Décembre 2010 : la presse française sonne la charge contre Jean-Luc Mélenchon coupable d’avoir quitté la salle du Parlement européen au moment où celui-ci décernait son "prix Sakharov" (sensé récompenser un défenseur distingué des droits de l’homme, de la liberté de penser) à Guillerno Farinas, "dissident cubain".
J’approuve totalement cette attitude du président du Parti de gauche, et ce, pour plusieurs raisons :
* 1) La situation en Amérique latine :
C’est la 3ème fois en 9 ans que le Parlement européen emboîte le pas à la CIA pour décerner le prix Sakharov à un anticastriste. Pourquoi braque-t-il ainsi les projecteurs médiatiques sur Cuba alors que les pays alliés des Etats Unis en Amérique latine violent les droits de l’homme de façon bien plus massive et bien plus ignoble ?
Qu’avons-nous appris dans les jours précédant ce choix ?
Une fosse commune a été découverte près d’une base militaire colombienne liée à l’armée américaine, comprenant 1505 corps de civils assassinés par la soldatesque. Si cela s’était passé à Cuba, que n’aurions-nous entendu de la part des journalistes prétendus "indépendants" !!!
Au Honduras, en 2010, Human Rights Watch a comptabilisé 47 attaques individuelles violentes dont 18 assassinats de journalistes, de défenseurs des droits de l’homme, de syndicalistes... "Les assassinats, menaces et attaques constants ont fomenté un climat de peur et d’intimidation qui a compromis l’exercice des droits élémentaires au Honduras" précise cette association. Quatre juges ont été limogés pour des raisons indignes comme participation à une manifestation ou propos individuel opposé au coup d’état. Suite à des menaces provenant de l’armée elle-même le directeur du canal 5 de télévision a préféré démissionner ; cela n’a pas empêché qu’il soit assassiné par un groupe armé.
Si cela s’était passé à Cuba, que n’aurions-nous entendu de la part des journalistes prétendus "indépendants" !!!
Cette situation n’est pas nouvelle. J’ai 62 ans et toute ma vie j’ai connu l’Amérique latine comme une chasse gardée des multinationales étatsuniennes, un terrain d’installation de dictatures et du fascisme militaire par les USA et leurs alliés.
Quel pays a réussi à conserver intacte durant tout ce temps la flamme faible de la souveraineté nationale et d’un espoir de réponse aux aspirations populaires face aux USA ? Cuba.
Cuba n’est pas une dictature !
Quel pays le Parlement européen choisit-il de dénoncer comme attentatoire aux droits de l’homme ? Cuba.
Pour décerner son prix Sakharov, le Parlement européen a fait le choix idéologique de fermer les yeux sur le fascisme militaire et de vilipender un Etat se présentant comme socialiste. La même cécité est notée par les historiens concernant les Jeux olympiques de Berlin en 1936.
* 2) Le Parlement européen aurait pu faire un autre choix puisqu’il avait déjà deux fois récemment marqué Cuba au fer rouge de son indignation sélective.
* En 2010, Birtukan Mideksa, ancienne juge éthiopienne, leader de l’opposition, condamnée à la prison à vie en 2008, pour avoir dénoncé l’emprisonnement des opposants dans son pays, méritait ce prix Sakharov décerné pour défense de la liberté de penser indépendamment des évolutions judiciaires très récentes ne changeant rien sur le fond.
* En 2010, l’association Breaking the Silence, créée en 2004 par des soldats israéliens et des anciens combattants pour « montrer au public israélien la réalité de l’occupation israélienne vue à travers les yeux des soldats" méritait tout autant ce prix Sakharov décerné pour défense de la liberté de penser. Mais cela aurait déplu au grand frère US.
* D’après le Département d’Etat étatsunien, le Mexique fait partie des 3 pays les plus dangereux de la planète avec l’Afghanistan et l’Irak. Parmi les journalistes actuellement menacés de mort pour leur quête de vérité, figure la journaliste mexicaine Anabel Hernandez. Si le prix Sakharov lui avait été décerné, elle aurait ainsi trouvé une petite protection (voir ajout en note).
* A titre personnel, je pense que le Parlement européen (s’il avait une once de souci démocratique) aurait dû décerner le prix à un des opposants au régime fasciste hondurien, emprisonné ou mort ; ça, ça aurait eu de l’allure.
