A l’issue du dernier Conseil National (1), j’ai mangé en compagnie de Pascale Le Néouanic, Magali Escot, Jean-Luc Mélenchon et René Revol. Le premier plat se faisant attendre, Jean-Luc demanda soudain "Parmi vous, qui est prêt à se réclamer de Robespierre ?" Ayant aussitôt répondu "Moi, à préciser", je crois utile de justifier mon point de vue même s’il était exprimé hors de tout cadre politique formalisé.
Cette réflexion présente un intérêt supérieur pour notre force politique. La république sociale nous sert de programme et de projet. Comme référence historique, elle ne peut se penser sans la Révolution française et particulièrement sans Robespierre et la Convention montagnarde.
J’ai bien souvent chanté L’Internationale (Il n’est pas de sauveur suprême / Ni Dieu, ni César, ni tribun) et ne propose Robespierre ni comme Dieu, ni comme César, ni comme tribun. Tout au plus, une personnalité forte, honnête, engagée, parfois dans l’erreur, parfois indécise au cours d’une grande révolution imposant chaque jour de nouveaux défis et de nouveaux choix.
Je n’ai ni la compétence, ni le temps, ni la documentation disponible pour écrire un texte à la hauteur du besoin. Je veux seulement apporter ici ma contribution face aux arriérés (y compris certains "historiens") qui le noircissent pour dénigrer à travers lui toute perspective d’émancipation sociale et démocratique.
Cet article est construit autour de la vie de Robespierre en trois grandes parties. Je rédigerai la quatrième plus tard en lien avec l’étude de la Convention montagnarde.
A) Robespierre avant 1789
B) Maximilien Robespierre, conscience éclairée du peuple dès 1789
C) Robespierre de 1790 à 1792, révolutionnaire actif, défenseur du peuple...
D) Robespierre au coeur du pouvoir politique en 1793 1794
Notre lecteur intéressé pourra aussi lire un texte complémentaire sur :
Quand la tête de Robespierre tombe de la guillotine, il vient d’avoir 35 ans. Ses qualités lui ont déjà permis de peser sur l’histoire humaine au point qu’il en restera pour longtemps une personnalité majeure, particulièrement dans les milieux progressistes et socialistes. Pourquoi ? C’est probablement Mirabeau qui a trouvé la réponse dès 1789 « Il ira loin ; il croit tout ce qu’il dit ». Effectivement, la sincérité de ses convictions construite sur la connaissance des malheurs populaires, sur une riche culture et sur beaucoup de travail lui a donné, au coeur d’une révolution où les traîtres n’ont pas manqué, une place particulière, celle de l’Incorruptible.
A1) Famille et enfance
Il naît à Arras le 5 mai 1758. Sa mère décède en couches en 1764, son père délaisse ses enfants, s’endette et disparaît définitivement à l’étranger quelques mois après le décès de son épouse. Le jeune Maximilien connaît à six ans, la condition difficile d’un aîné conscient de ses responsabilités vis à vis de ses frère et soeurs Augustin, Charlotte et Henriette. Durant la seconde moitié du 18ème siècle, plus d’un enfant sur dix est également orphelin de mère ou père avant sa dixième année.
La famille de Maximilien Robespierre s’apparente à la bourgeoisie à talents (hommes de loi, enseignants, médecins) par son père, au milieu populaire par sa mère (aubergistes non fortunés).
Si nous entendons par "bourgeoisie" la classe sociale propriétaire des moyens de production et d’échange dans le mode de production capitaliste, y intégrer le jeune Maximilien constituerait un contresens. Aucun armateur commerçant avec les îles, aucun fermier général, aucun industriel... dans sa parentèle.
Cependant, Maximilien fait bien partie de la petite et moyenne bourgeoisie provinciale d’Ancien régime. Ainsi, le statut social aisé de ses tantes paternelles lui ouvre des portes pour ses études, indice de ce milieu qui cherche une promotion pour ses enfants dans les services, l’administration et l’armée.
A2) De bonnes études dans des collèges prisons
Placé sous la responsabilité de ses grands parents maternels, aubergistes de profession, (décédés avant sa fin d’études), il connaît surtout des pensionnats dont il sort peu, le collège épiscopal d’Arras de 1765 à 1769 puis le collège de Clermont durant douze ans. Cet établissement parisien (actuellement lycée Louis le Grand) présente alors tous les aspects austères et cléricaux des collèges d’Ancien régime : messe quotidienne, rôle permanent de la prière (au début des cours et études, en fin de repas et fin de journée), du catéchisme et de la confession, usage courant du latin dans l’enseignement, surveillance des lectures et conversations entre élèves. Maximilien est handicapé par le règlement sévère et élitiste concernant l’habillement « Ils ne porteront point d’habits déchirés... ils changeront de linge plusieurs fois par semaine », lui qui doit se satisfaire de vêtements élimés et de chaussures trouées.
