Ségolène Royal propose à Nicolas Sarkozy une "Union nationale droite-gauche"

lundi 9 février 2009.
 

Hier, dimanche 8 février, 13 heures et quelques minutes. Après avoir bien fêté un anniversaire, j’allume la télé pour écouter les informations sur France 2. Qui occupe l’écran ? Ségolène Royal.

... Interrogée sur le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), dont le congrès fondateur avait lieu ce week-end, l’ex-candidate socialiste postule que "toutes les idées sont bonnes d’où qu’elles viennent". Une telle phrase contredit totalement la fonction critique rigoureuse auquel le socialisme a voulu s’astreindre dès sa fondation. Non, toutes les idées ne sont pas bonnes d’où qu’elles viennent (fascisme, communautarisme religieux, nationalisme, xénophobie...). Ségolène Royal met en avant la valeur centrale portée par l’idéologie dominante durant les années 1980 et 1990 : le tolérantisme consensuel dont le mouvement socialiste a particulièrement souffert. Cela rappelle son "Aimez-vous les uns les autres" de La Rochelle fin août 2008.

Vis à vis du NPA, sa réponse "toutes les idées sont bonnes d’où qu’elles viennent" lui sert probablement à marquer une distance comme elle dirait "Heureux les pauvres d’esprit, le royaume des cieux leur appartient".

A son retour du dernier Forum Social Mondial, Ségolène Royal avait endossé les habits d’une marieuse de toute la gauche : "Une chose m’a frappée à Belem ; il n’y a pas de barrière infranchissable entre ces trois composantes de la gauche que sont la gauche de gouvernement, les mouvements sociaux qui luttent sur le terrain et ce qu’on appelle en France l’extrême gauche". Elle se sent tellement bien dans ce rôle de marieuse qu’elle propose d’aller plus loin pour une partie à quatre.

Je subis la deuxième phrase : "Cela va de François Bayrou à Olivier Besancenot et au-delà". Là, votre corps arrête momentanément de digérer. Seul, votre cerveau essaie de retrouver un équilibre. La présidente de Poitou-Charentes avait déjà fait part de sa stratégie politique pour 2012 consistant en une alliance de Bayrou à Besancenot. Pour tout socialiste, stratégie unitaire et programme vont de pair ; j’aimerais bien savoir sur quel programme elle envisage cette alliance. Y croit-elle ? Je me dis qu’elle essaie certainement de maintenir sa côte de popularité dans les sondages.

Mon esprit commence à analyser la fin : "et au-delà" qu’elle en rajoute : "Dans les périodes de crise telles que nous vivons, nous devrions avoir, sur des solutions qui tiennent la route, une union nationale droite-gauche". Ainsi donc, si Ségolène Royal avait gagné les présidentielles, elle ferait tout pour constituer un gouvernement d’union nationale gauche droite comme c’est le cas aujourd’hui dans de nombreux pays européens pour le résultat catastrophique connu. Et si elle était sortie du congrès socialiste de l’automne 2008 première secrétaire, elle proposerait, au nom du Parti Socialiste, un gouvernement d’union nationale droite gauche à Nicolas Sarkozy.

Elle ne vous laisse pas le temps d’en douter puisqu’elle ajoute : "Même moi, je suis prête à y participer".

Ses phrases s’enchaînent alors avec une logique implacable. Elle a écouté le président de la république et en a retenu une "intention de tournant social".

"Toutes les idées sont bonnes d’où qu’elles viennent" ; aussi, elle lui propose un gouvernement d’union nationale : "Si Nicolas Sarkozy admet une bonne fois pour toute qu’il a fait fausse route" et s’il renonce au paquet fiscal, "on peut remettre les choses à plat et on peut avoir une démarche d’union nationale autour d’un certain nombre de propositions".

Ne prenons pas de telles affirmations à la légère. En posant des conditions aussi minimes à un rapprochement entre elle et le gouvernement, elle vient d’ouvrir la meilleure sortie de crise possible pour Sarkozy au lendemain du 29 janvier. Ségolène Royal a fait preuve dans le passé d’une qualité : sa détermination à réussir sa carrière politique.

On peut se demander si des contacts n’ont pas déjà eu lieu avec des émissaires du président de la république sur un tel sujet pour qu’elle aille si loin sur les antennes de france 2.

Peu de temps après, elle résume d’ailleurs son état d’esprit actuel "Je souhaite exercer des responsabilités".

Elle parle semble-t-il du Parti socialiste puisqu’elle précise : "Je veux bien être chargée des relations internationales"... "J’accepterai même, tenez, la question des territoires d’Outre-mer".

Soudain, le ton se fait plus dur. Ségolène Royal change de registre théâtral. Elle s’en prend au contre-plan de relance proposé par la direction du Parti socialiste. Elle juge que ce contre-plan ne va pas assez loin. J’en suis totalement d’accord mais valoriser l’intention sociale de Nicolas Sarkozy pour taper à bras raccourci sur Martine Aubry : comment le socialisme français a-t-il pu engendrer une telle candidate aux présidentielles ?

"Est-ce que les Français ont été satisfaits des propositions de la direction actuelle du Parti socialiste ? Non, on l’a vu. Donc, ça veut dire qu’il faut aller beaucoup plus loin".

Là, elle vous sort la phrase passe partout pour candidat attentif aux sondages : "En particulier, moi, je crois beaucoup au levier de la croissance verte".

Et bien moi, j’en avais assez entendu. Je ne connais donc pas la suite.

Quiconque a en tête les conséquences catastrophiques des erreurs d’orientation du mouvement socialiste dans les années 1930 ne peut qu’être aterré par les propos de Ségolène Royal. Elle paraît vivre dans le seul monde de la communication électoraliste, sans principe politique, sans souci de l’intérêt particulier des salariés et couches populaires, sans souci de l’intérêt public, sans souci même de la réalité.

En une semaine, elle est passée d’une communication sur le thème "Les altermondialistes avaient raison... Un autre monde est possible" à une autre en faveur d’une union droite gauche autour de Nicolas Sarkozy. Et Rebsamen, Dray, Batho, Menucci... paraissent continuer à la soutenir sans sourciller...

Pour des socialistes conséquents, le temps ne peut être aux faux-semblants et aux astuces de communication.

Jacques Serieys


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