15 mai 1869 : le programme républicain de Belleville

lundi 29 mai 2023.
 

La période révolutionnaire 1868 1871

Le 15 mai 1869, paraît dans L’Avenir National, un document électoral de Léon Gambetta, candidat aux élections législatives sur Paris. Ce texte, bientôt appelé Programme républicain de Belleville, va servir de référence à la gauche républicaine : libertés d’expression et de réunion, la séparation des Eglises et de l’Etat, l’école primaire laïque, gratuite et obligatoire, la fin des armées permanentes.

La diffusion et la popularité de ce programme consacrent Gambetta comme porte-parole de l’opposition démocratique à Napoléon 3. Pourtant, ce n’est pas lui qui en est l’auteur mais le Comité républicain de Belleville dont les instigateurs vont bientôt participer à La Commune.

Jacques Serieys

Le mouvement républicain du 19ème siècle en France (Jacques Serieys)

Citoyens,

Au nom du suffrage universel, base de toute organisation politique et sociale, donnons mandat à notre député d’affirmer les principes de la démocratie radicale et de revendiquer énergiquement :

* l’application la plus radicale du suffrage universel tant pour l’élection des maires et des conseillers municipaux, sans distinction de localité, que pour l’élection des députés ;

* la répartition des circonscriptions effectuée sur le nombre réel des électeurs de droit, et non sur le nombre des électeurs inscrits ;

* la liberté individuelle désormais placée sous l’égide des lois et non soumise au bon plaisir et à l’arbitraire administratifs ;

* l’abrogation de la loi de sûreté générale (prison pour toute tentative d’opposition, arrestation et déportation sans jugement pour délit politique) ;

* la suppression de l’article 75 de la Constitution de l’an VIII et la responsabilité directe de tous les fonctionnaires ;

* les délits politiques de tout ordre déférés au jury ;

* la liberté de la presse dans toute sa plénitude, débarrassée du timbre de cautionnement ;

* la suppression des brevets d’imprimerie et de librairie ;

* la liberté de réunion sans entraves et sans pièges avec la faculté de discuter toute matière religieuse, philosophique, politique ou sociale ;

* l’abrogation de l’article 291 du Code pénal ( "Nulle association de plus de 20 personnes ne pourra se former qu’avec l’agrément du gouvernement") ;

* la liberté d’association pleine et entière ;

* la suppression du budget des cultes et la séparation de l’Eglise et de l’Etat ;

* l’instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire avec concours entre les intelligences d’élite, pour l’admission aux cours supérieurs, également gratuits ;

* la suppression des octrois, la suppression des gros traitements et des cumuls et la modification de notre système d’impôts ;

* la nomination de tous les fonctionnaires publics par l’élection ;

* la suppression des armées permanentes cause de ruine pour les finances et les affaires de la nation, source de haine entre les peuples et de défiance à l’intérieur ;

* l’abolition des privilèges et monopoles, que nous définissons par ces mots : primes à l’oisiveté ;

* les réformes économiques, qui touchent au problème social dont la solution, quoique subordonnée à la transformation politique, doit être constamment étudiée et recherchée au nom du principe de justice et d’égalité sociale. Ce principe généralisé et appliqué peut seul, en effet, faire disparaître l’antagonisme social et réaliser complètement notre formule :

LIBERTE, EGALITE , FRATERNITE

Le comité électoral de Belleville

La lecture de ce programme montre bien :

* sa filiation avec la Révolution française et le mouvement républicain du 19ème siècle (souveraineté populaire, instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire, séparation de l’Eglise et de l’Etat, liberté d’association, liberté de la presse, élection des fonctionnaires...)

* l’ambiguité de ce républicanisme qui demande la suppression des gros traitements mais n’avance rien de précis en matière sociale. D’ailleurs, autant les rédacteurs de ce programme, membres du Comité Républicain resteront fidèles à cet appel de Belleville et seront Communards, autant Gambetta glissera vers un républicanisme politicien.

Jacques Serieys


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