Une mamie de 89 ans menacée d’expulsion

dimanche 20 janvier 2008.
 

Une femme turque, impotente et vivant depuis huit ans chez son fils à Woippy en Moselle, est menacée d’expulsion par la préfecture. Un élu interpelle le président de la République. "Cette dame a le droit de mourir dans la paix et la dignité, avec sa famille", plaide l’avocat de la famille.

Dilber Can a 89 ans. Cette mamie turque, née à Aksaray, près d’Ankara, souffre d’ostéoporose et de crises d’asthme. Depuis huit ans elle vit chez son fils, Omer, établi depuis 25 ans à Woippy, en Moselle. A cet âge avancé, c’est auprès des siens qu’elle espère finir ses jours. Oui, mais voilà, Dilber n’a pas de papiers et elle vient de recevoir un avis de reconduite à la frontière qui deviendra définitif le 7 février prochain. "Comment peut-on envisager de mettre une femme de bientôt 90 ans dans un centre de rétention ? Comment peut-on envisager son expulsion ? On a jamais vu cela nulle part", s’indigne sur LCI.fr l’avocat de la famille, maître Franck Colette. "Voilà le résultat de la politique des quotas. On ne réfléchit plus. On ne regarde plus. Il y a une déshumanisation totale. Est-ce cela la politique de civilisation de Monsieur Sarkozy ?", s’interroge-t-il.

"Elle ne touche aucune aide de l’Etat"

Omer, le fils de Dilber, oscille entre colère et abattement. Patron d’une boucherie à Woippy, ce père de quatre enfants, qui a la nationalité française, subvient sans problème aux besoins de toute la famille. "Ma mère est couchée, elle a besoin de moi et de ses petits-enfants au quotidien, elle ne touche aucune aide de l’Etat, elle veut juste mourir chez nous". Il reconnaît que sa mère est arrivée en France avec un passeport sans visa. Mais Can aurait demandé sa régularisation, certificat médical d’un médecin assermenté à l’appui. Le Républicain Lorrain, qui révèle l’affaire, indique qu’un autre médecin, inspecteur de la Santé publique saisi par la préfecture a, au contraire, estimé que "l’intéressée pouvait bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine" et qu’"il n’a pas paru opportun de l’admettre au séjour en France à titre dérogatoire ou pour des motifs exceptionnels ou humanitaires".

Lettre ouverte au président de la République

Maître Colette déposera le 5 février un recours devant le tribunal administratif de Strasbourg. Outre l’âge et la maladie de Dilber Can, il invoquera l’article 8 de la Convention européenne des Droits de l’Homme sur le droit à la vie privée et familiale. "Cette dame a le droit de mourir dans la paix et la dignité, avec sa famille", explique-t-il. D’ici là, l’affaire devrait faire du bruit.

René Leucart, conseiller régionale et candidat divers gauche à la mairie de Woippy aux prochaines municipales a envoyé jeudi une lettre ouverte au président de la République lui demandant de prendre une décision "honorable" dans cette affaire. "Monsieur Can est un commerçant connu et respectable, explique-t-il à LCI.fr. Quand il m’a raconté son histoire il a fondu en larmes. Je me suis effondré comme lui. Depuis que je connais cette histoire, j’ai un sentiment de honte, qui me rappelle une période noire de notre histoire. Je le dis dans ma lettre au Président. Cette vieille grand-mère ne menace pas l’ordre public. La renvoyer dans son pays, c’est l"envoyer à la mort". Egalement contactée par la rédaction, la préfecture de Lorraine a annoncé qu’elle ne communiquait pas dans l’immédiat.


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