CONSTRUISONS LE FRONT DE GAUCHE (Par Michèle Dessenne, porte-parole nationale du Mouvement politique d’éducation populaire M’PEP)

lundi 6 avril 2009.
 

Intervention de Michèle Dessenne, porte-parole nationale du M’PEP, au banquet organisé par le Front de Gauche à Suresnes (92), le 29 mars, aux côtés de Patrick Le Hyaric (PCF) et Eric Coquerel (PG).

Mesdames et messieurs, chers amis et camarades,

Faire face au capitalisme néolibéral et au libre-échange, à la crise sociale et environnementale et du productivisme, est une urgence. Et pour faire face efficacement, nous avons besoin d’un Front de gauche.

Nous avons besoin d’un front de gauche, d’une vraie gauche, à la fois anticapitaliste, capable de résister et de lutter aux côtés de la classe ouvrière et des employés, comme des petits artisans et des privés d’emploi. Une gauche fière de l’être qui assume et transmet son histoire et qui regarde vers l’avenir. Une gauche qui mène un combat acharné pour l’égalité, entre chacun et chacune, pour l’égalité entre les peuples. Une gauche internationaliste qui n’abdique pas, ne renonce ni à la souveraineté populaire, ni à la laïcité comme principes d’égalité et d’émancipation.

Une gauche qui protège et inscrit les droits au cœur de ses objectifs : santé, retraite, logement, emploi et même plein emploi. Une gauche qui ouvre de nouveaux droits, les inscrit dans les textes et dans les faits et qui a le courage de les rendre opposables. Une gauche qui a la rage au ventre et les pieds sur la terre. Une gauche de cœur et de raison. Une gauche qui n’a pas peur de prononcer des mots encore tabou il y a peu : nationalisation, réindustrialisation, suppression des délocalisations, planification, nouvelle répartition de la valeur ajoutée, récupération des milliards captés par les actionnaires et leurs multinationales sur le travail des salariés, suppression des paradis fiscaux, socialisation des moyens de production.

Une gauche solidaire et coopérative, celle qui sait tricoter les liens pour être efficace, qui se raccorde au peuple, qui sait tisser des alliances. Une gauche qui veut gagner, qui veut gouverner, qui ne se réfugie ni dans le slogan, ni dans la compassion, ni dans la charité. Une gauche qui porte l’étendard de l’émancipation, qui œuvre pour le progrès technique et scientifique sans en faire des objets de croyance aveugle. Une gauche populaire et exigeante qui décrypte, qui explique, qui associe, qui s’affronte à la complexité, qui crée de l’intelligence collective, qui politise.

La gauche dont on est fier de dire le nom, parce qu’elle est une belle part de l’identité de chacun-e de nous.

Pour toutes ces raisons, et d’autres encore que vous connaissez aussi, nous avons le devoir de construire un Front de gauche maintenant, sans attendre d’autres échéances. Nous avons vécu avec passion et enthousiasme la formidable campagne de 2005 qui a conduit à un NON retentissant au TCE. Ainsi, quatre ans plus tard, les élections européennes de juin 2009, ont un caractère particulier. Elles sont l’occasion de dire 4 fois NON et 3 fois OUI.

* Non au traité de Lisbonne, frère jumeau du TCE.

* Non aux listes et aux partis qui ont vendu la souveraineté populaire du vote des Français en ne faisant pas barrage au Traité de Lisbonne lors du congrès de Versailles l’année dernière.

* Non à Nicolas Sarkozy et à sa politique antisociale et de soutien au patronat.

* Non au caractère antidémocratique de l’Union européenne.

Mais aussi :

* OUI à une véritable union construite entre tous les peuples et nations du continent européen.

* OUI à l’union de la gauche de gauche à l’échelle européenne.

* OUI à l’union de la gauche de gauche en France !

Les élections européennes, nous devons réussir à en faire un moment de débat, de politisation et d’expression du pouvoir populaire par les urnes. D’autant qu’elles ont lieu dans un contexte de luttes sociales larges, diversifiées et très souvent unitaires. Les 29 janvier et 19 mars en sont une démonstration éclatante avec plusieurs millions de manifestants à l’appel des syndicats.

Or nous savons que les politiques de l’Union européenne sont déterminantes au quotidien. La transposition des directives européennes constitue 70% au moins de l’activité parlementaire française !

