La Métropole du Grand Paris est un énorme recul démocratique

lundi 8 février 2016.
 

La Métropole du Grand Paris (MGP) est effective depuis le 1er janvier 2016. Dotée d’un conseil métropolitain, elle est aussi découpée en 11 établissements publics de territoires (EPT) en sus de la ville de Paris.

Ultime avatar de la substitution technocratique à la légitimité politique, le fait métropolitain en général et la MGP en particulier marquent un recul démocratique sans précédent. Ce constat, qui pouvait être fait sur le fond avec le dessaisissement des communes, cadre de base d’exercice de la souveraineté populaire, et le transfert de compétences vers le mastodonte du Grand Paris, n’en est aujourd’hui que plus visible sur la forme.

Les assemblées et exécutifs fraîchement désignés renvoient la politique à un âge que les moins de 20 ans (au moins !) ne peuvent pas connaître. Jugez plutôt.

Victime collatérale de ce montage : la parité

Le conseil métropolitain compte 209 représentants issus des conseils municipaux de chaque commune. Si la Ville de Paris a 62 conseillers métropolitains, les autres communes ne sont représentées que par un ou deux conseillers selon leur taille (trois pour Saint-Denis). Ou comment diluer (dissoudre ?) la légitimité issue de l’ancrage territorial.

Les maires sont membres de droit du conseil métropolitain, quand bien même est également prévue "assemblée des maires". Peu importe, il faut pour chacun d’entre eux en être. Ce sont donc 131 maires sur 209 (63%) qui siègent dans cette nouvelle assemblée. Victime collatérale de ce montage : la parité. Sur les 209 conseillers métropolitains, 59 seulement sont femmes (28,2%) !

Mais la mise en place de l’exécutif métropolitain est pire encore : lors de la séance inaugurale du 22 janvier, ont été désignés un président homme (Patrick Ollier), deux femmes (10%) et 18 hommes aux vice-présidences, et deux femmes (28%) et cinq hommes en tant que conseillers délégués. Sur 28 membres du bureau de la MGP, on trouve donc quatre femmes et 24 hommes (14% de femmes).

Grotesque !

Regain de vitalité pour le cumul des mandats

Mais les vieux mâles ne se contentent pas d’exclure les femmes de la représentation et des responsabilités. Ils les accumulent sur leur personne. Ainsi, sur 28 membres du bureau exécutif, 21 sont maires de plein exercice (dont huit parlementaires qui sont aussi maires), deux sont maires d’arrondissement de Paris, deux sont présidents d’EPT.

Le cumul des mandats, si tant est qu’il en ait eu besoin, trouve avec la MGP un regain de vitalité !

Et que l’on prenne la métropole dans son tout ou dans ses parties, elle est partout le tombeau de la parité et le paradis des cumulards. Car les EPT ne valent pas mieux. Ainsi, sur 11 présidences, on trouve 10 hommes et une femme. Et encore, Nicole Goueta, présidente du T-5 "Boucle Nord de Seine", doit-elle son siège temporaire au fait qu’elle est la doyenne dans le cadre d’une présidence tournante !

La mascarade continue avec les bureaux des EPT. Sur 117 présidents et vice-présidents d’EPT, on trouve 21 femmes (17,9%). L’EPT-10 réalise même le tour de force de constituer un bureau 100% masculin : 13 hommes sur 13 ! Carton plein !

Un ralliement généralisé à la co-gouvernance droite-gauche

À l’inverse, les cumulards eux se sont fait la part belle : 77 maires (66%) siègent dans les exécutifs des EPT. En plus de leur mandat au conseil métropolitain bien sûr… Un triple cumul d’un coup, en sorte. Et celui-ci ne s’arrête pas là : 11% d’entre eux sont par ailleurs parlementaires. Les autres sont bien souvent aussi placés au conseil départemental ou au conseil régional…

Pour être sûr de participer au festin, il fallait que la mise en place des exécutifs de la métropole s’accompagne du ralliement généralisé à la co-gouvernance droite-gauche. Tous ont cotisés.

Anne Hidalgo, maire PS de Paris, est la 1ère vice-présidente du LR Patrick Ollier au conseil métropolitain, aux côtés de huit LR, quatre UDI, quatre PS, deux PCF, un Ensemble et un à EELV. Ailleurs dans les EPT, la droite a laissé au PS, à EELV ou au PCF les vice-présidences qu’elle a reçues en retour dans ceux dirigés par le PS ou le PCF.

Partout, le sens du vote dans les communes a été effacé au nom du mythe de la seule politique possible à laquelle chacun est prié de se plier.

Rétrograde et anti-démocratique

La Métropole du Grand Paris marque donc un gigantesque recul démocratique. Au dessaisissement du citoyen, elle ajoute l’enterrement dans les faits de la parité dans la vie politique imposée en 2000 sous Lionel Jospin.

Rétrograde et anti-démocratique, elle marque le retour aux pratiques de confiscation de la vie publique par l’institutionnalisation et la quasi automaticité du cumul multi-mandats.

Une réforme territoriale n’est jamais neutre. Elle répond toujours à un projet politique dédié. La mise en adéquation des territoires avec les logiques de compétitivité et de mise en concurrence ne pouvait se faire qu’en éloignant le peuple de la prise de décision. Et en lui substituant une petite Caste auto proclamée.

Le premier mois d’installation de la Métropole Grand Paris vient tristement de le confirmer.


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