Analyse des résultats des élections présidentielles de 2007

mardi 16 mai 2023.
 

Jamais la droite n’avait remporté une telle victoire électorale depuis les années 1962-1965. Pourtant, luttes et élections des dernières années prouvaient qu’une majorité de la société française souhaitait une victoire de la gauche.

Comment expliquer un tel paradoxe ? De toute évidence, la gauche n’était pas en capacité de l’emporter :

- le Parti socialiste, son corpus idéologique, sa candidate, son programme et sa campagne n’étaient pas à la hauteur des attentes et des besoins actuels de la société française. En son sein, la "gauche du PS" a été, dans son ensemble, éclatée, inaudible et inutile.

- le Parti Communiste, en situation d’agonie électorale sur une élection nationale comme les présidentielles, n’a pu être sauvé, ni par les qualités de MG Buffet, ni par la débauche d’énergie de ses militants, ni par son implantation ouvrière.

- L’échec d’une candidature unitaire "antilibérale" a impuissanté l’ensemble des forces impliquées dans la campagne du non. Aucune d’entre elles n’est apparue en capacité de représenter une alternative au PS face à la droite et à l’extrême droite.

- Nicolas Sarkozy et l’UMP, eux, se sont seulement occupé de gagner les présidentielles.

En conclusion, nous essaierons de voir comment la gauche peut tirer profit de cette défaite pour l’avenir.

Plan :

A) La droite et l’élection présidentielle de 2007

B) La gauche et l’élection présidentielle de 2007

C) Remarques complémentaires

A) La droite et l’élection de 2007

1) La victoire conjoncturelle d’un petit bonaparte, produit médiatique conjoncturel

2) Une victoire historique de la droite

3) Un succès personnel pour Nicolas Sarkozy

4) Nicolas Sarkozy à la présidence couronne le succès de la "nouvelle droite"

5) Vers un rapprochement droite extrême droite ?

6) La mondialisation libérale et ses implications politico-idéologiques ont précédé et préparé la victoire de Sarkozy

7) L’UMP aujourd’hui, un vrai parti de droite

8) Les résultats de Nicolas Sarkozy

9) Le Front National

10) Un exemple du corps électoral droite extrême droite : les catholiques pratiquants réguliers (au moins une fois par mois à la messe)

11) Un exemple du corps électoral de droite : le patronat

12) Un électorat sarko-lepéniste

13) Bayrou et son futur "mouvement démocrate"

14) L’élection présidentielle de 2007 marque-t-elle une droitisation de la société française ?

A) La droite et l’élection de 2007

1) La victoire conjoncturelle d’un petit bonaparte, produit médiatique conjoncturel

La droite et le patronat français ont compris depuis longtemps que leur meilleur moyen de maîtriser le pouvoir politique en France consiste à trouver, pour chaque élection présidentielle, un "homme rencontrant son peuple". La 5ème république répond exactement à cet objectif de maintenir l’ordre social par l’aura d’un chef inventé pour une élection puis protégé le temps de son mandat par les institutions et les forces de l’ordre.

La puissance des médias actuels a renforcé partout dans le monde le rôle politique conjoncturel de clowns surmédiatisés indépendamment des qualités réelles de l’individu (Bush et Berlusconi en sont de bons exemples).

Le leader du moment est lancé dans l’arène politique comme un grand magasin engage la promotion d’une marchandise :

* avec plus encore de sérieux et de réflexion (choix de l’intitulé, des arguments, de l’équipe de campagne, des moyens publicitaires...)

* avec plus encore d’argent et de moyens : mobilisation des finances du patronat (légale et très probablement extra-légale), utilisation maximum des journaux, télés, radios, instituts de sondage...

* avec un grand professionalisme pour parfaire l’adéquation entre l’individu choisi et la campagne à assumer à l’instant T des élections (théâtralisation de l’offre, storytelling à base d’histoire personnelle, lexique de campagne...)

* avec évidemment plus d’enjeu

La campagne de Nicolas Sarkozy présente beaucoup de points communs avec l’orientation de la droite conservatrice "libérale autoritaire" style Bush, Thatcher ou Aznar.

Cependant, pour bien cerner le profil politique du sarkozysme version 2007, je crois qu’il faut prendre en compte la monopolisation du politique par le chef, l’individualisation de la communication autour de lui, sa référence à l’histoire nationale par delà tous les courants politiques, l’ exercice de communication équilibriste pour ne pas être broyé par les antagonismes sociaux.

Le socialisme utilise le concept de bonapartisme pour caractériser un tel courant politique, construit autour d’un chef populaire et autoritaire, se voulant le père de toute la nation. Pourquoi bonapartisme ?

* par référence à Bonaparte (Napoléon 1er) qui permet à la bourgeoisie de sortir enfin de la Révolution française, de marginaliser le courant républicain social issu des Montagnards

* par référence à Napoléon 3 qui rallie électoralement les masses paysannes et même en partie, populaires urbaines, après la secousse sociale de 1848 sur un discours autoritaire, sécurisant et socialisant

Pourquoi la bourgeoisie française a-t-elle choisi l’option d’une candidature Sarkozy de type bonapartiste pour 2007, au détriment du chiraquisme (option présidentialiste avec un premier ministre en première ligne) ou de l’option giscardienne Bayrou (croyance en la possibilité d’un grand parti "démocrate" type UDF des années 1974 à 1995) ?

* parce qu’elle a tiré le bilan de la puissance des mouvements sociaux depuis 1995 et ne veut pas renouveler son échec du CPE. Elle a donc besoin d’une équipe de combat social à la tête de l’exécutif

* parce qu’elle veut avancer dans la liquidation de droits sociaux ( retraites, services publics, droit du travail, Sécurité sociale...) fondamentaux pour accroître encore ses profits... Elle a donc besoin d’une cohorte libérale de choc à la tête du pouvoir, respectant en un quinquennat ce plan de campagne, avec un chef apte à résister aux mouvements sociaux en trompant médiatiquement la plus grande partie possible des citoyens ( communication du bon républicain, de l’enfant de la France, de l’homme attentif aux malheurs de ses concitoyens).

* parce que depuis les années 1920, la droite sait que pour gagner culturellement et électoralement une partie des milieux populaires, ses meilleurs axes de communication reposent sur la xénophobie et la valorisation de l’identité nationale (elle avait créé le fascisme pour cela). Elle a donc besoin d’un candidat puis d’un président apte à disputer l’électorat du Front national sur le terrain de la sécurité et de la lutte contre l’immigration. Or, Sarkozy a construit son personnage sur ce créneau depuis quinze ans, d’où sa crédibilité ces dernières années dans la droite et le patronat pour incarner un tel profil.

La large victoire de Nicolas Sarkozy est-elle seulement le fruit des moyens formidables fournis par les puissances d’argent pour gagner la présidentielle de 2007 ? Je ne le pense pas.

2) Une victoire historique de la droite

Pour la première fois depuis trente ans, un candidat de droite obtient plus de 30% des suffrages au premier tour.

Pour la première fois dans l’histoire de la République française, la droite gagne plus de 18 points d’une présidentielle à l’autre : de 33,70 ( Chirac, Bayrou, Lepage, Boutin, Madelin) en 2002 à 51,9% ( Sarkozy, Bayrou, De Villiers) en 2007. Si elle ne gagne pas plus, c’est qu’elle présentait seulement 3 candidats au lieu de 5. Or, Madelin (3,91%), Lepage (1,88%) et Boutin (1,19%) représentent des électorats potentiels réels.

Pour la première fois depuis quarante ans la droite et l’extrême droite engrangent 62,4% des voix au premier tour (sans compter le CPNT de Nihous).

Il faut bien admettre notre défaite : oui, en terme électoral (et seulement électoral dans l’immédiat), cette élection marque un retour au rapport de force d’avant 1968 ; oui, la marche en avant de la gauche de 67 à 81 est conjoncturellement effacée.

Voici le total droite + extrême droite depuis 40 ans :

* 1965 : 67,13 % ( De Gaulle, Lecanuet, Marcilhacy)

* 1969 : 67,78 % ( Pompidou, Poher ; Poher est soutenu par ll’Union centriste,, par le parti radical et capte une partie de l’électorat de gauche en raison de l’échec de la candidature socialiste Deferre qui ne paraît pas en mesure de battre Pompidou)

* 1974 : 51,50 % ( Giscard, Chaban, Royer, Le Pen)

* 1981 : 47,65 % ( Giscard, Chirac, Garaud)

* 1988 : 50,88 % ( Chirac, Barre, Le Pen)

* 1995 : 59,16 % ( Chirac, Balladur, De Villiers, Le Pen)

* 2002 : 52,90 % ( Chirac, Bayrou, Madelin, Lepage, Boutin, Mégret, Le Pen)

* 2007 : 62,41 % ( Sarkozy, Bayrou, De Villiers, Le Pen)

Depuis quarante ans la plus grosse progression de la droite datait de 1988 à 1995 (8,28%) et sa plus grosse baisse de 1969 à 1974 (9,76%).

Pour la première fois depuis trente ans, un pouvoir sortant est réélu.

Pour la première fois depuis 40 ans, le candidat de droite au second tour est majoritaire sur le Nord Pas de Calais comme dans de nombreux autres fiefs du mouvement ouvrier, par exemple de la banlieue lyonnaise.

Pour la première fois depuis trente ans, un candidat de droite gagne le second tour sur une orientation de droite sans mettre en avant un thème dirigé vers l’électorat de gauche comme la participation en 69, la "nouvelle société" et la "démocratie française " en 74, la "fracture sociale" en 95, l’unité des républicains en 2002.

En nombre de suffrages, Nicolas Sarkozy est le président de la république française élu avec le plus de suffrages, plus que le meilleur total de la droite ( 3 millions de plus que Chirac en 1995), plus que le meilleur résultat de la gauche (Mitterrand en 1988).

3) Un succès personnel pour Nicolas Sarkozy

Les qualités réelles du nouveau président de la république me paraissent chétives pour le costume d’homme providentiel dont il s’est accoutré pour gagner. Il donne en permanence l’impression de fonctionner en surrégime, à la limite de l’implosion.

Ceci dit, constatons la réussite de son projet et même la qualité de sa campagne.

S’imposer comme candidat incontournable dans une droite française généralement minée par la dispersion clanique et idéologique n’était pas gagné d’avance.

Nicolas Sarkozy a réussi le tour de force :

* d’unifier les grandes traditions de la droite française : bonapartiste, libérale, nationale souverainiste, fascisante, catholique conservatrice tout en peaufinant une image "républicaine" héritière de tous les grands courants politiques de notre pays

* de valoriser ses amitiés parmi les milliardaires tout en gagnant des voix en milieu très populaire

Un tel exercice d’équilibrisme a été grandement facilité par les faiblesses de la candidate socialiste. L’équilibriste se cassera la figure si nous le combattons intelligemment et sans relâche dès à présent et dans les années à venir.

4) Nicolas Sarkozy à la présidence couronne le succès de la "nouvelle droite"

Depuis 1944, la droite française complexée par son rôle dans le fascisme d’avant guerre, dans le pétainisme et dans la collaboration n’assumait pas franchement de se proclamer de droite. Tel n’est plus le cas pour l’UMP de Nicolas Sarkozy.

Cette nouvelle droite s’est construite dans un dur combat idéologique face aux aspirations émancipatrices des années 68 puis face à la cohérence réformiste républicaine du programme commun. Nicolas Sarkozy prétend avoir lu Gramsci, donc particulièrement ses thèses concernant l’hégémonie culturelle ; il est au moins certain qu’il a participé à une génération politique de droite ayant beaucoup travaillé sur le sujet. Que pesait en face Ségolène Royal se réclamant à la fois de Jaurès et de Jeanne d’Arc, de l’ordre juste et de 68, de 81 et du blairisme ?