* 3) L’Union européenne fait effectivement preuve d’un acharnement contre Cuba sur lequel nous avons déjà mis en ligne plusieurs articles :
Cuba : Pourquoi cet acharnement irrationnel ? (Danielle Mitterand)
Les sanctions dictées en 2003 par l’Union européenne contre le gouvernement cubain sont infondées
Pourquoi l’Union européenne s’aligne sur la politique agressive des USA contre Cuba
* 4) Ne pas soutenir le choix effectué par le Parlement européen pour son prix Sakharov ne signifie pas avaliser tout ce qui se passe à Cuba. Il est évident que l’ignoble blocus imposé par les USA depuis cinquante ans contre cette île, en contradiction avec les résolutions votées par l’ONU, y a rendu difficile la vie économique, sociale et démocratique. Il est évident que le "socialisme" pratiqué à Cuba ne correspond pas sur plusieurs questions importantes au type de société auquel nous aspirons en France. Cependant, face au mépris total des droits de l’homme pratiqué par le "camp occidental" pro-américain contre Cuba, par exemple par l’internement inadmissible actuel de 5 citoyens de cette île aux USA, Jean-Luc Mélenchon a choisi courageusement de ne pas hurler avec les hyènes de l’anti-socialisme primaire... je l’en félicite.
* 5) L’équipe dirigeante du Nouvel Observateur choisit une ligne éditoriale extrêmement hostile vis à vis de Jean-Luc Mélenchon. Ignore-t-elle que le nombre d’adhérents du PG abonnés à leur hebdomadaire est significatif, au vu de ma connaissance du réseau en Midi-Pyrénées ? Elle me paraît mettre un signe d’égalité entre l’audience sondagière de DSK et le lectorat régulier du Nouvel Obs. Le résultat risque fort de les décevoir.
Jacques Serieys
Note complémentaire concernant Anabel Hernandez
Sur ce point, L’Express a publié le 24 décembre 2010 un article intéressant accessible à cette adresse :
http://www.lexpress.fr/actualite/mo...
Ci-dessous, quelques articles de presse et positions exprimées ces derniers jours :
Source : J. Quatremer (Libération)
Mis à jour à 22 heures (voir la note)
Tout à l’heure, l’ancien sénateur socialiste et actuel député européen du Front de gauche, a quitté l’hémicycle de Strasbourg en compagnie de quelques élus de son groupe (GUE, gauche communiste) au moment de la cérémonie de remise du prix Sakharov (qui récompense les défenseurs des droits de l’homme) au journaliste cubain, Guillermo Farinas. Un dissident cubain récompensé, un journaliste qui plus est, voilà qui est insupportable pour cet admirateur de Fidel Castro et de Hugo Chavez.
Un geste d’autant plus curieux que ce dissident qui défend les libertés publiques à Cuba était absent, le régime castriste lui ayant interdit de quitter l’île : tout comme lors de la remise du prix Nobel de la paix au dissident chinois, Liu Xiaobo, la cérémonie s’est déroulée devant une chaise vide. Pour José Bové, d’Europe Écologie, « ce geste était d’autant plus stupide que l’absence de Farinas montre bien quelle est la nature du gouvernement cubain ».
Ce cyberjournaliste de 48 ans, directeur de l’agence illégale Cubanacan Press et membre du mouvement clandestin "Alliance démocratique cubaine", s’est fait notamment connaître en faisant une grève de la faim de 135 jours pour réclamer la libération de prisonniers politiques. Il l’avait suspendu le 8 juillet dernier après l’annonce de la libération par le président cubain Raul Castro de 52 d’entre eux au terme d’une médiation de l’Église catholique.
Dans un message enregistré, Farinas a déclaré aux députés européens que son « plus grand espoir est que vous n’écoutiez pas le chant des sirènes d’un régime cruel de « communisme sauvage » ». « L’unique aspiration (du régime castriste) après avoir simulé des changements économiques imaginaires, est que l’Union européenne et le Parlement lèvent la position commune (de 1996 qui lie le dialogue politique au respect des droits de l’homme) pour qu’ils puissent bénéficier des crédits et des investissements ». A la fin de ce discours, tous les députés présents se sont levés pour l’applaudir. Sauf les députés du groupe communiste encore présents... Députés qui sont aussi restés assis, en compagnie du Front national, lorsqe l’hymne européen a été joué.
« Qu’ils s’en aillent tous », clame le populiste Mélenchon dans son dernier ouvrage. Manifestement, cette injonction ne vise pas que l’élite, mais aussi ceux qui s’opposent aux amis politiques de l’ancien sénateur socialiste. Une grande leçon de démocratie qui laisse présager la façon dont cet homme envisage l’exercice du pouvoir.
