Jean Jaurès, une exemplarité centenaire

samedi 12 juillet 2014.
 

On n’a pas toujours les héritiers que l’on mérite. La pensée et l’action de Jean Jaurès ont connu des revendications plus ou moins inattendues. Comme celle du FN, qui par voie d’affiches électorales, proclamait que le fondateur de L’Humanité aurait voté Front national. Aussi grotesque qu’indécent, car comme on le sait, le combattant pour la paix de la Grande Guerre a été assassiné le 31 juillet 1914 par un étudiant chauffé à blanc par le poison nationaliste, fonds de commerce de la famille Le Pen. Mais ce sont aussi les tentatives de récupération de François Hollande venu proclamer à Carmaux sous les huées que sa politique avait pour boussole de « suivre le cap de Jaurès » ou celle de Manuel Valls qui a sous-entendu que le député du Tarn aurait voté le pacte de responsabilité… Un documentaire, « Jaurès est vivant ! » programmé sur Arte le 8 juillet à 20.50 (et visible en replay durant une semaine sur le site de la chaîne) vient opportunément évoquer le grand homme.

Il n’était pas prédestiné à devenir un des porte-parole de la classe ouvrière. Ses débuts politiques se sont même déroulés sous les auspices tranquilles d’un républicanisme bon teint, dans l’environnement immédiat de Jules Ferry. Mais en accompagnant les mineurs de Carmaux en lutte pour la réintégration de l’un des leurs, renvoyé pour avoir été élu maire de la ville et avoir vouloir voulu exercer ses mandats, il va découvrir les limites de la république sans le socialisme et choisir son camp (Arte rediffuse le 11 juillet à 20.50 et en replay durant 7 jours sur son site un biopic de France Télévision autour de cette radicalisation, « Jaurès – Naissance d’un géant », avec Philippe Torreton pour interprète).

Agrégé de philosophie, journaliste, un des plus grands orateurs français, cet homme de mots n’en sera pas la dupe et restera étranger à tout dogmatisme, toujours attentif à la réalité. Ainsi, l’affaire Dreyfus le voit d’abord fustiger sous la pression de l’esprit du temps « la formidable puissance juive pour sauver l’un des siens ». Mais les failles et les incohérences de l’accusation le font changer d’avis. Il prend dès lors fait et cause pour le condamné et s’échine à souligner l’enjeu du combat à ses camarades qui n’y voient qu’une affaire de bourgeois. On le voit multiplier ensuite les fronts, celui de l’unité des socialistes, de la question éducative, de l’opposition à la peine de mort, de la paix contre la guerre qui monte et dont il sera une des premières victimes… « Jaurès est vivant ! » proclame ce documentaire de Jean-Noël Jeanneney et Bernard Georges en chœur avec les intervenants qu’ils ont réunis. Assurément, par ses combats toujours d’actualité mais aussi par ce mélange d’idéal et de réalisme, de réformisme et de révolution, de patriotisme et d’internationalisme qui ont caractérisé l’homme, admirable, et le politique, exemplaire.

Jean-Luc Bertet


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