Les dessous du glyphosate

samedi 21 octobre 2017.
 

Le débat sur l’interdiction du glyphosate est un révélateur politique, géopolitique et même culturel. Bien que l’OMS ait établi depuis plusieurs années que cette molécule désherbante est « probablement » cancérigène et génotoxique, l’agriculture productiviste s’y attache aveuglément.

Au point d’affirmer, de concert avec le gouvernement, qu’il n’existe pas aujourd’hui d’alternative au désherbage chimique des sols agricoles. Un grossier mensonge qui fait de ceux qui le propagent des industriels de l’ignorance. L’agriculture biologique démontre en effet que toutes les productions agricoles sont possibles sans désherbants. Même des agriculteurs non bios y arrivent en renouant avec une des bases de leur métier : le travail du sol ! Soit en le désherbant mécaniquement par le labour, soit en semant des plantes auxiliaires qui permettent d’éliminer les plantes concurrentes des cultures, ou de les faire tourner intelligemment. Ces pratiques « alternatives » ne sont en rien innovantes ou pionnières puisque l’essentiel de l’humanité se nourrit grâce à une agriculture qui n’utilise pas de désherbant. La principale différence est une bonne nouvelle pour le pays : il faut travailler plus et donc créer des emplois dans l’agriculture. Accompagner financièrement cette mutation écologique et humaine de l’agriculture serait bien plus utile au pays que d’investir dans la recherche d’alternatives chimiques au glyphosate pour trouver de nouvelles molécules tueuses, comme le font actuellement les firmes avec le soutien du gouvernement.

Car le glyphosate n’est pas qu’un enjeu écologique et sanitaire, c’est aussi un révélateur géopolitique et démocratique. Ce poison est défendu dans les institutions européennes par l’Allemagne d’Angela Merkel qui soutient également l’absorption par la firme allemande Bayer du principal producteur mondial de glyphosate : Monsanto. Les firmes font littéralement la loi européenne en matière d’autorisation ou d’interdiction de produit puisque les agences européennes d’évaluation n’utilisent que des études réalisées par les firmes. Ce système européen est ainsi totalement disqualifié en matière sanitaire : en continuant de permettre l’épandage de millions de litres de pesticides cancérigènes probables, les institutions européennes faillissent dans leur responsabilité élémentaire de protéger les populations. Tout comme le gouvernement français qui n’a rien fait jusqu’ici pour contribuer réellement à l’interdiction du glyphosate.

Ces choix traduisent une politique de l’ignorance au profit d’un agrobusiness qui tue les sols. Cette « terre » qui est le principal réservoir, souvent microscopique, de la biodiversité émergée. Et qui, sans désherbant, a assuré l’essentiel de la subsistance de l’humanité depuis 10 000 ans. Au point que l’espèce humaine a baptisé sa planète « Terre », du même nom que le sol qui la nourrit.

Laurent Maffeïs


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