Assassinat de Chokri Belaïd : Défilés massifs et grève générale

dimanche 10 février 2013.
 

D) Marée humaine pour les obsèques de Chokri Belaïd

Des dizaines de milliers de Tunisiens se sont rassemblés ce vendredi à Tunis pour les obsèques de l’opposant de gauche Chokri Belaïd, alors que le pays a connu un second jour de grève générale.

La foule, estimée à au moins 50.000 personnes, s’est massée devant la maison de la culture de Djebel Jelloud, dans la banlieue sud de la capitale, où reposait le corps du dirigeant de l’opposition de gauche laïque, Chokri Belaïd, tué de quatre balles mercredi devant chez lui. Jamais une foule aussi nombreuse ne s’était rassemblée pour des obsèques en Tunisie depuis celles, en 2000, de Habib Bourguiba, le "père" de l’indépendance et premier président du pays. "Le peuple veut une nouvelle révolution", ont scandé les participants, qui ont aussi entonné l’hymne national.

Le cercueil de l’ancien avocat, recouvert du drapeau tunisien, a été placé sur une camionnette de l’armée, qui a pris la direction du cimetière du Djellaz, à l’extérieur duquel des affrontements ont ensuite éclaté avec les forces de l’ordre pendant l’inhumation. La police a aussi fait usage de gaz lacrymogènes contre des manifestants rassemblés devant le ministère de l’Intérieur. Ce dernier a fait état de 150 interpellations pendant les heurts à Tunis.

Repose en paix

"Belaïd, repose en paix, nous continuons la lutte", scandait la foule, au sein de laquelle résonnait aussi des slogans hostiles à Rached Ghannouchi, le chef d’Ennahda, le parti islamiste au pouvoir : "Ghannouchi, assassin, criminel", "La Tunisie est libre, terrorisme dehors".

A Gafsa, bastion de partisans de Chokri Belaïd dans le bassin minier du sud de la Tunisie, la foule y a scandé "Le peuple veut la chute du régime", le slogan utilisé à l’origine contre Zine Ben Ali. Des manifestants ont lancé des pierres et des cocktails Molotov contre la police qui a riposté à l’aide de grenades lacrymogènes, selon des témoins. Dix mille personnes environ ont également manifesté à Sidi Bouzid, d’où est parti la "révolution du jasmin" de décembre 2010 et janvier 2011, rapportent des témoins.

Le pays est en bonne voie

Dans tout le pays, les banques, les usines et certains commerces sont restés fermés en réponse à l’appel à la grève des syndicats, dont la puissante Union générale tunisienne du travail (UGTT).

"Des criminels ont assassiné Chokri. Mais ils ne pourront pas assassiner son combat", a déclaré Besma Belaïd, sa veuve. "Ma tristesse s’est arrêtée quand j’ai vu ces milliers de personnes dans les rues. A ce moment-là, j’ai su que le pays était en bonne voie et que des hommes et des femmes défendaient la démocratie, la liberté et la vie."...

Source : http://www.assawra.info

C) La Tunisie en grève enterre Chokri Belaïd

La Tunisie tourne au ralenti vendredi à cause d’une grève générale décrétée pour les funérailles de l’opposant Chokri Belaïd, dont l’assassinat a aggravé la crise politique et provoqué des violences.

Le débrayage national était organisé à l’appel de partis politiques et de la centrale syndicale historique, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), pour marquer les obsèques de cette figure politique anti-islamiste très médiatisée depuis la révolution de 2011, tuée mercredi par balles. Le dernier appel à une grève effective de cette ampleur remonte au 14 janvier 2011, participant à la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali, qui avait pris la fuite ce jour-là vers l’Arabie saoudite.

L’aéroport de Tunis-Carthage, le principal du pays, restait ouvert le matin mais le trafic y était très perturbé avec un grand nombre de vols annulés, ont indiqué un représentant de la compagnie nationale Tunisair joint par téléphone et des journalistes de l’AFP.

En ville, les rues étaient largement vides, et seuls de rares bus étaient visibles. Le tramway de Tunis semblait fonctionner mais les rames, d’ordinaire bondées vers 07H30 GMT étaient désertées.

L’UGTT, forte de 500.000 membres, a appelé les Tunisiens au calme et au recueillement. "C’est une grève pacifique contre la violences", selon elle. Un appel relayé par le ministère de l’Intérieur et la présidence. Dans un communiqué, le ministère a appelé "tous les citoyens, hommes et femmes, au regard des circonstances exceptionnelles, à respecter le droit de travailler, le droit de grève et à éviter tout ce qui porterait atteinte à la sécurité publique".

L’assassinat de Chokri Belaïd, sans précédent dans les annales contemporaines, a déclenché deux jours de violences opposant policiers et manifestants à travers le pays. Un policier y a été tué.

L’opposant doit être inhumé en début d’après-midi à Djebel Jelloud, banlieue du sud de Tunis, après une procession. La famille a demandé à l’armée de protéger le cortège.

