Echos des débats parlementaires sur le Mécanisme européen de stabilité

jeudi 23 février 2012.
 

Installés dans le bureau à l’Assemblée Nationale de la députée Martine Billard, Jean-Charles Lallemand et Céline Meneses ont suivi les débats et les votes sur le Mécanisme Européen de Stabilité. Ils nous en font revivre le récit :

17 heures. La séance parlementaire sur le traité instituant le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) et l’amendement au Traité de Lisbonne permettant cette institution commence.

Dans le bureau de Martine Billard, on s’affaire. La journée a été marquée par une conférence de presse de Jean-Luc Mélenchon. Dénonçant le MES et son corollaire le traité « sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’union économique et monétaire » (TSCG), Jean-Luc Mélenchon a appelé les socialistes à voter contre cette machine à organiser des saignées UE-FMI partout en Europe.

Mais au même moment, une dépêche AFP retranscrivait la consigne de vote de Jean-Marc Ayrault, président de groupe à l’Assemblée nationale : ce serait l’abstention pour tous. Une abstention expliquée par un troublant : "notre abstention est dynamique, offensive. Le vote non aurait donné l’impression de ne rien décider". Effectivement, en le cas présent, s’abstenir c’est choisir. C’est choisir d’avaliser le Mécanisme européen de stabilité MES. C’est choisir l’institutionnalisation de la troïka et de ses programmes de saignées sociales et étatiques qu’il suppose. C’est choisir aussi le chantage à la ratification du "pacte budgétaire" qu’il grave dans le marbre. C’est choisir de donner le pouvoir à certains Etats, en l’espèce l’Allemagne et la France, rejoints par l’Italie dans les cas d’urgence, de décider s’il faut ou non octroyer une "assistance financière" à un autre Etat membre de la zone euro. C’est choisir de sanctionner les Etats qui ne pourraient pas verser les fonds qui sont exigés de lui. C’est choisir de ne plus avoir le moindre contrôle judiciaire, administratif ou législatif sur ce que fera ce Mécanisme. C’est choisir de ne pouvoir modifier ce traité qu’à l’unanimité des gouverneurs mandatés par les gouvernements et seulement sur quelques rares questions. C’est choisir enfin de ne plus pouvoir sortir de ce traité, aucune modalité d’extinction ni de dénonciation du traité n’étant prévu. Bref, effectivement, s’abstenir c’est choisir une fois de plus d’avaliser la dérive austéritaire de l’Europe. On n’en attendait pas moins de Monsieur Ayrault, il avait déjà prôné « l’abstention active » sur le traité de Lisbonne. On aurait par contre pu attendre de tous les députés du Non à Lisbonne qu’ils refusent le nouveau carcan austéritaire ficelé par la Merkozy.

Du côté d’Europe Ecologie-les Verts, c’est un vote négatif qui est prévu. Le Front de Gauche ne sera donc pas seul à faire un vote Contre.

C’est Leonetti, ministre chargé des affaires européennes, qui présente le projet. Un projet marqué du sceaux "du courage et de l’action" selon lui. Il est basé sur "la solidarité et la discipline dans un juste équilibre" explique-t-il. Il s’agirait "d’institutionnaliser le principe de solidarité" dans le droit européen. Rien que ça ! Quelle étrange visage que celui de la solidarité vue par la droite... "Nos concitoyens ne comprendraient pas que la solidarité ne s’accompagne pas de discipline". Comment faire peser sur les Français les misères qu’on prépare pour tous les peuples. Imposture s’il en est !

Monsieur Leonetti débite : la France versera 16,3 milliards d’euros et peut être appelée à verser jusqu’à plus de 142 milliards d’euros. Un bel engagement dit-il, sans revenir sur l’usage indécent qui en sera fait : ces milliards ne serviront en effet qu’à renflouer les banques qui s’engraissent sur le dos des dettes des Etats.