C’est au nom de l’Europe que le travail de nuit des femmes a été rétabli en France, que les aides d’Etat à la production sont interdites, que EDF, France Télécom ont été privatisées, que la Poste l’est déjà pour une grande part, que les services publics sont attaqués au prétexte qu’ils seraient une spécificité française. L’Europe les faisant disparaître au profit des Services d’intérêt économique général, les ouvrant ainsi au privé. Au nom de l’Europe encore que l’hôpital public est livré à de fumeux partenariat public privé.

Encore et toujours au nom de l’Europe que les nouvelles variétés de maïs génétiquement modifiés refont leur entrée. Et même si le Conseil des ministres de l’Environnement a rejeté le 2 mars 2009 la demande formulée par la Commission européenne de lever les moratoires hongrois et autrichien sur l’interdiction sur le mais MON810 de Monsento, il faut savoir qu’une proposition rejetée par le Conseil peut revenir une seconde puis une troisième fois. Ainsi, si la France ne parvient pas à réunir une majorité qualifiée lors des prochaines demandes de lever des interdictions d’OGM, il faudra sans doute faire de la désobéissance européenne. En clair, un gouvernement de vraie gauche n’aurait d’autre choix que de refuser de transposer une directive allant contre la volonté du peuple et ainsi de désobéir à l’Union européenne.

Mais attention à la confusion et même à l’imposture. Il ne faut pas confondre les mots. Ce n’est pas l’Europe qui dicte sa loi. C’est l’Union européenne. C’est-à-dire le contrat de libre-échange boosté par le patronat et ses lobbies et par les partis libéraux et pro-capitalistes, qui est en cause.

Le Front de gauche veut changer d’Europe. Oui changer d’Europe. Un objectif et un mot d’ordre qui retentissent comme un appel à refonder toute la construction européenne, sa conception même. Le M’PEP partage cet objectif et cette volonté de construction d’une Europe des peuples et de la coopération, de la solidarité et de l’égalité. Une Europe qui n’a pas grand chose de commun avec l’Union européenne imposée depuis des décennies, véritable cheval de Troie de la mondialisation néolibérale.

Il y a quelques semaines, j’entendais lors d’un débat à la télévision Jean-Luc Mélanchon, figure du Parti de Gauche, affirmer avec talent que l’Union européenne n’est pas démocratique. Benoit Hamon, porte parole du PS, qui était assis près de lui, n’a pas su lui répondre. Et pour cause ! Benoit Hamon a fait campagne avec de nombreux militants socialistes pour le NON au TCE. Aujourd’hui, l’aile dite de gauche du PS, semble avoir oublié les raisons qui l’ont conduite à s’opposer à leur direction de l’époque. Ainsi Benoit Hamon s’est-il contenté de baisser la tête et de rester sans voix.

Les composantes du Front de Gauche n’ont pas oublié leurs arguments contre le TCE : son caractère antidémocratique, son ficelage aux politiques de libéralisation qu’il contenait. Nous sommes cohérents en affirmant que le traité de Lisbonne est le copié collé du TCE, l’aspect constitutionnel en moins.

Nous ne baissons ni la tête ni les bras. Nous continuons la bataille, dans la rue et des urnes.

Mais il est vrai que le Front de Gauche n’a pas emprunté une route facile. Il lui faut faire face à de nombreux adversaires : la raillerie de la gauche sociale-libérale, la prétention et le mépris de la droite, Sarkozy en tête, le pseudo humanisme du MoDem, la pernicieuse alliance d’un Cohn-Bendit européiste et ouiste et d’un José Bové ancien candidat altermondialiste aux présidentielles de 2007. Et enfin, il ne faut pas le négliger, le perfide antimondialisme nationaliste de l’extrême-droite du Front national qui n’a pas disparu.

Il faudra aussi faire face à l’abstentionnisme, car les Français ne ressentent ni les bienfaits de l’Union européenne, et on les comprend, ni la possibilité concrète de peser sur ses politiques notamment en raison de ses institutions opaques.

Enfin, le plus regrettable serait que la gauche de gauche ne trouve pas les ressources pour construire ce front indispensable pour tracer des pistes de changement économique, social et démocratique urgent pour l’écrasante majorité des citoyens de notre pays.

Alors, décidemment, au nom de l’urgence sociale, et en particulier pour celles et ceux qui prennent la crise en pleine face, qui souffrent de l’injustice du système capitaliste, le Front de gauche est une urgence.

Il se construira avec les citoyens, qui, la tête haute, veulent prendre en main la vie de la cité, pour eux et pour les générations à venir.

Le 7 juin 2009, par un vote Front de Gauche, nous exprimerons à la fois notre colère, notre combativité et notre volonté de changer d’Europe !

Je vous remercie


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