Le 21 octobre dernier, le média indépendant de Besançon Radio BIP (Bisontine Indépendante et Populaire) était victime d’une nouvelle attaque. La dernière en date d’une (trop) longue série de menaces, d’intimidations, voire d’attaques physiques, la plupart du temps de la part de l’extrême droite locale. Cette radio indépendante, focalisée sur le respect des droits humains et aux engagements humanistes, participe au riche paysage associatif franc-comtois depuis 1977.
Cette ligne éditoriale, faite de reportages de guerre, de couvertures d’événements divers (conférences, manifestations…), n’est cependant pas du goût de tout le monde. Radio BIP et sa quarantaine d’employés sont souvent visés par les néonazis locaux. À ces attaques s’ajoutent un mutisme des forces de police locales, voire une certaine complaisance vis-à-vis des agresseurs. Notre brève.
La violence de l’extrême droite, les journalistes de Radio BIP connaissent bien. La reporter Emma Audrey par exemple a été plusieurs fois menacée par les nervis néonazis, parfois en pleine manifestation. Leur local a aussi porté les stigmates de la haine, plusieurs fois vandalisé et tagué de symboles néonazis, des carreaux brisés… Mais une étape a été franchie en octobre dernier.
Ce 21 octobre, vers 18 heures, les caméras à l’intérieur des locaux du média indépendant enregistrent des images, montrant 3 hommes, portant des gants coqués (idéaux pour frapper quelqu’un), défonçant la porte du local. Tout de suite, l’alarme se déclenche, faisant fuir les assaillants, dont l’identité est encore inconnue à ce jour. La journaliste Emma Audrey reçoit la notification de l’alarme sur son téléphone et arrive sur les lieux 5 minutes après, déserts.
Cette attaque inquiète à plusieurs niveaux. D’abord, le hasard, la chance même, fait qu’aucun journaliste n’est présent au moment des faits. Mais si quelqu’un s’était trouvé sur les lieux au moment de l’attaque ? Qu’auraient fait ces individus équipés pour se battre ? Les faits se sont produits à 18 heures, avant le changement d’heure, il faisait encore jour, et tout près de la gare de Besançon, un lieu donc très fréquenté. Une attaque qui aurait été commise de nuit il y a encore quelques années se produit maintenant en journée.
Une réunion publique initiée par Radio BIP a eu lieu ce 5 novembre, les journalistes ont pu alors témoigner de la peur qu’ils éprouvent désormais en allant travailler. Si on ne sait pas encore qui a commis l’attaque, pour eux il ne fait pas de doute que c’est l’extrême droite qui est derrière. Mais l’extrême droite de rue n’est pas la seule menace aux médias indépendants.
Soulignons d’abord le rôle de la police. D’après les journalistes de Radio BIP, elle ne s’est même pas donnée la peine de se déplacer sur les lieux de l’attaque. Pire encore, les tentatives de dépôt de plainte par la rédaction ont donné lieu à des situations ubuesques. Les policiers ont refusé de prendre la plainte plusieurs fois, à chaque fois pour des motifs pour le moins évasifs. Du côté du préfet du Doubs, silence radio.
De manière générale, les institutions nationales semblent faire la guerre aux médias indépendants et associatifs. De la part du RN, mais aussi des macronistes, et souvent des deux en même temps. On a ainsi vu la ministre de la Culture Dati, sous pression de l’extrême droite, s’attaquer aux radios indépendantes. Le député RN Ballard avait ainsi proposé de « trier » l’attribution des subventions de l’État, pour la retirer à celles qui seraient « hors du champ républicain ». Ce que la ministre avait approuvé sans réserve. Nul doute que Radio BIP, attachée aux droits humains, fait partie des stations visées.
Suite à l’attaque contre Radio BIP, les réactions de soutien se sont aussi multipliées. Plusieurs sections syndicales locales ont par exemple manifesté leur soutien au média associatif : Solidaires 25, le Syndicat National des Journalistes-CGT (SNJ-CGT). La Ligue des Droits de l’Homme a apporté son soutien à Radio BIP.
Les Insoumis ont également apporté leur soutien, notamment l’ancienne candidate LFI-NFP, rédactrice en chef du Journal de l’Insoumission (média ami et partenaire de l’Insoumission.fr) et membre de la coordination nationale de LFI, Séverine Véziès. Autre soutien de poids, celui de Jean-Luc Mélenchon, qui a aussi pointé le manque de réaction des forces de police.
La réunion du 5 novembre dernier a réuni plusieurs soutiens locaux, issus d’associations, de syndicats et d’organisations politiques. Plusieurs formes possibles de soutien à radio BIP ont été évoqué. La proposition qui est la plus ressortie est la formation d’une association des « Amis de Radio BIP », qui pourrait collecter des fonds, organiser des événements en soutien au média. Affaire à suivre.
Par Alexis Poyard
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