Fin de vie : établir une nouvelle liberté

lundi 12 avril 2021.
 

Intervention de Jean-Luc Mélenchon à l’Assemblée nationale le 8 avril 2021 dans le cadre du débat sur la proposition de loi visant à « donner et garantir le droit à une fin de vie libre et choisie ». Voici la retranscription de cette intervention :

Après ce vote, sachant que le chemin qui conduit jusqu’à l’accomplissement de cette idée n’est pas fini, pensant qu’une première fois en 2018 le texte a été déposé, ce soir il a fait un pas de plus. Et, sans doute, allons-nous encore nous retrouver jusqu’à ce que l’idée finisse par s’épanouir. Peut-être collègues parviendrez-vous à convaincre tout le monde que c’est une erreur, peut-être que nous, nous parviendrons à comprendre qu’il ne s’agit que d’établir une liberté. Que d’établir une liberté. Vous autres qui êtes croyants, vous qui avez, je crois avec une totale sincérité, défendu l’idée que le premier devoir était celui de la main tendue au plus faible, vous devez entendre la racine de notre conviction philosophique. Dans notre idée, l’être humain – et tel est l’humanisme fondateur – l’être humain est auteur de son histoire. Je sais que nous divergeons sur ce point, collègue Potier, je te respecte dans ta conviction, tu le sais. Mais nous, nous croyons ça et par conséquent chaque pas qui rend une personne plus maîtresse d’elle-même quelles que soient les circonstances, est un pas qui nous fait avancer en humanité, même quand c’est un pas cruel parce que c’est une responsabilité terrible de décider d’éteindre la lumière.

C’est pourquoi collègue Le Fur, tu ne dois pas t’étonner qu’on y ait mis tant de passion. Beaucoup d’entre nous ont été convaincus chemin faisant dans leur vie, ils n’avaient pas cette idée au départ. Et nous avons tous su à quel point c’était difficile d’admettre l’idée que la liberté la plus grande dont on peut jouir c’est celle de se dominer et de se posséder soi-même. Notre collègue a parfaitement eu raison de le dire, c’est de même nature que la liberté de l’IVG. C’est la liberté d’être soi-même maître et possesseur et créateur de soi. Voilà collègues, il n’y a aucune haine entre nous, il n’y a qu’un rapport de conviction. Et c’est pourquoi à cet instant et en félicitant ceux qui ont eu l’initiative de nous amener jusqu’à ce point ce soir, sans aucun esprit de revanche ou de je ne sais quelle domination sur ceux qui ne sont pas de notre avis, ma pensée se tourne vers les courageux militants de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, qui souvent ont convaincu beaucoup d’entre nous et leur président monsieur Jean-Luc Romero, qui n’est pas de mon parti politique, à qui j’adresse et je pense que maints d’entre vous se joindront à moi pour cet instant pour lui dire notre affection et notre respect, car nous sommes à cet instant les dépositaires d’un combat qu’ils ont conduit.

Nous nous retrouverons collègues, il n’y a pas besoin de se précipiter, c’est dur de convaincre. C’est un sujet qui est tellement délicat, on ne peut pas contraindre, on ne peut que convaincre. Mais dites-vous collègues que pas fois une fois nous ne vous retirerons à l’un ou l’autre d’entre vous, femme ou homme, le droit pour vous-même, dans votre foi et votre conviction, d’endurer ce que vous aurez à endurer pour tenir vos choix, et que nous le respecterons. Mais nous, nous voulons qu’à l’heure d’éteindre la lumière de sa propre décision, quelqu’un nous tienne la main et que ce soit une main aimante et aidante. »


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