11 novembre : Pour l’exemple

lundi 14 novembre 2022.
 

Le 11 novembre les monuments aux morts permettent de célébrer la mémoire des morts pour la France, tombés lors de la guerre de 1914-1918. On connaît tous ces listes innombrables, souvent d’ouvriers et de paysans, et on prend la mesure de la saignée de la première guerre mondiale, qui aurait dû être la « Der des Ders ». Les monuments en disent beaucoup de la mémoire nationale. Souvent ils présentent un soldat conquérant, un coq mettant à terre un aigle présomptueux. Monuments nationalistes qui esthétisent ce qu’il y a de plus vil dans l’humanité, la guerre. D’autres insistent sur la mort des soldats, les veuves et orphelins. Pourtant on célèbre moins souvent les femmes qui sont montées au front, les cent mille infirmières de guerre, dont on estime encore mal les pertes au front ou sous les bombardements. Les colonies françaises ont également lourdement payé le prix du sang : 565 000 mobilisés et 97100 tués.

Cette guerre devenue symbole du nationalisme a toujours été érigée comme illustrant la noirceur du capitalisme par le mouvement ouvrier. Jaurès a tenté jusqu’au bout de s’y opposer. À Lyon le 25 juillet 1914 il prononça un discours resté célèbre : « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ! ». Face à l’incurie du haut commandement, les troupes supporteront de plus en plus mal les ordres absurdes qui les mènent à la mort comme le rappelle la chanson de Craonne : « Adieu la vie, adieu l’amour, Adieu toutes les femmes (…) C’est nous les sacrifiés. » Elle révèle la lutte des classes souterraines : « Ceux qu’ont le pognon, ceux-là reviendront ; Car c’est pour eux qu’on crève. » Les tribunaux militaires choisissent souvent les ouvriers et les anciens syndicalistes lors des terribles opérations qui déciment des régiments pour mettre fin aux mutineries de 1917. Le Maréchal Pétain a rappelé son rôle en 1941 où se levant contre « le vent mauvais de la résistance » il a tenu à rappeler qu’il avait mis fin aux mutineries de 1917.

Le mouvement ouvrier a toujours tenu à saluer la mémoire des près de 700 fusillés pour l’exemple, parfois sans autre raison que d’être dans un régiment suspect. L’armée, les autorités de l’État s’y sont le plus souvent refusés. L’État est sélectif dans sa mémoire, mais l’histoire est têtue : un mouvement pacifiste a toujours refusé de porter les louanges de la barbarie. Les guerres portent le plus souvent des intérêts très éloignés des opprimés et l’internationalisme oppose à l’impérialisme la solidarité entre les peuples. Voilà pourquoi il y a quelques monuments pacifistes en France, certains disant « Maudite soit la guerre », d’autre rappelant les exécutions arbitraires. Sur proposition de Bastien Lachaud, l’Assemblée nationale a heureusement adopté une loi visant à réhabiliter les fusillés pour l’exemple. À Chauny, depuis 2019 un monument, érigé à l’initiative de la Libre Pensée, leur rend hommage. Souvenons-nous d’eux, pour l’exemple.

Benoit Schneckenburger


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