La parole passe à Monsieur Roubaud (UMP), rapporteur. Celui-ci juge "hors de propos" l’émotion suscitée par ce traité. Il débite à son tour le contenu du traité sans jamais rien expliquer. Dire que "d’un commun accord" veut dire à l’unanimité dans ce traité, expliquer qu’un vote à 80% du capital souscrit c’est donner un droit de veto à l’Allemagne et à la France et à elles seules, indiquer que les "strictes conditionnalités" prévues ce n’est rien d’autre que des plans UE-FMI tels que ceux qui saignent la Grèce et le Portugal par exemple, aurait le mérite de la clarté. Ici rien n’est dit. La lecture est absconde. A l’écouter, nous avons néamoins compris qu’il s’inquiète particulièrement des notes que pourront attribuer les agences de notation à un tel mécanisme. Revenant sur la complémentarité avec le TSCG, Monsieur Roubaud nous explique qu’il s’agit là d’un "lien de bon sens".

Vient le tour de Monsieur Poniatowski (UMP) président de la commission des affaires étrangères. Il nous explique que la politique des gouvernements européens et notamment du couple franco-allemand est "crédible". Il nous parle "des vertus des transferts de compétences et du mérite du fédéralisme". Il estime qu’il est salutaire que l’Europe avance à des vitesses différentes. Il est même heureux qu’une coalition de petits Etats ne puissent pas bloquer "le processus de décision d’urgence au sein du MES". Instructif...

Arrive Monsieur Lequiller (UMP) président de la commission des affaires européennes. Il appelle à la ratification rapide des deux traités pour donner l’exemple à l’Europe. Il parle d’une "seconde naissance" pour l’union monétaire et s’en félicite. Il se félicite aussi des coopérations entre les parlements nationaux et européen prévues à l’article 13 du TSCG. Sachez que cet article ne consacre qu’un droit à la discussion déjà prévu par le Traité de Lisbonne... Pour conclure, Monsieur Lequiller explique qu’il aurait voulu un vote unanime sur le MES.

Arrive en séance la motion de rejet proposée par le groupe Front de Gauche. C’est Jean-Pierre Brard qui a la parole. Il parle d’enfumage. "Solidarité avec la Deutsche Bank, la BNP, la Société générale" s’exclame. Il rappelle que c’est le Front de Gauche qui a bataillé pour obtenir un vote nominal sur ce texte. Il souligne l’absence de débat public sur le sujet crucial que constitue ce vote."Surveiller et punir" devient le nouveau modèle européen explique-t-il en déplorant au passage l’institutionnalisation du directoire franco-allemand qui instaure ce modèle. Il dénonce "l’aveuglement idéologique et l’idolâtrie austéritaire" des députés qui voteront pour le MES alors que les conséquences dramatiques des politiques de le troïka sont visibles pour qui veut bien se donner la peine de regarder. Il prend la peine de les décrire. Manque de soins, explosion des files aux soupes populaires, de la mendicité, des suicides, des overdoses... Les députés présents ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient. "D’abord l’acceptation de l’esclavage et après une louche dans la gamelle" voilà la formule par laquelle il a résumé le MES.

Il a aussi rappelé que le traité créant le MES accroît les compétences de la BCE et de la Commission européenne, toute chose qui demande normalement un amendement selon une procédure de révision ordinaire du traité de Lisbonne et non selon un procédure simplifiée... La différence ? La possibilité de mettre en place un référendum ! Rien que ça ! "La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par le droit de référendum" s’exclame-t-il en citant l’article 3 de la Constitution française dans un brouaha formidable.

Il finit en dénonçant l’institutionnalisation du secret qui rend inviolable tout ce qui appartient au MES et immunise toute personne y travaillant et en appelant à lutter contre la domination franco-allemande en Europe.

Un dernier mot pour en appeler au droit au bonheur pour les peuples d’Europe citant Saint Just.

Le ministre Leonetti répond. Pour lui "trop c’est trop". "Vous nous accusez d’aller contre le peuple grec. Est-ce que c’est aller contre le peuple grec que de l’empêcher de faire faillite ?" s’exclame-t-il dans un ultime affront aux souffrances de nos amis grecs dont les plans UE-FMI ont pour le moment creusé la dette. "La justice sans la force, c’est l’impuissance" déclare-t-il en conclusion citant Pascal. Scandaleux !

