ESPAGNE : PAS DE REPIT POUR LE PEUPLE ! (Article national du Parti de Gauche)

mardi 27 décembre 2011.
 

Un mois après son élection Rajoy prononçait lundi son discours d’investiture à la chambre des députés pour les fonctions de chef de gouvernement qu’il a prises mercredi annonçant en même temps les noms des membres de son gouvernement. Pas de surprise. Au programme : politique d’ajustement par des réformes structurelles en matière de services publics et de droit du travail pour annihiler tout ce qui restait d’Etat social en Espagne.

Rajoy : serviteur de la Troïka

Peu avant les élections Rajoy écrivait sur le site du PP : "Nous serons un gouvernement sérieux qui s’acquittera de ses obligations envers l’UE". Lors d’une conférence de presse de la Commission européenne juste après la victoire du PP, en compagnie de Barroso, le vice-président Olli Rehn expliquait aux journalistes : « L’Espagne a déjà pris des décisions très significatives pour la consolidation fiscale, particulièrement cette dernière année. Il y a maintenant une claire nécessité d’avancer dans des réformes structurelles, surtout en ce qui concerne le marché du travail ». C’est tout à fait ce qu’a annoncé Rajoy lors de son discours d’investiture : nouvelle casse des services publics et réforme du travail dans la droite ligne de son prédécesseur Zapatero.

Le gouvernement Zapatero a ouvert la voie

Le programme du PP suit les traces de la politique de son prédécesseur Zapatero qui en mai 2010 avait déjà fait voter un premier plan d’austérité de 50 milliards d’euros (gel des retraites, baisse de 5% puis gel du salaire des fonctionnaires, baisse des aides sociales, coupes dans la santé et l’éducation en vu de réduire le déficit public, baisse drastique des investissements publics, réforme des retraites qui provoqueront une grève générale en septembre 2010). A cette époque-là le PSOE fait le choix de l’austérité appelée rigueur et des politiques dictées par la Troïka. Cette politique sera couronnée par le vote en septembre de le « Règle d’or » (inscrivant dans la Constitution le principe du respect des 3% de déficit budgétaire) votée aussi par le PP provoquant une deuxième grève générale en septembre 2011, cycle qui se clôt par la déroute du PSOE aux élections de novembre perdant plus de 4,5 millions de voix. Rajoy légitimé par son élection décide donc d’accélérer et d’approfondir les contre-réformes. Lors du dernier sommet européen alors qu’il n’est pas encore investi il donne par l’intermédiaire de Zapatero qu’il a rencontré les garanties que l’UE attend.

La destruction des services publics

Lors de son discours d’investiture il annonce que son gouvernement coupera à hauteur de 16 milliards d’euros dans les Administrations publiques Il y aura 0 % de renouvellement du nombre de fonctionnaires. La loi de stabilité budgétaire viendra compléter en janvier prochain la « règle d’or » et ira plus loin en prévoyant pour 2020, un déficit de 0,4% du PIB en matière de déficit structurel et de 60% du PIB pour la dette publique. Pas d’annonce d’une nouvelle fiscalité pour renflouer les caisses ni de remise en question de la dette mais simplement un travail de coupes austères dans toute la fonction publique et tous les services publics. Moins d’Etat encore et toujours.

La flexibilité dans le travail

Rajoy annonce en plus une nouvelle loi pour mettre en place des réformes structurelles pour le marché de l’emploi comme le préconisait la Commission européenne. Place à la flexibilité, ce que tous les tenants du patronat souhaitent depuis des années. Flexibilité qui est accompagnée de « sa novlangue » de « formation tout au long de la vie ». Le gouvernement Zapatero avait déjà commencé le travail en septembre 2010 en créant un nouveau CDI avec des indemnités de licenciement réduites d’un tiers. Rajoy annonce en plus un nouveau type de négociation collective, branche par branche, pour mieux anéantir le droit du travail espagnol. Le tout pour, comme il le dit, "articuler droit au travail et compétitivité". Pour les travailleurs, ce sont des droits en moins et une précarité accrue. Sous le joli terme sournois de « flexi-sécurité », c’est l’insécurité au quotidien.

Rajoy pourra s’appuyer sur les gouvernements des Communautés Autonomes (récemment gagnées par le PP aux élections régionales de mai denier et sur celles gouvernées par le PSOE) pour articuler sa politique au niveau régional. Un exemple, celui de María Dolores de Cospedal, présidente de Castille-La-Manche