La nouvelle droite vient de loin et a eu le temps de s’homogénéiser ; elle est profondément marquée par les travaux du GRECE (Groupement de Recherche et d’Etudes pour la Civilisation Européenne) né en 68 en opposition totale aux mouvements de l’époque. Son Manifeste de la Nouvelle Droite de l’an 2000 précisait bien son but : mener la bataille des idées. " La Nouvelle Droite est née en 1968. Elle n’est pas un mouvement politique, mais une école de pensée. Les activités qui sont les siennes depuis aujourd’hui plus de trente ans (publication de livres et de revues, tenue de colloques et de conférences, organisation de séminaires et d’universités d’été, etc.) se situent d’emblée dans ... la perspective que les idées jouent un rôle fondamental dans les consciences collectives et, de façon plus générale, dans toute l’histoire des hommes... La Nouvelle Droite a pour ambition de contribuer au renouvellement de ces représentations sociales-historiques".

Ces "intellectuels de droite" ont reconstruit un corpus assez cohérent qui a gagné un écho grandissant, profitant du succès des néoconservateurs américains et des reculs de la gauche sur le terrain social, idéologique et politique. Sur tous les grands sujets abordés durant ces présidentielles, la droite disposait de réponses construites, ayant déjà largement pénétré le monde des médias et la société : nation, logement, morale, travail, transports, sécurité sociale, instituts de sondage... Sur tous ces points et bien d’autres, la candidate de gauche non seulement a reculé mais en croyant gagner des voix a plusieurs fois piraté le logiciel de son adversaire, déroutant son camp.

La question de la sécurité est flagrante. Depuis près de trente ans, la nouvelle droite et l’extrême droite en ont fait le cheval de Troie d’une conquête idéologique de la société. Depuis trente ans, ils ont labouré l’opinion sur ce sujet, profitant parfois d’un fait divers pour dénoncer la gauche au pouvoir et parfois d’un autre fait divers pour valoriser la droite au pouvoir. Toujours avec les mêmes mots, les mêmes arguments. Depuis dix ans, la droite a gagné cette bataille idéologique et les médias ont répercuté, amplifié, consolidé cette vision du monde dans chaque foyer. Cela a largement contribué à la défaite de 2002. En 2007, Ségolène Royal débute sa campagne au printemps 2006 en collant au mieux à cet état de l’opinion. Elle y gagne un succès d’estime auprès des sondeurs et des sondés mais ne fait ainsi que contribuer à renforcer l’hégémonie culturelle de la droite.

De même que les cadres de droite ont étudié la cohérence idéologique de la gauche dans l’après 68, il serait bon que nous prenions en compte par exemple leur ouvrage de référence "Vu de droite" paru en 1977 qui attira toute l’équipe Sarkozy actuelle : Fillon, Devedjian, Bolloré... et même Clara Gaymard. Qu’explique Alain de Benoist dans ce livre :

" La gauche française a compris depuis longtemps la leçon essentielle de Gramsci, à savoir que la majorité idéologique est plus importante que la majorité parlementaire et que la première annonce toujours la seconde, tandis que la seconde, sans la première, est appelée à s’effondrer. La droite ne perçoit pas l’enjeu d’une action métapolitique (sur les consciences)... Son manque de rigueur, son défaut d’unité, sa répugnance devant le travail de formulation théorique susceptible de dégager la ligne la plus juste, son refus des perspectives à long terme, l’absence dans son camp d’une synthèse doctrinale susceptible de cristalliser les énergies- tous ces traits notamment, expliquent ses échecs répétés.

" Face à un adversaire qui s’avance à la bataille armé d’un corpus idéologique en pleine efflorescence, l’homme de droite est proprement désarmé. Sans théorie précise pas d’action efficace. La droite française n’a pas saisi l’importance de Gramsci. Elle n’a pas vu comment le pouvoir culturel agit sur les valeurs implicites autour desquelles se cristallise le consensus indispensable à la durée du pouvoir politique. Elle n’a pas réalisé comment l’attaque frontale recueille les fruits de la guerre idéologique de position.

" La gauche progresse régulièrement. Elle le doit à l’activité de ses partis et de ses mouvements. Mais elle le doit surtout au climat général qu’elle est parvenue à créer métapolitiquement et par rapport auquel son discours sonne de plus en plus vrai. Or un tel travail n’est possible que lorsqu’une théorie a été produite, lorsqu’une ligne juste et des références précises ont été dégagées. Ce serait une grave erreur d’imaginer qu’une droite qui n’ose dire son nom peut se maintenir longtemps au pouvoir quand son mutisme a fait disparaître l’humus dans lequel elle plonge ses racines".

5) Vers un rapprochement droite extrême droite ?

Les axes de campagne communs à l’extrême droite et à la droite depuis 1995 ont déjà créé une symbiose importante entre leurs électorats.

Les sources idéologiques de leurs cadres présentent des similitudes, tel le club de l’Horloge qui se définit comme "un réservoir d’idées pour la Droite" ; il date aussi des années après 1968 et travaille depuis longtemps à une synthèse théorique et pratique entre la droite et l’extrême droite.

Nicolas Sarkozy a gagné ces présidentielles en menant campagne de façon à siphonner les voix du Front National. A terme, cela peut mener à un mouvement profond de rapprochement des électorats de droite et d’extrême droite.

De toute façon, le personnel politique de la droite française de 1815 à 1878, du boulangisme au fascisme, a toujours été majoritairement composé de personnes aptes à franchir, si nécessaire pour conquérir ou conserver le pouvoir, le pas d’une orientation semblable à celle de l’extrême droite (désignation de boucs émissaires par exemple).

Si ce rapprochement droite extrême droite se concrétisait, ceux qui minimisent la gravité de cette défaite électorale de 2007 pourraient bien s’en mordre les doigts. En tout cas, il faudra suivre très précisément cette évolution possible dans les années à venir.

6) La mondialisation libérale et ses implications politico-idéologiques ont précédé et préparé la victoire de Sarkozy

Le texte ci-dessus d’Alain de Benoist analyse bien :

* l’influence idéologique de la gauche de 1968 à 1990,

* les limites du pouvoir politique sans rapport de force culturel dans la société

* la nécessité d’une cohérence politique pour convaincre et entraîner une majorité des citoyens, en neutraliser d’autres.

Cependant, Alain de Benoist néglige le poids du rapport de force mondial sur les évolutions politiques nationales. La gauche bénéficiait durant les années 1965 à 1978 du contexte mondial : haut niveau de combativité et de conscience, puissance du mouvement jeune sous ses diverses formes, élan de la décolonisation et des luttes du Tiers Monde ( Vietnam en particulier), luttes démocratiques dans les Pays de l’Est (Tchécoslovaquie), mouvement ouvrier capable d’imposer une répartition des richesses et un maintien de grands acquis sociaux, social-démocratie assez protégée par les USA et le patronat mondial pour ne pas laisser la place aux communistes et à l’extrême gauche...

Cette période de haut niveau de combativité et de conscience n’ayant pas débouché sur des victoires significatives, un cycle de recul s’est amorcé au niveau international globalement à partir de 1974-1978. Ainsi, de 1978 à 1994, le gauche a connu sa deuxième période difficile du 20ème siècle (je reviendrai plus loin sur le cas particulier de la France). Contrairement à la précédente des années 1925-1943, le grand capital a articulé cette fois-ci d’une part des dictatures pour casser les dynamiques populaires et conserver des marges bénéficiaires ( Amérique latine, Asie du Sud-Est, grands pays africains), d’autre part un redéploiement économique mondial qui a complètement bousculé le mouvement ouvrier et les forces de gauche habitués à agir dans un cadre national.

Ce contexte mondial a pesé sur l’évolution du rapport de forces entre les classes sociales fondamentales (capitalistes d’un côté, salariés et couches populaires de l’autre), autre élément qu’Alain de Benoist sousestime. C’est la grève générale de Mai 68 et les nombreuses luttes émancipatrices de cette période qui avaient créé les conditions des aspirations sociales et de l’hégémonie culturelle auxquelles l’Union de la gauche a répondu par le Programme commun, celui-ci stabilisant et donnant un débouché politique au rapport de force.

Ces deux éléments sont décisifs pour analyser au plus près ce qui s’est passé depuis 40 ans, pour la gauche (j’y reviendrai), mais aussi pour la droite.

Il est évident que l’élection de Nicolas Sarkozy représente une péripétie dans le processus de la mondialisation libérale et des expressions politiques que celle-ci génère aux Etats Unis, Allemagne, Grande Bretagne, Pologne, République tchèque...

7) L’UMP aujourd’hui, un vrai parti de droite

La droite française n’était jamais arrivée depuis la Révolution française à se doter d’un grand parti conservateur lié au patronat et disposant d’un électorat apte à affronter durablement la gauche et le mouvement social. Elle a mis en place les institutions de la 5ème République pour compenser cette faiblesse congénitale par "la rencontre lors des présidentielles d’un homme providentiel avec son peuple". Tu parles, Charles, c’était seulement un moyen pour valoriser régulièrement un nouvel individu par les médias aux ordres, puis reconstruire une "majorité présidentielle" autour de lui.

Les partis de droite, ainsi constitués, n’ont jamais eu la puissance militante des partis de gauche ; il s’agissait plus de partis de supporters que de militants.

Depuis que Nicolas Sarkozy a été élu président de l’UMP, les caractéristiques de ce parti ont changé :

- finies les instances nationales essentiellement composées d’élus absentéistes ; voici un Conseil National de 2500 membres, creuset permettant la structuration d’un réseau national de cadres.

- finies les seules assemblées générales départementales, voici 3000 cercles locaux chargés de relayer l’orientation politique et de répartir les tâches militantes.

- finie l’extériorité de la droite par rapport au monde du travail ; voici 24 fédérations professionnelles "conçues à la fois comme boîtes à idées et courroies de transmission dans la société, un peu sur le modèle du Parti Socialiste des années 1970 à la grande époque des Groupes Socialistes d’Entreprises" (A Gauche n°1083).

- 18 conventions thématiques depuis deux ans sur "La France d’après" pour homogénéiser l’organisation sur les sujets clés.

Lors de ces élections de 2007, le militantisme de l’UMP laisse à penser que sur un certain nombre de départements Nicolas Sarkozy s’appuie au moins conjoncturellement sur un vrai parti conservateur en cours de consolidation. Si cette dynamique se poursuit : Le danger est réel !

Autre constat : la droite française avait toujours évité d’afficher ses liens avec le grand patronat ; tel n’est pas le cas pour Nicolas Sarkozy, tant par son programme que dans les médias. Son voyage en yacht après l’élection constitue un signal médiatique supplémentaire pour déculpabiliser les riches. La droite française était réputée plus à gauche que la gauche de certains pays européens tant elle était obligée de tenir compte du rapport de force ; tel n’est pas le cas pour Sarkozy qui met en avant ses liens avec Fini-Berlusconi, avec Aznar, avec Bush et les néo-conservateurs...

8) Les résultats de Nicolas Sarkozy

La victoire de la droite en 2007 constitue une victoire personnelle de Nicolas Sarkozy. En effet, pour tous les instituts de sondage, c’est le candidat qui attire, de loin, le plus d’électeurs sur son nom comme principale motivation de vote. Il a donc réussi à développer une campagne très à droite, à rassembler les droites dans un grand parti conservateur ( des royalistes à Hervé Morin) tout en réussissant le jeu bonapartiste de l’Homme providentiel. Cela éclaire la faiblesse de la campagne contre lui.

Il est étonnant de constater à quel point les fiefs de Sarkozy sont différents de ceux de Chirac. La carte de l’électorat de Sarkozy en 2007 ressemble plus à celui du Front National ( Sud-Est, Rhône Alpes, Est, Grand Centre) qu’à celui de Chirac en 1995 et 2002 ( Bretagne, Massif Central, Champagne, Grand Centre). Ce constat doit sans doute être rapproché du sondage SOFRES indiquant qu’environ 1 350 000 électeurs d’extrême droite sont passés entre 2002 et 2007 de Le Pen à Sarkozy, particulièrement dans ces régions.

Nicolas Sarkozy a réalisé ses meilleurs scores en milieu rural (57%) et dans les villes de 20.000 à 100.000 habitants (56%), tandis que Ségolène Royal obtient ses meilleurs résultats dans les villes de plus de 100.000 habitants (50%) et l’agglomération parisienne (50%).