Vient le vote sur notre motion de rejet. Les socialistes ne font aucune explication de vote ! Mauvais signe. Un député du Nouveau Centre, Monsieur Charles Amédée de Courson, prend la parole. Il accuse Jean-Pierre Brard, dans un lapsus dont ce dernier s’amusera, de "germamophilie". En effet, nous sommes tous germanophiles et "philes" de tous les peuples d’Europe. "En matière budgétaire ’Ich bin deustch. La vertu budgétaire c’est le maintien du système démocratique’ explique-t-il avant de dénoncer la "classe politique grecque" qui "a été en dessous de tout" ce qui expliquerait selon lui la situation vécue par la Grèce et de déclarer que le communisme "est en train de disparaître".

Jean-Paul Lecoq prend la parole. Il commence par soutenir Jean-Pierre Brard. Puis il avance ses arguments. Il voudrait un contrôle du Conseil constitutionnel car l’argent public doit être démocratiquement controlé par les parlementaires. Or aucun contrôle parlementaire n’est permis sur toute somme qui sera versée au MES. "C’est pourquoi il faut voter contre le MES".

"Vous refusez la solidarité en Europe" s’indigne une nouvelle députée de l’UMP, Madame Gruny, ancienne eurodéputée. "Il n’y a pas de transfert de compétences, je ne vois pas où vous avez vu ça".

La motion de rejet est mise aux voix. 256 votants pour 23, contre 233. La motion de rejet n’est pas adoptée.

Le débat commence. C’est Madame Guigou qui prend la parole. Il est 18H20. C’est la première intervention du PS. Elle indique que la discipline budgétaire est indispensable, rappelle l’engagement de ramener la France à l’équilibre budgétaire en 2017 pris par François Hollande, et explique que le TSCG, lui, n’est pas nécessaire. Elle rappelle la volonté de le renégocier sans rien préciser. Concernant le MES, elle commence par se féliciter de l’"aide" apportée au Portugal et à l’Irlande. Les portugais et les irlandais qui plient sous le poids des plans d’"ajustement" de l’UE et du FMI apprécieront. Ensuite, elle déplore que "ce mécanisme arrive bien tard". Elle poursuit "500 milliards d’euros ce n’est pas suffisants... Monsieur le ministre je vous parle !" s’écrie-t-elle visiblement exaspérée ! "Nous aurions besoin d’un mécanisme communautaire" avec un contrôle parlementaire, pas un mécanisme intergouvernemental. Elle dénonce le dernier plan de rigueur imposé aux grecs. "C’est la dignité même du peuple grec qui est bafouée" explique-t-elle avec justesse...avant d’expliquer que la faute en revient au gouvernement grec et à la Commission européenne qui n’a pas fait appliquer le traité de Lisbonne. Elle annonce qu’elle s’abstiendra. Sa condamnation du plan de rigueur grecque n’était donc que pure babillage. Dans le bureau nous avons la nausée.

Martine Billard rentre dans le bureau pour préparer son intervention. "Il n’y a que 13 socialistes en séance" nous lance-t-elle, abasourdie. Incroyable ! Quel peu d’intérêt pour l’avenir des peuples d’Europe...

De Courson (Nouveau Centre) reprend la parole. C’est un fédéraliste. Il veut une "Europe plus intégrée" avec une Commission plus forte. Ici, on prépare l’intervention de Martine Billard. On a perdu le fil de Courson.

Vient de nouveau le tour du camarade Lecoq (Front de Gauche). Il dénonce le désastre déjà causé par le Pacte de Stabilité et de Croissance. "Vous n’avez tiré aucune leçon de la crise (...) Vous auriez pu vous attaquer à la dictature des marchés financier" souligne-t-il avant de dénoncer la mainmise du FMI sur tout le processus de négociation des modalités d’assistance financière. Lui aussi revient sur la situation de la Grèce. "Le patrimoine grec est soumis à liquidation, le peuple grec n’aura même plus ça" fustige-t-il. Il explique que du fait des plans d’austérité UE-FMI successifs, la Grèce ne dispose plus des moyens d’investissements publics nécessaires à la relance. "C’est absurde !" lâche-t-il durement. C’est toute l’absurdité et le cynisme des souffrances imposées au peuple grec qui résonne dans le ton glacial qu’il emploie. Saisissant.

