Des dizaines de milliers de patrons, officiers, hauts fonctionnaires, intellectuels.. ont rampé dans une insignifiance minable de 1940 à 1943.
Comparé à eux, Robert Desnos le très mauvais élève devenu provocateur patenté apparaît comme un aigle de rigueur intellectuelle et morale, quotidiennement porteur de lumière quand il était minuit dans le siècle.
Agé de cent mille ans, j’aurai encore la force
De t’attendre ô demain présenté par l’espoir.
Sont-ce ses lectures qui lui ont insufflé le souffle de l’espérance progressiste ? Apprendre à lire dans Les Misérables l’a semble-t-il rendu imperméable à la France des profiteurs, des boursicoteurs et des conservateurs.
Et voici, Père Hugo, ton nom sur les murailles !
Tu peux te retourner au fond du Panthéon
Pour savoir qui a fait cela. Qui l’a fait ? On !
On c’est Hitler, on c’est Goebbels... C’est la racaille,
Un Laval, un Pétain, un Bonnard, un Brinon,
Ceux qui savent trahir et ceux qui font ripaille,
Ceux qui sont destinés aux justes représailles
Et cela ne fait pas un grand nombre de noms.
Ces gens de peu d’esprit et de faible culture
Ont besoin d’alibis dans leur sale aventure.
Ils ont dit : « Le bonhomme est mort. Il est dompté. »
Oui, le bonhomme est mort. Mais par devant notaire
Il a bien précisé quel legs il voulait faire :
Le notaire a nom : France et le legs : Liberté.
Sont-ce les vers d’Arthur Rimbaud ou les romans policiers qui l’ont introduit dans l’espoir politique sous la forme du merveilleux poétique ?
… Pourquoi veiller ? Jadis descendant d’un ciel tendre,
Jésus faisait pour nous des miracles annuels.
C’était Noël alors, gelant à pierre fendre
Pour ne pas maculer les pieds nus d’Emmanuel.
Nos pieds à nous sont lourds de vos glaises mouvantes,
Marais où s’enlisa le corps blanc des Jésus,
Juillet vit s’engloutir les prières savantes,
Et les Papes aux scapulaires décousus.
Et depuis nous scrutons la nuit fade et nuageuse
Dans l’espoir qu’avant l’aube en ce ciel déserté,
S’illuminant à chaque brasse, une nageuse
Conciliera l’amour avec la liberté.
(Les Veilleurs d’Arthur Rimbaud, 1923)
Sont-ce ses fréquentations d’adolescent (par exemple les derniers survivants de la Bande à Bonnot) qui ont ouvert son coeur à la fraternité humaine par delà l’horizon borné des convenances sociales, des intérêts égoïstes, des moralistes de bénitiers infectieux, des gagneurs vides de fonctions officielles ?
Sont-ce ses premiers écrits dans les revues d’avant-garde La Tribune des Jeunes (1917) puis Trait d’Union (1919) qui l’ont placé au-dessus du monde con des marchands de canon, des cadres rouages du capitalisme et des politiciens vendus ?
Ce coeur qui haïssait la guerre voilà qu’il bat pour le combat et la bataille !
Ce coeur qui ne battait qu’au rythme des marées, à celui des saisons, à celui des heures du jour et de la nuit,
Voilà qu’il se gonfle et qu’il envoie dans les veines un sang brûlant de salpêtre et de haine
Et qu’il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent
Et qu’il n’est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagne
Comme le son d’une cloche appelant à l’émeute et au combat.
Écoutez, je l’entends qui me revient renvoyé par les échos.
Mais non, c’est le bruit d’autres coeurs, de millions d’autres coeurs battant comme le mien à travers la France.
Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces coeurs,
Leur bruit est celui de la mer à l’assaut des falaises
Et tout ce sang porte dans des millions de cervelles un même mot d’ordre :
Révolte conte Hitler et mort à ses partisans !
