Guadeloupe : une grève reconductible contre la vie chère et l’austérité

vendredi 3 mai 2024.
 

Une grève reconductible a débuté ce mardi 23 avril en Guadeloupe. Depuis des années, l’île accumule une longue liste de problèmes non résolus et délibérément ignorés par le Gouvernement. En 2021, face aux tensions d’alors, la seule réponse de Gérald Darmanin fut l’envoi de CRS et d’unités du RAID. Sur place, la population ne manque pas de CRS, mais de tout. Chaque année, les enfants guadeloupéens perdent un mois et demi de cours, faute d’accès à l’eau.

Les prix des biens de consommation y sont 57 % plus élevés qu’en Hexagone. Les services publics sont quasi inexistants, les canalisations fonctionnelles aussi. Des injustices dénoncées par Mathilde Panot et Manon Aubry, tête de liste LFI aux élections européennes du 9 juin, lors de leur récent déplacement sur place. Les revendications motivant la grève reconductible sont claires : « Arrêt de la politique d’austérité du gouvernement » ; « encadrement des prix des produits de première nécessité » ; « renforcement du service public« , et bien d’autres portées par la même volonté d’égalité des droits. Notre article.

Large union syndicale pour une grève reconductible à la Guadeloupe à partir de ce mardi 23 avril

Les revendications publiées par l’intersyndicale sont fortes (communiqué à retrouver ici). À la hauteur de la crise sociale qui traverse cette île des Caraïbes. La plus importante injustice subie par les habitants à la Guadeloupe ? La vie chère. Lors d’un déplacement aux Antilles, Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale et Manon Aubry, tête de liste de LFI aux européennes du 9 juin, ont mené une expérience. Acheter exactement les mêmes produits dans un Carrefour en Hexagone et à la Guadeloupe. Résultat, un caddie à 108 euros dans le premier cas, contre 170 dans le second. Une différence de prix de 57%.

Pour aller plus loin : LFI en première ligne pour défendre les Outre-mer

Face à une telle crise du pouvoir d’achat, les syndicats unis demandent la hausse du SMIC, l’encadrement des prix des biens de première nécessité, l’augmentation de tous les salaires, des pensions et des minimas sociaux, l’indexation des primes de vie chère dans la retraite des fonctionnaires et leur intégration dans le salaire de base.

Deuxième axe : l’accès à l’eau. Des dizaines de milliers de Guadeloupéens et de Guadeloupéennes vivent en permanence sous le régime des tours d’eau. Pourtant, la pluviométrie est plus que favorable. Même dans les zones les plus sèches de l’île, il pleut en moyenne 1000 mm par an. Soit le niveau de pluie en Bretagne. L’eau tombe du ciel, mais ne coule pas au robinet. En cause, l’état catastrophique des canalisations et du réseau d’eau en général. 70% de l’eau est perdue en moyenne.

Les syndicats exigent, et il est tout de même frappant d’en être encore là au 21ᵉ siècle, dans la 7ème puissance économique du monde, « la distribution permanente de l’eau en qualité et en quantité dans nos robinets ».

Le conflit social qui oppose les syndicats guadeloupéens aux gouvernements Macron dure en réalité depuis des années. À ces justes revendications, le Président répond par la violence et le mépris. Lors de la précédente grève générale, Gérald Darmanin a trouvé pertinent d’envoyer le GIGN. L’unité d’élite de la gendarmerie contre des citoyennes et des citoyens qui demandent juste l’accès au droit les plus fondamentaux.

La répression judiciaire et policière contre les militants syndicaux est constante. Lors de leur déplacement sur l’île, Mathilde Panot et Manon Aubry ont apporté leur soutien au collectif des planteurs à l’Usine Gardel, dont 5 avaient été assignés en justice pour demander, comme tous les agriculteurs français, de pouvoir vivre de leur travail.

Le communiqué d’appel à la grève reconductible détaille plusieurs revendications en lien avec la liberté syndicale, pilier de la démocratie : « résolution du conflit opposant le collectif des planteurs à l’usine Gardel / l’exécution de toutes les décisions de justice favorables aux travailleurs / l’arrêt de la répression judiciaire et patronale / l’arrêt du mépris colonial des ministres ». Ce n’est pas le peuple qui lutte pour l’accès à ses droits fondamentaux qui doit être poursuivis en justice.