P.-S. J’ai cherché à joindre Jean-Luc Mélenchon. Pour l’instant en vain. Dès qu’il me rappelle, je vous tiens au courant.
Note : A 22 Heures, toujours pas de rappel. Voici ce que ma consoeur de l’AFP qui est à Strasbourg a recueilli comme réaction : "Je désapprouve ce prix qui entre dans les rites, les ritournelles du Parlement. C’est la troisième fois qu’un Cubain reçoit ce prix de la part d’un Parlement qui n’a pas trouvé une minute pour condamner le coup d’Etat au Honduras, et ne s’est jamais intéressé aux Cinq de Miami". Les "Cinq de Miami" ou "Cinq de Cuba" sont cinq espions cubains, arrêtés en 1998 à Miami et condamnés trois ans plus tard à des peines allant de 15 ans à la perpétuité par un tribunal de Miami (Floride), au terme d’un procès jugé inéquitable selon leurs avocats et le régime castriste. "Le Parlement européen est embrigadé dans des croisades anticommunistes qui m’exaspèrent. Ca ne veut pas dire qu’on approuve l’emprisonnement, ça veut dire qu’on désapprouve la manière dont le Parlement est bienveillant pour des dictatures fascistes, et malveillant vis-à-vis du camp progressiste". Et ça justifiait de boycotter la remise du prix à un dissident cubain ?
Rédigé le mercredi 15 décembre 2010 à 18:56
C’ est d’abord le télescopage de deux mots, " mélancolie " et " ronchon "... en s’accommodant d’une voyelle.
Sa mine, grise et triste, porte toute la misère du monde et de la mondialisation, sans que sa gouaille et le ton de sa voix viennent tempérer ses imprécations.
Sa mélancolie affichée, qui n’a pas la densité du spleen baudelairien, est aggravée par une bonne dose de ronchonneries, confortant son allure de rouspéteur et de mauvais coucheur.
Mais Mélenchon pourrait tout aussi bien être le nom d’une nouvelle chimère, ce monstre mythologique qui jette du feu par la gueule et est pourvu d’une tête et d’un poitrail de lion, d’un ventre de chèvre et d’une queue de dragon, tant il apparaît que cette chimère politique emprunte ses attributs à divers animaux du bestiaire électoral.
François Blocquaux, Paris
Source : http://aubry.var.over-blog.com/arti...
Jean Quatremer, son blog ... Aujourd’hui, un article sur Mélenchon et Cuba
A lire régulièrement, le blog « Blog Coulisses de Bruxelles, UE » de Jean Quatremer.
Aujourd’hui, Jean Quatremer, relate une attitude qui peut être considérée « déconcertante » ou « volontaire » mais en tout cas étrange par rapport à ce que l’on peut attendre d’un homme de gauche soucieux des Droits de l’Homme.
Jean-Luc Mélenchon aime la dictature cubaine et le montre
« Le député européen du Front de gauche a quitté l’hémicycle de Strasbourg au moment de la remise du prix Sakharov (qui récompense les défenseurs des droits de l’homme) au journaliste cubain Guillermo Farinas. … "
Ne manquez pas de lire la suite sur : http://bruxelles.blogs.liberation.f...
Alors que le Parlement européen remettait mercredi le prix Sakharov au dissident cubain Guillermo Farinas, Jean-Luc Mélenchon et les eurodéputés communistes français ont quitté l’hémicycle. Invitée du 19h de Public Sénat, l’ex Garde des Sceaux et députée PS Elisabeth Guigou n’a pas caché sa consternation.
Elisabeth Guigou a beau reconnaître que Jean-Luc Mélenchon a été « un bon ministre » et qu’il a du « talent », mais il est des comportements que la députée PS de Seine-Saint-Denis « ne comprend pas ». L’ex Garde des Sceaux a vivement critiqué l’attitude du président du Parti de Gauche au Parlement européen mercredi. Ce dernier ainsi que l’ensemble des eurodéputés communistes ont en effet quitté l’hémicycle alors que le dissident cubain Guillermo Farinas se voyait remettre le prix Sakharov pour la liberté de penser.
« Je désapprouve ce prix (…). Le Parlement européen est embrigadé dans des croisades anticommunistes qui m’exaspèrent », a déclaré Jean-Luc Mélenchon. « Là franchement, ça me dépasse. Je ne comprends pas », a réagi Elisabeth Guigou, qualifiant de « mauvais geste » l’attitude du Parti de Gauche. « Je le déplore, je suis consternée », a-elle-ajouté, rappelant que « Le Parlement européen récompense quelqu’un qui se bat pour les libertés (…).
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