Guillaume Dubois Principal ministre et cardinal sans avoir jamais su célébrer une messe

lundi 14 janvier 2019.
 

A) Le cardinal le plus orgiaque des gouvernants de la France

Sa réputation commence tôt. Il aurait, par exemple, mise enceinte, à l’âge de 13 ans, une servante chez le premier président du parlement de Bordeaux où il avait été engagé comme précepteur, qu’il l’aurait épousée et, qu’une fois la dot dilapidée en beuveries et escapades nocturnes, il aurait quitté précipitamment sa ville natale, à l’âge de 16 ans, sans même avoir communié pour monter dans la capitale.

Parmi ses frasques, certaines sont parfaitement documentées. Tel est le cas d’« un très essentiel service » de la part du marquis de Breteuil, alors intendant de Limoges, qui parvint « avec subtilité », à faire disparaître toutes traces d’un mariage contracté par le sieur Dubois, avant son entrée dans les ordres, en 1720, en vue d’être consacré archevêque puis cardinal.

Ayant obtenu l’archevêché de Cambrai (9 juin 1720), un des plus riches du pays, il n’y posera jamais les pieds.

Il aurait acquis son ascendant sur le Régent par sa capacité à lui procurer des maîtresses à sa convenance. Il se servait au passage, étant particulièrement connu pour ses "parties fines".

Devenu Principal ministre du même Régent il n’hésite pas à servir ses amis. Ainsi, son frère aîné est Joseph, devient maire perpétuel de Brive et directeur général des ponts et chaussées de France entre 1723 et 1736. Ainsi, le marquis de Breteuil qui lui avait permis de faire disparaître les traces de son mariage sera nommé ministre de la Guerre par le Régent sur proposition (fortement soutenue) de Dubois (voir les Mémoires du marquis d’Argenson).

B) 9 juin 1720, Dubois est sacré archevêque sans avoir jamais été prêtre

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Guillaume Dubois est chargé de l’éducation du duc Philippe de Chartres, neveu de Louis XIV. Il obtient de marier son élève à Mlle de Bois, fille légitimée du roi et de Mme de Montespan.

Portrait du cardinal Guillaume Dubois, archevêque de Cambrai, Hyacinthe Rigaud, XVIIIe siècle.Philippe, devenu duc d’Orléans à la mort de son père puis Régent, le 2 septembre 1715, garde Dubois à ses côtés comme conseiller.

Le précepteur entre au Conseil d’État. Il négocie le 4 janvier 1717 le traité de La Haye avec l’Angleterre et les Provinces-Unies, contre l’Espagne. Ce succès lui vaut d’être nommé ministre des Affaires étrangères. Il déjoue la conspiration de Cellamare, l’ambassadeur espagnol qui projetait de transférer la régence au roi d’Espagne !

Là-dessus, pétri d’ambition, celui que l’on surnomme « l’abbé Friponneau » en raison de sa liaison avec Mme de Tencin, obtient l’archevêché de Cambrai, illustré par Fénelon, mort un peu plus tôt.

Il y a juste un détail gênant : Dubois, simple abbé, n’est pas prêtre ! Qu’à cela ne tienne. Mgr Tressan, évêque de Nantes, accepte de lui conférer en une seule messe tous les ordres, le sous-diaconat, le diaconat et la prêtrise ! Si bien que le 9 juin 1720, Dubois est sacré archevêque. « Ce sacre va permettre à l’abbé de faire sa première communion », commente le duc de Mazarin.

Cela ne suffisant pas à sa gloire, il exige la barrette de cardinal et l’obtient l’année suivante sans avoir jamais su célébrer une messe.

En 1722, enfin, Guillaume Dubois est nommé par le Régent Principal ministre, une fonction qui n’avait plus été portée depuis la mort de Mazarin, six décennies plus tôt. Il est aussi élu à l’Académie française et à la présidence de l’Assemblée du clergé. Il décède le 10 août 1723.

C) 9 décembre 1718 : Échec de la conspiration de Cellamare

Le 9 décembre 1718, la conspiration de Cellamare, ambassadeur d’Espagne à la cour de France, est éventée. Elle visait à renverser le Régent Philippe d’Orléans, neveu de Louis XIV, au profit du roi d’Espagne, Philippe V (petit-fils du même Louis XIV).

L’ambassadeur pouvait compter sur l’appui de nombreux opposants au Régent et tout particulièrement du couple du Maine, le duc (lui-même fils naturel de feu Louis XIV) et de la duchesse, petite-fille du Grand Condé.

Didon et Énée, 1704, François de Troy, musée du Domaine départemental de Sceaux. Scène tirée de l’Énéide de Virgile. En réalité, le peintre met en scène le duc et la duchesse du Maine entourés par les familiers de la cour de Sceaux. Au centre : le duc du Maine, représenté sous les traits d’Énée. À droite, étendue sur un lit : la duchesse du Maine représentée sous les traits de Didon. Un secret mal gardé

Contrariée d’avoir dû épouser un homme inférieur à son rang, fut-il l’enfant préféré du Roi-Soleil, la duchesse du Maine n’a de cesse de pousser son mari de l’avant et ambitionne de renverser son ennemi, le Régent, en cheville avec le roi d’Espagne.

À soixante-dix ans d’écart, une nouvelle Fronde s’ébauche. Il s’agit de lancer un début de rébellion qui donnerait à Philippe V, premier prince du sang, motif de lancer un appel aux états généraux, aux parlements et à Louis XV lui-même, contre le Régent. La Bretagne ouvrirait ses ports à la flotte espagnole cependant que, par Bayonne, une armée espagnole entrerait dans le royaume.

Cellamare, cheville ouvrière du complot, recrute autant de monde qu’il peut, sans regarder à la dépense.

Mais le secret arrive en septembre 1718 à l’oreille de l’abbé Guillaume Dubois, ministre des Affaires étrangères du Régent. Mis au courant des échanges entre les comploteurs, Dubois les laisse faire, attendant son heure.

Le 9 décembre, le ministre investit l’ambassade d’Espagne. Cellamare prend la fuite. Les simples comparses seront exécutés cependant que les plus élevés en titre seront pardonnés par le Régent.

Parmi eux le duc et la duchesse du Maine ! Le Régent, avide de revanche, ne se prive pas toutefois du plaisir de les ridiculiser en faisant connaître au public les vilaines manies des uns et des autres


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