Banques et «  bande organisée  »

mardi 14 juillet 2015.
 

Des banques qui organisent en « bande » la concurrence faussée, manipulent les taux d’intérêt.

C’est un petit opus qui revient encore sur un diagnostic de plus en plus partagé par les économistes et les sciences humaines et sociales, en règle générale  : la crise de l’endettement public n’est en aucune manière le fait de la «  gabegie des finances publiques  », mais celui de la dérégulation de la finance globalisée. D’ailleurs, «  entre 2007 et 2011, écrit François Morin (l’Hydre mondiale. L’oligopole bancaire, Lux, 2015), la dette publique mondiale s’est accrue de 54 % soit à un rythme annuel deux fois plus grand qu’avant la crise financière. Il a fallu, à l’échelle mondiale, injecter des quantités phénoménales de capitaux publics pour recapitaliser les banques  ».

Selon la définition du G20 (Cannes, 2011), 28 banques ont été déclarées systémiques, avec un noyau dur de 11, c’est-à-dire des banques qui sciemment organisent en «  bande  » la concurrence faussée, manipulent les taux de change et d’intérêt pour défendre les seuls intérêts de leurs actionnaires, utilisent leur position dominante pour en abuser, fabriquent des produits dérivés toxiques. Ces banques sont européennes (16), américaines (8), japonaises (3) et chinoise  : JPMorgan Chase, Bank of America, Citigroup, HSBC, Deutsche Bank, Groupe Crédit agricole, BNP Paribas, Barclays PLC, Mitsubishi UFJ FG, Bank of China, Royal Bank of Scotland, Morgan Stanley, Goldman Sachs, Mizuho FG, Santander, Société générale, ING Bank, BPCE, Wells Fargo, Sumitomo Mitsui FG, UBS, UniCredit Group, Credit suisse, Nordea, BBVA, Standard Chartered, Bank of New York Mellon, State Street.

Face à cela, les États continuent de croire que les politiques d’austérité sont leurs seules solutions – la règle Volker (États-Unis) et la règle Vickers (Grande-Bretagne) étant totalement insuffisantes en matière de régulation de la finance – alors que la question prioritaire est celle d’une reprise en main de la souveraineté monétaire, voire de réformer le système monétaire international. Depuis la libéralisation financière des années 1970 et 80, des crises systémiques se sont produites à plusieurs reprises, explique Morin, qui ont été à chaque fois causées par les produits financiers dérivés. Or ces produits n’existaient pratiquement pas avant les années 1970. Par ailleurs, les États ont abandonné au cours des quarante dernières années toute souveraineté en matière de monnaie.

«  Par rapport à la période des Trente Glorieuses où les États et leurs banques centrales fixaient les conditions monétaires de l’activité économique en gérant taux de change et taux d’intérêt, la période actuelle se caractérise, de fait, par un renversement complet  : c’est un oligopole de banques privées et systémiques qui fixe les conditions monétaires de l’activité économique mondiale, non seulement en raison de ses positions dominantes sur les marchés monétaires et financiers, mais aussi (…) en abusant de ces positions.  » Morin est explicite et appelle à l’urgence totale  : démanteler l’oligarchie bancaire mondiale, réformer le système monétaire et financier international, créer une monnaie commune et non unique, redonner en somme à l’État de droit sa souveraineté monétaire. Le reste est simulacre.

Chronique de Cynthia Fleury dans L’Humanité


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