Re-voilà Madame Gruny pour l’UMP. Elle se lance dans une déclaration lyrique avant d’expliquer que le MES est pour elle "la preuve que quand l’Europe veut, l’Europe peut". Puis elle nous rappelle le contenu du traité que nous connaissons bien... Elle ne l’explicite pas, ne tire aucune conclusion des clauses du traité. Ennui dans le bureau. "Le parlement continuera à être informé tous les trimestres" se félicite-t-elle en expliquant qu’il n’y a aucune déni de souveraineté nationale... Les représentants du peuple consciencieux apprécieront de voir leur rôle réduit à la possibilité d’être informé. Pour finir, elle appelle les socialistes et les députés Europe écologie-les Verts à "écouter leur ami Dany (Daniel Cohn Bendit) et à ne pas lui faire l’affront de ne pas voter pour ce traité". Ah Dany... Si on pouvait se passer d’un droitier pareil...

Caresche prend la parole pour le PS. Il "s’interroge" sur le MES. "La Grèce est entrée dans un cycle infernal dans lequel l’austérité amène la récession qui amène l’austérité" souligne-t-il. "Sur un certain nombre de points le MES apporte des réponses nouvelles" avance-t-il. Il dénombre : il est permanent et mieux doté, "enfin la plupart des décisions seront prises à l’unanimité". Mensonge ! Une part seulement des décisions sont prises à l’unanimité : celles qui concernent le lancement des négociations des programmes d’austérité. Ces programmes, sans lesquels aucune assistance n’est octroyée, l’Allemagne et la France ont un droit de veto dessus !

Monsieur Caresche avance un nouvel argument : le MES serait "un sabre de bois" parce qu’il n’est pas adossé à la BCE. "Il ne peut donc aider que les petits Etats" pas l’Espagne ou l’Italie. Bien sûr il ne propose pas que la BCE prête aux Etats. Il se contente de suivre la proposition faite par Nicolas Sarkozy en Octobre dernier (la BCE prête au MES qui prête aux Etats). Il termine en expliquant qu’avec le MES "l’Europe est loin d’être sauvée". Il s’abstiendra. Allez comprendre...

Vient le tour de Monsieur Mariton pour l’UMP. Il se dit "très attaché à la souveraineté nationale et aux droits de ce parlement" mais il explique que "c’est en réalité une Europe fédérale qui se dessine, autant l’assumer".

Arrive le villiériste Souchet, non inscrit. Il s’inquiète du pouvoir de codécision donné au FMI et du fait que les parlementaires ne soient jamais consultés dans le cadre des assistances décidées au sein du MES. Il dénonce la spéculation qui disloque la monnaie unique... Tiens ! Il est pour la monnaie unique ?

Les interventions se succèdent. C’est maintenant le tour d’une députée d’origine grecque, Madame Karamanli. Elle veut un MES "lié à une autre politique économique". Elle y voit un "outil imparfait", "un outil qui aurait demandé mieux". Elle s’abstiendra...

Monsieur Remiller en remet une louche sur la soi-disant solidarité que permettrait le MES. Et de revenir sur le corollaire du MES, le TSCG. Et de vanter les vertus de la règle d’or... Il prétend même que "l’abstention ou le vote contre dans les bancs de l’Assemblée serait un camouflet au peuple grec". Un tel cynisme à longueur d’intervention est exaspérant. Vivement qu’un-e des nôtres intervienne !

Mais c’est au tour de Gérard Charasse (PRG). Lui aussi veut "adosser le MES à la BCE" et un contrôle parlementaire. Puis il se lance dans une diatribe contre la politique européenne actuelle. Il dénonce les politiques de rigueur imposée à la Grèce "et vous voulez les imposer aux autres pays !" s’exclame-t-il. "Vous voulez interdire toute marge de manœuvre aux peuples, quelle belle leçon de démocratie !" Lance-t-il ensuite. Il dénonce "le dumping et la concurrence contre l’union et la cohésion". "Vous privilégiez l’austérité quand nous privilégions la solidarité". Il ne nous dira rien sur le vote que fera le PRG. Dans le bureau on se questionne. Avec une telle intervention, Gérard Charasse osera-t-il s’abstenir ? Figurez-vous que oui !