Comme nous le verrons plus loin, plus l’électorat est favorisé plus il vote Sarkozy. Plus l’électorat est âgé, plus il vote Sarkozy.

9) Le Front National

Le nombre de ses électeurs tombe de 4 804 713 en 2002 à 3 824 258 en 2007. Cette perte de voix pour un nombre d’inscrits plus élevé entraîne une nette baisse en pourcentage de 16,86% à 10,51%.

Comment expliquer ce recul ?

* les régions où le Front national a subi ses plus fortes pertes ( de moins 0,66% à moins 0,5% des suffrages expromés) sont la Provence Côte d’Azur, Rhône Alpes, région parisienne, Alsace, Vendée et environs.

* c’est Nicolas Sarkozy qui a aspiré ces voix lepénistes de 2002, essentiellement un électorat politisé, ancré depuis toujours dans la droite dure et l’extrême droite, vouant une véritable haine à la gauche. Ce glissement de Le Pen vers Sarkozy se repère par exemple dans des communes aveyronnaises marquées au 20ème siècle par la tradition pétainiste.

* les 667 026 voix de Mégret ne se sont globalement pas réportées sur Le Pen mais sur Sarkozy.

* une partie des électeurs frontistes de 2002 venus de la gauche sont revenus vers elle en 2007 ( 22% en faveur de Ségolène Royal)

* une partie des électeurs Le Pen de 2002 a considéré en 2007 que le meilleur candidat anti-système était Bayrou (par exemple 17% des électeurs de gauche frontistes de 2002)

Ce recul électoral ne me paraît pas signifier un recul de l’audience du Front National (sauf paut-être dans certaines banlieues) :

* Les pertes de Le Pen en suffrages exprimés par département ne dépassent pas 0,66%. Même dans le contexte de la vague Sarkozy au sein de la droite, l’extrême droite a donc résisté. Cela marque un succès pour celle-ci, aujourd’hui encore plus qu’hier candidate au pouvoir.

* jamais les électeurs du Front ne s’en étaient autant vanté publiquement durant une campagne

* en reprenant les thèmes développés par Le Pen depuis 30 ans, Nicolas Sarkozy leur a donné une crédibilité supplémentaire.

* la sociologie du vote Le Pen n’a guère changé avec 26% parmi les ouvriers et une assise significative parmi les employés, retraités, inactifs, artisans, commerçants, chefs d’entreprise. Les départements où Jean Marie Le Pen résiste le mieux sont des départements ouvriers : Pas de Calais, Aisne, Haute Marne, partie des Ardennes et de la Lorraine.

* les villes qui apportent les meilleurs résultats au FN sont également des villes ouvrières comme le signale Jérôme Fourquet de l’IFOP : 22,5% à Stiting Wendel, 23% à Freyming Merlebach en Moselle, 23,2% à Brouvelieuvres dans les Vosges, 21% à Harnes et 21% à Sallaumines dans le Pas de Calais.

La carte du vote Le Pen en 2007 rappelle presque exactement celle de 2002 avec ses meilleures implantations dans :

- le Grand Est : Haut-Rhin, Belfort, Haute Saône, Vosges, Haute Marne, Aube, Meuse, Moselle, Bas Rhin

- les départements du Nord : Ardennes, Pas de Calais, Aisne, Oise, Somme, Nord

- les rives de la Méditerranée : Corse, Pyrénées Orientales, Aude, Hérault, Gard, Bouches du Rhône, Var, Alpes Maritimes

- le Grand Centre : Yonne, Nièvre, Cher, Indre, Loir et Cher, Loiret, Eure et Loir, Orne, Eure

- le couloir rhôdanien ( Vaucluse, Drôme, Loire, Ain) et la Basse vallée de la Garonne ( Tarn et Garonne, Lot et Garonne)

Le populisme du Front National a permis à la droite de gagner une partie de l’électorat de gauche dans les couches populaires. Mais son ancrage dans la tradition fasciste française laissera-t-elle place à une stratégie d’alliance politique avec la droite classique ? C’est le souhait du club de l’horloge et probablement de certains dirigeants dont Mégret et Marine Le Pen mais Nicolas Sarkozy y perdrait politiquement aujourd’hui plus qu’il n’y gagnerait.

10) Un exemple du corps électoral droite extrême droite : les catholiques pratiquants réguliers (au moins une fois par mois à la messe)

Depuis deux siècles cet électorat a toujours été marqué par son ancrage à droite et à l’extrême droite. Après une légère atténuation suite au concile Vatican II et à la force des aspirations émancipatrices des années 1968-1978, ce phénomène paraît connaître une seconde jeunesse.

Depuis deux ans, je suis surpris par l’évolution idéologique des publications catholiques parmi lesquelles revient peu à peu des éléments de leur cohérence de base d’avant la seconde guerre mondiale : importance de la Révélation et de la Tradition, refus de la connaissance dès que cela touche aux questions religieuses...

Ainsi, le néo-conservatisme américain trouve un écho de plus en plus net dans le catholicisme français. Les discours de Jean Paul II puis de Benoît XVI orientent leurs brebis dans cette direction. Prenons par exemple l’article de La Croix concernant le dernier ouvrage du pape concernant Jésus : " L’étude historico-critique a de longue date trouvé ses limites en laissant entendre que le "vrai jésus" dans son épaisseur historique, n’était pas accessible par les textes évangéliques. Benoît XVI lui oppose l’"exégèse canonique", née aux Etats Unis il y a une trentaine d’années, qui étudie chaque élément du Nouveau Testament à la lumière du message que la Tradition chrétienne a reconnu comme révélé dans la globalité de l’Ecriture... Jésus n’est pas venu "apporter le bien commun" mais "l’amour".

D’après le sondage CSA pour l’Union Nationale des Associations de Parents de l’Enseignement Libre, ce 22 avril 2007, 45% des catholiques pratiquants réguliers ont voté Sarkozy, 20% Bayrou, 11% Le Pen, 9% De Villiers soit 85%, sans compter Nihous. Ces pourcentages correspondent aux constatations plus floues que nous pouvons faire en Aveyron.

De Villiers dispose d’un vivier électoral dans ce milieu souvent rural et traditionnaliste, socialement privilégié, ancré dans un militantisme de soutien aux écoles privées. La majorité de ces électeurs ont choisi un "vote utile" pour Nicolas Sarkozy.

Il serait erronné de sous-estimer l’importance du courant clérical dans la droite française. Une victoire politique et idéologique comme celle de 2007 va probablement lui donner des ailes comme en témoigne dès le lendemain du vote, la proposition de loi formulée par dix députés UMP visant à caractériser comme génocide la Guerre de Vendée durant la Révolution française.

11) Un exemple du corps électoral de droite : le patronat

Depuis de nombreuses années, les grands capitalistes français ressentent Nicolas Sarkozy comme leur poulain. Retenons par exemple le cri du coeur du baron Ernest Antoine Seillière lorsque celui-ci fut nommé à Bercy dans le ministère Raffarin III : "C’est Zidane aux finances".

Le sondage "sortie des urnes" donnait le 22 avril pour les adhérents du MEDEF et de la CGPME : Sarkozy 96 %, Bayrou 2%, Royal 2% ! Effarant ! En voilà qui savent ce qu’est un vote de classe ! Heureusement qu’ils représentent une infime partie du corps électoral.

Par ailleurs, une étude IFOP-Fiducial donne parmi les patrons des " Très Petites Entreprises" (1 à 19 salariés) au premier tour : 50% pour Sarkozy, 12% pour Bayrou, 11% pour Le Pen, 11% pour Royal. Je n’ai pas souvenir de tels pourcentages depuis qu’existent ces instituts.

Interrogés sur le système de retraite, 65 % des petits patrons considèrent qu’il faut supprimer " rapidement " les régimes spéciaux (contre 52 % des Français) et 61 % sont favorables au non-remplacement systématique des fonctionnaires (contre 53 % des Français).

Ils sont par ailleurs très favorables (86 %) à l’assouplissement du droit du travail dans les entreprises de moins de 50 salariés. 78 % d’entre eux déclarent que cette mesure serait une " grande avancée pour la France si elle était appliquée ". Quant à la baisse de l’impôt sur les sociétés, 81 % d’entre eux estiment même que, si cette mesure était appliquée, ce serait bénéfique pour les entreprises car elle répond directement à leurs préoccupations (67 %) et pourrait les inciter à embaucher (62 %).

Dès le soir du 6 mai, la présidente du MEDEF a félicité le nouveau président, lui faisant part de sa joie et de l’engagement du MEDEF pour « contribuer avec responsabilité et enthousiasme à l’écriture de la nouvelle page qui s’ouvre pour la France ». Depuis cette date il est étonnant de voir les dirigeants patronaux français, généralement bougons et jouant la corde du pessimisme, considérer le 6 mai comme leur plus grande victoire depuis des décennies. Ainsi, lundi 14 mai, Laurence Parisot, présidente du Medef, a de nouveau manifesté son "enthousiasme" face au "nouveau cycle peut-être pas de cinq ans, mais de dix ans ou vingt ans qui s’ouvre pour notre pays".

12) Un électorat sarko-lepéniste

Sur le Nord Aveyron, depuis quinze ans environ, nous avions noté l’hésitation d’un nombre important d’électeurs de droite entre Le Pen et Chirac. En 2007, ce phénomène s’est largement amplifié en raison de la proximité de thèmes plus grande entre Le Pen et sarkozy.

Au plan national, plusieurs indications se recoupent prouvant l’existence d’environ 25% du corps électoral oscillant entre droite et extrême droite. C’est beaucoup car cela situe l’électorat potentiel de l’extrême droite à environ 35% ( par exemple en cas de second tour des présidentielles contre la gauche). C’est surtout beaucoup en cas de mobilisation de cet électorat, d’une façon ou d’une autre contre la gauche ou contre des grèves... Sur une moitié géographique du département de l’Aveyron, ils représentent déjà une force plus homogène, plus active et plus déterminée que la gauche.

Dans cet article, nous avons déjà noté que l’électorat politisé "droite dure extrême droite" a choisi conjoncturellement plutôt Sarkozy que Le Pen.

Dans l’électorat catholique pratiquant, CSA a analysé aussi, de son sondage du 16 mars au vote du 22 avril, un fort glissement de Le Pen et De Villiers vers Sarkozy.

Dans son sondage sortie des urnes le 22 avril, la SOFRES a demandé aux électeurs de Nicolas Sarkozy s’ils avaient envisagé de voter pour un autre candidat : 40% ont répondu Jean Marie Le Pen.

13) Bayrou et son futur "mouvement démocrate"

Dans le bilan de ces élections présidentielles, un constat est évident : Ségolène Royal a construit sa campagne sur une orientation "Tout sauf Sarkozy" et un positionnement "au centre", "fondé sur des valeurs plus que sur un catalogue" ; cela a conduit beaucoup d’électeurs de gauche a voter Bayrou au premier tour. Ségolène Royal a ouvert les digues d’une alliance par delà les clivages traditionnels ; cela a renforcé Bayrou ( puis Sarkozy depuis le 6 mai) déstabilisant le PS et le PRG.

Depuis 30 ans, le projet de constituer un "mouvement démocrate" positionné au centre droit, hors de la majorité présidentielle, a toujours échoué. Rappelons le Mouvement Démocrate Français (MDF) créé en 1978 par Henri Fouquereau, le Mouvement des Démocrates (MDD) créé en 1974 par le gaulliste Michel Jobert, qui se situait "ailleurs", le Mouvement Démocrate Socialiste de France (MDSF) créé en 1973 par Émile Muller et Max Lejeune (devenue Parti Social-Démocrate en 1982).

Sur l’orientation des congrès du parti socialiste (en gros Union de la Gauche), François Bayrou n’avait et n’aura aucune chance de percer. Après la campagne à la Prodi de Ségolène Royal, il a peut-être une petite chance de peser sur les alliances choisies par la gauche.

La différence entre Sarkozy et Bayrou m’apparaît comme un antagonisme de carrière politique personnelle plus qu’une différence de projet politique. La politique pratiquée par le second au ministère de l’Education nationale relevait du choix prioritaire de rassembler la droite autour de son identité historique française : la promotion de l’enseignement confessionnel. Les différents votes du Béarnais, plus récemment, comme député, ont continué à prouver son positionnement à droite et soucieux des intérêts patronaux.

