La révision du statut pénal du chef de l’Etat proposée par la droite, c’est une bonne chose ?

mardi 20 février 2007.
 

Chirac, conscient de la maigreur de son bilan, tient au moins à figurer dans les manuels de droit. D’où la énième modification de la Constitution (la 16ème en douze ans ! De Gaulle l’a modifié deux fois, Mitterrand quatre), portant à la fois sur le statut pénal du chef de l’Etat, le corps électoral en Nouvelle Calédonie et l’abolition de la peine de mort.

Evidemment, c’est le premier volet de cette révision qui est dans la lumière. Inspiré des conclusions du rapport Avril, les parlementaires viennent de voter un texte qui peut changer la nature de nos institutions. En effet, si le président de la République continue de bénéficier de l’immunité pendant l’exercice de ses fonctions, il pourra désormais être destitué par le Parlement (à la majorité des deux tiers) en cas de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ».

A première vue, la réforme va dans le bon sens. Mais le diable est dans les détails. Si la destitution d’un chef d’Etat conservateur devient quasi impossible, il n’en est pas de même pour un responsable de gauche. Compte tenu de la nature du Sénat, structurellement réactionnaire compte tenu de son mode d’élection archaïque, il est tout à fait envisageable de réunir une majorité de deux tiers de parlementaires de droite : ceux-ci pourraient être tentés, en période de cohabitation, d’engager une procédure de destitution à l’encontre d’un président de gauche, et cela en raison de simples divergences politiques (qu’est ce qu’un « manquement aux devoirs » ?).

Rober Badinter a raison de dire qu’en cas de vote sur la destitution d’un président, « la droite et la gauche disposeront théoriquement des mêmes armes, mais celles de la droite tireront à balles réelles et celles de la gauche à blanc ». Le premier ministre de la Justice de François Mitterrand n’a pas été écouté par ses pairs. En attendant une vraie réforme institutionnelle, la prudence était de mise. Espérons que la gauche n’aura pas à le regretter.

Écrit par Emmanuel MAUREL


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