Le ministre clôt le débat. Il dénonce les interventions des députés Front de Gauche, qu’il trouve néanmoins cohérentes, et celle du député Charasse qu’il ne comprend pas. Au PS il explique que la BCE joue le rôle qu’il faut. Fermer le banc... Il termine en appelant à "lutter contre la spéculation en votant pour le MES".

Ça y est on vote ! On commence par le vote sur l’amendement au traité de Lisbonne. Il s’agit de l’ajout d’un paragraphe 3 à article 136 : "Les Etats membres dont la monnaie est l’euro peuvent établir un mécanisme de stabilité qui puisse être activé s’il était indispensable de sauvegarder la stabilité de l’euro dans son ensemble. L’octroi de toute assistance financière requise via ce mécanisme sera sujet à de strictes conditionnalités." Notez la subtilité : il s’agit d’établir « UN mécanisme de stabilité » pas LE Mécanisme européen de stabilité sur lequel les députés votent ensuite. En soi, l’article ne donne donc pas de nouvelles compétences à quelque institution que ce soit...d’où la procédure simplifiée.

Ah non ! Finalement on ne vote pas tout de suite.

Intervention "sur l’article unique" du texte. C’est l’écologiste François de Rugy qui prend la parole pour expliquer que son groupe ne prendra pas part au vote. "Il n’y a pas de véritable volonté de créer un mécanisme de solidarité".

J’ai raté le détail de l’intervention d’un député UMP, Monsieur Myard, critique envers le MES. Il voulait visiblement que la BCE prête au MES... mais il annonce qu’il s’abstiendra.

Arrive le tour de Martine Billard. Enfin ! Elle indique que le Front de Gauche fera un vote cohérent et votera contre l’amendement au Traité de Lisbonne car on sait de quel mécanisme on parle...

"La modification de l’article 136 du traité de Lisbonne qui va conduire à la mise en place du Mécanisme européen de stabilité ne peut-être découplé de celui-ci. En effet, c’est cette modification qui va permettre un véritable hold up démocratique en soumettant directement le budget des États européens aux décisions d’un Conseil des gouverneurs, instance sans réel fondement démocratique. Mise en place à la sauvette, sans consultation des peuples, sans recours dans notre pays à un référendum, il est inacceptable de renoncer à ce point au fondement même de notre démocratie qu’est la souveraineté budgétaire."

"Ainsi, en ajoutant un paragraphe 3 à l’article 136 du traité, vous avez préféré évité donner de nouvelles compétences à la BCE et à la commission de manière à limiter la consultation à une procédure simplifiée et non à un procédure ordinaire alors même que vous ne cessez de dire qu’il s’agit d’un amendement fondamental. Ainsi, la proposition ne donne pas techniquement de compétences supplémentaires à la Commission et Conseil mais le MES lui en donne."

"Ainsi la BCE voit sa position renforcée et participera à la négociation des plans d’ajustement et les contrôlera. Plus encore, le FMI fait son entrée directe dans le champ européen au même titre et avec les mêmes compétences que la BCE."

"Oui, la souveraineté des Etats est remise en cause. Mme Gruny de l’UMP nous a dit que le Parlement sera informé. Mais nous ne sommes pas là pour être informés, nous sommes élus pour prendre des décisions et prioritairement pour définir le budget du pays. Et c’est vrai dans tout pays démocratique, en France comme en Grèce !"

Monsieur Ayrault prend à son tour la parole. Que va-t-il dire encore ? "Abstention dynamique ?" Ah non. Pire : "c’est à nos amis grecs que nous pensons aujourd’hui". Les "amis" apprécieront le cynisme ! Il avance : "ce traité nous l’avons souhaité et nous en approuvons la création même s’il constitue une base limitée". Il dénonce par contre "la camisole cousue de fils d’or" du pacte budgétaire et "la démocratie sous conditions" (sic) qu’il suppose. "Le MES est un progrès", explique-t-il, mais il dénonce le lien avec le pacte budgétaire inscrit au considérant 5 du traité MES. Aussi, selon lui, les socialistes ne peuvent-ils pas voter pour le MES : "ça brouillerait notre message politique". Il poursuit sous les cris des députés car il a déjà épuise son temps de parole. Il explique que l’abstention des socialistes signifie "que nous pouvons changer les choses". Il faudra qu’il nous explique ça. "Nous nous abstenons pour dire : oui, une autre Europe est possible (...)" annonce-t-il. On a bien compris, Jean-Marc : « vous vous abstenez pour dire oui »... Le reste n’est que blabla. Honte à vous !

