À la fête de l’Huma Roussel dénonce « la France des allocs », Mélenchon s’attaque aux super-profits

dimanche 18 septembre 2022.
 

700 millions d’euros de fraude sociale. 80 milliards de fraude fiscale. Les plus gros assistés, c’est ceux d’en haut. Le plus grand combat, c’est contre le capital. Un constat unanimement partagé à gauche ? La NUPES a en effet réussi à faire de la taxe sur les super-profits le sujet à l’agenda politique de cette rentrée. Pourtant, à la fête de l’Humanité, qui se tient ce weekend dans son nouveau site de Brétigny-sur-Orge (Essonne), Fabien Roussel a choisi de cibler un autre adversaire : « la France des allocs ».

Pour le moins surprenant, pour quelqu’un de gauche. Jean-Luc Mélenchon lui a répondu, à l’occasion d’un grand entretien sur l’Agora de l’Humanité ce samedi midi. Notre article.

Opposer « la France qui travaille » à « la France des assistés », est bien un discours banalement, tristement, de droite

S’attaquer à la « France des allocs » plutôt qu’au capital, quand on se dit « communiste », quand on se dit de « gauche » ? Surprenant. C’est pourtant le chemin emprunté par Fabien Roussel, Secrétaire national du Parti communiste français, ce week-end à la fête de l’Humanité. Celui qui a rassemblé 2% des voix à la dernière élection présidentielle, critique régulier de la NUPES, l’alliance historique de gauche qui lui a pourtant permis de se faire réélire député, a choisi une nouvelle fois de dégoupiller sur sa droite.

Car opposer « la France qui travaille » à « la France des assistés », est bien un discours banalement, tristement, de droite. Il semble donc utile de rappeler les bases au Secrétaire national du Parti communiste français : ceux qui se gavent, ce ne sont pas les assistés d’en bas, mais les assistés d’en haut. Deux chiffres. 724 millions d’euros. C’est le montant de la fraude aux cotisations sociales. 80 à 100 milliards d’euros. C’est le montant estimé de la fraude fiscale.

Quand Fabien Roussel se trompe une nouvelle fois d’adversaire

Faire en sorte que le peuple arrête de se diviser et relève la tête vers l’ennemi commun, le capital, c’est même censé être la raison d’être du parti de Fabien Roussel. Dans un pays où 5 milliardaires confisquent autant de richesses que 27 millions de personnes, dans un pays de nouveau champion d’Europe des dividendes, dans un pays où les milliardaires ont engrangé 236 milliards d’euros supplémentaires en 19 mois de crise sanitaire, le Secrétaire national du Parti communiste français se trompe piteusement de cible.

Les « assistés » à traquer ne sont pas du côté de « la France des allocs », quand, au passage, 60% des personnes qui devraient bénéficier du RSA ne le réclament pas, quand le non-recourt aux droits sociaux est un drame qui enfonce des millions de personne dans la misère. Les « assistés » à traquer sont ceux d’en haut, ceux qu’on ne voit jamais. Démasquer les profiteurs de crise, le grand capital qui confisque toutes les richesses et qui se gave sur le dos du travail, c’est le combat historique de la gauche. Stigmatiser les pauvres, c’est celui de la droite.

Mais ce n’est pas la première fois que Fabien Roussel sert d’idiot utile à la droite. Toute la campagne présidentielle, le Secrétaire national du Parti communiste français a préféré s’attaquer à Jean-Luc Mélenchon, plutôt que de concentrer ses coups sur le capital et l’extrême-droite. Mais pour reconquérir les classes populaires, trahies par le PS, adopter un discours de droite ne semble pas être efficace. Les faits sont têtus : Fabien Roussel a fait 2%, Jean-Luc Mélenchon 22%.

Le combat pour démasquer l’alliance de l’extrême-droite avec le capital, contre les travailleurs

Et Jean-Luc Mélenchon, le leader de la gauche a attiré une partie non-négligeable des classes populaires : 31% de ceux qui gagnent moins de 900 euros, 30% des chômeurs, 33% des salariés en CDD et 27% des intérimaires ont voté Jean-Luc Mélenchon. Si, bien évidemment, il faut que les insoumis et leurs nouveaux alliés livrent la bataille chaque jour sur le terrain pour arracher une par une les classes populaires à l’extrême-droite, le combat est mené pour démasquer Le Rassemblement National (RN) à l’Assemblée nationale et dans le pays.

