Michel Barnier à Matignon : comment Macron a pactisé avec Le Pen

jeudi 12 septembre 2024.
 

En début d’après-midi, ce jeudi, Emmanuel Macron a nommé Michel Barnier au poste de Premier ministre. Son seul parcours politique annonce ce que sera sa politique (s’il n’y pas censure populaire et/ou parlementaire) : dès 1981, il s’était opposé à la dépénalisation de l’homosexualité aux côtés de 155 autres députés de droite. Après le vote des Français contre la Constitution européenne en 2005, il a été l’une des personnalités politiques les plus actives pour enterrer la volonté populaire par l’adoption du traité de Lisbonne.

Le 10 décembre 1982, il votait contre le remboursement de l’IVG par la Sécurité sociale. En tant que commissaire européen, il a mené une politique sécuritaire, anti-migrante (xénophobe donc) et néolibérale brutale. M. Barnier a donc tout pour séduire Macron et sa clique, qui se radicalisent toujours plus dans l’alliance avec l’extrême droite depuis 2017. On ne sera pas surpris d’apprendre que Michel Barnier plait au Rassemblement National (RN) de Marine Le Pen, qui ne le censurera pas d’emblée à l’Assemblée nationale. Certains au RN aboient de façade, mais tous se réjouissent du nouveau locataire de Matignon, prêt à exaucer leurs sales besognes. Notre brève.

Comment en est-on arrivé là ?

Le déni de démocratie qui s’opère sous nos yeux depuis plusieurs semaines a vu défiler dans le bureau d’Emmanuel Macron toute sorte d’invités. Il a commencé, à la fin du mois d’août, par recevoir les représentants du Nouveau Front Populaire (NFP), dont sa candidate à Matignon, Lucie Castets. Par la suite le Président n’a reçu que des personnalités issues de la droite (Bernard Cazeneuve ne comptant pas comme un homme de gauche). Mais à chaque fois planait l’ombre de Marine Le Pen. Cette dernière a même posé ses conditions en début de semaine : si Bernard Cazeneuve ou Xavier Bertrand (son rival dans les Hauts de-France) sont nommés à Matignon, ses députés RN censureront leur gouvernement.

Et Marine Le Pen ne l’a pas dit dans un contexte anodin : elle et le Président Macron se sont appelés au cours des dernières heures, appel au cours duquel Macron a proposé les noms de Bertrand et Cazeneuve. Le Pen a refusé ces deux noms, comme elle avait refusé Thierry Beaudet, président du CESE, mardi dernier.

Voilà donc l’extrême droite faiseuse de rois en France : quelques minutes après l’annonce de la nomination de Barnier, Marine Le Pen a refusé de se prononcer pour une censure d’un futur gouvernement Barnier. Le Pen attend le discours de politique générale du nouveau Premier ministre, Le Pen attend de voir si Barnier parvient à un budget équilibré, Le Pen est attentive au projet porté par Barnier…

Toutes les circonvolutions sont bonnes pour ne pas dire les choses clairement : le RN ne censurera pas le nouveau gouvernement. Or la chose est nette : l’accord tacite, implicite, noué entre Macron et Le Pen éclate au grand jour. Plus grave encore, les dernières déclarations de Le Pen sous-entendent que l’action politique, le budget, de Barnier devront être alignés sur celle du RN si celui-ci veut éviter la censure. L’extrême droite et l’extrême centre, tous deux néolibéraux, se sont accordés sur un nom issu de la droite dure, lui aussi néolibéral, aussi archaïque et homophobe qu’eux. Le tout sur le dos du peuple français.

Les droites contre le peuple : Michel Barnier à Matignon ou le symbole de l’élection volée

Car c’est le vote populaire qui se trouve bafoué aujourd’hui, encore une fois. Les dernières élections ont placé le Nouveau Front Populaire (NFP) et la gauche en tête à l’Assemblée Nationale. Le monarque présidentiel n’a pas daigné donner sa chance à la coalition arrivée en tête, comme dans n’importe quelle démocratie saine. Au lieu de cela, Macron s’est tourné vers la droite dure et l’extrême droite, contre la hausse des salaires, contre le retour des services publics, contre les intérêts des français (mais pour ceux des plus riches, des racistes, des homophobes…).

La nomination de Barnier nous confirme que Macron a décidé de voler l’élection aux électeurs : le nouveau Premier ministre est issu de l’aile droite d’un parti pesant moins de 10 % nationalement (qui a même atteint les 4 % à la dernière élection présidentielle). L’extrême droite, bien qu’elle ait gagné des sièges de députés, s’était retrouvée marginalisée le 7 juillet, derrière le NFP et derrière le camp présidentiel. Le déni de démocratie de Macron et son refus de se plier au choix des urnes ont redonné au RN un rôle central, celui de choisir le futur Premier ministre. Macron en portera la responsabilité devant l’Histoire.

Pour l’heure, le gouvernement Barnier doit faire l’objet d’une censure au Parlement et d’une censure populaire. Une première étape dans ce sens doit être franchie le 7 septembre prochain, à l’appel des organisations de jeunesse, contre ce nouveau gouvernement de droite dure et pour un gouvernement du Nouveau Front Populaire.

Par Alexis Poyard

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