Il est surprenant que peu de personnes l’ait remarqué. En épluchant de près le programme du candidat de la droite, François Fillon, j’ai trouvé l’extrait suivant du point 4 :
« Supprimer les multiples taxes qui pèsent sur la masse salariale (cotisations FNAL, versement transport, taxes CNSA, taxe sur les véhicules de tourisme, contribution apprentissage). ».
Le diable se niche dans les détails. Ainsi dans cette parenthèse, au milieu d’une page, François Fillon propose la suppression du « versement transport ». Or il ne s’agit pas d’un détail. En effet, dans la quasi-totalité des grandes villes les employeurs de plus de 11 salariés participent au financement des transports en commun par un versement proportionnel à leur masse salariale. En effet, si les salariés devaient payer au prix coûtant leur transport en commun, beaucoup ne pourraient pas se rendre à leur travail, si ce n’est en voiture (et si ils en ont une), entraînant par la même la paralysie de la circulation et l’asphyxie des villes. Le versement transport est loin d’être négligeable, les 7,5 milliards d’€ de ressource nationalement peuvent représenter entre 40 et 60% du financement des transports en commun. Sa suppression entraînerait la faillite de plusieurs réseaux urbains de transport et une forte réduction de l’offre de transport collectif ; un déficit croissant des collectivités locales qui sont les autorités organisatrices du transport ; et une augmentation gigantesque des titres de transport pour tous les usagers. Si cette mesure passait, nous assisterions à un recul social et environnemental. Un recul social car l’augmentation des tarifs entraînerait une perte de pouvoir d’achat pour tous les citoyens et de multiples plans de licenciements ; un recul environnemental car le développement des transports en commun au détriment de la circulation automobile est un moyen essentiel de la lutte contre le réchauffement climatique et la pollution. Une bonne part du Versement transport est consacrée à l’investissement, ce qui a permis aux grandes villes françaises de relancer les trams notamment. Sans versement transport comment financer la future ligne 5 du tram ?
Il est à noter qu’une partie du patronat a historiquement défendu l’idée de ce versement transport au nom de leur intérêt bien compris en permettant à leurs salariés de se rendre au travail. Ce temps est derrière nous quand on voit les barons du MEDEF réclamer depuis plusieurs années la suppression de ce versement transport.
D’ailleurs, en épluchant la litanie des rapports pondus par les experts libéraux de ces dernières années on trouve toujours cette proposition, par exemple dans le rapport Attali co-rédigé par un certain Emmanuel Macron !
François Fillon affirme qu’il compensera cette baisse de recettes par une hausse de deux points de la TVA. Cela ne règle rien bien au contraire, pour deux raisons. D’une part, la TVA est l’impôt le plus injuste car il est proportionnellement plus élevé pour les revenus les plus pauvres ; son augmentation de deux points est une agression directe de leur pouvoir d’achat. Cela répond très bien par contre à la volonté de tous les libéraux, qui, sous des formes différentes, de Fillon à Macron, proposent de transférer vers les ménages une partie des prélèvements sur les entreprises. D’autre part, la TVA qui n’est pas une ressource dédiée contribue au budget général de l’Etat qui est libre de l’utiliser comme il le veut. Alors que le versement transport est une ressource dédiée, obligatoirement versée au budget des transports. Il ne s’agit donc nullement d’une question mineure. Je reviendrai dans une autre note sur les conséquences tout aussi catastrophiques d’autres suppressions de taxes.
J’en appelle à tous les usagers des transports en commun, à leurs associations, aux élus attachés aux services publics de transport : mobilisons-nous pour le maintien du versement transport et du financement collectif des transports en commun. En agissant nous enrichirons le programme de la France insoumise et de son candidat Jean-Luc Mélenchon, notamment dans son point 47 (page 77) :
« Défendre et reconstruire le maillage de transports en commun et de services publics sur tous le territoire ».
Sur chacun de nos territoires, nous ne manquons pas de propositions concrètes pour décliner une telle exigence.
René Revol
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