María Dolores de Cospedal : bras armé du PP et haine de l’Etat social

Lors de son discours, Rajoy explique que les communautés autonomes offriront « un éventail de bonne gestion des comptes publics » et que sera signé un « pacte pour l’austérité et l’efficacité » entre le gouvernement central et les régions en renforçant le « contrôle de la gestion publique » Celle gouvernée par Maria Dolores de Copsedal, numéro deux du PP, élue en mai dernier, est à l’avant-garde en matière de destruction de l’Etat Social. Déjà à peine élue, sa présidente formée sous la droite d’Aznar, annonce en août un premier plan d’austérité de 1815 millions d’économies soit 20% du budget de la région. Peu après l’élection, le 2 décembre elle annonçait un deuxième plan d’austérité pour réaliser 350 millions d’euros soit en tout 2 165 millions d’euros d’économies (59, 7 % des plans concernent la santé et l’éducation, deux domaines qui appartiennent aux compétences des autonomies, pour la santé 834 millions et pour l’éducation 460 millions) Elle annonçait aussi de nouvelles mesures comme la baisse de 3% du salaire brut des fonctionnaires, l’augmentation de la durée de la journée de travail des salariés de l’administration. A la mi-décembre, on apprend que 85 centres d’aides pour les femmes battues et 13 maisons des femmes fermeront au 1er janvier, faute de financement. Un exemple parmi tant d’autres des conséquences meurtrières de leur politique. Destruction des aides sociales, moins de services publics, place au privé ! On pourrait aussi parler de sa voisine Esperanza Aguirre dans la Communauté de Madrid, qui depuis quatre mois connaît des grèves dans l’enseignement primaire et secondaire.

Les beaux jours de la privatisation

Ces régions gouvernées par le PP sont à la pointe des partenariats publics/privés dans la santé en délégant au privé des pans entier de la santé. Les communautés Autonomes prévoient l’entrée de capital privé pour la construction de nouveaux hôpitaux. Madrid compte déjà des hôpitaux appelés « publics » totalement gérés par des capitaux.

Rajoy prévoit aussi de fournir aux usagers une liste des « services publics essentiels garantis ». Sous couvert d’être attaché à la notion « d’Etat de Bien-être » (« el Estado de bienestar ») le gouvernement Rajoy réduit à peau de chagrin les services aux personnes en les encourageant à avoir recours à des assurances et des complémentaires privées. Déjà des milliers d’espagnols se voient privés de leur droit à la santé en voyant leur carte de santé désactivée pour cause de chômage. Les gouvernements des régions PSOE/PP se renvoient la balle mais ces situations se multiplient.

Dans l’éducation, on procède à des coupes dans les budgets de l’école publique tandis que celui du privé se porte bien et on favorise la « Escuela concertada », l’école financée par des fonds publics et privés.

Le gouvernement annonce la privatisation des chaînes de télés publiques, la libéralisation du marché de l’énergie, la marchandisation de l’université par le plan de Bologne et Le plan Stratégie Université 2015 qui prévoit la mise en concurrence des Universités et l’entrée de capitaux privés. .

C’est bien simple, tout ce qui pourra être encore privatisé le sera.

Un gouvernement de la rigueur

Que dire du gouverment Rajoy ? Aucune surprise : on y retrouve des anciens ministres de Aznar comme Miguel Arias Cañete, député européen, ministre de l’agriculture de 2000 à 2004, il est reconduit à ce poste ; et surtout, après Mario Monti en Italie qui venait de Goldman Sachs, nous voilà en Espagne avec l’ancien dirigeant de Lehman Brothers en Espagne et au Portugal Luis de Guindos. Ceux qui on précipité les sociétés dans la crise se retrouvent aux manettes du pouvoir ! Quant aux banques, elles ont peu à craindre, Rajoy a parlé « d’assainissement du système financier »sans donner plus de détails hormis l’annonce de fusions de banques. Rien pour arrêter la spéculation sur la dette, rien sur un pôle public bancaire. D’ailleurs trois jours après son élection, Rajoy a rencontré les banquiers avec lesquels le PP a depuis longtemps maintenu une étroite relation comme Rodrigo Rato de Bankia et ex-ministre de Aznar, pour n’en citer qu’un, avant même de rencontrer qui que ce soit.

Le gouvernement Rajoy ne promet qu’une chose : faire payer la crise au peuple, détruire tout Etat social en le réduisant à ses fonctions régaliennes de maintien de l’ordre. Quelle société est promise aux espagnols ? La même que celle de la Grèce, faite de désespérance ?

Les « solutions » proposées par Rajoy et Zapatero ont fait la preuve de leur inefficacité pour sortir de la crise et elles ont prouvé leurs conséquences désastreuses pour les peuples à qui l’on ne promet que misère et souffrance comme ce fut le cas en Argentine. Et pourtant des solutions existent mais encore faut-il en avoir le courage de les formuler, le courage de « renverser la table » et de changer la donne : audit sur la dette, salaire maximum... Nous connaissons les solutions. Pour preuve de l’incompétence de Rajoy il propose comme « mesure phare » pour l’emploi d’un pays qui compte 5 millions de chômeurs dont 45 % de moins de 25 ans, d’exonérer de cotisations sociales les entreprises qui embauchent pour un an un jeune de moins de 30 ans. Cela a-t-il un sens ? Cela est-il sérieux ? Cela est-il efficace pour l’emploi de réduire les recettes de l’Etat et de la Sécurité sociale ? N’est-ce pas créer plus de déficit ? D’augmenter la dette ?...de poursuivre ce cercle infernal dans lequel est plongé les pays de l’Union Européenne qui abandonnent leur souveraineté aux mains de la finance.


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