Le peuple palestinien a droit à la vie, à la terre et à la souveraineté

vendredi 17 novembre 2023.
 

Les représailles d’Israël à l’attaque du 7 octobre 2023 par le Hamas se sont rapidement transformées en une nouvelle phase de ce qui ne peut être considéré que comme une campagne génocidaire visant à détruire et à déplacer les 2,2 millions d’habitants et habitantes de Gaza.

Au moment de la publication de cet article (le 27 octobre 2023), les bombardements aériens aveugles de l’armée israélienne ont tué plus de 7 000 personnes à Gaza, pour la plupart des femmes et des enfants, et détruit plus de 200 000 logements, ainsi que des écoles, des hôpitaux et des lieux de culte. Depuis plus de deux semaines, Israël a coupé Gaza des approvisionnements essentiels en nourriture, en eau, en carburant, en électricité et en médicaments, créant, selon l’OMS, « une crise humanitaire et sanitaire qui a atteint des proportions catastrophiques ».

Avant même cette nouvelle escalade de la violence, la population gazaouie était déjà en proie à une crise humanitaire. Depuis 2007, Israël impose un blocus illégal au territoire, obligeant 77 % de ses habitant·es à dépendre de l’aide alimentaire. Aujourd’hui, des organisations telles que La Via Campesina et Oxfam affirment que la famine est utilisée comme « stratégie de guerre » par le gouvernement israélien.

Depuis des décennies, l’une des nombreuses dimensions du projet colonial israélien est la destruction de l’agriculture et de la pêche palestiniennes. Avant octobre 2023, 35 % des terres agricoles de Gaza se trouvaient dans une « zone d’accès restreint » à la frontière avec Israël. En conséquence, 113 000 agriculteurs et agricultrices n’ont plus accès à leurs terres situées dans cette zone. En outre, depuis 2014, des avions israéliens pulvérisent systématiquement des herbicides, notamment du glyphosate, pendant les périodes de récolte, souvent lorsque le vent souffle en direction de Gaza. Rien qu’en janvier 2020, ces pulvérisations ont endommagé 281 hectares de cultures palestiniennes, affectant 350 exploitant·es et causant une perte de plus d’un million de dollars.

Le régime d’apartheid israélien a transformé la pêche à Gaza - un moyen de subsistance profondément ancré dans la culture et l’économie locales - en l’une des activités les plus précaires et les plus dangereuses de Palestine. La pénurie de carburant et le manque d’équipement, dus aux restrictions imposées à l’entrée des marchandises dans la bande de Gaza, rendent les sorties en mer difficiles. Les pêcheurs qui s’aventurent au-delà des 6 milles nautiques désignés risquent souvent d’être emprisonnés ou de subir des tirs directs de la part des Israéliens. Cette situation est contraire au droit international, qui autorise l’État palestinien à revendiquer une souveraineté permanente dans un rayon de 60 milles nautiques. En conséquence, seule la moitié des 3 800 pêcheurs gazaouis enregistrés ont la possibilité de poursuivre leur travail, ce qui affecte en fin de compte 35 000 personnes qui dépendent de ce secteur pour leur subsistance.

En Cisjordanie, les colons israéliens ont profité de l’offensive menée aujourd’hui à Gaza pour intensifier leurs propres attaques violentes afin de s’emparer de nouvelles terres, déplaçant ainsi des centaines d’agriculteurs et agricultrices palestinien·nes. Là encore, il s’agit d’une stratégie utilisée depuis des années. La Cisjordanie est composée à 90 % de terres agricoles, dont une grande partie est sous le contrôle direct d’Israël depuis les accords d’Oslo de 1993. Une barrière de séparation, située pour l’essentiel en Cisjordanie, a considérablement entravé l’accès à la terre pour des milliers d’agriculteurs et agricultrices palestinien·nes, en séparant les fermes et les pâturages de leurs villages. En 2019, seules 12 des 76 portes désignées pour permettre l’accès aux agriculteurs et agricultrices étaient ouvertes quotidiennement, tandis que 56 d’entre elles nécessitaient un permis. De plus, le système d’apartheid pousse les agriculteurs et agricultrices palestinien·nes à utiliser des semences et des produits agrochimiques vendus par des entreprises israéliennes, détruisant ainsi leurs sols et leur biodiversité et les laissant dans l’endettement et la pauvreté. Cette situation a entraîné un déclin significatif de l’agriculture, un secteur historiquement vital pour la société et l’identité palestiniennes.

Même avant les récentes coupes dans les services de base à Gaza, la situation de la population palestinienne était déjà désastreuse. En ce qui concerne l’accès à l’eau, le gouvernement israélien a imposé des contraintes sévères, que l’organisation de défense des droits humains Al-Haq qualifie d’ « apartheid de l’eau ». Depuis 1982, la population palestinienne dépend d’Israël pour son approvisionnement en eau, car la compagnie nationale des eaux, Mekorot, contrôle les infrastructures. L’extraction par Israël de l’eau des aquifères de Cisjordanie représente 85 % de l’approvisionnement du pays. Alors que Mekorot assure le raccordement des colonies illégales au réseau d’eau, les Palestinien·nes se voient constamment refuser la délivrance de permis de construire de nouveaux puits, tandis que leurs citernes de collecte d’eau de pluie sont souvent détruites par l’armée israélienne. Cette discrimination sous-jacente est tout à fait évidente si l’on considère qu’en Cisjordanie, les colons israéliens consomment en moyenne six fois plus d’eau que les Palestinien·nes.

Les conséquences de cet apartheid de l’eau ne se limitent pas à l’agriculture, mais touchent également la santé. Les maladies hydriques sont devenues la principale cause de décès à Gaza en raison des pénuries d’eau dans les villes et les villages, ainsi que du manque d’accès à l’eau courante dans les communautés rurales. Mais le contrôle de l’eau signifie aussi la capacité de réguler les barrages. Le Centre Al Mezan pour les droits humains rapporte que la manipulation des barrages d’eau de pluie ou des barrières d’eau par les autorités israéliennes a provoqué des inondations soudaines sur des terres cultivées à Gaza.

Les organisations paysannes et celles qui défendent la souveraineté alimentaire ont mis en œuvre une série de mesures pour répondre à ces conditions difficiles. Cela va du commerce solidaire aux paniers de la dignité pour les femmes gazaouies, en passant par les banques de semences locales et la production agroécologique. Compte tenu du risque de criminalisation et de répression auquel ces organisations et d’autres groupes sont confrontés de la part d’Israël, il est important de reconnaître et de soutenir ces initiatives.

Gaza est confrontée à une situation qui, loin d’être une guerre entre armées, s’apparente davantage à la destruction d’une population entière. L’objectif semble clair : prendre le contrôle de l’ensemble du territoire palestinien, cette fois-ci de manière plus ouverte et via une augmentation exponentielle de la violence. C’est ce qu’Israël fait de manière systématique et en toute impunité depuis 1948, date à laquelle 750 000 Palestiniens et Palestiniennes ont été déplacé·es de force. C’est pourquoi il est essentiel de maintenir collectivement la pression pour demander un cessez-le-feu immédiat et la fin du régime d’apartheid. Les personnes vivant de l’agriculture, de la pêche et la population palestinienne dans son ensemble ont le droit de retrouver la souveraineté sur leur vie et leur terre.


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