Bernard Guetta, prêtre du néolibéralisme (Par Bernard Teper)

mardi 23 juin 2009.
 

Alors qu’il nous assène à longueur de temps ses dogmes du haut de sa chaire de France-Inter sans que l’on ait le droit de le contredire, que faire ? Bernard Guetta vient de nous expliquer que la gauche "c’est comme Capri, c’est fini". Il n’y a plus d’ouvriers, il n’y a que des couches moyennes. Il n’y a plus de grande industrie, que des entreprises post-modernes. C’est pour cela que "la crise" profite à la droite et pas à "la social-démocratie". Fermer le ban !

Ce débat est d’importance car il y a à gauche aussi des militants qui pensent la même chose. Cela produit les idéologies du désir comme avenir de l’humanité, la décroissance pour tous y compris et surtout pour les couches populaires, le repli sur des solutions de nature individuelles, en un mot les "libéraux verts".

La refondation idéologique pour résister à l’offensive néolibérale demande d’abord de partir de la réalité matérielle et non d’une fiction fantasmée par les désirs des couches moyennes supérieures radicalisées. Aujourd’hui le salariat représente plus de 90% de la population active (au lieu d’un peu plus de 70% en mai 68). Nous vivons donc l’extension du règne du salariat comme prévu par le vieux barbu du 19ème siècle. Aujourd’hui, les ouvriers sont 6 millions de travailleurs dans la population active (sans compter les retraités). Les employés sont 9 millions (sans compter les retraités) et les cadres 3 millions et demi (sans compter les retraités).

Si le nombre d’ouvriers baisse, le nombre d’ouvriers et d’employés continuent à augmenter. Ce qui fait la caractéristique de la période est que les conditions d’ouvriers et d’employés deviennent les mêmes. Et l’évolution des forces productives fait que de plus en plus, le type de travail se rapproche par la mécanisation, la robotisation, l’informatique, l’électronique, etc.

Et si l’INSEE changeait ses catégories en y supprimant les "catégories intermédiaires"(ce qui ne veut rien dire !) et ajoutant "les travailleurs de l’immatériel" qui se rapprochent plus des couches populaires que des cadres, les chiffres précédents seraient amplifiés. Aujourd’hui, 85% des contrats sont des contrats en CDI. Voilà le constat dont ne parle pas France-Inter, la radio qui devrait être celle du service public.

La clé de toute pensée novatrice propre à aider à la résistance et à produire de la pensée alternative est de penser à partir de cette réalité.

Toute pensée qui commence à dire : "ce qui compte ce n’est plus le citoyen ou le salarié mais l’individu qui se détermine en dehors des catégories socioprofessionnelles" détourne des voies de la résistance et de l’alternative. C’est ce qu’on essayé de faire les Serge Mallet , les Guy Sorman et la plupart des intellectuels du post-modernisme qui les uns après les autres terminent leur voyage à droite, à gauche, dans ou en dehors de l’écologisme, dans une impasse théorique et pratique.

Toute pensée qui ne prend pas en compte les évolutions socioprofessionnelles par exemple en se figeant sur les réalités du passé sans comprendre que le monde change n’arme pas les combattants de la résistance et de l’alternative. C’est ce que font encore les nostalgiques du communisme orthodoxe et figé, du gaullisme historique, ou de toute autre figure politique et intellectuelle que l’on transforme en gourou. C’est pourquoi la refondation intellectuelle pour résister au turbocapitalisme et pour produire la future hégémonie culturelle au sens de Gramsci se doit d’abord de résister aux idées à la mode, aux nostalgies trompeuses et de se soumettre au débat humble, contradictoire et fraternel.

par Bernard Teper

Secrétaire national de l’UFAL


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