"Mon fils est un homme qui a vécu avec courage et dans la dignité. Il n’a jamais eu peur, il est parti en martyr pour son pays", répète Salah Belaïd aux visiteurs venus s’incliner devant la dépouille couverte de fleurs dans le domicile familial orné du drapeau national.

Depuis mercredi, les chaînes de télévision multiplient les chansons engagées et talk-show enflammés donnant la parole à des politiques et de simples citoyens qui laissent libre court à leur tristesse, leur colère et leur peur que le pays ne bascule dans l’instabilité. "Adieu Chokri, martyr de la liberté !" scandait-on, entre fleurs et chandelles, à l’endroit où il a été abattu de sang froid de trois balles tirées à bout portant devant son domicile tunisois.

Terrassée par la douleur, sa veuve Besma, observait le silence après avoir répété ces trois derniers jours que la mort de son mari avait été commanditée par les islamistes au pouvoir du parti Ennahda...

Source : http://www.assawra.info/spip.php?ar...

B) Grève générale aujourd’hui 8 février 2013 en Tunisie

Le principal syndicat tunisien, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), a appelé sur son site officiel à la grève générale vendredi 8 février, à l’occasion des funérailles de Chokri Belaïd, figure de la gauche assassiné mercredi à Tunis.

Quatre partis politiques avaient déjà lancé un appel similaire, mais l’UGTT, l’un des principaux moteurs de la chute de Ben Ali et qui revendique 750 000 adhérents dans toutes les régions, restait la clé de tout débrayage de grande ampleur. Cette grève générale est la première depuis 1978. Même sous Ben Ali, l’UGTT n’avait pas utilisé cette arme, se contentant d’un débrayage de deux heures le 14 janvier 2011, jour de la fuite précipitée de l’ex-dictateur.

Les syndicats des avocats, des magistrats et du parquet ainsi que les enseignants de l’université La Manouba de Tunis ont annoncé observer une grève dès aujourd’hui. La Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme (LTDH) a de son côté appelé les autorités à protéger les personnalités politiques

L’UGTT ÉVOQUE DES MENACES DE MORT

A l’UGTT, on indique, jeudi 7 février, avoir reçu par téléphone depuis deux jours plusieurs menaces de mort de plus en plus précises qui visent le secrétaire général de la centrale syndicale, Hocine Abassi, et son fils. "Auparavant, nous les avions déjà reçues par écrit", affirme Sami Tahri, membre du bureau exécutif de la centrale. Depuis plusieurs mois, les tensions se multipliaient entre l’UGTT et les autorités.

Des manifestations, fin novembre, dans la ville de Siliana pour obtenir le départ du gouverneur nommé par Ennahda, avaient fait plus de 300 blessés, au cours d’affrontements avec la police. Et le 5 décembre 2012, date de la commémoration du 60e anniversaire de l’assassinat du fondateur de l’UGTT, Farhat Hached, une figure anticolonialiste, les deux parties se sont copieusement invectivées et battues. Bilan : une dizaine de blessés.

ENNAHDA RESPONSABLE

... "Les autorités savaient que Chokri Belaid était menacé et n’ont rien fait", a déclaré le chef du Parti républicain, Ahmed Néjib Chebbi, révélant figurer lui-même sur une liste de personnalités politiques menacées de mort. Son parti s’est allié à un front de l’opposition laïque réitérant l’urgence de dissoudre les milices pro-Ennahda dites "Ligues de protection de la révolution" (LPR). Mais le pouvoir a fait la sourde oreille aux appels de dissolution de ce groupe responsable d’une attaque spectaculaire en décembre contre le siège de l’UGTT et du meurtre en octobre de Lotfi Naguedh, un opposant battu à mort dans le Sud. Les ultras d’Ennahda ont même choqué en appelant à la libération des suspects dans ce meurtre.

VIOLENTES MANIFESTATIONS

Besma Khalfaoui, la veuve de Chokri Belaïd, a aussi accusé le gouvernement de l’assassinat de son mari, alors que des manifestations ont eu lieu aux cris de "Le peuple veut la chute du régime" dans la capitale et plusieurs régions du pays, où des locaux d’Ennahda ont été saccagés par la foule en colère.

Ils étaient plusieurs centaines à défiler jeudi sur l’avenue Habib-Bourguiba à Tunis, haut-lieu de la révolution de 2011. Ils se dirigeaient vers le ministère de l’intérieur, essuyant des tirs de grenades lacrymogènes de la police. La veille, des heurts ont fait un mort dans les rangs de la police.

A Gafsa, ville instable du bassin minier tunisien, des centaines de manifestants anti-islamistes affrontaient violemment les forces de police jeudi. Les manifestants, qui procédaient à des funérailles symboliques de Chokri Belaïd, ont jeté un cocktail Molotov sur les policiers, qui ont répliqué par des tirs massifs de grenades lacrymogènes. La manifestation était organisée par le Front populaire, une alliance de partis de gauche et d’extrême gauche à laquelle appartenait M. Belaïd.

Les établissements scolaires français en Tunisie seront exceptionnellement fermés vendredi et samedi, a annoncé jeudi l’ambassade de France sur son site internet.

