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Samedi dernier, alors que l’ensemble des formations du Nouveau Front Populaire avaient trouvé entente autour du nom d’Huguette Bello, le Parti socialiste décidait seul d’un nouveau véto. À peine 48 heures plus tard, Olivier Faure s’exprime ce matin dans les colonnes du Parisien : « Je ne vois pas au nom de quoi il faudrait considérer, quand il y a trois formations politiques sur quatre qui sont prêts à accepter cette candidature, que la parole d’un seul s’impose à tous les autres ». Une autocritique suite à son refus d’Huguette Bello ?
Non, le Premier Secrétaire du Parti socialiste parle ici d’une nouvelle candidate sortie du chapeau social-démocrate : Laurence Tubiana. Elle qui, selon lui, « n’a jamais transigé avec ses convictions ». Doit-on comprendre qu’Huguette Bello transigeait avec les siennes ? Personne ne le saura, en raison du vide total d’explications dans le refus unilatéral de la candidature de Mme Bello par le Parti socialiste. Quant aux « convictions », quelles sont celles de Laurence Tubiana ?
Il y a quatre jours, elle publiait une tribune pour demander la formation d’une coalition et d’un programme commun avec les macronistes. À deux jours du 18 juillet et du vote décisif pour la présidence de l’Assemblée nationale, la candidature de Tubiana apparait comme un nouvel acte de blocage et de division semé par le Parti socialiste pour fissurer les rangs du Nouveau Front Populaire. Notre article.
Hier, le PS, les Écologistes et le Parti Communiste ont proposé un nom pour Matignon aux insoumis, issu de la « société civile » : Laurence Tubiana. Son profil ? Macron-compatible. Ainsi, LFI ne peut en aucun cas la soutenir pour le poste de Première ministre. Manuel Bompard en a expliqué clairement les raisons sur France 2 ce matin : « Laurence Tubiana a signé il y a 4 jours une tribune pour demander de former une coalition et un programme commun avec les macronistes. […] Cette proposition conduirait à faire rentrer par la fenêtre les macronistes qui ont été chassé lors des élections législatives », a-t-il alerté.
De nombreux éléments attestent de cela. Au soir du second, Laurence Tubiana appelait déjà à un programme de coalition ». 4 jours après le second tour des élections législatives, Laurence Tubiana signait une tribune collective dans Le Monde, se prononçant en faveur d’une coalition élargie à l’Assemble nationale avec le camp présidentiel.
Dans le texte dont elle est signataire, on peut lire, notamment : « C’est pourquoi, le NFP doit sans tarder tendre la main aux autres acteurs du front républicain pour discuter d’un programme d’urgence républicaine et d’un gouvernement correspondant. Le point de départ d’une telle négociation sera bien sûr, du côté du NFP, son programme, mais chacun et chacune d’entre nous sait, et admet par avance, que ce ne sera pas le point d’arrivée dans tous les domaines ».
Sans broncher, Laurence Tubiana a considéré BlackRock comme une « fondation philanthropique », face caméra. Pour rappel, cet énorme fonds d’investissement avait adoubé Emmanuel Macron au moment son élection en 2017 et soutenu activement les réformes des retraites du chef de l’État. En 2016, elle qualifiait les positions du président de BlackRock, Larry Fink, de « visionnaire ».
Les défenseurs de Laurence Tubiana mettent en avant son rôle majeur dans la négociation et la signature des accords de Paris sur la protection du climat. Oui, et ? D’aucuns savent aujourd’hui que ces accords n’étaient pas à la hauteur du récit en majesté qui en a été fait et de l’urgence climatique persistante. Surtout, ils ne présentaient aucune contrainte pour faire appliquer les objectifs qu’ils avaient fixés.
La candidate soutenue par le PS, le PC et Les Écologistes a plusieurs fois été citée ou appelée dans les cercles macronistes pour un ministère ou pour mener une liste à une élection. Son nom a été évoqué pour succéder à Édouard Philippe à Matignon et plusieurs fois pour rejoindre un gouvernement Macron. Elle a même été envisagée pour être tête de liste de La République en Marche aux élections européennes de 2019. Le 8 novembre 2022, elle saluait un discours du chef de l’État sur le climat, malgré l’inaction climatique criante des macronistes depuis 7 ans.
Bref, Laurence Tubiana constitue une véritable candidate Macron-compatible, qui ne peut être acceptée par LFI. Elle n’appliquera pas le programme du Nouveau Front Populaire qui a suscité un immense espoir dans le pays et qui est arrivé en tête des élections législatives.
À quoi joue le Parti Socialiste ? Ce week-end, le parti à la rose a refusé catégoriquement la candidature d’Huguette Bello, présidente de La Réunion, pour devenir Première ministre du Nouveau Front Populaire. Pourtant, les autres forces politiques de l’alliance étaient sur la même longueur d’onde. Les communistes ont été à l’initiative de cette proposition. Les insoumis ont largement plébiscité cette option, par la voix de leurs députés et par celle de Jean-Luc Mélenchon. De leur côté, les Écologistes avaient accueilli la nouvelle favorablement. Persistant à vouloir présenter une candidature de leur parti, le PS a refusé une option de consensus, qui a suscité de l’espoir parmi les électeurs, impatients de voir appliquer le programme pour lequel ils ont voté.
Présidente d’une région en Outre-mer reprise à droite, grande oratrice, longue expérience parlementaire, connaissance des rouages de l’État, passerelle entre trois des quatre forces politiques… Le profil d’Huguette affichait de puissants arguments, sans que le PS daigne changer sa position. « Depuis 48 heures, nous sommes dans une impasse en raison des vétos du PS », expliquait hier le député LFI Paul Vannier. « Le désaccord est entre le Parti socialiste et l’ensemble des composantes du Nouveau Front Populaire », a-t-il insisté.
Refuser Huguette Bello, mais soutenir une macro-compatible comme Laurence Tubiana ? La question se pose : à quoi joue le Parti Socialiste ? Que cherche-t-il en proposant un profil, dont il sait très bien que les insoumis ne pourront l’accepter ? « La proposition de Laurence Tubiana n’est pas sérieuse. C’est un peu une forme de provocation du Parti socialiste. On n’est pas là pour faire ressusciter François Hollande et les trahisons, mais pour appliquer notre programme », a taclé le député insoumis du Nord, Aurélien Le Coq.
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