Ces dernières années plusieurs psychiatres et autres professionnels de la psychologie ont publié des études concernant le poids de l’enfance de Maximilien sur la formation de sa personnalité. Un point (au moins) mérite d’être relevé : le père s’étant volatilisé, les grands parents maternels manquant de moyens financiers et d’envergure, Maximilien construisit son ego en référence aux personnages souvent mythifiés rencontrés dans la littérature classique.
Il est vrai que celle-ci a nourri sa pensée : Plutarque, Cicéron, Salluste mais aussi Montesquieu, Mably, Rousseau, Condillac, les théoriciens du droit naturel...
A3) L’empathie de l’avocat Robespierre pour les milieux populaires en souffrance
De 1782 à 1789, Maximilien Robespierre exerce la profession d’avocat et de juge dans l’Artois. Malgré la diversité des affaires qu’il traite, il fait preuve d’une grande sensibilité aux injustices, d’une grande cohérence dans ses aspirations démocratiques.
Les premiers "opprimés" auxquels il apporte son soutien sont opposés à des moines. Un religieux d’Anchin, Dom Brogniard, poursuit de ses avances empressées Clémence, la lingère de l’abbaye. Ne parvenant pas à ses fins, il accuse le frère de celle-ci François-Joseph Deteuf de lui avoir volé 262 louis. Robespierre défend les Deteuf d’août 1782 au 26 avril 1783. Pécuniairement, il gagne peu dans cette affaire ; par contre il conquiert une réputation d’intégrité et de détermination face aux injustices. Convaincu de détournements, accusé pour ses mœurs dissolues, Dom Brogniard est destitué puis emprisonné. Voici quelques phrases prononcées à cette occasion par Robespierre :
« O ! nous tous qui nous glorifions du titre de citoyens, si l’honneur, si la liberté, si la vie même, si tout ce qu’il y a de plus doux et de plus sacré parmi les hommes est de quelque prix à nos yeux... Demandons que les lois soient faites pour tous ; que toute injustice soit réparée, quels que soient l’état et la qualité de celui qui l’a commise ».
A4) Robespierre, enfant d’une période de montée révolutionnaire
Durant les années 1773 à 1789, le jeune Maximilien évolue dans un contexte qui va peser sur la formation de sa personnalité. L’aspect le plus important est la longue période de montée puis d’explosion révolutionnaire qui touche l’Europe et même le monde.
->Tout le dernier tiers du 18ème siècle est marqué par des explosions sociales bien plus radicales et nombreuses que les révolutions de 1848 (plus idéologiques, plus nationales...) ou même que les mouvements des années 1968 : soulèvement indien des Grands lacs au Canada (1763), révolte des Cosaques du Iaïk, dans l’Oural (1766), émeute de Moscou (1770), immense révolte en Russie de serfs, de cosaques et d’ouvriers (1773 à 1775), guerre des farines en France et révolte paysanne en Bohême (1775), insurrection de Tupac Amaru 2 au Pérou (1780 1781), émeutes de Londres, soulèvements en Transylvanie (1784), révolte des comuneros en Nouvelle Grenade (Colombie, Équateur, Panama, Vénézuéla, Guyana, Trinidad et Tobago)...
La violence sociale atteint en France un niveau surprenant avec plusieurs milliers d’émeutes entre 1780 et 1789. Même des milieux aisés comme les réseaux francs-maçons de la Cour de Louis XVI comprennent de plus en plus les souffrances populaires comme une injustice à réparer. Dans certains milieux démocrates, les luttes populaires apparaissent déjà comme un enjeu progressiste.
-> Le second aspect important de cette phase de montée révolutionnaire entre 1773 et 1789, c’est la crise économique qu’elle révèle, la crise politique et institutionnelle qu’elle génère. Des luttes démocratiques et de libération nationale éclatent sur tous les continents : en Corse, Nouvelle-Orléans (1768), Boston (1768 à 1773), en Pologne, en Irlande, dans l’Oural, la guerre d’Indépendance des USA, Pays Bas espagnols...Plusieurs souverains "éclairés" essaient d’y répondre par des réformes modernisatrices ; tel est le cas par exemple de la Toscane, de l’Angleterre, de la Russie, de la Suède et même de la Prusse et de l’Autriche-Hongrie. Cette atmosphère continentale de mise à plat des réformes nécessaires pousse à des débats de société dans lesquels Robespierre s’insère avec délectation.
La révolution batave de 1781 à 1787
->Le troisième aspect important de cette phase de montée révolutionnaire, c’est le développement d’un mouvement idéologique critique, celui des Lumières
18ème : Siècle des Lumières, progressistes mais datées
La poussée révolutionnaire citoyenne déstabilise peu à peu les pouvoirs en place, particulièrement en France et les régions voisines (Wallonie, vallée du Rhin, Suisse, Italie du Nord, Catalogne...)
La révolution brabançonne (1787 à 1790)
A5) Homme de loi du temps des Lumières
Un poète artésien dresse son portrait en 1787 :
Robespierre toujours le même
Contre les préjugés dirigeant ses efforts
Robespierre s’est effectivement beaucoup battu contre les préjugés avant 1789. En 1780, un avocat connu pour son athéisme, fait placer sur le toit de sa maison un paratonnerre en forme de glaive pointé vers le ciel. Une mobilisation des conservateurs pousse les élus locaux à faire retirer ledit paratonnerre dont le propriétaire porte l’affaire en justice avec pour avocat le jeune Robespierre (18, 19 ans en 1783). Citons un paragraphe de sa plaidoirie typique du courant des Lumières.