Il est vrai que dans l’immédiat, le projet politique de Nicolas Sarkozy présente des différences avec celui de Bayrou, mais pour des raisons conjoncturelles tactiques.

La vraie différence entre Nicolas Sarkozy et François Bayrou, c’est que le premier ayant phagocyté toute la droite, le second ne peut exister que si la gauche lui donne de l’oxygène, y compris au risque d’y perdre sa propre respiration. En conséquence, Bayrou et son pool diffèrent peut-être sur un point de l’UMP : ils choisissent moins délibérément l’affrontement avec les syndicats pour casser le droit du travail, la sécurité sociale, les retraites, les services publics...

François Bayrou présente quatre avantages pour la droite qui lui permettront de bénéficier d’une sympathie médiatique malgré l’échec vers lequel il court aux législatives :

* stopper le glissement vers la gauche de l’électorat populaire dans les bastions historiques du catholicisme français que l’affaiblissement institutionnel de l’Eglise laissait de plus en plus en déshérence . Dans quels secteurs François Bayrou passe-t-il le cap des 20% ce 22 avril ? surtout sur ces régions et départements : Bretagne, Pays de Loire, Normandie, Moyenne montagne du Massif central ( Puy de Dôme, Cantal, Aveyron, Lozère), Pyrénées Atlantiques, Hautes Pyrénées, Savoie, Rhône.

* conserver à la droite ces suffrages des milieux favorisés qui souhaitent une certaine "libéralisation" à l’européenne, mais sans trop d’affrontements, en donnant un peu de charité pour que les pauvres ne crient pas trop fort.

* attirer si possible une partie de la gauche dans une alliance de type italien à 90% libérale et à 10% sociale qui diviserait durablement la gauche, provoquerait peut—être une scission du parti socialiste et ainsi installerait plus durablement la droite au pouvoir.

* servir de solution de rechange pour 2012 si Sarkozy échoue.

14) L’élection présidentielle de 2007 marque-t-elle une droitisation de la société française ? NON !

La victoire de Sarkozy pour les présidentielles 2007 n’est pas synonyme pour le moment d’une droitisation de la société française. Le Front National a plutôt régressé en terme électoral. Sur les lieux de travail et de vie, nous ne sentons pas un glissement conservateur de la société sur les questions sociétales comme dans les années 1983 à 1995.

Ecrire cela, n’implique pas de sousestimer les raisons politiques et idéologiques de la victoire de Sarkozy, développées plus haut. Ceci dit, ces raisons sont plus superficielles que dues à des modifications profondes dans les réflexes idéologiques du peuple de notre pays. Sa victoire tient à la réussite de sa campagne conjoncturelle ainsi qu’aux faiblesses de la gauche et de sa candidate.

Dans un contexte d’anxiété de la société française sur l’avenir du pays et de combativité face aux ravages de la mondialisation libérale et de l’Europe ouiste, Nicolas Sarkozy a bien joué le coup médiatiquement avec son histoire de rupture.

N’oublions pas une raison décisive expliquant sa promotion presque unanime au sein de la droite et du patronat : le soutien qu’il a reçu des puissances d’argent.

Quel est l’objectif des milliardaires en propulsant Sarkozy à la présidence ?

* faire travailler plus les Français et les payer moins.

* liquider de façon importante les droits sociaux et services publics

Le nouveau président a gagné une manche en remportant les présidentielles sur le terrain politique. S’il remportait durant son quinquennat une victoire sociale nette face aux syndicats sur les objectifs ci-dessus, le risque de droitisation serait réel. Si l’UMP et l’extrême droite continuaient à chauffer à blanc les réflexes sécuritaires et xénophobes et si, en plus, ils s’épaulaient électoralement un jour, le risque de droitisation serait également réel.

Nous n’en sommes pas encore là mais tel est l’enjeu.

Pour les années à venir, il serait erronné de miser seulement sur les mobilisations sociales pour gagner ces manches à venir.

La refondation de la gauche représente donc un enjeu incontournable pour éviter une droitisation effective et une thatchérisation de la France.

B) La gauche et l’élection présidentielle de 2007

15) Le Parti Socialiste

16) Ségolène Royal

17) Résultats du premier et du second tour : le vote de la gauche radicale en faveur de Ségolène Royal

18) Maintien d’une identité idéologique spécifique de l’électorat de gauche par rapport à celui de droite

19) La candidature Royal, son électorat, sa base sociale, son orientation politique

20) Gauche plurielle et PRG

21) Les Verts

22) Le vote pour le Parti Communiste Français

23) Quelle unité et quelle clarification pour la gauche ?

24) José Bové

25) Olivier Besancenot

Cette élection était largement à portée de la gauche. Certains l’ont même caractérisée d’imperdable. Pourtant, elle a été perdue.

La principale cause de cette défaite relève du Parti Socialiste et de sa candidate.

15) Le Parti Socialiste et les présidentielles de 2007

L’appareil du Parti Socialiste a rarement perdu autant la main sur une campagne électorale que pour ces élections.

L’appareil du PS a perdu, momentanément, la main sur son propre parti

L’engagement total de cet appareil en faveur du oui au Traité Constitutionnel Européen puis la victoire du Non et même un non majoritaire parmi les adhérents ainsi que dans les bastions historiques de la gauche (Nord Pas de Calais, Midi Rouge...) l’a déstabilisé.

Premier secrétaire depuis 1997, François Hollande paraissait disposer de nombreuses cartes pour être investi candidat socialiste aux présidentielles. Il sortait renforcé du congrès du Mans par l’alliance de sa majorité (DSK, Aubry, Delanoë...) avec le NPS ( Peillon, Emmanuelli, Hamon...). Occupé par la gestion de ce capital, il s’est retrouvé liquidé en un rien de temps par l’offensive de son épouse Ségolène Royal jouant médiatiquement contre l’appareil central du parti. Comme les critiques de celle-ci correspondaient à la réalité et au sentiment de nombreux adhérents socialistes (appareil bureaucratisé, peu politique, peu offensif, peu rigoureux quant à la démocratie interne, fondant son pouvoir sur un équilibre entre grands élus, fort éloigné des soucis quotidiens de la base sociale de gauche), comme cela amusait la droite, comme cette attitude fut ressentie courageuse par les "sondés", François ne s’en est pas relevé.

Lors du vote d’investiture au sein du PS, Laurent Fabius n’a pas pesé lourd (18,54% des suffrages socialistes). Il se voulait héritier du non de 2005 mais était trop marqué par son passé social-libéral pour crédibiliser cette image. Il se voulait l’héritier du mitterrandisme l’actualisant pour ce début de 21ème siècle. Le mitterrandisme s’explique par le puissant mouvement social des années 1968 auquel le nouveau PS avait répondu par une stratégie de "front de classe", de programme commun avec le PCF, de "dépassement du capitalisme". Cette matrice du mitterrandisme originel pouvait répondre au contexte de 2007 avec un mouvement social à nouveau mobilisé et une aspiration citoyenne assez large à une alternative politique. Cependant, ni Fabius, ni le PS n’étaient en état de renouveler ce logicien pour 2007. Laurent Fabius se voulait le continuateur de la stratégie de "gauche plurielle" ; or, les Verts comme le PCF avaient largement pris, depuis 2002, leurs distances. Il se voulait le plus compétent, le plus précis, le plus apte des candidats socialistes à traiter les dossiers importants ; sur ce plan, il avait raison mais l’élection s’est jouée autrement.

Dominique Strauss-Kahn bénéficiait depuis 2002 de sondages flatteurs. Il disposait également de bons appuis au sein du réseau d’élus socialistes. Pourtant, son score au sein du parti (20,83%) s’est avéré presque aussi faible que celui de Fabius. Dans le contexte politique succédant à la victoire du non au TCE en 2005 puis la mobilisation sociale contre le CPE, l’orientation social-libérale assumée de DSK représentait un handicap.

Sur le fond, Fabius comme Strauss-Kahn misaient sur leurs qualités et leurs arguments peaufinés pour s’imposer au sein de leur parti et dégonfler la baudruche médiatique Ségolène.

Or, le Parti socialiste n’est plus capable de mener à bien de vrais débats politiques. De plus, il s’agit d’une machine de promotion électorale de moins en moins sensible aux aspirations ouvrières et populaires.

Le Parti Socialiste n’a jamais eu en France la puissante base sociale ouvrière du Labour britannique, du SPD allemand ou des partis nordiques ; il a cependant maintenu un lien ténu avec la classe ouvrière dans une région comme le Nord Pas de Calais et d’autres secteurs. Dans les années 1970, il avait retrouvé une implantation sociale réelle et une ossature de cadres dont l’expérience, la conviction et la formation n’étaient pas négligeables.

Les élus pléthoriques sont aujourd’hui bien moins politisés que dans les années 1970 et même 1980 ; beaucoup se préoccupent essentiellement de la tactique pour préparer leur réélection. En 2006, les sondages paraissant donner Ségolène comme la meilleure candidate pour battre Sarkozy au second tour, de nombreux leaders locaux et nationaux se sont rangés derrière elle sur ce seul argument (Jack Lang par exemple).

Le nombre d’adhérents fonctionnant essentiellement comme clientèle des élus explique le grand écart entre le faible nombre de présents lors des débats internes centralisés et le fort contingent d’exprimés lors des votes.

16) Ségolène Royal

Dans le bilan de la gauche lors de ces présidentielles 2007, elle occupe inévitablement une place centrale.

Pour la campagne interne au Parti Socialiste sur l’investiture d’un candidat, elle a gagné (60,62%), loin devant ses deux concurrents.

Beaucoup d’électeurs de gauche étaient décidés à ne pas renouveler le 21 avril 2002 ; aussi, une majorité s’est portée sur elle. Cependant, je crois que Ségolène Royal l’a emporté pour une raison tactique liée à la nature du champ politique capitaliste actuel : le rôle des médias et des instituts de sondage. Elle en a très bien usé et abusé du printemps à l’automne 2006, de jurys populaires en cartes scolaires, de la bravitude aux louanges pour Blair et Gemayel, de la dénonciation de l’assistanat à "la réconciliation avec les entreprises".

De nombreux medias l’ont aidée à se propulser en candidate officielle face à Nicolas Sarkozy bien avant le vote d’investiture interne au PS. L’échec de 2002 avait été ressenti par une bonne partie de l’électorat de gauche et même des militants socialistes comme lié à l’épuisement électoral de la génération née avec le mitterrandisme des années 1970. Quant aux médias, ayant soutenu le Oui lors du vote sur la constitution européenne, ils ont voulu mettre en pole position à gauche une ouiste correspondant au profil de la social-démocratie européenne.

De plus, Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius rappelant trop l’échec de 2002, ne boustant pas leurs ventes, ils ont fait le choix de bouleverser le casting avec du neuf ! Ces medias ont ainsi fait monter la mayonnaise d’un mythe auquel Ségolène Royal a ensuite essayé de donner une consistance.

* au lieu de comprendre les limites d’une popularité sondagière passagère et de muscler sa réflexion politique et son programme, Ségolène Royal a continué à surfer sur son rapport personnel à "l’opinion", dans une démarche fortement narcissique. Il est possible que ses soutiens socialistes principaux l’aient poussé dans ce sens, les Bernard Kouchner, Gérard Collomb, Gaëtan Gorce, Jean-Marie Bockel, Manuel Valls, Vincent Peillon, Arnaud Montebourg... En fait, ils utilisaient plus Ségolène Royal pour leur propre carrière qu’ils ne l’aidaient pour gagner la présidentielle.

* Certains choix politiques de Ségolène Royal dans sa campagne ne l’ont pas aidée à construire une dynamique collective autour d’elle. Après avoir gonflé ses sondages par la dénonciation de travers de son parti et de ses élus, croyait-elle l’emporter électoralement sur son profil photographique ? sur une bonne communication ? En s’attaquant par exemple sur le terrain éducatif à la carte scolaire et au temps de travail des enseignants croyait-elle pouvoir gagner de façon populiste contre un pilier social de la gauche ?

