), Spinoza, Rousseau, Kant, Hegel
Ce concept de SOCIALISME RATIONALISTE CRITIQUE présente également l’avantage d’induire que le socialisme est nécessairement non révélé, non dogmatique, non achevé, toujours à vivifier par l’apport des nouvelles expériences historiques, des différentes sciences, des nouvelles découvertes et analyses.
Par rapport au concept de socialisme scientifique formulé par Engels, celui de SOCIALISME RATIONALISTE CRITIQUE ne donne pas un label "scientifique" à l’ensemble des écrits et pratiques du mouvement politique communiste et socialisme. Moins ambitieux mais plus précis, il permet d’analyser les dérapages scientistes qui ont affaibli le communisme réellement existant, de même que certains courants socialistes.
Préférer le concept de SOCIALISME RATIONALISTE CRITIQUE ne signifie cependant pas abandonner les objectifs du socialisme énumérés en introduction...
L’apport de Marx
Formation Réflexion Théorie
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Formation politique : quel objectif ? quel contenu ? quelle démarche ? quel plan ?
Face à la classe capitaliste qui dispose des moyens de production, de communication et de répression, aucune efficacité n’est envisageable sans organisation, sans parti. De Babeuf à aujourd’hui, cette constante a caractérisé le socialisme. Si le socialisme était un corps humain, la théorie représenterait son cerveau et le parti sa colonne vertébrale. Sans colonne vertébrale, notre corps ne serait qu’un légume ; sans organisation, le socialisme ne vaut guère plus que la danse d’un chamane.
Il est vrai que l’organisation a généré ses propres travers en particulier le stalinisme, mais cela ne peut remettre en cause la nécessité d’un parti et d’une internationale, sinon, c’est choisir de laisser en place le capitalisme.
Par rapport à tous les philosophes et politiques précédents, Marx et les théoriciens poursuivent son combat, se distinguent par leur volonté d’analyser le présent et d’influer sur lui dans la perspective de l’émancipation des travailleurs par eux-mêmes, de l’émancipation humaine par les humains eux-mêmes.
21ème siècle Le socialisme reste d’actualité ! Plus que jamais ! (texte du 19 mai 2005)
Le socialisme, un courant politique au coeur de l’actualité
L’analyse politique du présent a représenté une part essentielle de la réflexion chez les babouvistes, les blanquistes puis chez Karl Marx.
Le socialisme n’a rien d’un dogme. Ses militants doivent en permanence analyser le cycle politique dans lequel ils agissent, à l’intérieur de ce cycle la période politique du pays concerné et plus précisément la conjoncture sociale et politique (évolutions économiques et idéologiques, patronat et syndicats, luttes ouvrières, forces politiques...). Un tel travail permet de clarifier une stratégie, un programme et des tactiques pour le présent, moment essentiel du combat socialiste. Cette action part des besoins des populations, d’une analyse des contradictions du capitalisme et de ses évolutions pour élaborer les objectifs essentiels de la transition vers le socialisme.
Si le socialisme était un corps humain, l’analyse de la période représenterait les yeux alors que l’action politique, la stratégie, la tactique, le programme représenteraient les membres, les mains.
En se développant, le capitalisme exacerbe ses propres contradictions : entre la socialisation des forces productives et la propriété privée des grands moyens de production, entre intérêts du capital et intérêts du travail, entre élévation du niveau de formation et maintien des anciens rapports de production, entre progrès technique et appropriation de ses potentialités, entre participation des femmes au procès de production et maintien de l’oppression féminine...
Par quoi remplacer ce capitalisme ? par le mode de production socialiste dont les principales caractéristiques sont la propriété sociale des grands moyens de production, la refondation égalitaire des rapports sociaux, la démocratie "jusqu’au bout".
K1) Le socialisme, un projet économique ancré dans la réalité historique
Pourquoi le socialisme donne-t-il des fondations économiques à ce projet collectif citoyen ? Parce que l’économie a constitué le socle de toutes les sociétés précédentes au plan social, politique et culturel. Il y eut bien sûr interaction entre ces différentes domaines mais la logique économique a toujours pris le pas sur le reste. Dans l’Antiquité par exemple, les besoins en main d’oeuvre du mode de production esclavagiste poussaient sans cesse à de nouvelles conquêtes pour disposer d’une masse servile ; ni la démocratie citoyenne, ni les différentes constitutions, ni les philosophes, ni même les luttes sociales et révolutions n’ont enrayé cette machine naturellement guerrière, pillarde et impérialiste. Ainsi, il ne pouvait rester qu’une puissance méditerranéenne dominante et ce fut Rome au détriment dommageable d’Athènes, de Carthage, d’Alexandrie, de Jérusalem, de Marseille, d’Antioche...