" Les Arts et les Sciences sont le plus riche présent que le Ciel ait fait aux hommes ; par quelle fatalité ont-ils donc trouvé tant d’obstacles pour s’établir sur la terre ? Pourquoi faut-il que nous ne puissions payer aux grands Hommes qui les ont inventés ou conduits vers la perfection, le juste tribut de reconnaissance et d’admiration que leur doit l’humanité entière, sans être forcés de gémir en même temps sur ces honteuses persécutions qui ont rendu leurs sublimes découvertes aussi fatales à leur repos qu’elles étaient utiles au bonheur de la société ? Malheur à quiconque ose éclairer ses concitoyens ! L’ignorance, les préjugés et les passions ont formé une ligue redoutable contre les hommes de génie, pour punir les services qu’ils rendront à leurs semblables."
Pour ne pas limiter l’apport des Lumières au seul héritage rousseauiste et au combat contre les préjugés, signalons sa défense en 1785 d’un certain Dupond, incarcéré pendant douze ans, par lettre de cachet. L’avocat d’Arras intervient auprès de Louis XVI en brossant les traits de la société à laquelle il aspire et pour laquelle il combattra bientôt :
"... Conduire les hommes au bonheur par la vertu, et à la vertu par une législation fondée sur les principes immuables de la morale universelle.. rétablir la nature humaine dans tous ses droits et sa dignité première ; renouer la chaîne immortelle qui doit unir l’homme à Dieu et à ses semblables, en détruisant toutes les causes de l’oppression et de la tyrannie qui sèment sur la terre la crainte, la défiance, l’orgueil, la bassesse, l’égoïsme, la haine, la cupidité et tous les vices qui entraînent l’homme loin du but que le législateur éternel avait assigné à la société, voilà sire, la glorieuse entreprise à laquelle il vous a appelé".
Albert Soboul apporte un éclairage très intéressant et parfaitement justifié sur son positionnement de professionnel de la justice vis à vis de l’institution judiciaire « Un caractère ombrageux et sa propension réitérée, comme avocat, à mettre en question l’organisation de la justice, les préjugés dominants et la structure même de l’ordre public, indisposaient les autorités qui le condamnèrent à l’impuissance. Il en conçut de l’amertume mais surtout puisa dans cette frustration, une volonté de lutte qui ne se démentit jamais. »
A6) Robespierre, intellectuel des Lumières préoccupé du social
Parmi les nombreux vers de Robespierre lui-même, signalons ceux-ci, connus comme oeuvre de son adolescence :
Le seul tourment du juste, à son heure dernière,
Et le seul dont alors je serai déchiré,
C’est de voir en mourant, la pâle et sombre envie
Distiller sur son front l’opprobre et l’infâmie,
De mourir pour le peuple et d’en être abhorré.
Le jeune Robespierre apparaît comme un intellectuel des Lumières aux idées souvent proches de celles qu’il défendra durant la Révolution avec pour repères les droits naturels dont l’égalité.
Nous avons signalé précédemment l’affaire du paratonnerre en 1782 1783.
En 1784 il obtient le deuxième prix du concours de l’académie de Metz en critiquant finement l’Ancien régime. Il y vante l’importance du droit naturel et des droits de l’homme, puisant ses citations chez Montesquieu, Beccaria, Denesle.
" Dans les états despotiques, la loi n’est autre chose que la volonté des princes, les peines et les récompenses semblent être plutôt les signes de sa colère ou de sa bienveillance, que les suites du crime ou de la vertu...
" La même tournure d’esprit qui fait que l’on respecte un homme, parce qu’il est né d’un père noble ; qu’on le dédaigne parce qu’il sort de parents obscurs, conduit naturellement à le mépriser, lorsqu’il a reçu le jour d’un homme flétri, où qu’il l’a donné à un scélérat »
" « Je voudrais aussi que la loi n’imprimât plus aucune espèce de tâche aux bâtards...
"… La prospérité des états repose nécessairement sur la base immuable de l’ordre, de la justice et de la sagesse. Toute loi injuste, toute institution cruelle qui offense le droit naturel, contrarie ouvertement leur but, qui est la conservation des droits de l’homme, le bonheur et la tranquillité des citoyens..."
A7) Robespierre, héritier philosophique de Rousseau
L’écolier Maximilien bénéficie d’un enseignement de qualité qui lui sera fort utile pour ses discours futurs (références, argumentation, capacité de synthèse...). Un abbé le dénonce cependant comme ouvrant les livres interdits des philosophes des Lumières en se cachant dans les toilettes. Il est vrai que l’adolescent dévore particulièrement les ouvrages de Jean-Jacques Rousseau.
