Pourquoi nous quittons le NPA (groupe de Clermont Ferrand, 2009)

mardi 5 novembre 2019.
 

Nous, militants du NPA en Auvergne, et pour certains précédemment à la LCR, avons décidé de quitter le NPA et de rejoindre la Gauche Unitaire. Il est légitime d’expliquer succinctement le sens de notre démarche.

Le NPA ne correspond pas à ce que nous en attendions

Dans la phase préparatoire à la fondation du NPA, celui-ci se présentait comme une page vierge susceptible d’accueillir tous ceux qui souhaitaient fonder une organisation résolument anticapitaliste, indépendante du social libéralisme, outil pour la fondation d’une gauche vraiment de gauche. Depuis longtemps nous étions engagés, à la LCR, en liaison avec elle ou à ces côtés, dans la bataille pour faire avancer la construction de la gauche anticapitaliste. Nous nous sommes investis dans la campagne politique pour un non de gauche au référendum sur le TCE, le succès de cette action nous a permis d’espérer que cette construction était à l’ordre du jour. Lors de la présidentielle, nous avons milité pour une candidature commune de la gauche de gauche, l’échec nous a troublés mais nous avons continué le même combat. Lorsque la LCR a proposé la création d’un nouveau parti anticapitaliste, nous nous sommes investis dans sa construction. Nous avons milité pour que sa première apparition sur le terrain électoral montre une orientation clairement unitaire en proposant au congrès fondateur que le NPA prenne l’initiative de proposer à l’ensemble des forces de la gauche de gauche des listes unitaires sur la base d’un programme rompant clairement avec le social libéralisme. Ce fut l’amendement de Clermont que nous avons défendu lors du congrès constitutif du NPA. Cette ligne fut clairement minoritaire au profit d’une proposition unitaire conditionnée à un accord sur le nucléaire et les régionales ! Conditionner une liste euro-péenne unitaire par un accord global et lointain revient à considérer que la dynamique unitaire qui avait été possible lors du référendum sur le traité constitutionnel européen ne l’était plus à l’occasion de cette élection. C’est une logique sectaire et de division qui s’installe où la négociation d’appareil serait préférable à la dynamique qu’aurait créée une liste unitaire de gauche ! C’est la négation du combat pour la recomposition politique à la gauche du parti socialiste que nous avons mené dans la LCR puis dans le NPA. Certains d’entre nous ont alors quitté le NPA d’autres ont encore voulu croire à la possibilité de se battre dans les instances.

Maintenant les élections européennes ont eu lieu. Elles ont été pour la gauche vraiment à gauche le moment d’une concurrence entre le NPA et le Front de Gauche qui, lui, a maintenu jusqu’au dépôt des listes des propositions unitaires au NPA. Ainsi le disait Christian Nguyen au meeting de la Maison du Peuple à Clermont « l’heure n’est pas à l’unité ». Le résultat est un succès de Sarkozy conforté dans sa politique antisociale, la relativisation du PS sans qu’apparaisse une autre proposition à gauche, c’est aussi la résurgence du bateleur Cohn-Bendit qui avec ses 16% apparaît maintenant comme le seul contrepoids au PS. Cette place, la gauche de gauche pouvait l’occuper. Unis, Front de Gauche et NPA auraient eu 12 élus (au lieu de 4 pour le front de gauche et 0 pour le NPA) ; éliminé le front national et privé Hortefeux de son siège, sans compter le dynamisme et l’espoir que cela aurait créé. Oui les élections européennes pouvaient être le moment d’une apparition de la gauche de gauche sur le champ électoral. Cette occasion a été gâchée par la ligne sectaire NPA.

Conséquence encore plus grave pour nous, la première apparition du NPA se fait sur le terrain de la division. Ce n’est plus seulement une erreur de parcours que fait le NPA, mais bien l’affirmation d’une ligne durable de division. C’est sur cette première apparition sur le terrain électoral que va se construire dorénavant le NPA, c’est sur cette ligne que vont se faire les adhésions, c’est au nom de cette validation électorale de la ligne que la direction va marginaliser son opposition…

Quelques mots à ce stade sur la minorité du NPA regroupée dans le courant « convergences et alternative ». Des camarades ont choisi de continuer la tradition politique d’UNIR dans le NPA. Ils estiment qu’il y a une place pour cette orientation dans le NPA, et pour certains, de nourrir l’espoir d’y être majoritaire. Nous ne voulons pas les décourager. Nous estimons tout simplement que cette orientation sera plus efficace pour notre combat s’il est mené de manière indépendante. Au delà des projections sur l’avenir, chacun jugera sur pièce. Restons-en à la campagne européenne. Aucune apparition du courant unitaire du NPA lors de la campagne, pas plus localement que nationalement : Il aura fallu une demande insistante venant de la salle pour que la tribune s’exprime sur le concept NPA « d’unité dans la clarté ». Les textes internes de ce courant sont intéressants à bien des égards, mais ne soufflent mot des élections régionales où les mêmes questions se poseront. Signalons tout de même que le prochain congrès du NPA n’aura lieu qu’après les régionales. Sans doute ces copains vont nous promettre une plus grande efficacité demain pour un silence aujourd’hui. Permettez-nous de lui préférer la défense quotidienne de notre classe.