* L’écart entre d’une part les attentes sociales poliques des salariés et du peuple de gauche, d’autre part la campagne personnalisée et politicienne de Ségolène Royal. Même les sondages indiquaient les priorités économico-sociales de notre peuple (salaires, emploi, retraite, santé, logement...). Ségolène Royal n’a jamais été en mesure de crédibiliser sur son nom une perspective politique alternative répondant à ces questions. Comme Jospin, elle a considérée l’élection comme gagnée d’avance et a surtout préparé l’avenir, refusant réellement de s’engager sur des revendications sociales précises.

17) Remarques sur les résultats du premier et du second tour : le vote de la gauche radicale en faveur de Ségolène Royal

D’après un sondage, un tiers des électeurs de Ségolène Royal au premier tour se réclament de "l’autre gauche" et ont donc effectué un "vote utile pour ne pas renouveler 2002". Sans cet apport, le score Royal est largement inférieur à celui de Lionel Jospin en 2002.

Pour le premier tour, Ségolène Royal bénéficiait du soutien du PRG et du MRC. En 2002, Jospin, Taubira plus Chevènement avaient obtenu ensemble 23,83% des voix. En 2007, Ségolène Royal réalise 25,87 % en ayant attiré des abstentionnistes de 2002 ( d’après les sondages sortie des urnes 51% des abstentionnistes de gauche de 2002 sont venus voter pour elle en 2007) et de nombreuses voix dans l’électorat Vert et dans celui de la gauche antilibérale.

Parmi l’électorat de gauche et d’extrême gauche de 2002, ( d’après les sondages sortie des urnes) elle récupère 75% des voix de Jospin, environ autant pour Taubira et Chevènement, 40% des voix Besancenot, 33% des voix Laguiller, 22% des voix Le Pen, 20% des voix Hue...

Au second tour, plus les électeurs se situaient à gauche de l’arc politique, plus ils ont voté Ségolène Royal au second tour

Les meilleurs résultats de Ségolène Royal au second tour proviennent généralement de bureaux, villes et circonscriptions où la gauche antilibérale a fait ses meilleurs scores au premier tour (dont circonscriptions du PC au niveau national ou gros scores Besancenot + Buffet en Aveyron et ailleurs)

Ce constat général est corroboré par le sondage sortie des urnes d’IPSOS au second tour. Les enquêteurs ont demandé aux citoyens de remplir un questionnaire indiquant d’une part leur positionnement politique, d’autre part leur vote.

Voici les votes pour Ségolène Royal :

* Electeurs "Très à gauche" 100%

* Electeurs "A gauche" 94%

* Electeurs "Plutôt à gauche" 87 %

* "Plutôt à droite" 7%

* "A droite" 3%

* "Très à droite" 3%

* Electeurs qui préfèrent ne pas se situer à gauche ou à droite : 39%

Dans le même ordre d’idée d’un fort clivage droite gauche maintenu malgré les médias, Bayrou et divers dirigeants de gauche notons que l’électorat de gauche qui avait voté Bayrou au premier tour est revenu à gauche au second alors que l’électorat Bayrou venu de droite s’est reporté sur Sarkozy.

18) Maintien d’une identité idéologique spécifique de l’électorat de gauche par rapport à celui de droite

Comme pour toutes les élections précédentes, les sondages font apparaître des différences toujours aussi significatives entre gauche et droite en ce qui concerne les motivations du vote

* "La lutte contre les inégalités et les injustices a-t-elle joué dans votre vote" ? 53% des électeurs de la gauche antilibérale répondent oui, 42% des électeurs de Ségolène Royal, 29% de Bayrou, 19% de Sarkozy et 17% de Le Pen. Même différenciation entre gauche et droite sur la défense du système de protection sociale ( retraites, santé...), sur l’amélioration de l’école, sur la lutte contre la pauvreté, sur l’environnement, sur l’intégration des minorités dans la société française.

* Par contre "la lutte contre l’insécurité a-t-elle joué dans votre vote ? " : 53% de oui pour Le Pen, 43% pour Sarkozy, 8% pour Royal ; quant à la lutte contre l’immigration clandestine : 60% de oui pour Le Pen, 30% pour Sarkozy, 11% pour Bayrou, 4% pour Royal...

Le même constat d’une différence de nature entre électorats peut être fait en ce qui concerne les évènements ayant influencé le vote.

Quels évènements sont mis en avant prioritairement par les électeurs de gauche ?

* les indemnités de départ de certains patrons

* le plan social d’Airbus

Quels évènements sont mis en avant prioritairement par les électeurs de droite ?

* les affrontements entre des jeunes et la police à la Gare du Nord (63% pour Le Pen, 43% pour Sarkozy, 19% pour Royal et Gauche antilibérale)

* les attentats au Maroc et en Algérie ; les exigences des talibans pour la libération des otages français...

Autre réponse significative à un sondage

" Dans les mois et les années qui viennent, souhaitez-vous que la société française soit une société avec plus de libertés individuelles ou une société avec plus d’ordre et d’autorité ?"

Réponse "une société avec plus de libertés individuelles" : Gauche antilibérale 62%, Ségolène Royal 66%, Sarkozy 16%, Le Pen 18%

Réponse " une société avec plus d’ordre et d’autorité" : Gauche antilibérale 30%, Ségolène Royal 27%, Sarkozy 83%, Le Pen 80%.

Les hésitations sur le choix du bulletin de vote montrent parfaitement le clivage entre droite gauche

Un sondage est intéressant à relever sur ce sujet. Voici la question : "Y a-t-il un autre candidat que celui que vous avez choisi pour lequel vous avez sérieusement envisagé de voter ? Si oui, lequel ?"

51% des électeurs de Ségolène Royal répondent oui dont 32% pour Olivier Besancenot, 6% pour Marie George Buffet, 10% pour Voynet..., seulement 2% pour Sarkozy, 0% de Villiers, 0% Le Pen.

Pour Nicolas Sarkozy, 40 % répondent Jean Marie Le Pen. Son électorat est extrêmement homogène et totalement réfractaire à la gauche. Les flux de voix à droite s’opèrent entre Sarkozy, Le Pen et De Villiers, moins vers Bayrou.

Par contre, environ 2% de l’électorat flotte entre extrême droite et extrême gauche.

19) La candidature Royal, son électorat, sa base sociale, son orientation politique

Sur l’électorat de Ségolène Royal

Beaucoup de militants de gauche ont été effarés de voir Ségolène Royal arborer un sourire radieux le soir du 6 mai alors que la gauche venait de subir une défaite considérable sur ces présidentielles sans compter la déroute idéologique. Qu’elle ait voulu montrer sa résistance à l’adversité pour donner confiance, c’est défendable ; par contre, un soir comme celui-là, en tant que candidate de gauche, il était nécessaire de donner des éléments de bilan et de perspectives ; au lieu de cela, nous eûmes droit par moments à une sorte de fête improvisée de jeunes fans qui n’avait pas lieu d’être.

Une ambiguité doit être évacuée. Elle et ses proches paraissent confondre son statut de candidate avec une ségomania de masse. Cela ne correspond ni à notre impression sur les lieux de vie et de travail, ni au sondage TNS SOFRES sur les motivations du vote lors du premier tour. A la question : "Qu’est-ce qui a le plus compté dans votre vote ?" les électeurs de Ségolène Royal répondent à 31% le vote utile face à la droite, à 24% le programme, à 17% le rejet de Nicolas Sarkozy, à 12% le mécontentement vis à vis de la politique suivie depuis 2002... et seulement pour 6% l’adhésion à une personnalité, à un caractère ( 21% pour Sarkozy).

Sur la base sociale de l’électorat Royal lors de ces présidentielles

Le plus mauvais résultat de la gauche lors d’un second tour de présidentielles depuis quarante ans était celui de 1995. Il est donc intéressant de comparer 1995 et 2007. Le principale conclusion à tirer, c’est l’évolution de la composition sociologique de l’électorat de gauche. Elle se détecte dans l’étude pourtant peu fine du vote par département. Plusieurs départements ouvriers qui se positionnaient dans les dix meilleurs résultats de 1995 connaissent un effondrement du vote de gauche :

* Pas de Calais : 57,28 % en 1995, 52,04% en 2007

* Aisne : 54,55% en 1995, 46,65% en 2007

* Nord : 53,71% en 1995, 48,25% en 2007

* Ardennes : 53,29 % en 1995, 46,47 % en 2007

* Seine Maritime : 53,23 % en 1995, 49,80% en 2007

Cet affaissement de la gauche dans le milieu ouvrier et populaire est encore plus net au niveau de l’étude des communes et des bureaux. Ces résultats départementaux et locaux confirment les tendances données par les instituts de sondage ( 65% des ouvriers auraient voté Jospin en 1995, seulement 54% en faveur de Ségolène Royal en 2007).

Par contre, la candidate de gauche progresse dans des communes socialement plus favorisées. Au niveau des résultats par département, notons par exemple la progression sur Paris de 39,87% en 1995 à 49,81% en 2007.

Sur l’orientation politique

Sur ce point, l’analyse produite par Antoine Artous et Stathis Kouvélakis dans leur texte Présidentielles France 2007 : les leçons d’une défaite est meilleure que celle que j’avais développé en rédigeant mon article. Aussi, je reprends leur propos ci-dessous :

" Ségolène Royal a lancé sa candidature en contournant le parti. Elle a joué sur l’aspiration au renouvellement (et la candidature d’une femme), la « modernisation » de la démocratie (démocratie participative, etc.), faisant des clins d’oeil sur sa gauche et/ou vers les couches moyennes, tout en reprenant à son compte une version atténuée de la thématique sarkozyenne des « valeurs » : ordre, travail, identité nationale, éloge de la famille. Sur les questions économiques et sociales, elle a oscillé entre un projet initial inspiré de Tony Blair, et peu distinct sur le fond de celui de Sarkozy, (« réconciliation avec les entreprises », remplacement des droits sociaux par un discours compassionnel et moralisant, dénonciation de l’« assistanat » et réhabilitation « éthique » du « travail ») et des concessions, souvent de pure circonstance, à des éléments plus classiquement social-démocrates, sous la pression de son parti ou de la nécessité de s’adresser à l’électorat de gauche. Et lorsque la poussée Bayrou s’est accentuée dans les sondages, elle a clairement fait apparaître son orientation : en finir avec l’héritage de l’ère Mitterrand pour se tourner vers le centre.

Une telle orientation, agrémentée de zig-zags, n’était en rien capable de proposer une « rupture », alternative à celle de Sarkozy. Elle a, au contraire, accéléré le délitement idéologique du PS et conforté la posture offensive de la droite, ravie de voir le débat sur les « valeurs » se substituer aux choix en matière de politique économique et sociale. Si Ségolène Royal a engrangé au premier tour une partie des voix « anti-sarkozy » (le « vote utile » contre la droite), les votes « anti-système » ont été principalement captés par Bayrou. Son score médiocre fait apparaître que le relâchement des liens entre le PS et des secteurs décisifs de son électorat s’est non seulement poursuivi mais qu’il s’est même s’accentué : à la sécession des couches populaires est venue s’ajouter la distanciation d’une partie significative du salariat intermédiaire et intellectuel."

20) Gauche plurielle et PRG

En 2002, les candidats de la "gauche plurielle" totalisaient 9 245 292 voix soit 32,45% des voix (dont la moitié pour Lionel Jospin).

Le 21 avril 2002 a eu pour conséquence une polarisation au profit du Parti socialiste des votes "Gauche de gouvernement" et même d’une partie de l’extrême gauche lors de toutes les élections suivantes ( législatives, régionales, européennes) et ce, malgré le vote du 29 mai 2005.

En 2007, les partis de l’ex gauche plurielle rassemblent 10 678 524 voix soit 29,34% (dont 88% pour Ségolène Royal). Il est évident que le soutien du PRG et du MRC à Ségolène Royal a contribué à lui donner une crédibilité unitaire et un bon résultat.

La stratégie d’alliance du PRG et du MRC avec le PS va certainement se maintenir pour les législatives, municipales et cantonales à venir. Quel avenir ensuite ?

