A) L’enfer des cages au profit d’Auchan, Carrefour, Système U, Intermarché et Casino
B) Poulets industriels et santé humaine
C) Agro-industrie. Élevages intensifs, la recette de la poule au pou
D) L’élevage intensif des poulets (vidéo)
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https://www.youtube.com/watch?time_...
L’association L214, déjà connue pour des vidéos tournées dans des abattoirs, a publié une nouvelle vidéo dirigée cette fois contre l’élevage intensif de poules pondeuses GAEC du Perrat à Chaleins, dans le département de l’Ain.
Ce reportage dénonce les conditions de vie horribles des 200 000 volatiles que compte l’exploitation. On y voit des poules déplumées piétiner les cadavres en décomposition de leurs congénères, peinant à se déplacer dans des cages petites et surpeuplées. Elles sont aussi contraintes de marcher sur un sol grillagé, en pente, qui est une source de douleur et d’inconfort permanent pour elles.
Exploitées pour leurs œufs, elles ne verront jamais la lumière du jour et devront pondre jusqu’à l’épuisement dans un environnement infesté de poux et d’asticots. L’élevage intensif GAEC du Perrat approvisionne la marque Matines et les grandes enseignes de la distribution suivantes : Auchan, Carrefour, Système U, Intermarché et Casino. Suite à la publication de cette vidéo, Matines a annoncé mettre fin à sa collaboration avec cet élevage.
En 2013, l’association L214 avait déjà dénoncé l’état dramatique de cet élevage, mais la justice lui avait interdit de diffuser les images de l’exploitation. Trois ans plus tard, malgré plusieurs arrêtés préfectoraux prescrivant des mesures correctives, cette exploitation est toujours en activité.
L214 a porté plainte contre le GAEC du Perrat et a demandé aux autorités sa fermeture immédiate. Une démarche soutenue par la Fondation 30 Millions d’Amis qui s’est portée partie civile. La ministre de l’Environnement, Ségolène Royal, a demandé une inspection de l’établissement et une décision devrait être annoncée prochainement.
Source : https://www.ciwf.fr/animaux-de-ferm...
845 millions de poulets élevés chaque année en France, plus de 80% dans des élevages intensifs pour satisfaire une demande croissante de poulet à bas prix : densité de peuplement élevée, bâtiments sombres et nus, croissance rapide et problèmes de santé sont le quotidien de ces millions d’oiseaux.
Les poulets de chair sont élevés dans des conditions incompatibles avec leur bien-être :
17 à 22 poulets/m², soit moins d’une feuille A4 par poulet ;
bâtiments sombres sans aucun enrichissement (type perchoirs…) ;
sélection génétique pour atteindre le poids d’abattage le plus rapidement possible.
Des densités d’élevage excessives
Le lendemain de l’éclosion, les poussins se retrouvent dans d’énormes poulaillers sans fenêtre qui peuvent renfermer jusqu’à 40 000 individus. Et plus ils grandissent, plus leurs conditions de vie se dégradent. Cette surpopulation provoque de sérieux problèmes de bien-être et les poulets souffrent de nombreuses pathologies. Privés d’exercice essentiel pour le développement osseux, ils souffrent souvent de problèmes de locomotion. La litière n’est généralement pas changée durant la durée de vie des animaux et devient progressivement humide et chargée en ammoniac provenant des excréments. Le contact prolongé avec cette litière provoque souvent des inflammations cutanées chez les poulets.
Pattes déformées et cœur défaillant
Sélectionnés pour un rythme de croissance très élevé, ils atteignent leur poids d’abattage entre 38 et 40 jours (soit âgés de moins de 6 semaines). Deux fois plus rapidement qu’il y a 30 ans.
Ce rythme rapide est souvent associé à des problèmes de locomotion et des problèmes cardiovasculaires et respiratoires : le muscle grandit rapidement mais pas la structure des pattes, du cœur et des poumons. Des millions de poulets de chair souffrent de douloureuses déformations des pattes voire de paralysie ; ne pouvant se déplacer jusqu’aux mangeoires, certains meurent de faim ou de soif. D’autres meurent de problèmes cardiaques avant même d’atteindre leur âge d’abattage.
Des famines chroniques chez les poulets reproducteurs
Les conditions de santé des poulets de chair sont telles que beaucoup ne pourraient pas atteindre l’âge pubère de 18 semaines. C’est un sérieux problème dans le cas des poulets reproducteurs. Ces reproducteurs doivent non seulement vivre jusqu’à l’âge adulte mais également rester en assez bonne santé pour se reproduire. La solution pour ralentir leur croissance ? Les nourrir avec des rations très limitées, 25% à 50% de ce qu’ils mangeraient s’ils avaient un libre accès à la nourriture. Les reproducteurs, frustrés et stressés, souffrent chroniquement de la faim.