Nous vous racontions dans nos colonnes un épisode des caravanes populaires qui ont sillonné la France cet été. « À Metz, au Sablon, terrain de pétanques, on rencontre des électeurs RN. 40 à 60 ans, des chauffeurs routiers, retraités, ouvriers… Un ancien bastion ouvrier. On lance la discussion. On leur dit que le RN a voté contre l’augmentation du SMIC. L’intégralité des gens présents ne nous croit pas.

On est obligé de sortir nos téléphones, d’aller chercher les votes à l’Assemblée, de leur montrer les votes du RN et de Le Pen. Et là, il se passe un truc : « on a voté pour eux pour le pouvoir d’achat on n’a pas de quoi payer 4 jours à la mer à nos enfants et ils nous font ça ? ». Nous on est là, pas d’échéance électorale, on est là les insoumis pour vous raconter ce qu’il se passe à l’Assemblée.

On a parlé de tous pleins de problèmes sociaux. Et à aucun moment le racisme et l’immigration n’est venu dans la discussion. On a fini par rester. Alors qu’il y avait Leïla, Shéhérazade et Livia, il n’y avait aucune animosité. Jamais je n’ai vécu un échange politique avec moins d’animosité que ce moment-là. Avec nos opposants politiques majeurs, le Rassemblement national ! On était heureux. On a fait la partie de pétanque avec eux ».

Alors que 89 députés du RN ont fait leur entrée glaçante à l’Assemblée (suivez notre série de sur les députés RN), que le parti présidentiel ne cesse de lui servir de dangereux tremplin, l’urgence est bien de démasquer l’extrême-droite plutôt que d’être tenté de jouer sur son terrain.

Jean-Luc Mélenchon et le reste de la NUPES se concentrent sur la bataille pour taxer les super-profits

« Il y a des discours (à gauche) qui ne passent pas » auprès des électeurs, a affirmé Fabien Roussel vendredi soir à la fête de l’Huma. Son discours sur « la France des allocs » n’est visiblement pas très bien passé auprès des militants et sympathisants communistes croisés dans les travées de la fête. Ce, alors même que la NUPES a réussi à s’attaquer au capital en cette rentrée, faisant de la taxe super-profits un sujet majeur de l’agenda politique.

Manuel Bompard (LFI), député LFI-NUPES et co-rapporteur de la mission d’information sur les superprofits, Olivier Faure, député PS-NUPES et premier secrétaire du Parti socialiste, Elsa Faucillon, députée PCF-NUPES, Sophia Taillé-Polian, députée Génération.s-NUPES, et Manon Aubry, co-présidente du groupe La Gauche au Parlement européen, tenaient justement un débat conjoint sur les super-profits ce vendredi sur le stand de LFI sur la fête de l’Huma.

Ce samedi midi, Jean-Luc Mélenchon est venu remettre les points sur les I : « rappelez-vous toujours que ce n’est pas le capital qui crée la richesse : c’est le travail, et rien d’autre. Les cotisations sociales ne sont pas une faveur, c’est votre propre paye. Dire que le système est généreux ne veut rien dire ». Et d’appeler à l’union populaire face au capital et à l’extrême-droite : « la meilleure manière pour les fascistes d’empêcher la lutte de classes, c’est de la dévier en racisme, dans la lutte contre les musulmans, contre tout ce que vous voulez sauf le capital. C’est pourquoi on ne peut avancer sans mener la lutte contre le racisme et l’islamophobie ».

Et d’enfoncer le clou : « taxer les super-profits, c’est montrer qui est l’adversaire : ceux qui ont profité, ceux qui se sont gavés, le système qui rend ça possible. C’est pédagogique : l’ennemi ce n’est pas l’immigré, c’est le banquier. La taxe super-profits, c’est le combat de la rentrée ». De même, Mathilde Panot qui débattait avec Ségolène Royal sur le stand de LFI cet après-midi a dénoncé les mots de Fabien Roussel : « on ne peut pas combattre les libéraux et l’extrême-droite en reprenant leurs mots ». Ovation totale sur le stand. L’insoumission.fr, accusée d’alimenter « la haine des riches » selon LCI pour avoir cité le regretté François Delapierre, est prête pour la bataille culturelle. Contre ceux d’en haut, pas contre ceux d’en bas.

Par Pierre Joigneaux.


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