Pourtant ce coeur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons,
Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères
Et des millions de Français se préparent dans l’ombre à la besogne que l’aube proche leur imposera.
Car ces coeurs qui haïssaient la guerre battaient pour la liberté au rythme même des saisons et des marées, du jour et de la nuit.
Poème signé sous le pseudonyme Pierre Andier, publié le 14 juillet 1943 dans la revue L’Honneur des poètes.
Sont-ce ses premiers amis du dadaïsme puis du surréalisme (Breton, Tzara, Aragon, Péret...) qui l’ont orienté vers la contestation suffisamment onirique et outrancière pour charrier l’espérance révolutionnaire ?
Jadis, les rois marchèrent dans la direction d’une étoile ni plus ni moins concrète que toi, place de l’Etoile avec ton arc, orbite où le soleil se loge comme l’oeil du ciel, randonnée aventureuse et dont le but mystérieux était peut-être toi que je sollicite, amour fatal, exclusif, et meurtrier. Si j’avais été l’un des rois, o Jésus, tu serais mort au berceau, étranglé, pour avoir interrompu si tôt mon voyage magnifique et brisé ma liberté puis, sans doute, un amour mystique m’eût enchaîné et traîné en prisonnier sur les routes du globe que j’eusse rêvé parcourir libre.
Sont-ce ses pères en journalisme (Marcel Achard, Henri Jeanson) qui lui ont insufflé la quête de vérité ?
« Le journalisme est un critérium du délire auquel la société du vingtième siècle est en proie... Un journal, au surplus, s’écrit-il avec de l’encre ? Peut-être, mais il s’écrit surtout avec du pétrole, de la margarine, du ripolin, du charbon, du coton, du caoutchouc, voire ce que vous pensez... quand il ne s’écrit pas avec du sang. »
Sont-ce les prostituées voisines de son domicile familial d’enfance qui ont ancré l’érotisme au coeur de sa personnalité et de son écriture ?
Sont-ce les boucheries de 1914 1918 ou les lunettes opaques des juges censurant La Liberté ou l’Amour qui lui ont fait comprendre la société mièvre, obtuse et assassine dans laquelle nous vivons ?
Est-ce Youki, seul grand amour de sa vie qui hante sa poésie comme Diane pour Agrippa d’Aubigné ?
Coucher avec elle
pour le sommeil côte à côte
Pour les rêves parallèles
pour la double respiration.
Coucher avec elle
Pour l’ombre unique et surprenante
Pour la même chaleur
Pour la même solitude.
Est-ce son profil de poète ivre de liberté qui permet à Pierre Berger de confier ce souvenir de Desnos quand il était minuit dans le siècle :
« Il était hallucinant d’espoir... En 1941, il engueulait publiquement les gens qui n’avaient plus la force d’attendre la victoire et sombraient dans la résignation. Et comme il avait toujours eu l’habitude de la provocation, il parlait des beaux jours comme si déjà, nous les vivions. »
Le 22 février 1944, la Gestapo l’arrête à son domicile. Direction : la prison de Fresnes, Compiègne puis le 27 avril un convoi vers les camps de concentration.
La veille de son arrivée à Buchenwald, il parcourt encore les wagons pour apporter un espoir aux morts vivants en prétextant une lecture de leurs lignes de vie.
Quelques heures avant de tomber dans le coma, il vante encore le SURREALISME comme résistance à l’obscurantisme du monde.
Le 8 juin 1945, à 5 heures du matin, l’extrême droite peut crier victoire : le poète est mort. Nous savons que l’extrême droite doit s’écraser dans l’oeuf sinon, c’est elle qui nous anéantit.
