Mathilde Panot : « Il faut empêcher les plus riches de vivre au-dessus de nos moyens »

jeudi 22 septembre 2022.
 

Présidente du groupe La France insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot revient pour Mediapart sur la rentrée parlementaire qui s’annonce chargée

Face à une macronie « en panique », la cheffe des Insoumis à l’Assemblée nationale assume un discours offensif, contre le projet de loi sur les énergies renouvelables, les appels aux petits gestes, le bouclier tarifaire… « Qu’ont-ils à offrir sinon rationnement, pénuries et tristesse ? »

Présidente du groupe La France insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot revient pour Mediapart sur la rentrée parlementaire qui s’annonce chargée – les travaux dans l’hémicycle reprendront le 3 octobre. Au programme : le projet de loi de finances, la réforme de l’assurance-chômage, ou encore le projet de loi sur les énergies renouvelables – que le groupe ne votera pas.

Prônant interdictions et encadrement, elle assume une ligne offensive : contre le bouclier tarifaire mais pour le blocage des prix de l’énergie, contre le projet de loi sur les énergies renouvelables mais pour la rupture avec le marché européen de l’électricité, contre les appels aux petits gestes mais pour la gratuité des transports collectifs et du train…

La députée du Val-de-Marne nous reçoit, jeudi 8 septembre, dans son bureau du Palais-Bourbon, qu’occupait, il y a quelques mois encore, Jean-Luc Mélenchon. Sur les murs encore nus, une grande carte de la Méditerranée, seul héritage visible de son prédécesseur, et à l’autre bout de la pièce, une photo encadrée d’un voyage au Burkina Faso, où Jean-Luc Mélenchon, une couronne de fleurs entre les mains, pose aux côtés de Mathilde Panot et de Bastien Lachaud, député de Seine-Saint-Denis, et l’un des plus proches de l’ancien candidat à la présidentielle.

La cheffe des député·es LFI dresse un premier bilan de la séquence parlementaire estivale qui a vu adoptée, contre l’avis de la gauche, la loi sur le pouvoir d’achat. Elle aborde aussi les enjeux de cette législature placée sous le sceau de l’union de la gauche.

Mediapart : Quelle est votre lecture du moment politique dans lequel nous sommes entrés depuis la réélection d’Emmanuel Macron ? Il vient de lancer son Conseil national de la refondation (CNR), mais le président, alors que l’événement était censé mobiliser la nation entière, a semblé très isolé.

Mathilde Panot : Passons sur le fait qu’Emmanuel Macron insulte le (vrai) Conseil national de la Résistance en reprenant l’acronyme de l’entité qui a fondé la Sécurité sociale, tout en s’appliquant à vouloir détruire les réalisations et les conquêtes sociales de cette époque. Le constat qu’on peut tirer de cette séquence, c’est qu’Emmanuel Macron est un président sans cap et sans idées. La petite musique médiatique de l’été s’emballait sur une majorité neuve entre Macron et le groupe Les Républicains (LR). En réalité, il n’a jamais été aussi seul. Les LR ont d’ores et déjà expliqué qu’ils voteront contre le budget. Quant à Édouard Philippe [fondateur du petit parti Horizons, qui dispose d’un groupe parlementaire allié à la majorité – ndlr], il ne s’est même pas rendu au CNR.

Vous estimez que Macron est durablement affaibli ?

Oui, car au sein même de la macronie - aussi bien au niveau de l’exécutif que du groupe parlementaire –, les divisions sont de plus en plus prégnantes. C’est le cas par exemple sur la taxation des superprofits. D’un côté, Bruno Le Maire ne sait pas définir un superprofit, de l’autre, Sacha Houlié, le président de la commission des lois, veut taxer les profiteurs de crise… Alors quelle est la ligne ? Qui décide ? Comme un avertissement, Yaël Braun-Pivet, la présidente LREM de l’Assemblée nationale, a d’ailleurs souligné en début de semaine que Macron ne devait pas contourner le Parlement… c’est pourtant ce qu’ils font à grand renfort de « bitoniaus » à huis clos et de menaces de 49-3.

Bref, la macronie a un problème de cohérence en interne. C’est la panique à bord. L’arrivée des députés « marcheurs » dans l’hémicycle a, à ce titre, été assez éloquente. Avec cent députés de moins qu’à la précédente législature, ils ont perdu de leur superbe et pris de nouvelles habitudes : on les a vus courir en trombe des commissions à l’hémicycle et inversement pour empêcher nos amendements de passer ! Finalement, même au sein de la macronie, c’est le chaos.

N’y a-t-il pas des divergences de ligne aussi au sein de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes), qui regroupe les groupes insoumis, communiste, écologiste et socialiste à l’Assemblée ? Cela s’est vu au moment du vote sur le passe sanitaire, ou même sur la loi pouvoir d’achat – LFI a voté contre, le PS s’est abstenu.

Au contraire, la Nupes s’est renforcée depuis qu’elle s’est constituée en intergroupe à l’Assemblée. Nous avons bien travaillé ensemble dans les commissions et dans l’hémicycle sur la loi pouvoir d’achat. Finalement, personne n’a voté pour alors que certains songeaient à le faire au départ. Toute la Nupes a voté contre le projet de loi de finances rectificative.

Les nuances et divergences entre les différentes composantes de la Nupes, parce qu’elles ont été actées et assumées lors de l’écriture du programme commun pour les législatives, ne sont pas une entrave au travail en commun.

Nous avons aussi présenté la motion de censure en commun face à une première ministre, Élisabeth Borne, qui a refusé d’engager sa confiance : du jamais-vu depuis trente ans. Nous avons porté ensemble une proposition de loi sur la constitutionnalisation de l’IVG, nous avons élaboré un contre-projet commun sur le pouvoir d’achat… Et nous allons continuer à chaque étape de faire nos propositions pour dire ce qu’on ferait si on était au pouvoir.

