Intervention de Nicolas Voisin (BN de PRS) lors du meeting de Montreuil du Collectif pour un rassemblement anti-libéral

jeudi 15 juin 2006.
 

Depuis plusieurs années, notre pays est plongé dans un état d’urgence social, politique, et institutionnel. C’est le constat qui a été à l’origine de la constitution de l’Association Pour la République Sociale, et c’est cette situation qui dicte notre conduite ; nous travaillons tous sous la contrainte.

Pour nous, l’union des gauches sans exclusive est le seul moyen d’ouvrir et de proposer à notre peuple une issue politique à cette crise, en lui donnant la possibilité de battre la droite et l’extrême droite dans quelques mois.

La crise ouverte par le 21 avril 2002 n’est pas terminée. C’est qu’à bien des égards, la situation politique du pays est encore pire qu’en 2002 : la confusion politique n’a jamais été aussi forte que depuis quelques mois, avec une fois de plus, le retour de la vague sécuritaire qui engloutit toutes les autres questions, brouille tous les clivages.

Cette confusion politique n’est pas due au hasard. C’est une stratégie délibérée du libéralisme qui a pour but de dépolitiser le débat pour éviter que l’on parle des réels enjeux, pour permettre à la droite européenne, qui a fait sa révolution idéologique depuis le milieu des années 1990, d’imposer sa ligne.

Le concentré de la politique libérale en Europe qu’on cherche à faire passer en brouillant toutes les pistes est basé sur le triptyque cohérent que forment le libéralisme économique mondialisé, la conception sécuritaire du rôle de l’Etat et le communautarisme comme élément de stabilité sociale.

En France, cette révolution idéologique de la droite a été réalisée pendant le premier mandat de Chirac. Pour permettre ce coup de force, il a fallu semer la confusion la plus totale dans le débat entre la droite et la gauche structurant la vie politique. L’imposture de la lutte contre la « fracture sociale » en 1995 a été le premier acte significatif. Cela ne s’est plus arrêté depuis, et aujourd’hui, c’est Sarkozy qui prétend incarner la « rupture ».

Vous le savez : en Europe comme en France, c’est aussi grâce à la complaisance de responsables issus de la gauche que nous avons ce désordre et cette confusion politique qui désoriente notre peuple. On en a encore eu la confirmation la semaine dernière...

Dans certains grands pays européens, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Italie, l’on assiste désormais à la structuration du débat politique entre des partis dominants aux propositions interchangeables. La stratégie de la confusion politique l’a pour l’instant emporté dans ces pays.

C’est le gouvernement au centre - il faut dire « la gouvernance » - qui doit devenir le seul choix possible pour les électeurs. Centre droit ou centre gauche, il ne s’agit plus que de choisir entre telle ou telle « gouvernance » d’un système libéral mondialisé, dont l’objectif est de briser - brutalement ou plus souplement - les acquis et les protections arrachés par plus de 100 ans de luttes sociales.

En France, On a vu l’an dernier dans le débat préparant le référendum sur la Constitution Européenne, il semble que les choses soient plus difficiles. Pour l’instant, le peuple conserve encore sa capacité à enrayer la mécanique. Le Non victorieux le 29 mai 2005, dominé par le Non de Gauche, laisse entre ouverte la fenêtre... mais pour combien de temps ?

Car nous avons tous pu constater qu’ils n’ont renoncé à rien au sujet de la ratification du Traité Constitutionnel Européen. Le traitement du premier anniversaire du 29 mai dans les principaux médias donne la mesure de l’arrogance d’une classe politique presque unanime et de son mépris pour ce peuple d’imbéciles qui a osé voter contre ce si beau projet. On sait que la reprise du processus de ratification est en préparation au niveau de la Commission Européenne, dès que les présidentielles seront passées en France, à condition, bien-sûr, que le président élu (ou la présidente) y consente... Voilà l’enjeu pour eux. Cet incroyable mépris pour la souveraineté populaire qui s’est exprimée le 29 mai 2005 pour le Non ne peut qu’accroître un peu plus le fossé entre le peuple et les formes d’interventions citoyennes et républicaines.

