Après un séjour aux Amériques puis-je ajouter quelques informations au flot d’articles sur les élections aux USA ? Dans New York City, rares sont les références à la campagne sauf un immense panneau VOTE au plus haut des pubs de Times Square. Un appel au vote qui n’est pas inutile si on note que le Canada voisin, qui vient d’avoir des élections fédérales, a perdu 10% de participation. Mais aux USA les indicateurs sont inverse : la nouveauté de la campagne, avec la possibilité d’avoir un président noir, devrait permettre de passer le 61% de votants de 2004. Notons cependant que ce nombre évacue tous les nombreux non-inscrits et qu’il masque la faible participation (autour de 30%) aux autres élections. Par exemple, il faudrait évoquer les élections au Congrès qui se déroulement en même temps (pour la moitié du pays), et qui sont plus présentes dans les journaux US que dans les journaux français.
Pour le moment, une seule chose est sûre : l’inflation financière de la campagne. Et il ne s’agit pas seulement des dépenses extravagantes de la candidate à la vice-présidence, Sarah Palin.
La bataille de l’Ohio devenant de jour en jour plus décisive, c’est là que les dépenses de campagne prennent une ampleur colossale et Obama est le vainqueur avec plus de 14 millions de dollars mis en jeu quand Mc Cain en reste à 10 millions. Cependant Mc Cain prend sa revanche si on se réfère à la part utilisée dans leurs dépenses globales. Le candidat républicain a utilisé dans cet Etat Clef 12% de ses frais engagés, quand le démocrate n’a mis en jeu autour de Colombus que 9,6% de sa somme globale à la date de l’article (mi-octobre). Etrange situation dans cet Etat : alors qu’il est agricole, Mc Cain y perd des points en annonçant son opposition à l’utilisation des agro-carburants, mais il en marque en annonçant aux victimes de la crise économique, qu’il faut aider les pauvres et non les banquiers de Wall Street. Une élection présidentielle aux USA n’est pas une élection nationale à cause du mode de scrutin. Dans les Etats acquis solidement à un camp, la campagne y est sans utilité puisque le candidat arrivé en tête rafle tous les grands électeurs. Donc les financements varient suivant les enjeux. Mais la campagne redevient nationale quant à son fonctionnement global calqué sur les méthodes de marketing, ce qui suppose en premier lieu la conquête de moyens financiers.
L’appui de Colin Powell à Barack Obama ne fut donc pas seulement un appui politique mais aussi un appui financier. Dans les caisses de Barack Obama les dons augmentèrent aussitôt sensiblement après l’annonce alors qu’ils étaient déjà très haut. Le New York Times du 20 octobre s’est largement penché sur le sujet en rappelant d’ailleurs qu’il suffit à chaque électeur de taper son zip code sur le site officiel du financement des partis, pour connaître les noms de TOUS les donateurs.
Le 27 octobre, avec l’appui officiel du Financial Times à Obama, un nouvelle page de la campagne a été tournée poussant plus encore Mc Cain vers un discours « favorable » aux pauvres et Obama vers un discours « responsable ». Pourquoi le Financial Times soutient le candidat démocrate ? Pour ce journal une campagne doit démontrer des capacités de leader or Obama a su soulever l’espoir tandis que Mc Cain traîne les pieds. Face à la crise qui s’annonce, Obama peut relancer le capitalisme tandis que Mc Cain l’enferme dans le passé. Mieux que ça, le journal approuve les propositions « social-démocrates » de Obama : plus de sécurité sociale par exemple. Mais sa victoire ne risque-t-elle pas d’alimenter des désillusions ?
En même temps qu’Obama est candidat de « Google » et de la Silicon Valley, il est aussi le candidat de simples citoyens sincères qui distribuent des tracts sur Washington Square, qui inscrivent des appels manuscrits sur des papiers du métro et qui croient que la page Bush sera définitivement tournée. Le hasard a voulu qu’au moment même où nous vivions ces événements l’Islande faisait la Une des journaux surtout au Canada. L’effondrement de ce petit pays de 330 000 habitants qui vient de bénéficier de l’aide du FMI, fait penser, à un prof d’université de New York et aussi de l’université d’Islande, que la situation ressemble à celle de l’Allemagne en 1919. Le FMI de DSK pense se trouver un nouveau rôle en devenant le sauveteur de pays à la dérive, après avoir été la sangsue de pays souhaitant se développer, mais il s’agit d’une nouvelle illusion. Pourquoi le cas de l’Islande suscite la peur ? Le gouvernement britannique fut le premier à mettre le gouvernement islandais au banc de la société quand celui annonça qu’il ne pouvait plus rembourser les sommes déposées par des Britanniques dans les banques islandaises. Le vol des emprunts russes d’une France ancienne !
Le trou sans fond de ce pays semble toucher l’Irlande autre modèle de développement. De l’un à l’autre les sauveteurs risquent de manquer de bouées et demain Obama, même avec les conseils de Sorros, peut découvrir que les sommes colossales gagnées pendant la campagne furent le vestige d’une époque passée. Ce ne sont pas les liquidités qui vont manquer mais les maisons, les emplois, les aliments etc. Une campagne de publicité orne les panneaux à New York : « Pensez aux personnes âgées, elles peuvent être des employées de maison ». Tout le monde sait que c’est l’argent des fonds de pension qui part en fumée, aussi l’âge de la retraite qui recule depuis quatre ans, va reculer encore beaucoup (peut-être de 10 ans indique le New York Times) au moment où les entreprises veulent seulement des jeunes ! Obama président pourra-t-il servir la finance et les sans-finance ? A suivre.
28-10-2008 Jean-Paul Damaggio
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