Jean-Jacques Rousseau, philosophe de la souveraineté populaire
Je pense que le positionnement de Robespierre à l’extrême gauche de l’Assemblée constituante s’explique largement par son socle théorique rousseauiste :
le seul vrai souverain d’un Etat démocratique, c’est le peuple non un roi
confiance dans les virtualités naturelles de tout humain, y compris évidemment de milieu populaire
les droits politiques font partie des droits naturels imprescriptibles de tout homme
le peuple étant le seul vrai souverain, son pouvoir législatif est nécessairement supérieur aux pouvoirs exécutif et judiciaire...
Lors de la discussion d’août 1791 sur la révision de la constitution, la référence rousseauiste de Robespierre est évidente et il ne s’en cache pas « Jean-Jacques Rousseau a dit que le pouvoir législatif constituait l’essence de la souveraineté, parce qu’il était la volonté générale, qui est la source de tous les pouvoirs délégués : et c’est dans ce sens que Rousseau a dit que lorsqu’une nation déléguait ses pouvoirs à ses représentants, la nation n’était plus libre et qu’elle n’existait plus. »
A8) Robespierre choisit "le peuple" comme concept central de sa philosophie politique
Ce concept de peuple revêt chez lui un sens politique pour plusieurs raisons :
il est "le plus ferme appui de la liberté"...
il désigne des humains qui ne bénéficient d’aucun droit naturel alors qu’ils y ont droit doit de façon imprescriptible
En se situant dès le printemps 1789 comme "fidèle défenseur de peuple", il va devoir anticiper sans cesse les manoeuvres des aristocrates puis des politiciens pour le tromper et le réprimer. D’une grande journée de la révolution à une autre, il va gagner par ses combats une influence profonde sur l’avant-garde plébéienne large de la Révolution.
B1) La sincérité de l’Incorruptible
Certains théoriciens d’extrême gauche me paraissent passer à côté de la personnalité de Maximilien Robespierre en prétendant qu’il fut un politicien retors surfant sur le mouvement populaire pour abattre la royauté tout en ne dépassant pas les intérêts de la bourgeoisie. Je considère qu’il a poursuivi de façon fort cohérente ses objectifs politiques d’une république respectueuse des droits naturels imprescriptibles, d’une république fondée sur l’intérêt général.
Tout ce texte constitue une argumentation contre l’idée d’un Robespierre calculateur présent dans le mouvement populaire pour être mieux au service des riches. Je voudrais cependant apporter ici un éclairage supplémentaire. Son jeune frère Augustin (député montagnard) a traversé la Révolution de façon active, fort indépendante vis à vis de son frère aîné. Pourtant, ses actes et ses écrits reposent sur les mêmes fondements politico-philosophiques. Représentant en mission dans le Sud-Est, c’est lui qui fait nommer Philippe Buonarotti agent national général pour les territoires conquis sur le royaume du Piémont, à l’est de Menton. C’est à Oneglia que celui-ci tentera, durant onze mois, de constituer un refuge pour les patriotes italiens et un modèle de république sans désaccord d’Augustin.
Sa soeur Charlotte leur survivra et portera haut jusqu’à son décès le 1er août 1840, la mémoire de ses frères, particulièrement Maximilien.
B2) Fondements de la pensée de Robespierre lorsque débute la révolution
Nous venons d’aborder ses héritages des Lumières, particulièrement de Rousseau et son concept central de "peuple". N’y revenons pas.
L’année 1789 commence alors que Robespierre n’est âgé que de 30 ans. Il se lance dans la bataille politique par un texte imprégné d’une colère incommensurable contre la misère des milieux populaires.
« Nos campagnes offrent de toutes parts à nos yeux des infortunés qui arrosent des larmes du désespoir cette terre que leurs sueurs avaient en vain fertilisée ; la plus grande partie des hommes qui habitent nos villes et nos campagnes sont abaissés par l’indigence à ce dernier degré de l’avilissement où l’homme, absorbé tout entier par les soins qu’exige la conservation de son existence, est incapable de réfléchir sur les causes de ses malheurs et de reconnaître les droits que la nature lui a donnés. Et nous trouvons encore des sommes immenses pour fournir aux vaines dépenses du luxe et à des largesses aussi indécentes que ridicules ! Et je pourrais contenir la douleur qu’un tel spectacle doit exciter dans l’âme de tous les honnêtes gens ! Et tandis que tous les ennemis du peuple ont assez d’audace pour se jouer de l’humanité, je manquerais du courage nécessaire pour réclamer ses droits ! Et je garderais devant eux un lâche silence, dans le seul moment où depuis tant de siècles la voix de la vérité ait pu se faire entendre avec énergie, dans le moment où le vice, armé d’un injuste pouvoir, doit apprendre lui-même à trembler devant la justice et la raison triomphantes ! ... »
Les Droits naturels de l’homme, la Justice, la Raison et la Vérité, voilà quatre concepts déjà profondément ancrés dans la pensée robespierriste avant même les mouvements sociaux de la révolution française. Quel paradigme unifie sa pensée et son action : la morale face au luxe indécent et au "vice armé d’un injuste pouvoir".