Historiquement, le parti radical n’est pas un parti ancré à gauche. D’ailleurs, il s’est divisé entre d’une part une majorité qui a rejoint la droite et soutenait Sarkozy pour ces élections, d’autre part une minorité groupée aujourd’hui au sein du PRG, partie prenante de l’Union des Gauches depuis 40 ans. Cette insertion dans une gauche héritière de la tradition républicaine sociale et liée au mouvement ouvrier sur la base d’un bon rapport de force explique la tonalité parfois gauche, y compris antilibérale d’un certain nombre d’élus (par exemple Jean Rigal en Aveyron). Il a suffi de l’affaiblisement du PS autour de 1993 pour voir le PRG tenter une autre stratégie que l’union de la gauche : par exemple par l’opération Tapie. Il a suffi de l’échec de 2007 pour voir Jean Michel Baylet lancer des ponts pour tenter de repositionner son parti au plus offrant entre droite et gauche. Un glissement en ce sens du PRG est probable si Nicolas Sarkozy, après sa victoire électorale, réussissait à emporter une victoire sociale importante durant son quinquennat. Cependant, la force de la gauche est telle dans les collectivités régionales, départementales et locales que la base du PRG, parti d’élus, hésitera avant de changer d’alliance.

21) Les Verts (570 240 voix soit 1,57%)

Leur score s’est effondré de 5,25% à 1,57. La gauche du parti autour de Francine Bavay avait rejoint Bové. Beaucoup de cadres comme Cohn Bendit ou Lipietz lorgnent vers une alliance au centre avec l’UDF ; 20% des électeurs Verts les ont suivi en ce sens dès 2007 en votant Bayrou. Jean Luc Benhamias a rejoint le mouvement démocrate.

D’autres ont contribué à gonfler la médiatisation de Nicolas Hulot...

Dans un tel contexte, l’électorat écologiste a été le plus indécis de tous :

* 26 % s’est abstenu (sondage IPSOS)

* parmi les 570 240 voix de Dominique Voynet, 28% se sont décidés le jour du vote.

Dans ses explications sur le faible résultat des Verts, Dominique Voynet avance essentiellement le "vote utile" pour Ségolène Royal ; cela correspond à une réalité évidente même si ce n’est pas suffisant.

Il est clair que les Verts ont perdu leur forte audience dans l’électorat de gauche antilibérale, en particulier lors du référendum sur le TCE ; José Bové a fini d’emporter les militants de ce courant hors du parti écologiste pour soutenir sa campagne.

Faut-il pour autant tirer un trait sur les écologistes comme force électorale ? Non. Si la gauche antilibérale était un peu unifiée, au moins dans un front souple, la place des écologistes se limiterait à une sorte de centre gauche bobo ; mais tel n’est pas le cas.

22) Le vote pour le Parti Communiste Français

Il est facilement caractérisable socialement (ouvriers, chômeurs, personnes faiblement qualifiées, peu de jeunes) et politiquement ( 8% des non de 2005, vote identitaire, vote protestataire). Il s’agit aussi d’un vote pour un changement social : près de la moitié des électeurs communistes pensent que leur vie changerait beaucoup si leur candidate était élue.

Que s’est-il passé entre le vote de 2002 ( 960 480 voix soit 3,37%) et celui de 2007 ( 705 487 voix soit 1,94%) ?

* MG Buffet ne perd que 250000 voix mais dans un contexte où le nombre d’inscrits et de participants est nettement plus élevé ; le pourcentage se divise presque par deux.

* 66% des électeurs de Robert Hue se sont retrouvés sur MG Buffet mais 18 % pour Ségolène Royal. Au vu des bureaux, villes et départements où Olivier Besancenot réalise ses meilleurs scores, il ne fait aucun doute qu’une partie vient de l’électorat du parti communiste.

* parmi les sympathisants communistes 41% ont choisi MG Buffet, 29% Ségolène Royal, 14% Olivier Besancenot.

* en 2002, Robert Hue obtenait 18% des suffrages parmi les "proches de la CGT" ; ce pourcentage tombe à 7% en 2007 essentiellement au profit d’Olivier Beancenot (9%).

* 12% des électeurs d’Arlette Laguiller en 2002 ont choisi Marie George Buffet cette fois-ci.

Divers "analystes" expliquent ces derniers jours que le parti communiste est en fin de vie. Je ne vois pas bien sur quels arguments précis repose ce point de vue. D’une part le PC garde, j’en suis persuadé, des implantations locales fortes. D’autre part, le pourcentage de Français se reconnaissant dans l’anti-capitalisme et l’anti-impérialisme, la perspective socialiste, reste nettement supérieur à 15% ; toute la question est de savoir quel sera à l’avenir le rapport du PC avec ce courant d’opinion.

23) Quelle unité et quelle clarification pour l’avenir de la gauche ?

Plusieurs organisations et réseaux poussent aujourd’hui à un grand parti unifié de la gauche sur la base d’une clarification de l’orientation politique.

Tel est le cas pour Sami Naïr (MRC) : " En France, les défis sont majeurs, un grand parti de gauche doit les affronter. Encore faut-il nous mettre d’accord autant sur l’objectif que sur les modalités à plus long terme de la refondation de la gauche. Nous avons besoin d’un grand rassemblement des gauches, un rassemblement qui crée le moyen d’avancer ensemble, de lutter ensemble, de gagner ensemble. Un rassemblement qui devra réunir les sensibilités socialiste, républicaine, social-démocrate, radicale, environnementale et de tradition communiste. Nous avons besoin de ce rassemblement pour créer les conditions sociologiques et culturelles d’une hégémonie durable de la gauche dans les années qui viennent".

Tel est le cas aussi pour les socialistes Marie Noelle Lienemann et Paul Quilès, animateurs de Gauche Avenir. Dans leur dernier appel, ils veulent "contribuer, en dehors des partis, de leurs enjeux de pouvoir et des rivalités de personnes, à la « redéfinition » des valeurs claires et mobilisatrices ainsi que des objectifs simples... Issus de différentes sensibilités politiques, sociales et culturelles, nous souhaitons rassembler toutes celles et tous ceux qui veulent s’associer à cette démarche et qui, sans se renier, ont compris que le monde a changé et que de nouvelles aspirations se sont fait jour. Cette démarche, patiente et sérieuse, s’appuiera sur une volonté de dialogue, d’écoute et d’ouverture à tous les courants de la gauche... Nous avons l’ambition de développer une analyse et une méthode qui pourraient devenir incontournables dans les processus conduisant à l’indispensable refondation de la gauche en France. En nous fixant de tels objectifs, nous nous inscrivons dans la forte tradition du mouvement associatif et des clubs, qui a marqué l’histoire de la République comme celle de la gauche."

Robert Hue et ses proches me paraissent marcher dans le même sens.

Malgré la concordance de leurs discours actuels, je ne crois pas que toutes ces forces iront bien loin.

Premièrement, la question n’est pas comment réussir tel appel momentané, tel réseau sympathique ou tel colloque mais comment construire une force politique apte à prouver la validité, l’efficacité d’une autre orientation. Marie Noelle Lienemann, "la tradition du mouvement associatif et des clubs" n’a été ni forte, ni utile depuis bien longtemps en France. Depuis la Première guerre mondiale et l’échec du jauressisme médiatique, depuis le congrès de Tours, depuis la résistance face au fascisme, la gauche a besoin de partis organisés et cohérents.

Deuxièmement, sans sous-estimer l’importance du "dialogue, de l’écoute et de l’ouverture", il est évident que la refondation théorique et pratique de la gauche se fera surtout au travers des luttes, des élections et d’une concurrence de projets portés par des forces politiques. Ce n’est pas le plus gentil qui gagnera mais le plus fort (ce qui nécessite actuellement démocratie interne, écoute et ouverture) et le plus efficace.

Troisièmement, l’unité de la gauche est indispensable :

- mais unité n’implique pas unification qui se ferait inéluctablement aujourd’hui sur des bases social-libérales et seulement dans une perspective électorale

- j’ai toujours été un partisan de la politique de Front Unique mais elle nécessite préalablement ou au moins concomitamment la constitution d’une force politique apte à utiliser ce Front dans l’intérêt des salariés et de l’intérêt général, sur une démarche alternative aux logiques du capitalisme.

24) José Bové

L’échec de José Bové montre bien la limite d’une stratégie fondée sur des réseaux, du baratin unitaire et des opérations tactiques.

Si la carte des meilleurs résultats d’Olivier Besancenot correspond à des fiefs historiques du mouvement ouvrier ( Bassin de Decazeville, Allier, Nord, Pas de Calais, Limousin, Picardie) puis du parti communiste ( Le Havre, Nîmes...), celle de José Bové correspond plus aux bastions républicains et socialistes dont il semble capter l’aile la plus combative.

Ainsi, ses scores dans le Sud sont nettement plus élevés que la moyenne nationale : Alpes de Haute Provence : 2,23 ; Hautes Alpes : 2,48 ; Ardèche :2,17 ; Ariège : 2,67 ; Aveyron : 2,95 ; Lot : 2,60 ; Lozère : 2,43 ; Hérault : 1,87 ; Gard : 1,73 ; Tarn : 1,85 ; Tarn et Garonne : 1,83...

25) Olivier Besancenot ( 1 498 835 voix soit 4,08%)

En nombre de voix le candidat de la LCR progresse de 290 000 suffrages entre 2002 et 2007 mais il baisse de 0,12% en pourcentage.

Les éléments donnés par les instituts de sondage se recoupent pour définir un électorat politisé. 8 % de l’ensemble des citoyens déclarant se positionner clairement à gauche ont voté Besancenot ; 50% de ses électeurs l’ont choisi pour son programme. Selon Ipsos, cet électorat s’est déterminé en prenant en compte la question du chômage (55 %), du pouvoir d’achat (58 %) et de l’exclusion/précarité (42 %). L’étude de CSA sur les motivations du vote fait apparaître les mêmes conclusions puisque, selon cet institut, les principaux éléments avancés par ses électeurs sont les inégalités sociales (65 %), l’emploi (55 %), le pouvoir d’achat (37 %) et le logement (35 %).

Mais il ne s’agit pas d’un électorat fidèle à la LCR ; d’après un sondage CSA (échantillon de 5 009 personnes), sur la composition et les motivations du vote, seul un électeur de 2002 sur trois a revoté Besancenot, choisissant particulièrement le vote Royal en 2007 ; cette pression du vote utile a été plus forte dans ce qu’il est convenu d’appeler « les classes moyennes » que dans les milieux ouvriers et populaires.

Cette oscillation d’un fort électorat entre le(la) candidat(e) socialiste et Besancenot doit être notée : 40% des électeurs Besancenot de 2002 ont voté Royal en 2007, 16% des électeurs de Royal en 2007 ont déclaré avoir failli voter Besancenot. D’après les instituts de sondage et l’étude de quelques résultats au second tour (par exemple en Aveyron dans les communes où le facteur a réalisé un score proche ou supérieur à 10%) cet électorat s’est reporté de façon parfaite sur la candidate de gauche.

Par contre, Besancenot a bénéficié à la fois d’un transfert de voix acquises en 2002 à Lutte ouvrière (34 %), de la bienveillance de sympathisants communistes (14 %) et de l’adhésion de 10 % des anciens abstentionnistes.

D’après les instituts de sondage, l’électorat Besancenot est féminin à 55%. 49 % de son électorat a moins de 35 ans (21 % de 18-24 ans et 28 % de 25-34 ans), 33% dans la génération des 45-64 ans. Selon la même étude, 10 % des 18-24 ans et 8 % des 25-34 ans auraient voté Besancenot à cette présidentielle. Les scores tombent à 4 % pour les 35-44 ans comme pour les 45-64 ans, ils deviennent ensuite insignifiants pour les plus de 65 ans (1 % pour les 65-74 ans et 0 % au-delà de 75 ans).

