Au cinéma ce soir : Un secret

jeudi 11 octobre 2007.
 

Comme promis, le deuxième bonheur filmé, à ne surtout pas rater si jamais vous le voyez passer par là. « Un secret », de Claude Miller. Le bouquin était (est toujours !) de Philippe Grimbert. Difficile de vous raconter l’histoire sans flétrir, justement ce qui fait le titre du film, ce secret. On ne flétrira donc pas, promis. Juste on va effleurer, et essayer de vous donner envie d’y courir.

C’est une famille. Normale, le papa, la maman et le petit garçon, François. Il est tout seul, François, et donc il s’ennuie ferme, à tel point qu’il s’est inventé un frère, plus grand, plus fort aussi, parce que lui de ce côté-là, c’est pas bien terrible, niveau musculature, tout le contraire de ses parents. De vrais athlètes, ces deux-là, beaux comme des astres (et en vrai, les filles, le papa c’est Bruel himself ! et pour les autres, la maman, c’est Cécile de France, y a qu’à voir...).

Si beaux que le papa, il jette des regards un peu déçus sur sa descendance, c’est sûr. De plongeoirs en confidences de la copine de la famille (il y a toujours une amie de la famille qui dit les choses importantes dans le bon cinéma, ici c’est la fragile Julie Depardieu, dont je vous ai déjà dit comme elle est unique, et indispensable), le garçon va percer un secret vieux de tant et tant d’années. Un secret en forme de petit chien en peluche, un secret si terrible qu’on ne peut même pas imaginer que deux êtres si beaux... Si beaux, si bons.

La Shoah se profile, quand on croit qu’elle s’est tue. La Shoah ne se taira jamais. Elle poursuivra les survivants au-delà des générations. Elle empoisonnera leur vie pour toujours. Et ce garçon, le héros du film, il va grandir d’un seul coup, parce que cette saleté absolue se faufile dans la douceur de sa vie, comme une gangrène. Il faudrait pouvoir vous raconter les scènes les plus poignantes. Mais ce serait déflorer le secret et on n’a pas le droit. Il faut que vous gardiez l’envie d’aller voir. Claude Miller, le cinéaste de l’enfance malmenée. L’héritier de Truffaut, incontestablement.

Vous vous souvenez de la tendresse mise à filmer Charlotte Gainsbourg, dans l’Effrontée, bien sûr, mais surtout dans la Petite Voleuse ? Vous vous souvenez de ce qu’il avait fait de Serrault dans « Garde à vue » ? Eh bien voilà. Miller, il sait transcender les images, rendre les gens « autrement », les illuminer même dans le désespoir. Regardez Patrick Bruel. Et oubliez définitivement le soi-disant crooner. Un acteur, un vrai ! Magnifique de passion et d’amour et de culpabilité dévorante.

Ne loupez pas non plus les rares apparitions de la douce Ludivine Sagnier, encore une qui promet, dîtes donc. Et en filigrane, l’hymne aux corps. Très bizarrement en les voyant, on pense aux statues d’Arno Breker. On frôle le malaise. Mais j’ai entendu par la suite Miller revendiquer ce raccourci, alors, plus rien à dire. Un dernier mot, l’autre soir je relisais le livre dans le train qui me ramenait de Dijon. Aux dernières pages, je me suis surprise à pleurer comme une gamine. Les gens dans le wagon ont dû croire je ne sais trop quoi... Je m’en fous. Il faut savoir pleurer sur un livre simplement parce qu’il est beau, et qu’il fait bouger tout au fond de nous LA question essentielle : et moi, j’aurais fait quoi ?

brigitte blang prs57


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