Pourquoi Jean-Luc Mélenchon n’a pas pris position pour appeler à faire barrage au FN en votant Macron.

mercredi 10 mai 2017.
 

La première raison tient au respect de la nature sociale et politique du mouvement France Insoumise.

Il ne s’agit pas d’un parti politique mais d’une collectivité d’individus se retrouvant ensemble autour d’un programme "l’Avenir en commun", lui-même le résultat d’un travail collectif. Rappelons que ce programme a été considéré par Amnesty international comme le programme le plus favorable aux libertés.

Les membres de ce vaste mouvement de quelques 480 000 personnes d’origines culturelles et politiques très diverses jouissent de toute liberté de penser et d’action. Ils n’ont pas besoin d’un chef pour savoir quelle décision prendre et ont justement rejoint France insoumise principalement pour cette raison.

Jean-Luc Mélenchon, contrairement à l’image que les médias se sont acharnés à faire passer, n’est pas un chef, un gourou, un guide, un berger. Il accompagne ce mouvement qu’il a contribué avec d’autres à créer et à organiser en assurant sa cohérence et son unité autour du programme l’Avenir en commun et sa quarantaine de livrets thématiques.

Considérant les membres de ce mouvement comme des citoyens maîtres et responsables de leur jugement, il n’a pas jugé nécessaire et même utile de donner une consigne de vote.

Il faut néanmoins remarquer que dans le choix proposé sur la plate-forme JLM 2017, la possibilité du vote Marine Le Pen est exclu, ne serait-ce que du fait que le contenu du programme l’Avenir en commun est en très grande contradiction avec celui du FN.

Contrairement à un parti politique qui implique une discipline et une prédominance d’un organe central et du chef de parti, le mouvement France Insoumise n’a pas de structure d’appareil et ne fonctionne pas de la même manière. Il y a eu changement de paradigme dans la manière de faire de la politique.

Faute de connaître ce mouvement d’une manière précise et d’avoir compris la philosophie politique qui le sous-tend, la plupart des responsables politiques des appareils traditionnels et des journalistes des appareils médiatiques n’ont pas compris grand-chose à la nature de ce mouvement qui échappe à leurs codes.

Vu de loin, on aperçoit un orateur tribun de talent et une foule de "supporters" venant admirer leur "homme providentiel" au "panache blanc". Mais la réalité de terrain de la France insoumise est loin de se réduire à cette image simplificatrice dont le caractère spectaculaire alimente avec parcimonie les grands médias. Les insoumis ont fait preuve de beaucoup d’initiative et d’imagination sans attendre de consignes durant la campagne électorale.

Prisonniers de leurs vieux schémas et d’une vision étriquée de la démocratie, ils accusent bêtement Mélenchon de ne pas avoir pris position pour faire barrage à Le Pen en éliminant la possibilité du vote blanc ou de l’abstention considérant les insoumis comme des êtres soumis et obéissants à un chef. Ces "observateurs", bizarrement souvent agressifs, n’ont rien compris et se transforment alors en donneurs de leçons de démocratie.

Rappelons tout de même deux évidences :

- c’est la politique du gouvernement Hollande et de Macron qui a considérablement renforcé le FN ;

- c’est l’absence du report d’une partie des voix obtenues par Benoît Hamon vers Mélenchon qui a conduit à la qualification de Marine Le Pen et à l’élimination de Mélenchon. En prenant simplement la moitié du pourcentage de Benoît Hamon et celui de Mélenchon, on obtient : 3, 3 % + 19, 6 % = 22, 9 % alors que le score de Mme Le Pen s’élève à 21, 7 %.

Alors les donneurs de leçons devraient plutôt se taire en prétendant que Mélenchon pourrait être la cause de l’élection de Marine Le Pen. Les électeurs ne sont pas des pantins et n’obéissent pas à des consignes comme des soldats à leur état-major.

La deuxième raison de l’absence de prise de position de Mélenchon en faveur de Macron est stratégique. D’abord une partie des insoumis ne supporterait pas cette prise de position. Ensuite, si Mélenchon prenait parti pour Macron, il sera accusé d’avoir influencé France insoumise et d’être responsable avec ce mouvement de la politique économique calamiteuse prévisible de celui qu’ils auront contribué à faire élire. Alors plus aucune perspective pour les classes exploitées sinon que celle du FN. Un véritable suicide politique France insoumise. On mesure alors l’irresponsabilité et l’inconséquence de ces donneurs de leçons qui devraient prendre un peu plus de temps pour analyser et réfléchir. À moins, pour certains d’entre eux, de vouloir nuire au mouvement France insoumise et attirer de nouvelles ouailles dans un PS délabré.

Hervé Debonrivage


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