Macron Démission, Assemblée Dissolution !

lundi 22 juin 2020.
 

L’allo­cu­tion pré­si­den­tielle de ce diman­che 14 juin nour­ris­sait, parmi les plus naïfs, quel­ques espoirs. Nombreux, sans l’avouer, vou­laient y croire. Macron à la télé­vi­sion par­le­rait vite et de façon caté­go­ri­que. Au mieux il démis­sion­ne­rait pour tenter de re légi­ti­mer, ou légi­ti­mer tout sim­ple­ment, son pou­voir per­son­nel par une nou­velle élection pré­si­den­tielle. Au pire il annon­ce­rait la dis­so­lu­tion de l’assem­blée pour tenter de régé­né­rer une majo­rité qui durant deux ans aura brillé par sa doci­lité, et sur le fond sa nul­lité. D’une façon ou d’une autre il devrait pren­dre une ini­tia­tive qui cham­bou­le­rait la vie poli­ti­que et per­met­trait peut-être de re dis­tri­buer les cartes.

Mais il n’en n’a rien été. Dés les pre­miè­res minu­tes le Président de la République déjouait les pro­nos­tics qui cour­raient dans les rédac­tions pari­sien­nes sur la base d’infor­ma­tions sciem­ment dis­til­lées. Les illu­sions, témoi­gna­ges d’incom­pré­hen­sions majeu­res, s’envo­laient.

La démis­sion aurait exigé une qua­lité per­son­nelle, le cou­rage encore dénommé pana­che, qui aujourd’hui fait défaut. Elle aurait exigé la capa­cité et la volonté d’enga­ger dans le pays un véri­ta­ble débat sur les ques­tions essen­tiel­les, économiques et socia­les notam­ment, qui sont trai­tées depuis deux ans, mais pru­dem­ment évacuées de toute dis­cus­sion. Il eut été par exem­ple néces­saire, pour esquis­ser le monde de demain — puis­que l’exer­cice est à la mode — d’abor­der le rejet que sus­cite le monde d’aujourd’hui, dont les valeurs sont pré­ci­sé­ment incar­nées par Macron et sa cour. Il eut fallu pour Emmanuel Macron défen­dre ouver­te­ment et fron­ta­le­ment la liqui­da­tion des retrai­tes en repre­nant sa réforme, l’ampu­ta­tion des liber­tés impo­sée par les dif­fé­ren­tes lois d’urgence, la dimi­nu­tion des indem­ni­sa­tions, comme l’impose sa réforme de l’assu­rance chô­mage, la mise à mal des ser­vi­ces publics, comme l’a mis au pre­mier plan la crise sani­taire avec l’hôpi­tal et la santé en géné­ral, mais aussi affir­mer les atta­ques en cours ou en pré­pa­ra­tion contre l’ensei­gne­ment, l’emploi, les salai­res, et quel­ques autres ques­tions qui auraient alors trouvé une caisse de réso­nance assour­dis­sante pour le pou­voir démis­sion­naire bien inca­pa­ble de jouer son jeu à cartes retour­nées.

La dis­so­lu­tion pré­sen­tait une dif­fi­culté sup­plé­men­taire. Le per­son­nel poli­ti­que sur lequel s’appuie la macro­nie est déjà épuisé. Qui reste t’il ? Les Valls, les Guedj, les Cohn-Bendit, et pour­quoi pas les Goupil ? Un peu rance et marqué pour faire office de renou­vel­le­ment et sou­le­ver l’enthou­siasme.

Alors ?

Les com­men­ta­teurs offi­ciels sur les pla­teaux de télé­vi­sion, dans les stu­dios de radio ou encore dans les rédac­tions des jour­naux sont assez timi­des sur le fond. Ils se veu­lent imper­ti­nents pour sou­li­gner que le Président n’a eu de cesse de s’auto congra­tu­ler, tout en adres­sant ses féli­ci­ta­tions aux fran­çais pour leur dis­ci­pline, leur obéis­sance, leur sou­mis­sion durant la période de confi­ne­ment. Mais ils évitent l’essen­tiel que le pré­si­dent n’a pas évacué.

Macron remet dans les mains des « partenaires sociaux » encore dénommés « corps intermédiaires » la mise en pratique de sa politique pour les deux ans qui viennent. Il s’agit donc d’intégrer officiellement les organisations syndicales — qui ont déjà un fil à la patte avec leur appartenance à la CES, organe de l’UE pour la politique sociale — au nom de la responsabilité à combattre les effets de la crise sanitaire. Il faudra travailler plus et toucher moins ! C’est aux syndicats de faire passer la pilule. Aussi, n’y a t’il rien de plus urgent que d’exiger par exemple la sortie des organisations syndicales du Ségur de la santé, dont l’objectif est en réalité de faire prendre en charge par les syndicats hospitaliers la pénurie organisée, la destruction de notre système de santé. Les restaurants, cinémas, bars etc… pourront reprendre leur activité, certes avec des contraintes apparentes. Mais les rassemblements, les manifestations, dont on apprend de la bouche présidentielle, qu’ils constituent le principal vecteur de propagation du virus, (voila que nous serions responsables du Covid) seront strictement encadrées, nous dit-il. On imagine la suite. La crise sociale va coûter cher nous dit le président. Qui paiera ? Pas les impôts des plus riches surtout. Pas les revenus des actionnaires. Non, mais qui alors ? Sans le dire, Emmanuel Macron reprend à son compte les vieilles recettes qui consistent à taxer le peuple dans son ensemble, histoire d’épargner les privilégiés, ses soutiens, ses donneurs d’ordre. La question européenne que le président évoque pour parler de souveraineté européenne justement, là où n’existe ni peuple, ni nation, cette question, si elle n’était risible dans la bouche macronienne tellement elle est absurde, donne une indication précise concernant le « paiement de la dette ». C’est sans doute la Grèce à grande échelle que prépare l’UE avec la complicité des gouvernements français et allemands notamment. Comment d’ailleurs peut-il en être autrement lorsqu’on refuse la seule souveraineté qui vaille, la souveraineté nationale sous tous ses aspects, dont la souveraineté monétaire qui permettrait de battre monnaie pour ré industrialiser, embaucher, définir nos priorités, les assumer, et décider quoi, et qui rembourser. Pour conclure, les for­mu­les concer­nant la police méri­tent notre inté­rêt. Emmanuel Macron sans dis­tinc­tion, sans réserve, accorde toute sa confiance "au nom de la Nation" à une police qu’on fait mine de décou­vrir sur l’affaire Traoré, mais qui s’est bien dis­tin­guée durant la mobi­li­sa­tion des Gilets jaunes, agis­sant comme une milice privée char­gée d’énucléer, d’estro­pier, de muti­ler sur ordre pour casser la contes­ta­tion sociale. Ne nous y trom­pons pas. Cette « indul­gence » à l’égard de la police, tous corps confon­dus, est assez inté­res­sée. Il s’agit de donner des gages à ceux que le pou­voir peut demain appe­ler à l’action contre les mobi­li­sa­tions socia­les, contre le peuple fran­çais.

Durant la pan­dé­mie, Macron pour cacher ses res­pon­sa­bi­li­tés a abusé du terme « nous sommes en guerre ». Rendons au roi­te­let ce qui lui revient de droit. Nous sommes bien en guerre. La guerre sociale que le pré­si­dent de la répu­bli­que, tout sou­rire, a re déclaré diman­che 14 juin au peuple fran­çais.

Jacques Cotta Le 15 juin 2020


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