Conséquences pour la santé humaine
Les méthodes d’aviculture intensive ont contribué à l’apparition et à la propagation de maladies telles que la grippe aviaire, avec des conséquences mortelles pour l’Homme. Les poulets issus de l’élevage intensif sont aussi une cause commune d’intoxication alimentaire par les bactéries (salmonellose, campylobacter). Des antibiotiques sont également utilisés en grandes quantités pour prévenir et combattre des maladies liées aux conditions d’élevage intensives qui affaiblissent leur système immunitaire. Non seulement on traite les symptômes et non la cause de ces maladies, mais l’utilisation excessive des antibiotiques contribue à l’apparition de bactéries qui leur sont résistantes.
Standardisées et concentrées, les exploitations industrielles sont devenues plus vulnérables aux maladies, donc plus dépendantes de molécules pharmaceutiques. Mais à quel prix les poulaillers peuvent-ils se passer de pesticides ?
Un autre œuf est-il possible ? L’affaire de ceux contaminés au fipronil continue de courir en Europe, et avec elle la remise en question de l’industrialisation du secteur. Standardisés et concentrés, les élevages grand format seraient devenus plus vulnérables aux maladies et autres parasites, donc plus dépendants de produits pharmaceutiques et, le cas échéant, de fournisseurs malveillants. CQFD.
« Dès lors qu’il y a concentration, il y a un risque accru de contamination ou d’accident », relève Raymond Girardi, secrétaire général du Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef). Il n’en va pas que des poules et du pou rouge : la crise qu’a connue cet hiver la filière du canard, confrontée à une grave épizootie de grippe aviaire, relève du même souci. « Tout est parti d’un gros naisseur (atelier où éclosent les canetons) installé dans le Tarn, qui a vendu ses canetons contaminés aux gros ateliers de gaveurs (jeunes canards) et de prêts à gaver (canards adultes) disséminés dans le Lot et le Gers », rappelle-t-il. En quelques semaines, toute la région était contaminée. « Si l’on avait disposé d’une chaîne de production relocalisée par canton autour d’ateliers plus petits, le virus aurait été endigué. » De la même manière, la concentration complique la prévention au sein d’un seul et même élevage. Comme dans un métro bondé, miasmes et autres bestioles y passent aisément de bec en bec, compliquant la prévention et obligeant les producteurs à avoir recours à des traitements curatifs.
Des organismes de contrôle sans moyens
Le bio n’est pas complètement préservé de ce travers. Son cahier des charges lui impose de limiter les chambres d’élevage à 3 000 poules maximum. Il ne fixe aucun seuil, en revanche, concernant les bâtiments eux-mêmes. « Certains peuvent abriter 9 000, voire 12 000 poules ! » relève Philippe-André Richard, producteur d’œufs bio en Bretagne.
Lui a choisi de s’en tenir à 9 000 poules, réparties dans deux bâtiments. Il a connu quelques échecs, admet-il, « mais voilà des lustres que nous n’utilisons plus d’antibiotiques ». Les problèmes sont devenus plus rares et, quand ils surviennent, l’éleveur les traite par les plantes et les huiles essentielles.
Solution efficace ? Oui, encore faut-il accepter que certains repères changent. « Les délais d’efficacité peuvent être plus longs ou le traitement coûter plus cher. Mais c’est un choix que nous assumons », conclut Philippe-André Richard. Encore faut-il aussi y avoir accès. « Il existe énormément d’alternatives naturelles aux traitements chimiques », assure André Le Du, coprésident de la commission élevage de l’Institut technique de l’agriculture biologique (Itab). « Mais, faute de réglementation adaptée, beaucoup de ces substances n’obtiennent pas d’autorisation de mise sur les marchés. »
L’affaire du fipronil, au reste, l’a démontré : la fraude n’est pas non plus exclue dans cette filière. Sur les quelque 250 000 œufs contaminés repérés en France, plus de 48 000, commercialisés par l’enseigne Leader Price, étaient estampillés bio. Les producteurs néerlandais se seraient fait avoir en achetant un désinfectant à l’eucalyptus contaminé. « Avoir des organismes de contrôle efficaces reste indispensable », reprend Philippe-André Richard. Or, dans ce domaine, la France paraît manquer de moyens. Selon le Canard enchaîné, la direction générale de l’alimentation n’aura pu contrôler l’an dernier que 677 œufs sur… 15 milliards commercialisés.
Pour tenter de se passer totalement de tout produit, certains optent pour des microstructures. Installé dans l’Essonne, l’élevage de Charles Monville ne compte jamais plus de 250 poules. « Je n’ai jamais vu un pou rouge, et voilà dix ans que je n’ai pas eu à utiliser d’antiparasitaire », assure-t-il. La taille de son élevage lui permet de gérer en amont. « Je revends mes poules chaque année pour en prendre de nouvelles, et l’élevage change de lieu. » Chez lui, le vide sanitaire dure un mois, et le parcours extérieur où galopent ses gallinacées reste en jachère deux mois. La taille réduite de son élevage ne lui permet pas, en revanche, d’être aux normes CE et lui interdit de distribuer ses produits en grandes surfaces (pas même spécialisées bio). « Mais la vente directe me plaît et me permet de valoriser mes produits », assure encore l’éleveur. Il vend sa boîte de 6 œufs bio 3 euros, quand le prix d’un produit similaire surfe entre 2,75 euros et 3,25 euros en grande distribution.
Marie-Noëlle Bertrand, L’Humanité
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