Le mode de production capitaliste présente un aspect encore plus systématique avec ses logiques économiques d’exploitation des hommes et de la nature, d’extension de la sphère de la marchandise, du libre-échange et du profit, de financiarisation, de mondialisation, de réduction des protections sociales, de désarmement fiscal, de dumping social, de rétrécissement des possibilités d’intervention des Etats et collectivités publiques.
K2) Doctrine économique : de l’anticapitalisme moral à la socialisation des grands moyens de production
La littérature du 19ème siècle exprime admirablement le cri de la conscience humaine face à la misère à laquelle le capitalisme réduit les familles ouvrières et les milieux populaires. Alexandre Dumas met en scène les trois grandes figures du pouvoir bourgeois de l’époque (banquier, politicien, juge) dans Le comte de Monte Cristo. Victor Hugo peint la détresse et la dignité de ses inoubliables Misérables (Jean Valjean, Cosette, Enjolras, Gavroche, Fantine...). Citons encore Heinrich Heine, Dickens (Oliver Twist, David Copperfield), Thomas Hardy (Tess), Emile Zola (Germinal), Hector Malot (Sans famille), Jules Vallès (L’enfant...), George Sand (Le compagnon du Tour de France), Dostoïevski (Les pauvres gens, Crime et Châtiment), Alexandre Herzen, Nikolaï Tchernychevski...
Le socialisme essaie lui de proposer une solution politique pour que le rapport entre économique et social soit plus respectueux des droits humains. Gaétan Gorce, parlementaire socialiste français, écrit à juste titre dans son livre L’avenir d’une idée « Tous ceux qui se rangeront progressivement sous la bannière du socialisme, vers le milieu du 19ème siècle, le feront autour d’une seule et même préoccupation : trouver une forme d’organisation qui mette un terme au formidable désordre généré par les transformations rapides et brutales du capitalisme et visibles à l’oeil nu. Et le faire à partir d’une analyse critique, presque scientifique, des faits sociaux. »
Ainsi, Jean Jaurès sur la socialisation des moyens de production, le "travail associé", la coopération sociale, les coopératives qui correspondent à l’étymologie du mot socialisme « La devise de la république sociale : ni oligarchie, ni bureaucratie mais une vaste coopération sociale où les règles sont définies par tous. » (Jean Jaurès, Revue de l’enseignement, 1er avril 1906). « L’idée de propriété sociale des moyens de production... est le point lumineux où tous les vrais révolutionnaires se rallient. » (L’Humanité, 25 août 1912). « Que tous les hommes passent de l’état de concurrence brutale et de violence à l’état de coopération, c’est la fin la plus haute. » (Jean Jaurès, L’Armée nouvelle, avril 1911)
K3) Les échecs économiques du socialisme réformiste
Les partis socialistes européens issus de la Seconde Internationale ont porté des progrès significatifs dans leurs pays tant que l’URSS existait car les Etats Unis se servaient d’eux comme vitrine face à l’Est. Depuis l’explosion du Pacte de Varsovie, les pays du "vieux" continent sont bien plus soumis aux logiques économiques du capitalisme financiarisé et mondialisé.
L’union européenne aurait pu contribuer à constituer un rempart face au libéralisme US au service des multinationales. Tel n’a pas été le cas parce que le fondateurs de cette Europe, atlantistes convaincus liés à Washington, ont imposé le primat de la "concurrence libre et non faussée". L’Acte Unique Européen (1986), les traités de Maastricht (1992) d’Amsterdam (1997) puis de Lisbonne ont complété le Traité de Rome (1957) pour imposer des politiques néo-libérales instituant la guerre économique comme fondement de nos sociétés.
Le projet progressiste d’une Europe politique de la paix, de la démocratie et du progrès social s’est ainsi dilué dans une simple zone de libre-échange qui pourrait bientôt s’élargir en fait aux Etats-Unis, au Canada et à Israël, nos prétendus partenaires dans le "choc des civilisations".
K4) Les échecs économiques du socialisme prétendu communiste
Ecosystème, intérêt général humain et PLANIFICATION ECOLOGIQUE (note complétée par JL Mélenchon)
L’écosocialisme pour maîtriser le futur (Jean-Luc Mélenchon)
Ecosocialisme : la quatrième voie (Hervé Debonrivage)
Réinventer la politique autour de l’écosocialisme
Le projet écosocialiste est un constant aller retour entre pensée et action (Michael Löwy)
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