Chez les chômeurs, Olivier Besancenot obtient son meilleur résultat, avec 8 %. Il réalise 6 % chez les ouvriers et 6 % aussi parmi les employés. Plus globalement, les études indiquent que le résultat obtenu parmi les salariés s’élève à 6 %, que ce soit - et c’est une particularité - dans les secteurs public ou privé. Par ailleurs 17 % des électeurs de Besancenot auraient au maximum un BEP et représenteraient plus de la moitié des électeurs de 2007 (52 %). La carte géographique des résultats valide ces conditionnels avec les meilleurs scores dans les régions ( par exemple Nord-Pas de Calais), départements ( Pas-de-Calais 6,21 %, Somme 5,88 %, Seine-Maritime 5,78 % ) et villes ouvrières ( Le Havre 6,28 %, Saint-Pierre des Corps (37) 7,28 %, Calais (62) 7,15 %, à Hérouville-Saint-Clair (14) 6,69 %...). De même Besancenot réalise de bons scores dans les fiefs politisés de la gauche.

(Voir aussi partie 29 d "la percée de Besancenot dans les fiefs du mouvement ouvrier sur l’Aveyron)

C) Remarques complémentaires

26) Le vote par catégorie sociale

27) Le vote par âge

28) Le vote en fonction de l’appartenance ou sympathie syndicale au 1er tour

29) Le vote féminin

30) Les résultats du 22 avril en Aveyron

31)Les résultats du 6 mai en Aveyron

Conclusion

26) Le vote par catégorie sociale

Plus une catégorie sociale est favorisée, plus elle a voté Nicolas Sarkozy au premier tour : 37% chez les chefs d’entreprise, commerçants et artisans, 31% parmi les cadres et professions intellectuelles, 28% pour les professions intermédiaires, 25% employés, 17% ouvriers. Même situation au second tour avec 82% des chefs d’entreprise, artisans, commerçants, 67% des agriculteurs, 52 % des cadres et seulement 46% des ouvriers.

Ségolène Royal obtient de 22 à 31% dans toutes les catégories sociales avec un maximum parmi les professions supérieures et les plus diplômés. Il en va de même pour Bayrou ( de 16 à 28%)

Parmi les ouvriers, au premier tour Jean Marie Le Pen obtient 26%, suivi de Ségolène Royal avec 24, Nicolas Sarkozy 17, François Bayrou 16, Olivier Besancenot 7, les autres candidats se partageant les 10% restants.

Au second tour, parmi les ouvriers Ségolène Royal obtient 54 % (65% pour Jospin en 1995), parmi les employés 51%.

27) Le vote par âge

L’étude du vote par âge , en particulier celui d’IPSOS réalisé sur un large échantillon, donne des informations intéressantes.

Globalement, plus l’électorat est âgé, plus il vote Nicolas Sarkozy au premier comme au second tour.

Dans le détail des tranches d’âge pour le 6 mai :

* la génération jeune qui a connu les nombreuses luttes depuis 2002 vote à 58% pour Royal ;

* la tranche d’âge venue à l’âge adulte au creux des luttes jeunes dans les années 1990 vote à 57 % pour Sarkozy ;

* celle des années 80 se partage 50 / 50 entre Royal et Sarkozy ;

* la génération des années 1967-1975 vote toujours largement à gauche depuis cette époque ( la tranche des 45/59 ans vote à 55% pour Royal)

* la tranche d’âge des 60-69 ans vote à 61 % pour Sarkozy

* celle des plus de 70 ans vote à 68% pour Sarkozy

28) Le vote en fonction de l’appartenance ou sympathie syndicale au 1er tour

CGT : Royal 42%, Besancenot 9%, Buffet 7%, Arlette 2, Bové et Schivardi 1 chacun, et Le Pen 12, Sarkozy et Bayrou 11 chacun, De Villiers 3, et Voynet 2.

FO : Royal 25, Arlette et Besancenot 7 chacun, Buffet 3, Bové et Schivardi 1, et Sarkozy 20, Bayrou 19 et Le Pen 14. A noter le faible score de Schivardi alors que le "Parti des Travailleurs" est implanté dans ce syndicat.

CFDT : Royal 32, Besancenot 2, Buffet et Arlette 1, et Bayrou 24, Sarkozy 20, Le Pen 8 et De Villiers 5.

UNSA : Royal et Bayrou 29 chacun, Sarkozy 20, De Villiers 10 ( !? il est précisé "à prendre avec précaution car effectifs sondés faibles").

FSU : Royal 69%, Besancenot 9% et Bayrou 14%, Sarkozy... 1% !

SUD : Royal 42% et Besancenot 20%, Bové 4, et Bayrou 27%, Sarkozy... 2%.

CGC : Sarkozy : 60% ;

MEDEF et CGPME : Sarkozy :96%

29) Le vote féminin

Le vote féminin depuis 1944

Globalement, les historiens distinguent deux phases dans l’histoire du vote des femmes :

* de 1945 aux années 68 elles s’abstiennent en plus grand nombre et votent nettement plus à droite que les hommes. Pour les présidentielles de 1965 par exemple, Mitterrand obtient 39% chez les femmes et 51% chez les hommes.

* à partir des années 68, le vote des femmes et celui des hommes se rapprochent, tant pour la participation que pour l’orientation du vote. Selon les élections, il semble que les femmes votent plus ou moins à gauche que les hommes sans que cela soit significatif. En 1986, 1988, 1999 les femmes ont plus voté à gauche que les hommes.

Comment expliquer cette rupture autour de 1968 ?

* le niveau d’études a toujours été un facteur favorisant le vote à gauche. Cela a joué particulièrement pour les femmes à partir en gros de cette époque par la démocratisation massive des possibilités d’études et d’entrée dans le supérieur.

* les femmes ayant une activité professionnelle ont toujours été plus politisées et plus engagées à gauche. Or, leur pourcentage est passé du tiers de la population active à près de la moitié(46%). Lors du 1er tour de la présidentielle de 1988, 47% des femmes travaillant à temps complet, 44% des femmes travaillant à temps partiel et 40% des ex-actives ont voté pour des candidats de gauche contre seulement 29% des femmes depuis toujours au foyer (enquête TNS Sofres/Cevipof). Lors des élections législatives de 1997, 40% des femmes actives et 30% des femmes depuis toujours au foyer ont voté pour des candidats de gauche (TNS Sofres).

* la pratique religieuse des femmes était beaucoup plus importante que celle des hommes jusqu’à la fin des années 60 (en 1952, 52% des femmes et 29% des hommes). L’emprise idéologique de l’Eglise sur la conception du monde portée par de nombreuses femmes (humilité, sacrifice, respect des hiérarchies, communautarisme religieux et national...) intégrait celles-ci dans ce milieu catholique pratiquant qui a toujours été particulièrement conservateur en France. Cette réalité s’observe d’ailleurs partout en Europe : les femmes votent plus à gauche que les hommes en Allemagne, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Suède mais nettement moins par exemple en Espagne, Italie et en Pologne, pays fortement marqués par la culture catholique.

* les objectifs émancipateurs du mouvement féministe ont établi à un niveau de masse un lien entre libération des femmes et projet politique progressiste.

Spécificités du vote féminin et élection du 22 avril puis du 6 mai

Les spécialistes constatent encore aujourd’hui quelques spécificités parmi les 52% de femmes constituant le corps électoral.

"Les électrices sont plus sécuritaires que les hommes car elles sont plus pessimistes sur l’avenir et se sentent moins en sécurité. Ceci est avant tout lié au fait qu’elles se sentent plus vulnérables dans la société. Le vote "sécuritaire" est caractéristique des positions des femmes plus âgées, qui sont généralement plus isolées que les autres... (10 avril 2007, Janine Mossuz-Lavau, chercheuse au CEVIPOF)

Cette spécificité "sécuritaire" du vote féminin explique probablement le fait que les femmes (32 à 33%) ont nettement plus voté pour Sarkozy que les hommes (27 à 28%) le 22 avril. Il faut cependant prendre en compte le pourcentage nettement plus important de femmes dans la population âgée où le vote Sarkozy est très fort (43% au premier tour parmi les retraités). En effet, dans les tranches d’âge plus jeunes, c’est Ségolène Royal qui l’emporte.

Comme pour chaque élection, le 22 avril a confirmé que les femmes (9%) votent moins pour Le Pen que les hommes (14%).

Retenons qu’au second tour, Nicolas Sarkozy a obtenu 54% chez les hommes et 52% chez les femmes

Terminons cette petite étude sur les candidats antilibéraux par quelques remarques générales sur cet électorat à partir d’éléments donnés par les instituts de sondage :

a) Pendant longtemps, l’électorat du Parti Communiste était le plus homogène du champ politique.

Aujourd’hui, parmi les quatre grands courants : extrême droite, droite, gauche, gauche antilibérale, ce dernier apparaît comme le plus aléatoire avec des électeurs qui se sont souvent déterminés sur la fin de campagne.

b) Les motivations du vote dessinent un électorat qui n’est pas plus cohérent sur les orientations de gauche que celui de Ségolène Royal. Tel est le cas par exemple sur l’intégration des minorités dans la société française, sur l’environnement, sur la lutte contre la pauvreté, sur l’amélioration du pouvoir d’achat, sur l’amélioration de l’enseignement...

c) Par contre, cet électorat de la gauche antilibérale est en pourcentage plus ouvrier et populaire que celui de Ségolène Royal.

30) La mobilisation citoyenne de ces présidentielles

La France connaît depuis le printemps 2005 une véritable mobilisation citoyenne.

Nous avons tous constaté l’afflux incroyable de personnes faisant la queue dans les mairies fin 2006 pour se faire inscrire sur les listes électorales. Le résultat dépasse toutes les espérances civiques : de 2002 à 2007, le nombre d’inscrits est passé de 41 194 689 à 43 651 575 soit 2 millions et demi de nouveaux électeurs, en particulier en provenance des banlieues urbaines. Ces nouveaux citoyens se rendraient-ils aux urnes massivement ?

Depuis 40 ans, le pourcentage d’abstention ne faisait qur croître :

* 15,25% en 1965

* 15,77% en 1974

* 18,91% en 1981

* 21,39% en 1995

* 27,86% en 2002

Les commentateurs glosaient sans fin sur une évolution à l’anglo-saxonne consistant en un désintérêt progressif de la population vis à vis des élections.

Or, l’abstention lors de ce premier tour n’est que de 15,4%. Cela prouve que beaucoup de nos compatriotes sont conscients de l’importance de cette élection pour leur vie.

31) Les résultats du 22 avril en Aveyron

a) De bons résultats pour la gauche sur les villes

Sur les villes aveyronnaises Ségolène Royal arrive en tête du premier tour, y compris à Rodez.

Viviez ( canton d’Aubin Firmi) : 43,8 % (Sarkozy 15,6)

Firmi ( canton d’Aubin Firmi) : 39,43 % ( Sarkozy 15,9)

Cransac ( canton d’Aubin Firmi) : 40,70% ( Sarkozy 19,12)

Rodez : 30,36 % (Sarkozy 29,6)

Millau : 29,58 % (Sarkozy 25,3)

Onet le Château : 32,45 % ( Sarkozy 28,4)

Decazeville : 38,53 % (Sarkozy 19,7)

Aubin : 39,21 % ( Sarkozy 16,6)

Capdenac : 34,85 % ( Sarkozy 22,6)

Villefranche de Rouergue : 34,40 % ( Sarkozy 25,5)

Saint Affrique : 29,07 % ( Sarkozy 25,7)

Baraqueville : 33 % ( Sarkozy 27)

Le Monastère (banlieue est de Rodez) : 30 % ( Sarkozy 25)

Seule exception, l’habituel cas d’Espalion.

Les candidats antilibéraux réussissent également quelques bons scores sur les villes.

Besancenot dépasse ou égale ses poucentages nationaux avec 5,37 à Millau, 7, 04 à Decazeville, 4,69 à Villefranche, 4,27 à Saint Affrique...

Bové fait de même avec 4,87% à Saint Affrique, 3,77% à Millau...

