Pour Éric Piolle, «  Jean-Luc Mélenchon peut structurer l’arc humaniste  »

lundi 2 mai 2022.
 

Défait au premier tour de la primaire des écologistes, Éric Piolle, tenant de l’aile gauche d’EELV, a soutenu, sans y croire, Yannick Jadot pour la présidentielle. Son candidat a récolté 4,6 % des voix. Au regard de la percée de Jean-Luc Mélenchon, le maire de Grenoble plaide, une fois l’extrême droite battue, pour un rapprochement avec la France insoumise (FI) au sein d’un «  arc humaniste  ».

Vous appelez à battre l’extrême droite tout en disant que «  les castors sont fatigués  » de construire des barrages. Pensez-vous que celui de dimanche tiendra  ?

Je ne sais pas. Je mettrai un bulletin Macron, sans l’ombre d’un doute. Je n’oublie pas ce qu’est l’extrême droite, qu’elle avance toujours cachée, qu’elle monte en agitant les peurs… C’est la première des luttes  : l’histoire nous apprend que la part sombre de l’humanité ne disparaît jamais.

Sur l’écologie, Emmanuel Macron dit s’être «  transformé  ». Le croyez-vous  ?

C’est du foutage de gueule  ! Il dit ce qu’on attend, mais ne l’a pas fait depuis cinq ans. J’attendais aussi qu’il donne des mesures concrètes sur les retraites, le RIC, le RSA, l’assurance-chômage, un référendum sur la convention citoyenne sur le climat… Avec le grand débat des gilets jaunes et le Covid, il nous avait déjà fait le coup  : rien ne devait plus être comme avant. Et pourtant…

Jean-Luc Mélenchon a demandé aux Français de l’élire premier ministre aux législatives. Poussez-vous en ce sens  ?

Grâce au travail de la France insoumise, il a rassemblé des millions d’électeurs. De fait, il y a eu une démarche unitaire dans les urnes. C’est donc une logique pragmatique qui peut donner un débouché positif. Je souhaite que Jean-Luc Mélenchon, tout en disant que ça nous tord les tripes, appelle à voter Macron. Mais il doit aussi donner une perspective en annonçant pouvoir prendre la tête d’une coalition en juin. Il est en capacité de structurer l’arc humaniste. C’est un changement par rapport à 2017, où tout avait été très dur avant et pendant les législatives. Aujourd’hui, il y a cette responsabilité assumée d’ajouter des chaises autour de la table pour fédérer largement. C’est à ceux qui sont arrivés en tête de prendre l’initiative.

Au regard du premier tour, pensez-vous toujours que l’écologie est le pivot de cet «  arc humaniste  »  ?

L’écologie en tant que parti, peut-être pas. Mais l’écologie en tant qu’idée, oui. Car c’est le projet qui se demande comment garantir les sécurités, comment chérir les biens communs et le vivant, comment nourrir le désir d’émancipation et de justice. Les programmes de Jean-Luc Mélenchon et de Yannick Jadot étaient assez similaires sur la question.

Pendant la campagne, EELV a exprimé de vifs désaccords avec Mélenchon sur les questions internationales et a aussi été accusé de l’avoir empêché d’atteindre le second tour. A-t-il des comptes à rendre, comme le demande la FI  ?

Je suis resté en dehors de ça jusqu’ici et je continuerai. Pourquoi y a-t-il eu un candidat écologiste et un communiste  ? C’est comme ça. La réalité est qu’il s’agit d’une défaite de plus qui a, tout de même, soulevé des millions de personnes qui ont voulu, sans succès, faire barrage à Le Pen dès le premier tour.

La gauche pèse à peine 32 % des voix. Comment analysez-vous le scrutin  ?

Quand je me suis engagé en politique, je disais que le paysage allait se structurer en trois espaces  : le bloc réactionnaire d’extrême droite, un bloc néolibéral de plus en plus autoritaire et un arc humaniste autour de l’écologie. Nous y sommes. Les blocs sont de taille relativement égale, le nôtre est donc en capacité de peser. Maintenant, à nous de proposer un projet de société et de mener la bataille culturelle. Je rejoins l’analyse de François Ruffin  : dans cette élection, Jean-Luc Mélenchon a su mobiliser dans les quartiers populaires mais il manque une étape, celle des territoires péri­urbains et ruraux. Si Marine Le Pen est en tête dans 20 000 communes, ce n’est pas pour rien. Beaucoup de gens vivent dans la peur de l’après, et la colère monte. Notre rôle est de proposer des modes de vie prospères qui ne soient ni le fruit d’une domination, ni d’une destruction du vivant, ni d’une captation des profits. Voilà pour le cap.

Vous avez été en retrait en 2022. Était-ce une façon de vous mettre à distance de la ligne et de la stratégie portées par Yannick Jadot  ?

J’ai répondu présent quand on a fait appel à moi. J’ai fait loyalement campagne au service du candidat. Lors de la primaire, un choix démocratique a été fait et je l’ai suivi sans me poser de question, mais sans me travestir. À la primaire, je me suis battu pour construire l’arc humaniste, mais j’ai perdu. Depuis, personne n’a fait ce travail. Yannick Jadot a mené campagne avec ses forces et sa cohérence.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message