Nous voudrions ajouter un paragraphe sur le fonctionnement de ce parti. Il importe de souligner deux éléments inquiétants, qui montrent une importante rupture avec les traditions démocratiques qui furent celles de la LCR, pour lesquelles elle se battit contre tous les courants de l’extrême gauche et qui lui permit de se maintenir puis de faire grandir son influence dans la dernière période.

La première question est le rôle particulier que joue Olivier Besancenot. Chéri des médias, il est dépendant de la caste médiatique ; du jour au lendemain il peut passer du gentil facteur au dangereux révolutionnaire. Le pouvoir a fait une tentative en cette direction en tentant d’assimiler le NPA avec « action directe ». Ce rôle de porte parole donne aussi un poids politique démesuré à O.B. dans les débats internes du NPA ; il peut demain jouer d’un poids décisif pour faire prendre telle ou telle orientation. Sa déclaration, le soir de l’élection européenne, selon laquelle il faudra désormais compter avec les 5% d’anticapitalistes qui existent dans le pays, illustre parfaitement la logique sectaire du NPA.

La seconde est les questions sur le droit de tendance que pose l’élection du CPN à la fin du congrès. La direction accorde le droit de tendance mais a refusé à la minorité la possibilité de choisir ses représentants au CPN. Alors que la LCR était volontariste pour protéger les droits des minorités, le NPA lui n’a en tête que la recherche des moyens pour les diminuer !

Une troisième enfin est le constat d’une dérive où le NPA se pose en donneur de leçon sur le terrain syndical, chantre de la sacralisation gauchiste du « y a qu’à.com ».

Le NPA est ainsi un parti anticapitaliste installé durablement dans une ligne de division de la gauche de gauche. Les camarades qui veulent le faire évoluer de l’intérieur sont obligés de constater que c’est fondamentalement des pressions extérieures que viendront les évolutions qui d’ailleurs sont très loin d’être acquises… C’est pourquoi nous quittons le NPA pour construire une force externe capable de le mettre devant les choix décisifs pour que le mouvement ouvrier ne soit pas orphelin de sa représentation politique.

Pourquoi nous rejoignons la Gauche Unitaire

L’espoir dans la période est l’apparition sur l’échiquier politique français du Front de Gauche. Le champ politique à gauche était dévasté par la calamiteuse élection présidentielle (victoire d’une ligne extrême de la bourgeoisie, affaiblissement du PS au profit d’un vide à sa gauche). La construction du Front de Gauche est apparu à la fois comme une bouffée d’oxygène susceptible de redonner une chance à la gauche de gauche, mais aussi comme extrêmement fragile tant les tentations pour le PCF de retourner à ses alliances sans contenu avec le social libéralisme sont fortes. Toutes les appréciations de cette initiative dans le NPA furent négatives, du nouvel avatar du social libéralisme défendu par la majorité, aux pronostics négatifs (ça ne fera pas de voix face au NPA, ça ne subsistera pas au 7 juin) de la minorité. La clairvoyance politique était du côté de ceux qui ont eu une appréciation positive.

Non seulement cette force électorale a existé face au NPA, mais elle réalise de meilleurs scores électoraux, même à Clermont où le paysage est depuis longtemps façonné par la LCR. Quelle différence entre le meeting électoral du NPA (guère plus de 200 personnes, peu de militants organisateurs du salariat, ambiance fade où chacun percevait le manque de dynamique de cette campagne axée sur le meilleur programme anticapitaliste) et celui du Front de Gauche (plus de 600 personnes, beaucoup de cadres syndicaux -CGT, FSU, UNEF, Solidaires- et associatifs, volonté de s’ouvrir notamment au NPA et de continuer, volontés affirmées non seulement par les participants mais aussi à la tribune). Faut-il y voir un signe, l’Internationale fut chantée par toute la salle au Front de gauche contre quelques voix isolées au NPA ?

La question de la survie du Front de Gauche n’est pas tranchée, la question pour lui de s’adresser au NPA pour constituer sans préalable idéologique l’unité de la gauche de gauche non plus. Nous choisissons de mener ces batailles là où elles existent et maintenant. Pour cela il existe un outil : la Gauche Unitaire qui a dans son manifeste le meilleur de la tradition de la tendance UNIR de la LCR et de la bataille pour l’amendement Clermont dans le NPA (disponible sur le site www.gauche-unitaire.fr).

D’autres, dont nous sommes proches politiquement, font le choix de rester au NPA, nous déplorons ce choix mais le respectons. Nous aurons toujours le souci de garder le contact fraternel avec eux. Mais voilà les voies divergent, c’est ainsi ; et ce n’est pas la fin du monde.

Aller à La Gauche Unitaire n’est pas un pari mais un choix, le choix de l’action dans la vie politique en étant ancrés dans le réel.

Clermont Ferrand le 22 juin 2009

Premiers signataires : Maïté Ballais, Gérard Blanchet, Gérard Bohner, Nicole Courtine, Laurent Dias, Philippe Pupion, Alia Vasset, Serge Vasset

Par ailleurs, ce texte a le soutien de Philippe Bonnet qui rejoint la construction de la Gauche Unitaire sans avoir été auparavant au NPA.


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