Un « foyer infectieux » au Parti socialiste selon Macron ? (par Gérard Filoche)

vendredi 3 avril 2015.
 

Sauver le Parti socialiste, imposer une politique de gauche En combattant pour cela, sommes nous un « foyer infectieux » ? Des « fainéants » ?

Une pratique nouvelle, mais haïssable, a tendance à se développer sous le gouvernement Valls. C’est le temps des anathèmes et des insultes qui renait.

Forcément, un gouvernement pour lequel 95 % des socialistes n’ont pas voté, un gouvernement qui exclut de ses rangs la majorité des socialistes et la majorité de la gauche, se trouve légitimement contesté. Etant donné qu’il est minoritaire, qu’il dirige sur une « tête d’épingle », il devrait pourtant entendre, comprendre, intégrer les contestations car sinon il lui faut il se raidir et passer en force. Dans ce dernier cas manifestement choisi par Valls, les méthodes autoritaires, les rappels à la discipline, les menaces, les violences, les insultes réapparaissent quasi automatiquement.

Au point qu’il faut que le président lui-même reçoive les « frondeurs » pour adoucir et normaliser les rapports

Déjà Valls, ministre de l’intérieur, sous Jean-Marc Ayrault, le 31 mai 2013, avait traité Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale « d’irresponsable, démagogique, nocif ». Il n’avait pas été rappelé à l’ordre, ni traduit devant une quelconque « haute autorité » aussi continue t il de façon récurrente. Devenu Premier ministre, il se laisse aller et procède par coups de force, il impose à François Hollande le limogeage de Arnaud Montebourg et de Benoit Hamon, lesquels l’avaient pourtant porté au poste qu’il occupe.

Des menaces d’exclusion systématique commencent à pleuvoir : en cas de refus de la « confiance », en cas de « non vote du budget », en cas de non soumission aux choix libéraux imposés. Dissolution, exclusions, sanctions, haute autorité, tout devient nécessaire pour imposer son pouvoir minoritaire contre la majorité légitime du parti socialiste. Quand ce n’est pas Valls qui s’y colle, c’est le premier secrétaire du PS qui se voit contraint de relayer. Admonestations dans les médias, polémiques artificielles, « resserrez les rangs », « silence derrière le chef », tout est bon et inévitable pour défendre le petit, trop petit, pré carré de Valls.

C’est une pratique violente, ferme, avec des avancées et des reculs, qui avait servi à Tony Blair pour prendre à l’arrache, le contrôle du Labour party : il avait alterné agressions et flatteries, menacé et divisé ses opposants, avant d’imposer une rupture avec les syndicats, avec les références de la gauche traditionnelle, et de créer le « New labour » qui se coula dans les traces de Margaret Thatcher sans en effacer les stigmates.

Valls ne pratique lui aussi que le forcing, tentant d’accréditer devant le Conseil national du PS que la « gauche peut mourir » alors qu’elle recule du seul fait de sa politique. Il mène campagne contre les socialistes de gauche. Il désigne le seul FN comme enenmi central au risque de le faire grossier. Il envoie un ministre comme Jean-Marie le Guen arracher la signature de dix députés socialistes pour qualifier le Code du travail de « répulsif pour l’emploi » et dénigrer ceux qui le défendent.

Il prend parti publiquement, hors de toute précaution, de toute règle démocratique, en pleine Assemblée nationale, le 20 octobre 2014 pour honorer un PDG de Total – qui vole la France – et demande à ce qu’un membre du BN de son parti soit exclu du PS pour avoir mis en doute celui qui est son parrain. Deux jours après, Benoit Hamon se voit, parce qu’il mis en cause sa politique prié de quitter le Parti socialiste par le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll.

Il s’attaque à la CGT dont il exige, le 29 octobre 2014, que son secrétaire, impose « l’exemplarité à tous les niveaux ». Il attaque carrément le PS comme étant une « gauche passéiste ». Il ose même réclamer de renoncer à l’appellation « socialiste ». Il vient, en criant, tout rouge, apoplectique, en réunion de groupe parlementaire, gronder les députés « frondeurs » comme s’ils étaient des enfants insuffisamment disciplinés en cour de récréation. Puis anti démocratiquement, constatant qu’il n’a manifestement toujours pas de majorité, il choisit d’imposer un « 49 3 », au groupe parlementaire faute d’avoir pu les terroriser pour qu’ils votent une loi à 100 % étrangère au programme socialiste, à la gauche, son histoire, à ses espérances.

Tout cela indique ce qui arrivera si le congrès de Poitiers du Parti socialiste devait, par malheur, donner le pouvoir qu’il n’a pas, à Manuel Valls et ses amis.

Mais avec le projet de loi Macron un pas supplémentaire a été franchi qu’on ne peut laisser passer sans crier « stop » : le ministre a traité les frondeurs de « fainéants » et expliqué qu’ils étaient « un foyer infectieux qui ne s’est pas éteint. »

Le Figaro en a fait gorge chaude : Emmanuel Macron dans Le Monde, regrette que Jean-Christophe Cambadélis, au nom du PS, ait pris ses distances avec son projet de loi sur la question du travail du dimanche. C’est a cause du fait que Cambadelis a choisi 7 dimanches à la place de 12 dimanches travaillés… crime infectieux.

Même si le premier secrétaire l’a finalement soutenu, Emmanuel Macron dresse un constat contrasté : « Sur (la) position initiale du parti, s’est greffé un foyer infectieux qui ne s’est pas éteint ». « Qu’un ancien ministre, (Benoit Hamon) … vote contre le gouvernement, laisse à penser que l’on a perdue de vue la réalité des choses ou qu’on a perdu de la culture politique ».

« Il y a la politique des fainéants qui consiste à regarder la surface de l’eau » ajoute t il. Pour le non-socialiste, Emmanuel Macron, la rue de Solférino n’a pas suffisamment « joué son rôle de régulateur entre les forces en présence ». (Entendre : “n’a pas assez serré les boulons”) Le ministre juge qu’une « dynamique très politicienne s’est cristallisée » fustigeant « quelques parlementaires qui ont eu des réflexes de congrès sur ce texte et qui ont pensé qu’il s’agissait d’une motion du parti ». Comme si les 106 articles scélérats Attali-Macron approuvés ostensiblement par Angela Merkel, ne portaient pas suffisamment à discussion et comme si quelqu’un pouvait confondre les deux.

« Je pense qu’il y a une politique de fainéants et il y a une politique des artisans », dit Macron. « Moi je fais la politique avec les artisans et les artisans, au sens fort du terme, ce sont ceux qui ont passé des jours et des nuits à travailler un texte au fond, qui savent ce qu’il y a dedans, qui peuvent en être fiers »… « Il y a la politique des fainéants qui consiste à regarder la surface de l’eau. On meurt de cela » termine Emmanuel Macron contre les députés socialistes frondeurs hostiles à sa politique.

On atteint là un summum dont il faut manifestement sauver le Parti socialiste !


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