Jacques Serieys
J’ai tant rêvé de toi (poème de Robert Desnos)
Toute sa vie durant, sa courte vie, Robert Desnos l’a consacrée à la poésie, à l’écriture. Il est né en 1900 près de la Bastille, on l’imagine baguenauder dans les ruelles de ce quartier encore populaire de la capitale. Mauvais élève, il quitte très vite les bancs de l’école, ce qui ne l’empêche pas, à tout juste dix-sept ans, de publier ses premiers poèmes dans la Tribune des jeunes, revue socialiste d’alors. Déjà, il retranscrit sur des petits carnets ses rêves. En 1919, il se consacre pleinement à l’écriture et compose en alexandrins, soigneusement ordonnés en quatrains, le Fard des argaunotes. Ami de Benjamin Péret, c’est par son entremise qu’il rejoint les surréalistes qui se retrouvaient alors au Certa, un café passage de l’Opéra, où Breton organisait des soirées d’écriture poétique sous hypnose. Le 25 septembre 1922, Desnos fait un tabac auprès de ses pairs bluffés par les vers qu’il prononce en état de sommeil hypnotique. Aussitôt accepté chez les surréalistes, il est de toutes les manifestations de ce mouvement littéraire. André Breton l’évoque dans un article paru dans le Journal littéraire du 5 juillet 1924 : « Le surréalisme est à l’ordre du jour et Desnos est son prophète. »
En 1925, il entre à Paris-Soir et écrit la Liberté ou l’amour, qui sera censuré aussi sec par le tribunal de la Seine. Quelque temps après, il publie The Nigth of Loveless Nigths (la Nuit des nuits sans amour), poème de facture classique loin de l’influence surréaliste, baudelairien dans l’écriture dont la révolte sous-jacente qui pointe au détour de chaque mot ne lui vaut pas l’« excommunication » de Breton. Inclassable, son écriture oscille entre alexandrins et vers libres, entre quatrains et prose, entre tragique et révolte. Touche-à-tout, d’une curiosité insatiable, il aime la chanson, le jazz, la samba, rédigera des réclames radiophoniques ainsi que le générique du feuilleton Fantômas et même des notices pharmaceutiques !
Quand, au début des années trente, le mouvement surréaliste traverse une crise profonde, Desnos rejoint la dissidence et cosigne le troisième Cadavre, celui qui enterre Breton. La rupture est consommée. Desnos décide de poursuivre sa route poétique seul mais pas en solitaire, totalement immergé dans le chaos du monde à venir, conscient et engagé. En 1934, il adhère aux mouvements d’intellectuels antifascistes (l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires) et, en 1936, au Comité de vigilance des intellectuels antifascistes. Choqué par le refus de Blum de soutenir la République espagnole, Desnos s’éloigne de ses positions pacifistes : la France doit se préparer à la guerre pour défendre son indépendance, sa culture et son territoire, et pour faire obstacle au fascisme. Mobilisé en 1939, Desnos ne se laissera abattre ni par la défaite de juin 1940, ni par l’occupation de Paris. Il poursuit ses activités journalistiques à Aujourd’hui, le journal d’Henri Jeanson. Après l’arrestation de ce dernier, le journal est soumis à la censure allemande mais, « mine de rien », comme disait Desnos, il continue de la déjouer. Depuis juillet 1942, il fait partie du réseau Agir.
Parallèlement à ses activités clandestines, Desnos continue d’écrire. Fortunes (1942) trace le bilan des années trente. Suivent les couplets d’État de veille (1943) et de Chantefables (1944) « à chanter sur n’importe quel air ». Puis le Bain avec Andromède (1944), Contrée (1944), et les sonnets en argot, comme le Maréchal Ducono, virulente attaque contre Pétain. Arrêté le 22 février 1944, il connaîtra la prison de Fresnes, le camp de Compiègne puis ceux de Buchenwald, de Flossenbürg et Terezin. « La poésie de Desnos, c’est la poésie du courage », dira Paul Éluard lors des obsèques du poète en octobre 1945. Aragon écrira un long poème (mis en musique et chanté par Ferrat). Desnos, c’est ce « Robert le Diable » : « Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne / Comme un soir en dormant tu nous en fis récit / Accomplir jusqu’au bout ta propre prophétie / Là-bas où le destin de notre siècle saigne ».
