Retraites  : l’été 2013 de tous les coups en douce

mardi 20 août 2013.
 

Le gouvernement multiplie les ballons d’essai sur le financement des pensions. À maintes reprises, il a exposé la piste d’une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) comme «  incontournable  ». Une perspective qui ne pourrait que réjouir le patronat, dont les caisses seraient une fois de plus épargnées…

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Pas d’accalmie sur le front des retraites, même au cœur du mois d’août. Alors qu’il doit présenter son projet de réforme aux syndicats dès la fin du mois, le gouvernement semble se saisir de la trêve estivale pour multiplier les ballons d’essai, testant ainsi l’opinion. Sur fond de chiffrages catastrophistes – d’ici à 2020, le besoin de financement est estimé à 7,5 milliards d’euros pour le régime général, 20 milliards pour l’ensemble des régimes –, l’idée d’augmenter la contribution sociale généralisée (CSG), créée en 1990 par Michel ­Rocard, commence à trotter dans les têtes de nombreux dirigeants socialistes. Déjà développée à l’automne par Louis Gallois dans ses propositions sur la «  compétitivité  », cette mesure a été préconisée dans le rapport Moreau, remis en juin. Mais après avoir combattu, dans l’opposition, le principe de la TVA sociale mise en place par l’UMP, le PS peut-il, une fois au pouvoir, se rallier purement et simplement à ce transfert, via la CSG, du financement de la protection sociale de la cotisation à l’impôt  ?

Tout en assénant que la réforme des retraites ne devra pas être «  brutale  », Marisol Touraine, la ministre de la Santé, chargée de présenter un projet sur les retraites avant les arbitrages au sein du gouvernement d’ici à la fin août, a indiqué que l’augmentation éventuelle de la CSG pour combler les déficits des régimes de retraite est, à ses yeux, «  une option qui a assurément une forte cohérence  ». De manière plus claire encore, Bruno Le Roux, le patron des députés PS à l’Assemblée, ne veut pas voir «  écartée  » l’hypothèse d’une hausse de la CSG, tout en promettant d’«  examiner comment les entreprises vont participer  ».

Grever le pouvoir d’achat

Tout le problème est là  : comment faire participer le capital au financement des retraites  ? Rien ne sera arbitré avant la fin du mois, affirme-t-on au gouvernement, mais le rendement de la CSG obnubile tout le monde. «  En 2011, elle a rapporté 92 milliards à la ­Sécurité sociale, anticipe Pierre Ramon-Baldié, directeur adjoint de l’École nationale supérieure de Sécurité sociale. Si on l’augmente d’un point, ça rapportera 12,4 milliards de plus.  » L’alignement qui découlerait de cette application, à savoir le rapprochement de la CSG des retraités (6,6 %) sur celle des actifs (7,5 %) pour financer les droits nouveaux (apprentissage, pénibilité…) n’est pas du goût de certains syndicats. «  Nous considérons qu’une augmentation de la CSG serait totalement contre-productive, dégradant encore davantage le pouvoir d’achat des actifs et des retraités, abaissant le niveau de consommation déjà très bas, a averti la CGT dans un communiqué ces derniers jours. In fine, cette augmentation ne ferait que conforter la spirale des destructions massives d’emplois.  »

Le Medef se frotte les mains

Le gouvernement estime qu’une augmentation de la CSG, parce qu’elle met «  à contribution l’ensemble des revenus  », serait un dispositif «  plus de gauche  » que la TVA, qui frappe directement les plus modestes. Mais en fait, c’est bel et bien le Medef qui se frotte les mains. Dans un savant théâtre d’ombres, le patronat feint d’accepter une hausse très légère des cotisations contre la promesse de l’augmentation de la CSG, et donc d’une érosion toujours plus importante du financement des retraites par les entreprises… Et du côté du gouvernement, selon des indiscrétions, on se félicite que le Medef accepte d’envisager une augmentation symbolique des cotisations contre la hausse de la CSG.

Cette hypothèse confirme l’intention de François Hollande de ne pas mettre à contribution les revenus financiers pour maintenir la pérennité de notre système de retraite, solidaire et à prestations définies, alors que les Français sont largement favorables à cette idée. Il demeure ainsi sourd aux solutions de financement alternatives portées depuis plusieurs mois par les syndicats CGT, FSU, Solidaires et FO et plusieurs collectifs citoyens, politiques et étudiants (La retraite, une affaire de jeunes, collectif retraites 2013). Faute, une nouvelle fois, de voir leurs inquiétudes et leurs propositions entendues, ces organisations syndicales rappellent leur mot d’ordre le 10 septembre pour «  une grande journée de manifestations et de grèves ­interprofessionnelles pour nos salaires, nos emplois et notre retraite  ».

QUID DE LA PÉNIBILITÉ  ? Les syndicats craignent depuis le début une réforme cosmétique 
et restrictive de la pénibilité. La semaine dernière, Marisol Touraine, reprenant le rapport Moreau, a confirmé la création de «  comptes pénibilité  » pour les salariés afin de conditionner un départ 
à la retraite anticipé. Les employeurs devraient avoir à payer 
une surcotisation pour financer un dispositif estimé à 2 milliards d’euros. Les salariés obtiendraient un point par mois d’exposition 
à un travail pénible, ces bonifications seraient plafonnées.

Nicolas Dutent avec T. L.


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