Marie George Buffet se maintient sur le bassin minier d’Aubin Decazeville.

b) Les cantons qui ont apporté le plus de voix à Ségolène Royal en Aveyron

Aubin : 40,19% ( Sarkozy 16,73)

Decazeville : 35,25% ( Sarkozy, 22,85)

Capdenac : 33,92 % (Sarkozy 23,28)

Villefranche de Rouergue : 33,69 % ( Sarkozy 24,9%)

Rodez Nord : 31,83 % ( Sarkozy 27,53)

Naucelle : 30,37 % (Sarkozy 27,98)

Millau Est : 30,15 % (Sarkozy 22,3)

Villeneuve d’Aveyron : 29,53 %

Rignac : 29,52 % ( Sarkozy 28,34)

Rodez Ouest : 29,69 % ( Sarkozy 27,8)

Marcillac : 29,27 % (Sarkozy 27,08)

Millau Ouest : 29,15% ( Sarkozy 25,9)

Najac : 28,65 % ( Sarkozy 27,24)

Sévérac le Château : 27,8 % ( Sarkozy 26,34%)

Saint Beauzély : 27,97 % ( Sarkozy 25,69)

Montbazens : 27,69 % (Sarkozy 26,84)

La Salvetat : 27,20 %

Saint Affrique : 26,98 % ( Sarkozy 25,63)

c) Les excellents scores aveyronnais de José Bové

Avec 2,95 % des voix, José obtient en Aveyron son meilleur score national.

Ses scores sont particulièrement élevés sur les cantons du Sud du département : 6% à Nant (meilleur résultat cantonal sur le pays), 5,44 % à Belmont sur Rance, 5,28 % à Saint Rome de Tarn, 4,92 % à Saint Beauzély, 4,88% à Saint Affrique, 4, 70% sur Millau Est, 4,62% à Peyreleau, 4,52% à Camarès, 4,40% à Cornus, 4,31% à Saint Sernin sur Rance.

De bons résultats sont également enregistrés sur des cantons ruraux où l’on retrouve des voix de la Confédération paysanne : Vezins de Lévézou : 4,84%, Rieupeyroux 4, 32 %, Campagnac 4,08%, Réquista 3,68%, Cassagnes Bégonhès 3,57 %, Marcillac : 3,53 %, Pont de Salars 3,15 %, Rignac 3,15%, Sévérac le Château 3,12%, Saint Chély d’Aubrac 3,02%...

La force du vote paysan est encore plus nette lorsque l’on parcourt rapidement les résultats par commune : La Roque Sainte Margueritte 15,76%, Saint Sever du Moustier 11 %, Mélagues 10,67%, Combret 9,70%, Murasson 8,64%, Le Viala du Pas de Jaux 8,53%, Martrin 8,18%, Saint Julien d’Alcapiès 7,74%, Sainte Eulalie de Cernon 6,95%...

En fait, sur un certain nombre de communes de l’Aveyron, nous avons constaté une confluence en faveur de José Bové de paysans, de néo-ruraux très sensibles aux questions écologiques et d’antilibéraux. Ainsi, il obtient 15,88% sur La Couvertoirade, son meilleur score communal du pays.

d) Le vote des fiefs du mouvement ouvrier en Aveyron, percée de Besancenot et bon maintien de Buffet

La désindustrialisation, l’échec de plusieurs grandes luttes, la baisse démographique ont affecté la conscience et la force politique du mouvement sur ces villes.

Cependant, il est intéressant après chaque élection d’analyser le vote de ces communes où s’est jouée l’histoire aveyronnaise (en partie française) du socialisme.

Le premier constat, c’est évidemment la force du vote utile en faveur de Ségolène Royal qui atteint en gros de 36% à 48% selon les bureaux avec 43,8% pour l’ensemble de la commune de Viviez, 40,70% pour les urnes d’Aubin, 39,43% pour celles de Firmi, 38,53% à Decazeville...

Malgré cela, le total des voix en faveur des candidats antilibéraux correspond, en gros, au double des moyennes nationales : 21, 16 % sur Aubin, 21, 67% à Cransac, 19,93% à Firmi, 18,77% à Viviez, 17,30 à Decazeville.

Olivier Besancenot apparaît comme le principal bénéficiaire du haut niveau de conscience politique du bassin minier avec plus de 12% sur la commune ouvrière de Boisse Penchot, 9,82% sur la commune d’Aubin, 8,25 sur Cransac, 7,04 à Decazeville, 6,53% à Firmi, 6,36 à Viviez...

Marie George Buffet a bien résisté obtenant plus de voix que Besancenot sur Firmi (7,21%) et Viviez ( 7,49%). Ailleurs, elle se maintient entre 5 et 7%.

Dans un tel contexte, les assez bons résultats de José Bové méritent d’être notés : 5,08% à Auzits, 3,44% à Firmi, 3,16 à Cransac...

32)Les résultats du 6 mai en Aveyron

a) Ségolène Royal obtient un bon résultat en Aveyron avec 90380 voix soit 49,17%. Le meilleur résultat communal pour la gauche doit être celui de Viviez ( canton d’Aubin Firmi, mairie de Jean Louis Denoit) avec 73, 94 %.

Les nouvelles reçues sur mon portable au début et sur la fin du dépouillement par nos camarades de PRS 12 ne pouvaient laisser présager la défaite nationale.

Les scores fleuves de Sarkozy dans les nombreux cantons chouans de moyenne montagne ont empêché une belle victoire départementale.

b) La plus grande surprise de ce deuxième tour en Aveyron, c’est la victoire de la gauche sur Rodez avec 51,18 %. Les communes du Grand Rodez et environs apportent aussi, globalement, une majorité à la gauche avec

* Onet le Château : 52,96 %

* Sébazac : 52,53 %

* Olemps : 54,19 %

* Le Monastère : 55, 46 %

* Druelle : 51,36 %

* Agen d’Aveyron : 55,16 %

* Ste Radegonde : Nicolas Sarkozy 51,7%

* Gages-Montrozier : Ségolène Royal 54,3%

c) Le second tour a amplifié la dynamique électorale de la gauche sur les villes de l’Aveyron :

* Millau : 55,17 %

* Saint Affrique : 54,22 %

* Decazeville : 65,24 %

* Villefranche de Rouergue : 56,03 %

* Marcillac Vallon : 53,87 %

* Aubin : 69,16 %

* Baraqueville : 55,35 %

* Capdenac : 59,38 %

* Villeneuve : 53,42 %

d) Le Bassin minier de Decazeville Aubin reste un fief de la gauche avec des résultats rares. Nous avons cité plus haut Decazeville, Aubin et Viviez ; il faut ajouter :

* Firmi (canton d’Aubin Firmi) : 69,26 %

* Cransac (canton d’Aubin Firmi) : 67, 73 %

* Boisse Penchot (canton de Decazeville) : 64,13 %

* Livinhac (canton de Decazeville) : 60,65 %

* Auzits : 60,78 %

L’analyse détaillée de ces résultats montre un excellent report des voix Besancenot et Buffet sur Royal.

e) L’Ouest du département reste profondément ancré à gauche avec 54,55% des suffrages sur la deuxième circonscription

Nous avons cité ci-dessus les villes du Bassin, Villefranche, Baraqueville, Capdenac et Villeneuve. Il faut ajouter :

* Lacapelle Bleys (mairie de Pierre Marty) : 60,70 %

* Montbazens : 52,24 %

* Roussennac (canton de Montbazens) : 52,29 %

* Lugan (canton de Montbazens) : 66,26 %

* Brandonnet (canton de Montbazens) : 53,91%

* Compolibat (canton de Montbazens) : 53, 22 %

* Causse et Diège (canton de Capdenac) : 62,83 %

* Bouillac (canton de Capdenac) : 58, 70 %

* Balaguier d’Olt (canton de Capdenac) : 57,80 %

* Foissac (canton de Capdenac) : 58,71 %

* Salles Courbatiès (canton de Capdenac) : 56,26 %

* Monteils (canton de Najac) : 58,42 %

* Quins (canton de Naucelle) : 59,48 %

* Meljac (canton de Naucelle) :57,66 %

* Saint Just sur Viaur (canton de Naucelle) : 54,70 %

* Escandolières ( canton de Rignac) : 59,14 %

* Bournazel ( canton de Rignac) : 57,69 %

* La Rouquette (canton de Villefranche) : 60, 96 % ainsi que toutes les communes de ce canton (Martiel, Morlhon, Savignac, Toulonjac, Vailhourles)

* Ambeyrac (canton de Villeneuve) : 58,33 %

f) Avec l’Ouest et le Grand Rodez, l’autre point fort de la gauche en Aveyron se concentre dans le Sud, essentiellement sur la vallée du Tarn de Saint Affrique à Millau.

Sur cette troisième circonscription, les meilleurs résultats proviennent de Sauclières (canton de Nant) avec 66,67% et Connac (canton de Réquista) avec 65,31 %.

Une étude détaillée prouve partout un excellent report des voix de José Bové.

Parmi les bons résultats communaux sur le Sud, nous pouvons noter :

* Compeyre (c Millau Est) : 58,91 %

* Aguessac (c Millau Est) : 58,39 %

* Creissels ( c Millau Ouest) : 58,64 %

* Comprégnac (c Millau Ouest) : 56,76 %

* Saint Rome de Cernon (c de St Affrique) : 54, 70 %

* St Jean d’Alcapiès (c de St Affrique) : 60,81 %

* La Couvertoirade (c de Nant) : 56,80 %

* La Roque Sainte Marguerite (c de Peyreleau) : 62,09 %

* Veyreau (c de Peyreleau) : 63,25 %

* Viala du Tarn ( c de St Beauzély) : 61,80 %

* Montjaux ( c de St Beauzély) : 59,71 %

* Verrières (c de St Beauzély) : 55,81 %

* Saint Victor et Melvieu (c de St Rome) : 61,07 %

* Martrin ( c de St Sernin) : 63, 01 %

* Montclar (c de St Sernin) : 57,72 %

* Combret (c de St Sernin) : 55,28 %

* Lapanouse (c de Sévérac ) : 59,21 %

g) Les cantons situés en moyenne montagne restent profondément ancrés à droite

Pour une personne progressiste, l’ancrage de la moyenne montagne aveyronnaise sur des orientations de droite extrême droite, sans discontinuer, depuis deux cents ans, pose un problème majeur.

Voici quelques résultats communaux de Nicolas Sarkozy sur ce secteur :

* Le Cayrol ( c d’Espalion) : 80, 86 %

* Lassouts ( c d’Espalion) : 79,20 %

* Curières (c de Laguiole) : 81,16 %

* Montpeyroux (c de Laguiole) : 84, 80 %

* Thérondels (c de Mur de Barrez) : 80,05 %

* Huparlac (c de Saint Amans des Cots) : 80,88 %

* Lacalm (c de Sainte Geneviève) : 83,23 %

* Alpuech (c de Sainte Geneviève) : 82,61 %

* Aurelle Verlac (c de Saint Geniez) : 82,39 %...

CONCLUSION

Le bilan de cette campagne justifie, me semble-t-il, le point de vue défendu sur ce site au soir de l’investiture de Ségolène Royal par les adhérents du parti socialiste : celui-ci s’est éloigné de ses racines de 1905 et même de 1981 ; ses références idéologiques et son projet stratégique représentent aujourd’hui un enjeu très important dont le résultat n’est pas écrit d’avance.

Après ces élections présidentielles, toutes les forces de gauche, tous les militants sont interpelés pour refonder une orientation et une organisation aptes à affronter victorieusement un autre cycle de l’histoire ; celui de la Révolution russe s’est achevé au plus tard en 1989 ; celui ouvert par Mai 68 puis le congrès d’Epinay vient de clore son dernier chapitre.

L’avenir reste donc à réécrire totalement ; ceux qui n’auront pas oublié des périodes précédentes comment se parle, s’écrit et même se vit le socialisme partent avec un avantage, à condition de le faire fructifier utilement.

En tout cas, le peuple de gauche va souffrir sous Sarkozy et ce n’est pas Ségolène Royal qui va l’aider à résister. Nous avons deux ans maximum pour reconstruire une gauche plus apte à lutter en lien avec le mouvement social, plus apte à lui proposer un débouché politique, plus apte à se lier à la contestation du système capitaliste qui progresse de l’Amérique latine à l’Europe.

Hasta la victoria siempre !

Jacques Serieys le 15 mai 2007


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