Marie-José Sirach
Le Printemps des Poètes rend hommage à partir d’aujourd’hui, à travers une dizaine d’initiatives réparties dans toute la France, au poète et résistant Robert Desnos. A l’aune de cette célébration, Olivier Barbarant, poète et aragonien reconnu (Prix Mallarmé, Prix Tristan-Tzara), nous livre ses impressions sur cet amoureux du verbe et de la langue, auteur d’une œuvre polymorphe.
Le printemps des poètes s’apprête à célébrer l’œuvre de Robert Desnos, décédé il y a 70 ans dans le camp tragique de Térézin. Cet esprit bouillonnant, lu mais aussi écouté, est sorti de l’anonymat avec l’expérience surréaliste. Quel rôle spécifique a-t-il joué au sein de cette aventure littéraire et artistique ?
Olivier Barbarant : Plus on connaît le surréalisme, plus on se rend compte que c’était un gigantesque atelier de singularités. Les étiquettes d’école ne fonctionnent pas : il y a un surréalisme à la Eluard, un surréalisme à la Desnos, un surréalisme à la Crevel, un surréalisme à la Aragon... D’une certaine façon cette question est chaque fois biaisée car le surréalisme a fédéré des énergies mais tous ses membres avaient des singularités fortes. Le surréalisme littéral c’est celui de Breton, il l’a défini, théorisé. L’apport de Desnos dans cette aventure est d’abord l’apport des rêves. Il a fait vaciller comme personne les frontières entre imaginaire et vie consciente. La porosité entre ces deux aspects a troublé y compris les surréalistes. C’est la fameuse période dite des sommeils. Quand il rentre dans le groupe il vient apporter cet élément, qui renvoie à une affirmation de l’inconscient, à la possibilité d’exploiter même enfantinement l’imaginaire des rêves, qui ne dure qu’un temps. Cette méthode collective qui vise à rêver à voix haute a bouleversé le surréalisme et l’a fasciné. C’était une mise en contact des pulsions intimes et de l’inconscient. C’est une position différente de celle d’Aragon pour lequel le fait de ne jamais tenir la plume n’existe jamais : le poète tient la plume même quand il est tenu par elle. Cela est donc le Desnos historique. Celui qui m’intéresse le plus est celui qui a fait preuve de la plus grande liberté.
Précisément : Y a-t-il une modernité à l’œuvre dans la poétique de Desnos qui puisse faire de lui un auteur actuel, digne d’éveiller notre curiosité par delà les sommeils hypnotiques auxquels on l’a injustement réduit ?
Olivier Barbarant : Sa singularité est telle qu’il a été constamment en recherche. Il a porté jusqu’au bout des choses pas tellement surréalistes : son goût pour toutes les musiques, la critique de disque, l’intérêt pour le music-hall, la capacité aussi à travailler des textes qui ont pu être à la limite du slogan publicitaire, la proximité avec la culture populaire. Ce sont des choses qui ont toujours été assumées chez lui et peu importe que ce soit à telle date de son appartenance au mouvement surréaliste ou à telle autre. Il a fait entendre une voix très personnelle dans sa génération. Même à travers un thème aussi commun que Paris : il y a clairement un Paris de Desnos. On y sent affleurer un Paris populaire, vibrant : les Halles, la Porte Saint-Martin, Saint Mery… Tous les endroits qu’il fréquentait. Il y a donc chez Desnos une manière d’habiter la ville qui n’est ni celle des aquariums des passages parisiens d’Aragon ni celle de la quête éperdue de singularité qu’on peut retrouver chez Breton. C’est un déploiement fabuleux, somptueux, jouissif de la ville nocturne. La liberté ou l’amour ! est le récit d’une grande errance, qui met en scène une manière très particulière d’habiter la capitale.
Sur le procédé poétique lui-même, son style et son phrasé sont-ils notables et continuent-ils de nous influencer ?
