Histoire du Vénézuéla au 20ème siècle : USA, classes profiteuses, gauche et mobilisations populaires

dimanche 16 avril 2023.
 

1) Un siècle d’’intervention des Etats Unis au Vénézuéla

Dés le début du 20ème siècle, les Etats Unis achètent le vice-président Juan Vicente Gomez, l’’installent au pouvoir (1908) puis l’’appuient comme dictateur du pays jusqu’’à la veille de la Seconde Guerre mondiale. En 1945, un coup d’’Etat (encore préparé par les Etats Unis) installe au pouvoir l’’Action démocratique ( parti social-démocrate vénézuélien) de Romulo Betancourt.

La vague d’’aspirations populaires et démocratiques des années 1944-1949 touche particulièrement le Vénézuéla. L’’élection présidentielle de 1947 marque le succès de l’’écrivain Rómulo Gallegos, candidat de l’’Action démocratique. Sa politique progressiste par divers aspects(vote des femmes, réforme agraire...) effraie l’’Eglise et la bourgeoisie ; l’’armée reprend le pouvoir en novembre 1948. Les USA soutiennent un nouveau putsch et une nouvelle dictature militaire (Perez jimenez) durant 10 ans.

Mais arrive la grande période mondiale de combativité (ouvriers, jeunes, peuples opprimés...) et d’’aspirations progressistes des années 1958-1975. Dès 1958, une énorme insurrection balaie la dictature.

Les Etats Unis et le patronat appuient à nouveau la constitution d’’un gouvernement dirigé par Action Démocratique et achètent la bureaucrtie de la centrale syndicale CTV liée à AD. Romulo Betancourt et le Vénézuéla deviennent la "vitrine" des Etats Unis en Amérique latine, leur point d’’appui face à Cuba. Durant 30 ans, gauche (AD) et droite "démocrate chrétienne"(COPEI) alternent au pouvoir.

2) Les alliés vénézuéliens des Etats Unis : grands propriétaires, patronat, social-démocratie, Eglise, armée

Les rapides rappels ci-dessus montrent l’’extrême importance du Vénézuéla pour les Etats Unis.

Deux raisons à cela : d’’une part la richesse du pays (particulièrement pétrole et produits agricoles), d’’autre part la possibilité ici de s’’appuyer sur des forces sociales et politiques conservatrices réelles.

- les grands propriétaires terriens disposent de réseaux clientélistes hérités de la domination espagnole : ouvriers agricoles tenus en main, caudillisme électoral, main mise sur les "polices décentralisées" qu’’ils recrutent et utilisent, lien à de nombreuses institutions religieuses locales...

- le patronat est actif, centralisé et amateur de coups d’’Etat matant ses salariés. Il contrôle des médias puissants. Il s’’est attachée la bureaucratie syndicale de CTV très attachée à ses prébendes diverses de chien-chien. Il dispose de relais dans la classe moyenne (patrons de PME, cadres de l’’industrie...).

- une social-démocratie pro-américaine et très accomodante avec les intérêts du grand patronat.

- la hiérarchie de l’’Eglise a soutenu tous les coups d’’Etat réactionnaires et a toujours été liée aux propriétaires de latifundios. Les partis de droite hérités d’’une tradition historique d’’implantation du catholicisme conservateur ( comme COPEI au Vénézuéla) ont toujours disposé d’’une implantation sociale populaire plus forte que les partis libéraux classiques. Cependant, des secteurs importants du catholicisme populaire vénézuélien sont imprégnés depuis longtemps par la "théologie de la libération".

- Une hiérarchie militaire dans laquelle les Etats Unis ont toujours trouvé les acteurs nécessaires pour installer des dictatures. Ceci dit, le rôle historique de l’’armée dans un pays comme le Vénézuéla est complexe : la laïcisation du pays, par exemple, date largement du général président Antonio Guzman Blanco qui institua l’’enseignement primaire gratuit et obligatoire, instaura le mariage civil, supprima les couvents... Quant aux cadres de l’’armée depuis les années 60, leur formation à l’’université les a souvent placés en contact avec les enseignants et groupes radicaux de l’’Université d’’où, par exemple, une certaine connaissance du marxisme parmi eux.

3) La gauche vénézuélienne : guerrilla, gauche radicale, militaires bolivariens et syndicalistes

Action Démocratique a toujours été liée aux Etats Unis et n’’a jamais cherché à défendre réellement l’’intérêt des milieux populaires. Cependant, jusqu’’à ces dernières années, il était faux de tirer un trait d’’égalité entre AD et COPEI :

- ni du point de vue de leur histoire.

- ni du point de vue de leur base militante. Le MIR (mouvement de la gauche révolutionnaire) naît d’’une scission d’’Action démocratique avant d’’impulser des guerrillas dans les années 1960

- ni du point de vue des décisions politiques gouvernementales, par exemple la nationalisation de l’’industrie pétrolière par AD en 1976 qui sera plus tard un point d’’appui pour Chavez.

Pour les militants de gauche attachés à la défense de milieux populaires particulièrement misérables au Vénézuéla, il faut reconnaître qu’’ils ont subi une répression pratiquement aussi forte de la part des gouvernements d’’Action démocratique que des dictatures militaires. La dictature militaire de Perez Jimenez puis le pouvoir autoritaire policier de Romulo Betancourt (garanties constitutionnelles plusieurs fois suspendues, liquidation physique de militants ...) convainquent une forte partie de la gauche anti-capitaliste de lutter hors du cadre légal.

Ainsi, dans les années 1960, le Parti Communiste Vénézuélien, le MIR, le PRV (Parti de la Révolution Vénézuélienne, scission du PCV) choisissent la lutte armée comme perspective stratégique (clandestinité, guerrilla, travail dans l’’armée). En 1962, des secteurs progressistes de l’’armée tentent sans succés, de renverser le gouvernement d’’Action Démocratique.

Dans les années 1960, 1970, 1980, malgré des hauts et des bas, des liens se maintiennent et se développent entre la gauche radicale, des militaires "bolivariens", des syndicalistes "lutte de classe" (qui ont créé le parti Cause Radicale).

Hugo Chavez est partie prenante de ce processus dés les années 1970 développant au sein des forces armées un réseau qui deviendra le MBR (Mouvement Bolivarien Révolutionnaire).

27 février 1989 (Caracazo) le peuple du Vénézuéla se soulève, est écrasé mais lève un espoir de changement en Amérique latine

4 février 1992 : Hugo Chavez et le MBR tentent de renverser le président assassin social-démocrate pro-américain Carlos Andrès Pérez

6 décembre 1998 : le président de la république du Vénézuéla, élu avec 56% des suffrages, se nomme Hugo Chavez !


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