Lorsque la révolution de 1789 éclate en France, Maximilien Robespierre dispose aussi de plusieurs éclairages historiques fort utiles :
le bilan des luttes sociales et politiques de l’Antiquité
les révolutions plébéiennes de Genève
Ceci dit, le contexte social, culturel et politique représente à coup sûr sa principale source d’analyse et de clarification des idées, contexte national (nous allons y revenir), mais aussi international.
B3) L’intelligence politique de Robespierre, comme conscience des intérêts populaires dès janvier 1789
> En janvier 1789, il conclut son mémoire pour Dupond en signalant l’imminence d’une révolution « Nous touchons à une révolution qui doit amener, parmi nous, la restauration des lois, et par une suite nécessaire, la réforme des moeurs. » L’objectif d’une telle révolution est d’établir les « droits imprescriptibles des hommes »... La dimension morale de Maximilien prend déjà une place importante dans sa cohérence politique. Ceci dit, en argumentant que cette révolution peut ressembler à celle qu’avait tentée Henri IV "mais qui n’était pas encore possible" à cette époque, il ne sous-estime pas les conditions socio-économiques rendant possible une expérience historique. En valorisant les empereurs Antonin et Marc-Aurèle qui voulaient rendre "aux Romains leurs antiques assemblées", en insistant sur le "caractère sacré" des futurs états généraux qui devront « unir à jamais la liberté et le bonheur des peuples avec celui des rois », il leur donne déjà une fonction bien différente du seul problème de la dette publique.
> Les textes appelant à lutter contre la noblesse, contre les droits féodaux vexatoires ne manquent pas en ce début d’année 1789. Robespierre emboite-t-il le pas à cette mode du temps ? Non, il désigne comme adversaires les "riches", les "puissants" parmi lesquels les nobles. Il voit aussi les conséquences néfastes de l’oppression sociale sur les gens du peuple eux -mêmes que la misère conduit « à oublier la dignité de l’homme et les principes de la morale, au point de regarder la richesse comme le premier objet de sa vénération et de son culte, la bassesse servile et la flatterie envers les riches et les puissants comme un devoir, l’oppression comme un état naturel, la protection des lois comme une faveur presque inespérée... »
B4) Candidat député aux Etats Généraux de 1789
Dès que le jeune Robespierre (30 ans) apprend la convocation des Etats Généraux, il publie un "Appel à la Nation artésienne sur la nécessité de réformer les Etats d’Artois" (février 1789). Il se comporte déjà en militant politique "patriote", faisant paraître ce texte virulent de façon anonyme pour développer une critique radicale sans trop de souci des risques. Sur qui tape-t-il ? sur les états généraux de l’Artois (réunis du 29 décembre 1788 au 21 janvier 1789) qui ne représentent en rien le peuple. « Que sont les prétendus états d’Artois en général ? une espèce de commission qui a élevé son autorité sur la ruine de nos vrais états ; une ligue de quelques citoyens qui se sont emparés seuls du pouvoir qui n’appartenait qu’au peuple... » L’Eglise, par exemple, est représentée par deux évêques, dix-huit chefs d’abbaye, des représentants de chapitres des chanoines mais par aucun curé de paroisse. Est-ce une telle assemblée qui va élire les députés aux états généraux de Versailles ?
Dans ce texte, nous retrouvons :
la dénonciation de l’injustice sociale
le philosophe politique des Lumières, mettant en avant les droits sacrés et imprescriptibles de l’homme, l’importance de la politique, de la justice, de la raison, de la souveraineté populaire.
" ... Saisissons l’unique moment que la Providence nous ait réservé dans l’espace des siècles pour recouvrer ces droits imprescriptibles et sacrés dont la perte est à la fois un opprobre et une source de calamités...
" Le véritable moyen d’anéantir les abus qui causent les malheurs publics est d’aller droit aux sources principales d’où ils découlent. Or, la première source des malheurs du peuple, ce sont les vices de son gouvernement... "
Son argumentation avance jusqu’à énoncer que seul le peuple est légitime pour le choix des élus locaux, régionaux et nationaux.
B5) Robespierre député au coeur de la révolution politique du printemps 1789
Son refus de tout compromis dès avril 1789 est surprenant. Tel est bien le ton de son long pamphlet (58 pages) Les Ennemis de la patrie. Lors de l’Assemblée du 20 avril pour élire les députés aux Etats généraux de Versailles ; le clergé et la noblesse annoncent qu’ils sabordent leurs "exemptions et immunités" ; un délégué ayant proposé de les remercier, Robespierre se lève et lance « Point de remerciements à des gens qui n’ont fait que renoncer à des abus ».