Bien au contraire, il y a des procès à mener à la Guadeloupe, envers celles et ceux qui ont volé l’argent de l’eau et se sont enrichis, laissant les canalisations se délabrer. Il est tout aussi est urgent d’indemniser toutes les victimes de l’empoisonnement au chlordécone, ce pesticide connu pour être cancérigène, interdit en Hexagone, mais qui a continué à être utilisé dans les Antilles. Ce racisme d’État ne peut plus rester impuni.

Le préavis s’achève par un appel à la paix en Haïti, Ukraine, Palestine.

Ces revendications sont largement communes avec les propositions portées par la France insoumise. Une communauté politique logique lorsqu’on sait que Jean-Luc Mélenchon et son programme l’Avenir en Commun ont remporté plus de 56% des voix au premier tour de l’élection présidentielle.

Enfin, le point d’où part la grève : les services publics. À l’image de l’eau, dont la gestion catastrophique par Véolia conduit à un désastre social, l’ensemble des services publics sont sous doté à la Guadeloupe, encore plus que dans le reste du pays.

Les écoles ne sont ni climatisées ni rénovées malgré les chaleurs bien supérieures à celles de l’Hexagone. Les classes sont surpeuplées, les enfants manquent en moyenne un mois et demi de classe par an, car il n’y a pas d’eau. L’Enseignement supérieur de ce département est si mal doté que des jeunes des Caraïbes préfèrent aller étudier à Trinité-et-Tobago ou en Jamaïque (respectivement 46ᵉ et 113ᵉ PIB par habitant du monde) qu’à l’Université française (26ᵉ).

L’hôpital public en voie de trépas

Le CHU de la Guadeloupe est en crise. Trop peu de personnel, des équipements médicaux insuffisants, et des travailleurs précaires à foison. Les urgences sont dans un état de détresse criant, et les agents ne peuvent plus rester silencieux.

Ce jeudi 18 mars, les travailleurs du service des Urgences du Centre Hospitalier Universitaire de la Guadeloupe (CHUG) ont décidé de mettre en pause leurs activités pour exprimer leur ras-le-bol. « Urgences en souffrance », clamait-on sur leurs tuniques. Ils dénoncent les conditions de travail déplorables qui minent leur quotidien, conséquence directe d’un manque de moyens humains et matériels flagrant.

Cette situation n’est pas isolée aux urgences pour adultes à Pointe-à-Pitre, mais sévit également dans les services pédiatriques et obstétriques. Face à cette crise, l’UTS-UGTG a lancé un appel à la grève, à partir du mardi 23 avril.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 120 patients admis chaque jour aux urgences pour adultes et 100 patients aux urgences pédiatriques. Ce flux constant d’admissions ne trouve en face que la bonne volonté d’humains qui se tuent à la tâche, privés des ressources matérielles et humaines nécessaires pour mener à bien leur mission de services publics.

Les travailleurs de la santé mobilisés dénoncent aussi les pressions subies, le mal-être généralisé, et la précarité professionnelle qui affecte plus de 80 % des agents, contraints à des contrats irréguliers et à durée déterminée.

Face à cette crise, les syndicats réclament des actions concrètes :

Un état des lieux complet des dysfonctionnements et des lacunes dans tous les aspects des activités médicales et soignantes.

L’allocation de tous les moyens nécessaires en équipements, espace, matériel et personnel.

La titularisation des 80% des agents non titulaires.

La clarification des rythmes de travail et le respect des lois sur la gestion du temps de travail.

Le respect des normes de qualité de vie au travail dans la Fonction Publique Hospitalière.

Cette crise met en péril la santé des Guadeloupéens. L’État doit y répondre d’urgence. Face à la surdité d’Emmanuel Macron, la grève reconductible pour une vie digne, pour la justice sociale et la paix est lancée à la Guadeloupe.

Par Ulysse


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