Comment l’Iran surveille le web : Les appels au boycott de Nokia se multiplient

vendredi 17 juillet 2009.
 

Déjà sous le coup d’un appel au boycott de la part de syndicalistes allemands, mécontent de voir la production de Nokia se délocaliser en Roumanie, les choses se corsent pour Nokia suite aux révélation du Wall Street Journal sur l’implication de Nokia et Siemens dans le système de surveillance Iranien. Les appels au boycott s’étendent désormais à la planète entière et promettent, au minimum, de causer des dommages conséquents aux deux marques.

Le Wall Street Journal, repris dans de très nombreux média américains, montre comment Nokia et Siemens, à travers une joint venture, auraient vendu au gouvernement Iranien un système complexe de surveillance permettant d’inspecter le traffic web du pays. La technologie, connue sous le nom de “deep packet inspection”, permettrait à la cyberpolice Iranienne de lire les informations qui circulent sur le net et de surveiller les internautes.

Emails, VoIP, envois vers les sites sociaux comme Twitter, MySpace et Facebook, le système serait bien plus sophistiqué encore que celui mis en place en Chine. Le nombre réduit d’internautes en Iran (par rapport à la Chine) permettant un système centralisé plus efficace.

Le journal affirme par ailleurs que le système est même capable d’altérer et de modifier les communications.

Une telle efficacité s’explique par le passage de toutes les communications entrantes et sortantes par un point unique. Cette spécificité du réseau Iranien, combinée aux technologies de “deep packet inspection”, qui nécessitent d’énormes puissances de calculs, expliquerait, selon les sources du Wall Street Journal, les ralentissements qu’a connu le web iranien durant les révoltes qui ont suivit les dernières élections. Revers de la médaille, une telle infrastructure crée un point de faille qui permettrait à des puissances étrangère de paralyser l’infrastructure électronique Iranienne. Il y a fort à parier en effet que de multiples backdoors ont été mise en place dans le système.

La BBC confirme les affirmations du Wall Street Journal, tout comme le Washington Times et Wired.

La Washingtom Times de son coté rapporte les dires de Lily Mazaheri, avocat spécialisé dans les problèmes liés aux Droits de l’Homme et à l’immigration, qui représente des dissidents Iraniens. L’avocat soupçonnait depuis un certain temps une montée en puissance des moyens de surveillance électronique du gouvernement Iranien et raconte comment l’un de ses clients a été récemment arrêté, sur la base d’une conversation qu’il avait eu avec lui par messagerie instantanée. Lors de son interrogatoire, un transcript de la conversation lui a été montré, ce qui lui a valu un emprisonnement immédiat.

Contacté par le réseau des Observers de France24 qui a demandé des explications à Nokia, Ben Roome, le porte parole de la joint-venture, nie les faits et affirme que le système se limite à l’écoute légale de communications téléphoniques, France24 rapporte toutefois qu’il est resté “très évasif quand à savoir si cette technologie permettait d’intercepter des SMS”. Le Wall Street Journal maintien de son coté ses accusations et affirme qu’il n’a “aucune raison de douter des informations qu’il a fourni”. Wired, qui souligne que le WSJ s’est par le passé laissé aller a exagérer des affaires de surveillance, soutien l’analyse du journaliste.

Andres Roman, chercheur en politique sociale à la prestigieuse London School of Economics de Londres affirme lui dans une interview à France24 qu’il “(…) comprend que l’on vende un système d’écoutes à un pays démocratique dans lequel il existe des contre-pouvoirs, mais pas à des pays comme l’Iran, la Chine ou la Birmanie, dans lesquels la loi ne protège pas la vie privée des citoyens”. Même si le Wall Street Journal a certainement exagéré les choses, “cela ne change pas le problème” affirme-t-il.

Après les média, c’est désormais aux consommateurs de se faire entendre. Wired rapporte ainsi que de nombreux consommateurs appellent désormais au boycott des produits Nokia et Siemens. Plusieurs groupes Facebook sont ainsi apparus, et il sera intéressant de voir les conséquences de ce boycott sur les ventes de Nokia dans les mois à venir.

Aucune campagne de boycott lancé sur internet n’a pour l’instant eu d’effet mesurable, mais aucune d’entre elles n’a été lancée après l’avènement du web social. Maintenant que le web est avant tout un moyen de relier les hommes, les choses pourrait bien changer.

Hasard ou cynisme absolu, c’est après avoir publié une demi douzaine de billets sur les événements en Iran que Nokia, à travers son agence de communication ‘buzz marketing’ Londonienne, a contacté ReadWriteWeb France pour lui proposer un généreux partenariat et faire la promotion de la dernière opération virale de Nokia : win-again.fr.


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