Dans sa magnifique biographie intitulée Robespierre et éditée chez Fayard, Hervé Leuwers précise « Robespierre... ne ressemble pas à cette majorité de députés qui, comme l’a montré Timothy Tackett, ont mis plusieurs semaines à devenir révolutionnaires ; lui, il l’a été avant son arrivée à Versailles et en a accepté d’emblée le prix... retenons l’intensité et l’exaltation avec lesquelles Robespierre ressent ce printemps 1789 : il entre en Révolution, totalement. »
Aussi, il intervient de plus en plus à l’Assemblée nationale. Il se fait remarquer par sa détermination et sa clarté lors de la journée du 17 juin où Les députés du Tiers état se proclament Assemblée nationale. « Il eût semblé que c’était le génie de la patrie qui l’inspirait ici dans ce moment » d’après un journaliste. »
Lors du serment du Jeu de Paume, le voici à nouveau au premier plan (voir tableau de David).
B6) Robespierre, défenseur des structures populaires d’auto-organisation
Durant l’été 1789, les districts parisiens commencent à fonctionner comme structures d’auto-organisation coordonnées au sein de l’Assemblée des districts puis "l’assemblée générale des représentants de la commune de Paris" comprenant deux puis trois enfin cinq membres élus par district. De semaine en semaine, cette instance d’émanation révolutionnaire s’octroie un rôle de plus en plus important. Aussi, la Cour comme la bourgeoisie parisienne (Bailly...) veulent dissoudre ces comités de district et leur "assemblée générale". Le député Robespierre apparaît alors comme le meilleur défenseur des districts.
Pourquoi ce soutien aux premières formes d’auto-organisation ? Probablement parce que Robespierre comprend que la mobilisation populaire représente la seule chance de résistance face à l’inévitable répression que le roi tente et va tenter. Dans la lettre à son ami Buissart (23 juillet 1789), il résume bien son état d’esprit durant ces journées « La Révolution actuelle, mon cher ami, nous a fait voir en peu de jours les plus grands évènements que l’histoire des hommes puisse présenter... Le despotisme et l’aristocratie se proposaient d’égorger la moitié de la nation et de prendre ses représentants pour premières victimes. De là cette multitude innombrable de troupes rassemblées autour de Paris et de Versailles... Cependant Paris alarmé se préparait déjà à défendre la liberté publique contre les dernières entreprises du despotisme, le renvoi des ministres avait été le signal d’une insurrection générale, une armée patriotique de trois cent mille hommes de toutes les classes... semblait être sortie de terre par une espèce de prodige... »
Plus important encore, Robespierre comprend dès le lendemain du 14 juillet l’importance de construire une armée populaire révolutionnaire dans toute la France « Nous espérons que toute la France adoptera cette institution nécessaire non seulement pour assurer la tranquillité publique, mais pour défendre la liberté de la nation contre les entreprises qu’elle peut craindre encore de la part du despotisme et de l’aristocratie qui se sont étroitement alliés dans le temps que nous sommes. »
B7) Robespierre, démocratie et souveraineté populaire
En août 1789, il intervient plusieurs fois dans le débat sur la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. Fondamentalement, il campe parmi les députés et même parmi les patriotes dans l’extrême gauche ancrée sur le terrain d’une démocratie émancipatrice. Aussi, ses propositions restent généralement minoritaires ; ainsi, concernant l’article 10 « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi », il propose de supprimer la restriction du trouble à l’ordre public.« Une restriction à un principe aussi simple... c’est l’anéantir en donnant lieu à une foule d’interprétations dangereuses » (23 août 1789). Cohérent dans son orientation, il intervient le lendemain dans le débat sur l’article 11 "La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi" et propose de supprimer la proposition "sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi" rappelant que toute restriction ambigüe des libertés peut laisser place au despotisme.
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (votée le 26 août 1789)
En septembre 1789, Robespierre défend la souveraineté populaire face au pouvoir royal symbolisé et concrétisé par son droit de veto. Comme souvent dans ses discours argumentatifs, Maximilien Robespierre commence sa démonstration par l’affirmation rousseauiste de confiance en l’homme, capable par nature de se gouverner lui-même.
« Tout homme a par sa nature, la faculté de se gouverner par sa volonté ; les hommes réunis en Corps politique, c’est-à-dire, une Nation, ont par conséquent le même droit. Cette faculté de vouloir commune, composée des facultés de vouloir particulières, ou la Puissance législative, est inaliénable, souveraine et indépendante, dans la société entière...
Il faut se rappeler que les Gouvernements, quels qu’ils soient, sont établis par le Peuple et pour le Peuple, que tous ceux qui gouvernent, et par conséquent les Rois eux-mêmes, ne sont que les mandataires et les délégués du peuple ; que les Fonctions de tous les Pouvoirs politiques, et par conséquent de la Royauté, sont des devoirs publics, et non des droits personnels ni une propriété particulière..."
