Audiovisuel public : à la hâche

samedi 27 décembre 2008.
 

Sarkozy avait prévenu un soir de campagne électorale où l’on avait eu l’outrecuidance de le prier d’attendre son tour avant de le maquiller et de l’installer sur le plateau de télévision : la direction du service public ne perdait rien pour attendre. Il a tenu parole et, en effet, la télévision publique a très peu attendu…

Ce n’est certes pas ici que nous ferons mine de verser des larmes de crocodiles sur le sort de M.de Carolis contraint de manger son chapeau et de faire voter la suppression des recettes publicitaires après vingt heures alors même que le projet de loi n’avait pas encore franchi le cap de la première lecture à l’Assemblée Nationale. On se contentera de mesurer la servitude quand la grandeur reste une denrée rare dans ces contrées. Mais le plus fort de l’affaire est que le PDG de France Télévision s’était mis dans un tel pétrin qu’il ne pouvait guère faire autrement ayant si bien anticipé sur la volonté de Sarkozy qu’il avait construit pour le mois de janvier une nouvelle grille de programme dépourvue d’écrans publicitaires nocturnes. C’était donc voter ou… démissionner. Il n’a pas hésité très longtemps, Rodrigue est démodé et Corneille est bien mort.

Reste l’essentiel : la télévision publique est en grave danger.

Contraint de manœuvrer en recul devant les lycéens et de composer sur le travail du dimanche, Sarkozy tient la barre ferme sur la télévision. Rien n’y a fait jusqu’à présent. Ni les manifestations massives et unitaires des personnels, ni les puissantes grèves, ni les conclusions de la commission Copé (renvoyé à ses chères études), ni les craintes des créateurs, ni les inquiétudes des producteurs, ni les risques pris sur la constitutionnalité de ses procédés, ni même la défection tardive d’une partie de sa propre majorité. Rien. Sarkozy trépigne et répète : je le veux !

On aurait tort de voir là un caprice.

D’abord le compère veut renvoyer les ascenseurs. Bouygues, Bolloré, Lagardère, ses commensaux, attendent la pâtée quand la droite vote, dans un même mouvement, la suppression du tiers des revenus du service public et la deuxième coupure publicitaire pour le service privé. Limpide et néanmoins juteux.

Ensuite et comme ailleurs, il souhaite mettre un terme à ce qui reste de combativité et d’indépendance dans l’univers conforme de la vidéocratie dominante. Certes, depuis l’étrange création de la Cinquième confiée à Berlusconi par J. Lang et la privatisation consécutive de TF1 par F. Léotard, la création comme l’impertinence avaient beaucoup souffert. Mais pas encore assez, c’est manifeste.

Enfin, l’homme fasciné de lui-même, ivre de son image et des livres d’images, veut à toute force finir par ressembler à sa caricature et passer à la postérité comme on passe aux Guignols de l’info. À chacun son Panthéon.

Prochaine passe d’armes : le 7 janvier au Sénat.


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