La multinationale ExxonMobil, géant pétrolier climaticide, a décidé fin mai la suppression de près de 700 emplois sur son site pétrochimique de Port-Jérôme, près du Havre (Seine-Maritime). La mobilisation des salariés, avec leurs syndicats, s’est amplifiée depuis la mi-juin. La direction y a répondu par la comparution de deux syndicalistes CGT et FO au tribunal, le 27 juin. Notre entretien avec Germinal Lancelin, secrétaire général de la CGT ExxonMobil Chimie.

Où en est la grève à ExxonMobil contre la fermeture du vapocraqueur ?

Germinal Lancelin : Le point fort de la mobilisation, ce sont les piquets que les salariés ont installés sur les différentes voies d’accès au site depuis mercredi 19 juin. Les gars sont vraiment combatifs, ceux du vapocraqueur en particulier ne lâchent rien. Ils font tout ce qui est possible pour contrer les agissements de la direction. Pour animer cette mobilisation, nous avons un noyau très dur FO et CGT étroitement aligné sur les revendications. Les autres syndicats actuellement nous suivent.

La direction a embauché auprès d’une société privée une équipe de gardes du corps. Ils montent des provocations et ont tenté de forcer le passage. Les gars tiennent bon face à un directeur qui est seulement là pour détruire les emplois. Il l’a fait auparavant en Italie. C’est un « tueur » sans affect. Quand on parle du détail des emplois à défendre en réunion, il s’endort.

La direction vous a traîné au tribunal ?

G.L. : Oui, hier [jeudi 27 avril, NDLR] au Havre. Nous aurons le délibéré lundi 1ᵉʳ juillet. Sur un strict plan juridique, nous devrions l’emporter. Cela a énervé encore plus les salariés : dans la suite de la convocation au tribunal le jeudi 27 au matin, nous avons tenu une assemblée à 13 h 30. Il y avait 250 personnes, plus que d’habitude. Alors, on est parti en manifestation jusqu’à la direction et on est rentré dans le bâtiment. Le directeur s’est enfermé dans une salle sécurisée avec ses gardes du corps. Pour faire pression, on a fait beaucoup de bruit, avec une sono à fond.

Au bout d’une heure, le directeur est tout de même venu faire deux annonces : il est possible que la raffinerie soit mise à l’arrêt temporairement, faute de livraisons et de pouvoir expédier du produit. Et il a confirmé qu’une séance de négociation aura lieu mardi 2 juillet.

Propos recueillis le 28 juin

Les syndicalistes relaxés par le tribunal le 1er juillet

« Les deux syndicalistes FO et CGT mis en cause par ExxonMobil n’ont finalement vu aucun élément retenu contre eux », rapporte le journal Paris-Normandie, ce mardi 2 juillet. Le tribunal du Havre ordonne en revanche la levée des piquets. « Nous n’avons pas encore décidé de l’arrêt des barrages filtrants. Cette décision sera prise avec les travailleurs », déclarent les syndicats, selon ce journal.

Le jeudi 27 juin, les secrétaires FO et CGT d’ExxonMobil de Port-Jérôme (76) ont été assignés au tribunal du Havre, en leur nom propre, dans le cadre de la grève et des actions de blocage contre les 670 suppressions de poste. Lors de l’audience à 9 h 30, 250 sympathisants, adhérents et militants FO et CGT se sont réunis, dans un cadre unitaire où la CFDT et la CFE-CGC les ont rejoints pour apporter leur soutien aux deux syndicalistes inquiétés.

Tous étaient présents contre la répression syndicale, mesure d’intimidation utilisée par ExxonMobil pour mettre fin au mouvement de grève dans lequel les salariés n’ont pas dit leur dernier mot. C’est bien ensemble, après l’audience, qu’ils ont décidé de ne rien lâcher, et sont retournés sur les piquets de grève dès l’après-midi. Sur le site, le soutien des salariés était indéfectible et leur détermination intacte.

Le lendemain, vendredi 28, sur les coups de midi, la direction, accompagnée d’huissiers et de gardes du corps, a voulu faire entrer 6 camions de matière par la porte principale, devant le piquet de grève. Ils ont finalement fait demi-tour. De quoi continuer à donner l’espoir aux salariés qu’ensemble, ils peuvent les faire reculer.

Correspondante