De Courson reprend la parole : "les deux traités sont intimement liés, mes chers amis socialistes, vous ne pouvez pas être contre le traité budgétaire et ne pas être contre le MES". "L’abstention est un manque de courage" lance-t-il à Jean-Marc Ayrault. Lui, au moins, est cohérent : il est favorable aux deux ! Il insiste même sur la nécessité de l’austérité en Grèce... Aveuglement libéral traditionnel.

Jean-Pierre Brard monte au créneau. Après avoir dénoncé les aristocrates et autres qui accablent toujours le tiers-Etat, il revient sur l’accusation de germanophobie qui lui a été faite : "Nous choisissons nos allemands nous : plutôt Marx que Bismarck !" Il a décidé de lire une des lettres écrites par Mikis Theodorakis, résistant grec et ardent défenseur de la démocratie sous la dictature des généraux hier, comme sous celle des marchés aujourd’hui. Moment de plaisir au bureau de Martine Billard où François Delapierre, directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, nous a rejoints.

Lequiller (UMP) fait à son tour l’explication de vote de son groupe. Il dénonce l’abstention des socialistes "sous la pression de Mélenchon", à deux reprises. Il moque "l’abstention pour décider" de JM Ayrault et demande "où est la cohérence ?" Ça crie dans l’Assemblée. On est bien loin des faux débats du Parlement européen où les interventions se succèdent face à la caméra sans débat.

Ça y est : ça vote. Amendement 136 : 431 présents, 300 votes exprimés : pour 256 contre 44. Contre : 18 Front de Gauche, 23 PS, Dupont-Aignan et 2 MPF.

Les 23 PS sont : Gisèle Biémouret, Christophe Bouillon, Guy Delcourt, Julien Dray, Philippe Duron, Olivier Dussopt, Henri Emmanuelli, Martine Faure, Hervé Féron, Geneviève Fioraso, Pierre Forgues, Pascal Got, Sandrine Hurel, Régis Juanico, Gilbert Le Bris, Kléber Mesquida, Philippe Plisson, Catherine Quéré, Marilyse Raynaud, Odile Saugues, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Jacques Valax.

On passe au vote sur le traité. Ah non ! Dupont Aignan prend la parole. Il s’exprime sur l’article unique de la loi autorisant la ratification du traité MES. Il dénonce la perte du choix budgétaire et la dépense de 16 milliards d’euros alors que les coupes budgétaires se multiplient. Il rappelle qu’en Allemagne, l’immunité de tout le personnel du MES suscite de nombreux débats. "Ce mécanisme est indigne de notre démocratie" dit-il, avant d’indiquer qu’il enfoncera l’Europe dans la crise de la dette.

Martine Billard reprend la parole. Elle dénonce les plans d’austérité qui non seulement imposent des coupes dans les dépenses publiques mais qui imposent également le gel des salaires dans le secteur privé. C’est une casse organisée des négociations salariales et la baisse des retraites. Elle rappelle que la Grèce a déjà remboursé sa dette, hors intérêts : la Grèce a diminué son stock de dette de 10,6% du PIB en 2009 à moins de 2% en 2011. Elle dénonce la saignée sans précédent du peuple grec en cours : « Qu’ont apporté les 8 plans d’austérité en Grèce depuis 2 ans ? Ils ont aggravé la pauvreté, le chômage, la faim, le manque de soins et d’accès aux médicaments, la prostitution, le nombre des suicides, et la fuite de la jeunesse vers d’autres pays ». Elle souligne la cohérence des positions des députés du Front de Gauche à l’Assemblée nationale depuis 2 ans. Elle appelle le Président-candidat Sarkozy, qui ose se réclamer du peuple, à justement donner la parole au peuple, en convoquant un référendum. Et elle appelle afin ses collègues parlementaires à s’associer aux députés du Front de Gauche pour saisir le Conseil constitutionnel.


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