Deux ans après l’élection d’Obama, rien n’a changé, si ce n’est… l’abstention et la crise

mardi 9 novembre 2010.
 

Un électorat républicain anxieux et mobilisé, des électeurs démocrates frappés par la crise, déçus et abstentionnistes  : voilà ce qui a fait la différence lors de ces élections de mi-mandat.

Le Parti démocrate a enregistré, mardi, le plus important recul en sièges depuis 1938 (quand le père du New Deal, le président Roosevelt, perdit 71 sièges) mais, aussi étonnant que cela puisse paraître de prime abord, les lignes électorales qui dessinent le paysage politique des États-Unis depuis les années 1960 n’ont pas bougé. Le vote républicain reste un vote blanc, masculin, de citoyens plutôt aisés financièrement. Le vote démocrate demeure un vote de « minorités » (jeunes, Noirs, Latinos) et d’électeurs aux revenus plus modestes. Et ce qui a fait la différence, une fois de plus, c’est évidemment la participation beaucoup plus forte dans le cœur de l’électorat républicain que dans celui de l’électorat démocrate.

Selon un sondage réalisé à la sortie des urnes par CNN, les Blancs ont voté républicain à 60%, encore plus les hommes (62%) que les femmes (57%). Les électeurs blancs d’Obama, notamment ceux aux revenus les plus modestes, ont été plus sujets à l’abstention.

En revanche, mobilisation presque inchangée chez les Afro-Américains, dont 90% des suffrages exprimés se sont portés sur le Parti démocrate. L’abstention a été massive parmi les Latinos, très durement atteints par la crise, qui ne représentent que 8% de l’électorat total contre 15% de la population. Ceux qui se sont exprimés ont maintenu leur confiance aux démocrates à 65%. Phénomène identique chez les jeunes (18-29 ans), groupe fortement frappé par l’abstention mais fidèle au parti d’Obama, qui se retrouve minoritaire dans toutes les autres catégories d’âge. Autre constante  : on a voté démocrate dans les villes, grandes (65%) comme petites (52%), et républicain dans les banlieues résidentielles (54%), dans le tissu rurbain (54%) et dans les campagnes (63%).

Cette apparente stabilité des structures sociales et « ethniques » du vote ne doit pas masquer un « contenu » que l’on découvre presque à fronts renversés. Le vote républicain, expression traditionnelle d’optimisme et de confiance dans le « rêve américain », est, cette année, celui de l’anxiété  : 70% des électeurs qui se déclarent « très inquiets » ont voté républicain tandis que ceux qui ne le sont « pas trop » ont voté à 82% démocrate… Comme une surprise ne vient jamais seule  : les électeurs qui estiment que Wall Street est le principal responsable de la situation économique actuelle (35% de l’électorat total pensent ainsi) ont plus voté républicain (56%) que démocrate (42%)…

Matérialisation géographique de ces tendances, la ceinture industrielle (Rust Bell), très fortement touchée par le chômage, la précarité et les saisies immobilières, s’est offert un raz-de-marée républicain. Le parti de l’âne remporte les sièges de sénateurs de Pennsylvanie, d’Indiana, d’Illinois (détenu jusqu’en 2008 par Obama) et du Wisconsin. À la Chambre des représentants, le rapport de forces dans les six États concernés (Pennsylvanie, Ohio, Indiana, Michigan, Illinois et Wisconsin) s’établit désormais ainsi  : 55 républicains pour 31 démocrates.

En 1992, James Carville, conseiller de Bill Clinton, lançait, avec une ironie mordante, aux républicains interdits devant la défaite de George Bush père, pourtant « auréolé » de sa victoire lors de la première guerre du Golfe  : « C’est l’économie, idiots ». Voilà qui s’avère toujours d’actualité.

Christophe Deroubaix


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