Source : Le Monde

A) Communiqués sur l’assassinat de Chokri Belaïd

A1) Assassinat de Chokri Belaïd La Révolution tunisienne attaquée (Raquel Garrido, PG)

C’est avec la plus grande émotion et indignation que nous avons appris ce matin l’assassinat à Tunis de Chokri Belaïd, dirigeant reconnu de la gauche tunisienne.

Le Parti de Gauche tient à exprimer toutes ses condoléances à sa famille et à ses camarades.

En s’attaquant à ce leader courageux et populaire de la révolution tunisienne, ce crime vise en réalité la démocratie tunisienne elle-même.

Nous appelons à la plus large solidarité en France et dans le monde avec le peuple tunisien en lutte pour ses libertés et sa souveraineté.

Nous appelons à soutenir avec vigueur les mobilisations pacifiques des organisations politiques, associatives et syndicales tunisiennes qui résistent au quotidien à l’obscurantisme et au fanatisme. »

A2) Assassinat de Chokri Belaïd, c’est la démocratie tunisienne qui est visée

COMMUNIQUE EUROPEEN DE LA GUE/NGL

Le groupe de la Gauche Unitaire Européenne -Gauche Verte Nordique (GUE/NGL) condamne avec la plus grande fermeté le lâche assassinat à Tunis de l’avocat Chokri Belaïd secrétaire général du Parti Patriote Démocratique Unifié, et membre dirigeant du Front Populaire.

Il exprime sa vive émotion et transmet ses condoléances et sa solidarité à l’égard de son épouse, ses deux filles, son parti, le Front populaire et le peuple tunisien dans son ensemble.

Chokri Belaïd était une des figures de la Révolution tunisienne. Il s’est toujours opposé à la violence politique et défendait aujourd’hui comme hier la démocratie et la justice sociale.

Le groupe GUE/NGL comprend l’émotion suscitée par ce lâche assassinat mais appelle le peuple tunisien à ne pas céder à la provocation et à la spirale de la violence.

La GUE/NGL demande aux autorités du pays de tout mettre en oeuvre pour que les coupables soient rapidement identifiés et demande que des mesures soient adoptées immédiatement pour protéger les autres leaders du Front populaire.

Plus que jamais, l’UE doit aider la démocratie tunisienne. Elle a déjà trop perdu de temps. Elle doit agir concrètement pour soutenir la démocratie tunisienne et ouvrir de vraies perspectives de développement pour le peuple tunisien. Pour cela, elle doit créer les conditions d’un véritable partenariat avec la Tunisie et non se contenter de remettre sur la table ce qui l’était déjà sous Ben Ali. Elle doit permettre le rapatriement immédiat des avoirs gelés du dictateur déchu, mettre en place un moratoire et un audit sur la dette tunisienne et annuler la dette extérieure odieuse, au lieu de faire pression pour instaurer une zone de libre-échange qui aggraverait la situation économique du pays.

Il en va de la survie de la démocratie en Tunisie, mais aussi de la paix dans toute la région.

A3) Assassinat de Chokri Belaïd : « La révolution tunisienne est directement visée » (PCF)

Le secrétaire général du Parti des Patriotes démocrates unifiés et leader du Front de Gauche, Chokri Belaïd, a été assassiné ce matin à Tunis. Cet assassinat suscite une très grande émotion.

Le Parti communiste français exprime avec la plus grande force son indignation et sa condamnation devant ce crime odieux. Cet acte criminel confirme les menaces qui pèsent aujourd’hui sur la Tunisie de la part de forces hostiles à la démocratie et à un État de droit.

C’est la « révolution » tunisienne qui est directement visée. Ce sont les aspirations populaires, l’espoir d’un vrai changement qui sont attaqués.

Le PCF tient à exprimer ses sincères condoléances et toute sa solidarité à la famille de la victime et à tous les démocrates tunisiens.

Parti communiste français

A4) Solidarité et mobilisation après l’assassinat de Chokri Belaïd (communiqué du NPA)

Chokri Belaïd, un des principaux responsables de la gauche radicale tunisienne, vient d’être abattu par balle ce matin devant chez lui.

Le NPA exprime son horreur face à ce crime odieux. Il apporte son entière solidarité à ses proches ainsi qu’aux militant-es Tunisiens qui partageaient son combat.

Chokri Belaïd était le secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unifiés (Watad), et à ce titre un des porte-parole du "Front populaire pour la réalisation des objectifs de la révolution".

Il était l’objet d’une campagne haineuse des islamistes pour son implication dans les mobilisations sociales en cours. Le 2 février, il avait déjà fait l’objet d’un agression par des salafistes à l’occasion du congrès de son parti. La veille de son assassinat, il soulignait à la télévision la responsabilité du gouvernement dirigé par Ennahdha dans les agressions verbales et physiques dont il était l’objet.

Le NPA appelle à se joindre aux mobilisations organisées en France pour dénoncer ce crime et exiger que toute la lumière soit faite sur celui-ci.

Montreuil, le 6 février 2013


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