Le jeune député d’Arras s’oppose, pour des raisons de principe, aux modérés qui proposent un droit de veto suspensif du Roi. " Je n’ai pas cru devoir désespérer du Pouvoir de la vérité et du salut public ; il m’a semblé d’ailleurs qu’il n’était pas bon de composer avec la liberté, avec la justice, avec la raison, et qu’un courage inébranlable, qu’une fidélité inviolable aux grands principes, était la seule ressource qui convînt à la situation actuelle des défenseurs du Peuple. Je dirai donc, avec franchise, que l’un et l’autre veto me paraissent différer beaucoup plus par les mots que par les effets et qu’ils sont également propres à anéantir, parmi nous, la liberté naissante. »
B8) Robespierre aux côtés des milieux pauvres
Dès 1789, il se positionne en défense des miséreux, des gueux, des défavorisés et de leurs formes de lutte. C’est particulièrement évident lors des mouvements sociaux de populations locales qui réclament de la farine pour faire du pain. Il intervient à l’Assemblée contre les mesures répressives proposées ; il explique qu’il ne faut pas frapper le peuple pour ne pas « éteindre son amour de la liberté ». Robespierre est bien conscient alors qu’en écrasant les milieux sociaux les plus opprimés, la Révolution se tuerait elle-même.
Le 5 octobre 1789, un grand nombre de femmes excédées par la famine marchent de Paris jusqu’à Versailles où elles envahissent l’Assemblée nationale.
5 octobre 1789 Quand la masse des femmes entre en révolution
Robespierre prend aussitôt la parole pour imposer qu’on prenne le temps de les écouter plutôt que les chasser à la pointe des fusils. Quelques heures plus tard, la famille royale a complètement perdu la bataille et suit le cortège de femmes jusqu’à Paris comme lieu, jusqu’à la destitution et la proclamation de la république comme résultat politique.
De toute évidence, certaines idées-force du Robespierre de 1793 sont déjà mûres chez lui en 1789, par exemple le fait que tout homme doit se voir reconnaître l’entièreté des droits politiques (vote, éligibilité...), par exemple aussi son souci de placer la lutte contre la misère en tête des priorités morales et politiques « Quand, des bords d’un fleuve irrité, un homme sensible et courageux voit un être faible près de périr dans les flots, balance-t-il à se jeter à la nage ? »
Le dilemme de 1793 "La liberté (victoire de la révolution) ou la mort (les révolutions vaincues se terminent toujours par le massacre généralisé des défenseurs du peuple) est déjà lancinant chez Robespierre avant son élection aux Etats Généraux. Comprenant cela, il essaie d’agir au mieux pour assurer le succès de la révolution. Les Ennemis de la patrie espèrent « nous replonger dans tous les maux dont nous voulons nous délivrer et méditent déjà de changer en martyrs tous les défenseurs du peuple. »
B9) Robespierre et les actions illégales du mouvement populaire
Quinze jours après les grandes journées des 5 et 6 octobre, la Commune de Paris comme l’Assemblée constituante veulent l’adoption d’une loi martiale pour tirer sur la foule lors de troubles dus au manque de pain.
Depuis quatre ans, cette question des grains est au coeur des préoccupations de la société française en raison surtout du contexte climatique et de mauvaises récoltes mais aussi évidemment parce que la liberté du commerce pousse les grands propriétaires à stocker ce blé pour en faire monter le prix avant de la vendre.
La gauche de l’Assemblée (à ce moment-là) plaide seulement pour un texte moins dur. Robespierre prononce alors son premier grand discours à résonance nationale importante. Comme à son habitude, il dresse tout d’abord une analyse de la situation politique et des tâches qui en découlent. Quel est le danger majeur actuel ? la contre-révolution ou le peuple qui veut manger un peu de pain chaque jour ?
...« Si nous ne nous réveillons pas, c’en est fait de la liberté. Les députés de la commune vous demandent du pain et des soldats, et pourquoi ? pour repousser le peuple... Quand le peuple meurt de faim, il s’attroupe ; il faut donc remonter à la cause des émeutes pour les apaiser... Il faut prendre des mesures pour découvrir les auteurs (des causes des mouvements populaires)... Après avoir organisé un tribunal pris dans votre sein, il faudra vous occuper de tous les complots... Ici ce sont des évêques qui donnent des mandements incendiaires ; là ce sont des commandants de provinces frontières qui laissent passer des grains dans les pays étrangers... » Vis à vis de ceux qui s’en tiennent à la nécessité d’appliquer la loi inscrite dans la constitution, sa réponse est remarquable « La constitution ne serait qu’une chimère si nous ne portions pas remède aux maux actuels. »
B10) Robespierre, promoteur et défenseur de structures armées d’auto-organisation du peuple
En décembre 1789, les députés aux Etats généraux sont majoritairement décidés à casser la radicalisation du mouvement populaire. Aussi, ils privilégient la formation d’une garde nationale bourgeoise, composée d’hommes payant un impôt significatif, donc attachés à défendre l’ordre social ancien. Robespierre engage un combat sur la composition de cette garde ; en demandant son ouverture à tout homme.
Sur l’organisation de gardes nationales ayant pour devise Liberté Egalité Fraternité, décembre 1789
"... Songez combien l’esprit de despotisme et de domination est naturel aux militaires de tous pays ; avec quelle facilité ils séparent la qualité de citoyen de celle de soldat, et mettent celle-ci au-dessus de l’autre... Un autre écueil pour le civisme des militaires, c’est l’ascendant que prennent leur chefs. La discipline amène l’habitude d’une prompte et entière soumission à leur volonté.. c’est ainsi que les soldats de la république deviennent les soldats de Sylla, de Pompée, de César, et ne sont plus que les instruments aveugles de la grandeur de leurs généraux et de la servitude de leurs concitoyens.