Olivier Barbarant : Le discours savant peut mettre en avant plusieurs choses admirables chez Desnos. Du point de l’image poétique et du surréalisme, son apport a été celui du « langage cuit » : il a fait faire de l’imaginaire dans des structures rigides et s’est illustré par le renversement des lettres, le travail sur les anagrammes, l’utilisation du poncif retourné… Tout cela est plus contraint que l’écriture automatique sur le plan linguistique. Cela n’a rien à voir avec une grande noyade dans les écluses de l’imaginaire. « O mon crâne étoile de nacre qui s’étiole » est une de ces anagrammes et de ces retournements qui produisent des images de manière tout autre que la fabrique du surréalisme pouvait le faire. Cette entreprise est passionnante et bien des poètes des années 60/70 lui doivent sans doute énormément. Ce jeu n’est pas seulement ludique chez lui : il produit des images prodigieuses. La démarche n’est pas seulement lettriste : il s’empare du corps de la lettre et il en fait surgir l’explosion surréaliste, ce qui n’existe pas forcément chez ses collègues. Il y a aussi un travail de la voix dont on ne mesure pas toujours la portée. Le veilleur du Pont-au-Change est pour moi un des grands poèmes whitmanien à la française. Il y a un élan à hauteur d’homme. Il a trouvé une juste hauteur au lyrisme. Un lyrisme ouvert, fraternel, toujours humain et sans aucune démagogie ou sans les facilités de l’anaphore. Ce Desnos-là est bouleversant et a été décisif pour moi. Sa poésie n’est ni verticale ni un langage séparé, elle s’émancipe d’un certain corsetage. Il est celui qui assume un langage de l’homme. Ses textes ont su grâce à la spontanéité de la voix trouver les enjeux des lyrismes les plus puissants. Il y a chez lui quelque chose de Villon, une évidence dans l’écriture. C’est d’une extraordinaire modernité qui peut nous rincer d’une école française qui a été très souvent dans le langage séparé, ésotérique, emprunt d’un mauvais mallarméisme. Il y a un vrai génie laborieux des formes chez Desnos, ses vers sentent le compté, la volonté de mettre de l’ordre. Comme si les forces de l’imaginaire étaient trop puissantes et qu’il fallait les faire tenir dans une forme. Le plus libérateur des Desnos pour moi est celui qui utilise un langage à juste hauteur d’homme.
Quels textes de Desnos ont été les plus marquants pour vous ?
Olivier Barbarant : A mes yeux, un des plus beaux textes demeure, outre le recueil cinglant Les quatre sans cou, « Art poétique ». C’est un texte extraordinaire du point de vue de la rythmique et sa violence arrache Desnos à la représentation du poète pour enfants ou des jeux de mots. Un superbe alexandrin revient : « Je suis le vers témoin du souffle de mon maître », tel un combat pour accéder à la forme. Quand il m’arrive de désespérer du travail poétique, je relis « Art poétique ». Cette puissance de l’imaginaire chez Desnos n’est pas douée ou virtuose. C’est un combat pour s’extraire de la boue de la parole et accoucher d’un souffle. L’autre grand texte rythmique de Desnos est « Sol de Compiègne », qui illustre le parcours vers les camps. La réitération à l’œuvre dans ce texte trouve dans la sonorité-même quelque chose de l’âpreté de la situation historique : « craie et silex et craie et silex et craie ». Il y a là une poésie profondément de résistance, au sens le plus juste du terme : elle résiste à une réalité. L’essentiel n’est pas dans la proclamation poétique mais dans le saisissement par les signes, par les sons, par le souffle, d’une réalité rugueuse, qu’il tire. C’est rimbaldien. Marie-Claire Dumas a sa vie durant aidé à prendre la mesure d’un tel poète, au-delà des réductions légendaires. Desnos est un grand combattant du travail poétique même si à cause des chantefables et des chantefleurs aux aspects ludiques, plaisants, on sous-estime l’énergie, la puissance lyrique et respiratoire, la brusquerie. Et, ajouté à tout cela, l’humour !
Interview dans L’Humanité
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