Campagne législative : Bilan de mandat des députés insoumis sur lequel s’appuyer

vendredi 20 mai 2022.
 

L’élection en 2017 des 17 députés du groupe insoumis à l’Assemblée nationale a été un événement politique majeur en France. Elle suivait le rassemblement des bulletins de vote de 7 millions de personnes pour le programme l’Avenir en commun. Elle offrait la durée d’une législature pour faire vivre les idées de ce programme au fil des évènements face au pouvoir le plus personnel et le plus violent de la Cinquième République. L’humanisme écologique et social des insoumis a pu donner de la voix dans une opposition sans faille. Une opposition créatrice. Premiers opposants ils ont aussi été premiers proposants. Le groupe ainsi formé était inédit par sa composition. À l’image de la fédération constituée autour du programme dans l’élection présidentielle, il réunit des membres d’horizons politiques très divers : à côté de militants associatifs, des membres du Parti de gauche, d’Ensemble, des communistes ont travaillé au coude à coude. Le défi posé en juin 2017 était de tenir le choc de cinq années de travail parlementaire dans une position d’opposition minoritaire. Ce n’était pas gagné d’avance.

Avant l’élection, ils étaient occupés par leurs activités d’aide-soignante, de conseiller EDF, de bibliothécaire, de responsable associative, de journaliste, etc. Le groupe de la France insoumise a aussi apporté cela : la fierté pour les milieux populaires d’avoir les leurs pour les représenter à l’Assemblée nationale. Les arrogantes et médiocres moqueries de députés macronistes gonflés au mépris de classe contre la « députée bac – 2 » ou le « député call center » ne les a pas désarçonnés. Au contraire elles ont renforcé l’identification avec eux de milliers de gens. Ils se sont attachés à cultiver ce lien si important. C’est celui qui se produit lorsque les oubliés, les méprisés, les invisibles accèdent à la lumière de la représentation politique. Ordinairement, toutes les scènes et arènes où le débat politique officiel s’organise, hémicycles et plateaux télévisés, effacent les classes populaires et leurs préoccupations. C’était la première injustice à briser. Ce qui a souvent été décrit comme des « coups d’éclats » des députés insoumis visait précisément à cela. Les commentateurs n’ont pas compris à quel point pour beaucoup de gens, voir dans l’Assemblée le paquet de pâtes qu’ils ne pourraient plus acheter avec la baisse des APL ou entendre une aide-soignante parler crûment du quotidien dans les EHPAD était décisif. Car avec la visibilité retrouvée peut s’enclencher un cercle vertueux : le peuple est de retour en politique. La fonction de député n’est pas l’apanage des cadres ou des bac+5 qui sont très largement surreprésentés à l’Assemblée nationale. C’était la vocation de ce groupe de représenter le peuple. Ils ont fait leur la phrase de Maximilien Robespierre, quant à la question qu’il lui était adressée de savoir s’il se prenait pour le « défenseur du peuple » il répondit « je suis du peuple, je n’ai jamais été que cela, je ne veux être que cela ; je méprise quiconque a la prétention d’être quelque chose de plus ».

La France insoumise n’avait aucun député à l’Assemblée nationale avant 2017. Être capable de faire face à l’avalanche de textes présentés par le gouvernement a été un défi relevé collectivement par les députés et leurs équipes. Ils ont été à la hauteur. Depuis 2017, de nombreux rapports, brochures, explications des lois du régime macroniste et du combat contre elles ont été publiés. Ils ont, dans leurs circonscriptions et dans toute la France participé à des centaines de discussions, de réunions et de mobilisations avec des associations, des syndicalistes, des militants écologistes. Sur chaque sujet qui venait, ils ont tâché d’aller chercher leurs informations et propositions auprès de ceux qui étaient en première ligne. Plusieurs des propositions de loi déposées ont même été écrites directement par des citoyens dans des ateliers des lois organisés partout dans le pays. De toutes ces manières, ils ont construit et entretenu un lien entre leur activité au sein de l’institution parlementaire et la société. « Un pied dedans, un pied dehors » : faire rentrer les luttes dans l’Assemblée et faire connaitre dehors ce qui se discutait et était voté dans l’hémicycle. Face à une assemblée verrouillée par une majorité pléthorique l’enjeu n’était pas tant de convaincre les députés macronistes que d’utiliser à plein la fonction tribunitienne ainsi offerte pour exprimer une opposition argumentée et présenter une alternative crédible. Les interventions en hémicycle ont été l’occasion de s’adresser au pays tout entier. Pour cela, l’alliance de la forme et du fond est déterminante. Si chacun l’a fait à sa manière, à partir de son histoire, un style insoumis a émergé. Notons que de nombreux discours de néodéputés ont percé le mur du son, des figures identifiées ont émergé et donné à voir un collectif soudé fait de personnalités singulières. Les réseaux sociaux ont permis de faire sortir les débats du cénacle de l’Assemblée. Les batailles contre la réforme des retraites qui ont rassemblé des millions de gens ainsi que contre la casse du Code du travail en ont été des moments emblématiques. En toutes circonstances, dans les votes ou dans les luttes, ils sont restés unis et solidaires.

Le groupe parlementaire de la France insoumise ne s’est pas contenté de s’opposer. Il s’est astreint à se placer en situation de gouverner à chaque instant en formulant des propositions raisonnables et argumentées. Cela a été particulièrement visible dans une période comme celle du Covid où ils ont présenté de nombreux documents que vous pouvez retrouver en ligne sur la situation sanitaire, économique, démocratique et sociale. Pendant ce mandat, ont été déposés une centaine de propositions de lois et plus de 50 000 amendements par les députés insoumis. Sans oublier les rapports de commission d’enquête, de missions d’information et 4 contre-budgets détaillés. Lors de sa dernière niche parlementaire, le groupe parlementaire de la France insoumise a fait voter une proposition de résolution pour faire reconnaître l’endométriose comme une affection longue durée et une proposition de loi pour réhabiliter les fusillées pour l’exemple de la Première guerre mondiale. Plus de la moitié des mesures de l’Avenir en commun sont d’ores et déjà transcrites en propositions législatives prêtes à être appliquées. Bien sûr, pour se rendre compte de la portée d’une telle donnée, il faut comprendre qu’une grande partie de l’Avenir en commun ne relève pas du domaine de la loi mais de celui des décrets, des arrêtés ou de la méthode de gouvernement. Jamais sûrement une force politique n’a été aussi prête à exercer le pouvoir. Il existe en France un programme de rupture dont les conditions d’application ont été amplement réfléchies, travaillées et préparées, encore enrichi par les plans présentés lors de la campagne présidentielle de l’Union populaire.

À n’en pas douter, ce bilan sera un des arguments qu’ils feront valoir lors de la campagne législative qui s’ouvre.

Antonin Fédrun


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