Les gardes nationales ne peuvent être que la nation entière pour défendre, au besoin, ses droits ; il faut que tous les citoyens en âge de porter les armes y soient admis sans aucune distinction. Sans cela, loin d’être les appuis de la liberté, elles en seront les fléaux nécessaires... Etre armé pour défendre la liberté et l’existence de la commune patrie est le droit de tout citoyen. Dépouiller une portion quelconque des Citoyens du droit de s’armer pour la patrie et investir exclusivement l’autre, c’est donc violer à la fois et cette sainte égalité qui fait la base du pacte social, et les lois les plus irréfragables et les plus sacrées de la nature...
Cessez de calomnier le peuple et de blasphémer contre votre souverain, en le représentant sans cesse indigne de jouir de ses droits, méchant, barbare, corrompu ; c’est vous qui êtes injustes et corrompus ; ce sont les castes fortunées auxquelles vous voulez transférer sa puissance. C’est le peuple qui est bon, patient, généreux... Le peuple ne demande que tranquillité, justice, que le droit de vivre ; les hommes puissants, les riches sont affamés de distinctions, de trésors, de voluptés. L’intérêt, le vœu du peuple est celui de la nature, de l’humanité ; c’est l’intérêt général. L’intérêt, le vœu des riches et des hommes puissants est celui de l’ambition, de l’orgueil, de la cupidité, des fantaisies les plus extravagantes, des passions les plus funestes au bonheur de la société. Les abus qui l’ont désolée furent toujours leur ouvrage : ils furent toujours les fléaux du peuple. Aussi, qui a fait notre glorieuse révolution ? Sont-ce les riches ? sont-ce les hommes puissants ? Le peuple seul pouvait la désirer et la faire ; le peuple seul peut la soutenir, par la même raison…
Les gardes nationales s’exerceront à certains jours de dimanche & de fêtes qui seront indiqués par chaque commune. Elles se rassembleront tous les ans le 14 juillet dans chaque district pour célébrer, par des fêtes patriotiques, l’heureuse époque de la révolution. Elles porteront sur leur poitrine ces mots gravés : LE PEUPLE FRANÇAIS, et au-dessous : LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE. Les mêmes mots seront inscrits sur leurs drapeaux, qui porteront les trois couleurs de la nation."
J’ai cité longuement ce discours du 5 décembre 1789 devant l’Assemblée nationale car il permet de comprendre plusieurs points importants quant au rôle de Robespierre en ce début de révolution :
premièrement il éclaircit sa force politique due à la radicalité cohérente de ses idées démocratiques "Tout citoyen, riche ou pauvre, a droit d’être garde national au nom des droits de l’homme."
deuxièmement, il est très minoritaire à l’Assemblée. Un véritable chahut l’empêche de continuer à parler à la tribune. Les représentants de la bourgeoisie l’attaquent durement comme le monarchien Malouet (planteur à saint Domingue) ou Isaac Le Chapelier (auteur de la loi interdisant les coalitions ouvrières et le droit de grève). Mais se mêlent à eux un représentant de la cause américaine comme Démeunier, un démocrate comme le pasteur Rabaut Saint Etienne... "Ce serait le moyen d’armer des troupes de vagabonds" s’insurgent toutes ces personnalités installées.
troisièmement, isolé à l’Assemblée, il recommence son discours le soir même devant les Jacobins. Mirabeau essaie de le faire taire mais n’y parvient pas tant la majorité de la salle est pendue aux lèvres de l’orateur.
quatrièmement, le texte de 78 pages qu’il publie à la mi-décembre lui apporte des contacts enthousiastes dans plusieurs villes de province comme Lille et Marseille.
Maximilien Robespierre participe au Comité de Salut public (donc au pouvoir exécutif) durant la Convention montagnarde. Ceci dit, il ne dispose absolument pas des pouvoirs d’un dictateur, au moins pour la raison que ne maîtrise pas plusieurs sources de pouvoir :
des institutions pesant lourdement sur les décisions (comme la Commune de Paris ou le Tribunal révolutionnaire)
des personnalités influentes et occupant des fonctions au moins aussi importantes que les siennes (comme Lafayette puis Carnot, Barère)
des courants politiques, y compris parmi les sans-culottes (les Girondins à sa droite et les Hébertistes à sa gauche par exemple).
Nous en avons mis en ligne plusieurs sur ce site :
"Périssent les colonies plutôt qu’un principe !" Robespierre sur l’esclavage
Robespierre intervient en faveur du droit de vote des Juifs et des comédiens
Robespierre 30 mai 1791 : Pour l’abolition de la peine de mort
« La démocratie est un état où le Peuple souverain, guidé par des lois, fait par lui-même tout ce qu’il peut bien faire, et par des délégués tout ce qu’il ne peut pas. » Robespierre
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