Jusqu’à aujourd’hui, le peuple Français demeure attaché à la citoyenneté et à la république, comme l’a démontré la formidable insurrection civique du 29 mai 2005. Mais à force de l’humilier, de le culpabiliser et de le désorienter, il n’est pas écrit que ce peuple ne choisira pas dans d’autres formes d’action qu’il jugera, à tort, plus efficace.

Il faut se rappeler comment Georges Bush s’est fait élire pour son 2ème mandat sur la base d’une réelle mobilisation de l’électorat populaire. Il faut aussi se rappeler que Silvio Berlusconi battu de justesse par Romano Prodi était majoritaire en voix lors des dernières élections italiennes ! La tentation du vote nationaliste en France demeure forte. La course de vitesse avec l’extrême droite n’est pas jouée.

Cela définit l’enjeu pour nous. Nous qui représentons chacun à notre manière la gauche des ruptures avec le libéralisme.

Il faut que la gauche s’unisse, la gauche des ruptures et la gauche toute entière pour battre la droite et l’extrême droite et empêcher un nouveau désastre qui pourrait être encore plus grand que celui du 21 avril 2002.

Nous, militants et responsables de la Gauche toute entière, nous sommes désormais tous placés devant une extraordinaire responsabilité sous la pression de l’Etat d’urgence dans lequel se trouve notre pays. Pour empêcher que la vague néolibérale engloutisse définitivement l’Europe, pour interrompre la mise en pièce de notre système social, pour mettre un terme à l’interminable agonie de la Vème république qui autorise tous les abus et tous les scandales, pour inverser le cours des choses, il faut que la gauche gagne en 2007, et il faut donc qu’elle s’unisse sans exclusives.

C’est pour que se réalise cette union que PRS - avec Jean-Luc Mélenchon - a lancé une vaste campagne depuis plusieurs mois.

Mais, lors de la Convention Nationale de PRS qui s’est tenue ici même à Montreuil au début du mois d’avril, nous avons aussi précisé que pour exister, cette union doit être équilibrée à Gauche.

L’éparpillement de la gauche entre un candidat socialiste d’une part et une nuée de candidatures alternatives ne correspondrait pas à la réalité politique profonde de la gauche telle qu’elle s’est révélée lors du référendum sur la Constitution.

Cet éparpillement risquerait de produire un nouveau désastre électoral parce qu’une large partie de l’électorat de gauche serait condamnée à l’impuissance par sa dispersion et pourrait être tentée de se retirer du combat au deuxième tour.

Ensuite, cela empêcherait la dynamique d’Union populaire dont la gauche a besoin, car nous voulons non seulement la victoire mais aussi la refondation républicaine et sociale que l’état d’urgence impose en France et en Europe. Voilà pourquoi un certain nombre de responsables nationaux de PRS comme moi ont signé l’appel pour des candidatures unitaires et ont décidé d’aider à l’union de la gauche des ruptures. Pour nous, cela va de soi, elle prendra place dans le cadre d’une large union des gauches sans exclusives. C’est ce que nous appelons l’union dans l’union. Nous avons quelques semaines pour convaincre ceux qui hésitent encore, et quelques mois à peine pour populariser cette dynamique unitaire et pour permettre l’implication citoyenne sans laquelle aucun changement n’est possible, comme on l’a vu lors du référendum, comme on l’a vu contre le CPE.

Un mot pour conclure sur les enjeux à l’échelon local. Nous savons tous que les élections de 2007 seront dominées par la Présidentielle. On peut le regretter, mais la Vème République fonctionne ainsi. Mais si nous voulons être cohérents et crédibles, nous devrons aussi poser la question des candidatures unitaires à l’échelon local. Nous ne serions pas compris par nos concitoyens si nous ne le faisions pas. Les choses ne seront pas plus simples à ce niveau qu’au niveau national, et il va falloir prendre le temps de convaincre... Mais ici, à Montreuil comme partout ailleurs, la question doit être posée.


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