Jacques Prévert : poèmes inoubliables

mercredi 7 février 2024.
 

Poète engagé et dérangeant pour les réacs et les imbéciles, né le 4 février 1900, il fait partie des plus grands poètes du 20ème siècle.

Jacques Prévert, poète anti-conformiste et révolutionnaire

- 10) Les feuilles mortes

- 9) Le cancre

- 8) Vive la grève

- 7) Le temps perdu

- 6) Les clefs de la ville

- 5) L’avènement d’Hitler

- 4) PATER NOSTER

- 3) Inventaire

- 2) Etranges étrangers

- 1) Chasse à l’enfant

Le 11 avril 2007, Jacques Prévert s’en allait suivre les escargots, ceux qui vont à l’enterrement d’une feuille morte

10) Les feuilles mortes->9080]

9) Le cancre (Jacques Prévert)

8) Face au "bordel capitaliste"... Vive la grève (Jacques Prévert)

7) Le temps perdu (Jacques Prévert)

6) Les clefs de la ville

Les clefs de la ville

Sont tachées de sang

L’Amiral et les rats ont quitté le navire

Depuis longtemps

Sœur Anne ma sœur Anne

Ne vois-tu rien venir

Je vois dans la misère le pied nu d’un enfant

Et le cœur de l’été

Déjà serré entre les glaces de l’hiver

Je vois dans la poussière des ruines de la guerre

Des chevaliers d’industrie lourde

A cheval sur des officiers de cavalerie légère

Qui paradent sous l’arc

Dans une musique de cirque

Et des maîtres de forges

Des maîtres de ballet

Dirigeant un quadrille immobile et glacé

Où de pauvres familles

Debout devant le buffet

Regardent sans rien dire leurs frères libérés

Leurs frères libérés

A nouveau menacés

Par un vieux monde sénile exemplaire et taré

Et je te vois Marianne

Ma pauvre petite sœur

Pendue encore une fois

Dans le cabinet noir de l’histoire

Cravatée de la Légion d’Honneur

Et je vois

Barbe bleue blanc rouge

Impassible et souriant

Remettant

Remettant les clefs tachées de sang

Aux grands serviteurs de l’Ordre

L’Ordre des grandes puissances d’argent.

5) L’avènement d’Hitler (Jacques Prévert)

4) PATER NOSTER (Jacques Prévert)

3) Inventaire (Jacques Prévert)

2) Etranges étrangers (Jacques Prévert)

Pour accéder à cette poésie, cliquer sur le titre 2 ci-dessus.

1) Chasse à l’enfant

A Marianne Oswald

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

Au-dessus de l’île on voit des oiseaux

Tout autour de l’île il y a de l’eau

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

Qu’est-ce que c’est que ces hurlements

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

C’est la meute des honnêtes gens

Qui fait la chasse à l’enfant

Il avait dit J’en ai assez de la maison de redressement

Et les gardiens à coups de clefs lui avaient brisé les dents

Et puis ils l’avaient laissé étendu sur le ciment

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

Maintenant il s’est sauvé

Et comme une bête traquée

Il galope dans la nuit

Et tous galopent après lui

Les gendarmes les touristes les rentiers les artistes

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

C’est la meute des honnêtes gens

Qui fait la chasse à l’enfant

Pour chasser l’enfant pas besoin de permis

Tous les braves gens s’y sont mis

Qu’est-ce qui nage dans la nuit

Quels sont ces éclairs et ces bruits

C’est un enfant qui s’enfuit

On tire sur lui à coups de fusil

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

Tous ces messieurs sur le rivage

Sont bredouilles et verts de rage

Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !

Rejoindras-tu le continent rejoindras-tu le continent

Au-dessus de l’île on voit des oiseaux

Tout autour de l’île il y a de l’eau.

Ce poème-là, d’abord pour sa dédicace à Marianne Oswald, « la petite sœur des poètes », née à Sarreguemines. Son vrai nom, c’était Alice Bloch... Dès 40, elle est partie aux Amériques. Ceci explique peut-être cela ?!

Ensuite, pour l’histoire qui l’entoure : au début des années trente, Belle-Ile-en Mer était un bagne d’enfants. Un bagne d’enfants... Entendez-vous ce que le télescopage de ces mots « bagne » et « enfant » a d’indécent ? Bref, en ce temps-là, des petits « bagnards » s’étaient évadés de l’endroit, un peu las des violences de leurs G.O. de l’époque. On promit une prime à qui aiderait à capturer les fuyards... 20 francs par gamin attrapé... 20 francs, le prix d’un gosse, pas mal, non ? Que croyez-vous qu’il arriva ? Tout le monde s’y est mis. Les habitants de l’île, bien sûr, mais aussi les vacanciers (de pas encore les congés payés...), tiens, on ne sait jamais, vingt francs, ça pourrait faire une petite rallonge à la villégiature. C’était à Belle-Ile, en 1934. Pensez-y, quand votre bateau accostera au cours de l’une ou l’autre de vos balades. Pour moi, quand j’entends Laurent Voulzy (Belle-Ile en mer, Marie-Galante, la la la...) c’est à ces petits-là que va ma pensée, à eux aussi, à eux surtout...

brigitte blang prs 57


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