Histoire de montrer que vous n’êtes pas qu’une force d’opposition, mais aussi une force de proposition…

Nous sommes aujourd’hui non seulement la seule opposition à Macron, mais aussi la seule alternative ! Les nuances et divergences entre les différentes composantes de la Nupes, parce qu’elles ont été actées et assumées lors de l’écriture du programme commun pour les législatives, ne sont pas une entrave au travail en commun. Alors que les partis de gauche ne se parlaient plus depuis des années, nous sommes entrés dans un dialogue apaisé. De nouveaux espaces de discussion y contribuent : notre réunion hebdomadaire de l’intergroupe, les temps d’échanges entre les députés Nupes siégeant dans les mêmes commissions, et bientôt lors d’une grande réunion que nous allons organiser avec les 151 députés de la Nupes.

Par ailleurs, l’été a donné raison à nos analyses : nous avions alerté sur le dérèglement climatique, les pénuries d’eau, la déliquescence des services publics… Mais nous sommes en train de payer le chaos né de l’impréparation du pouvoir. Cet été, nous avons vu une multiplication sans précédent des feux de forêt - je rappelle que les pompiers se sont fait gazer quand ils ont manifesté l’an dernier ! –, une souffrance inédite dans les services d’urgence dits « dégradés »…

Quant à cette rentrée scolaire, elle est catastrophique : les élèves porteurs de handicap n’ont pas d’accompagnants, les profs sont « formés » en quatre jours – beaucoup ne se sont d’ailleurs pas présentés aux formations –, et à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) où je suis élue, j’ai vu des classes où il y a quarante-cinq élèves en petite section de maternelle ! Ce monde, leur monde, ne fait plus rêver. Ces piscines qui ferment et autant d’enfants qui ne pourront pas apprendre à nager sont un symbole parmi d’autres de leur si fabuleux marché. Qu’ont-ils à offrir sinon rationnement, pénuries et tristesse ?

En parlant de la crise de l’énergie qui s’annonce cet hiver, faut-il maintenir le bouclier tarifaire de l’énergie ?

Nous sommes pour le blocage des prix à la baisse. Sinon, cela revient à prendre dans le Trésor public pour enrichir le trésor privé. C’est ce qu’ils font avec ce bouclier tarifaire. Le prix de l’essence a doublé en un an et les profits de Total aussi. Au premier semestre 2022, ils ont engrangé 18 milliards de bénéfice et son PDG a augmenté de 52 % sa rémunération. Mais ils nous font une aumône de 500 millions via une ristourne de 20 centimes au litre : c’est-à-dire trente fois moins que leurs bénéfices. Donc en fait c’est l’ensemble des Français qui paient ce bouclier pour protéger les profits ! On n’est pas d’accord avec ça. D’où l’idée du blocage des prix : c’est du côté de la chaîne des producteurs qu’on prélève, et ça permet aux Français de respirer.

À quel niveau fixer le blocage des prix ?

Pour le carburant, à 1,40 euro. Et pour les produits de première nécessité, on préconise de suivre le modèle du « Bouclier Qualité Prix » créé en outre-mer après les mobilisations contre la vie chère. Les distributeurs, producteurs, l’État et des associations de consommateurs fixent le prix d’un panier de produits en s’appuyant sur un observatoire des marges de la distribution auquel participent les citoyens.

Mais un autre point très important pour nous est la rupture avec le marché européen de l’énergie, responsable de la multiplication par vingt du prix du gaz, et par dix de l’électricité en un an. On arrête d’indexer le prix sur la dernière centrale appelée – en général au gaz – qui fait exploser les niveaux des prix. Et on sort des aléas du marché et de la spéculation. Il y a aussi l’absurdité qui, au nom de la concurrence, oblige EDF à vendre son électricité à ses concurrents à des prix inférieurs au coût de production. On défend à la place un pôle public de l’énergie. Et cela n’empêcherait pas d’assurer les échanges de solidarité avec les autres pays.

Bloquer les prix de l’énergie, n’est-ce pas contradictoire avec une vision écologiste qui dit qu’une énergie trop bon marché est une invitation à consommer toujours plus ?

Oui, le bouclier tarifaire est un moindre mal. Mais non, ce n’est pas la solution. Notre position, c’est le blocage des prix à la baisse. Sur l’écologie, cela me fait doucement rire ou pleurer d’entendre Emmanuel Macron dire aux gens qu’il faut baisser le chauffage ou la clim. Cet hiver, on va avoir des problèmes car ils n’ont rien planifié. Ils nous mettent au pied du mur.

Quand on en est là, il ne faut pas mentir. Une baisse de 10 % de la consommation d’énergie, comme le demande aujourd’hui le gouvernement, c’est plus que la baisse de la consommation en 2020 avec deux confinements (– 8 %) ! Il faut que les gens se rendent compte. On nous met dans une situation dramatique parce qu’Emmanuel Macron a refusé de faire de la planification. De prévoir. Et de faire que les seules énergies qui nous rendent souverains, les énergies renouvelables, soient développées suffisamment. La France est le seul pays en Europe qui n’a pas atteint ses objectifs d’énergies renouvelables.

Dans notre pays, 12 millions de personnes sont en précarité énergétique. Il y en a 13 millions en précarité mobilité, c’est-à-dire qui soit n’ont pas de véhicule, soit n’arrivent pas à payer l’essence pour se déplacer. La sobriété subie, cela s’appelle la précarité. On va devoir faire des choix cet hiver : qu’est-ce qu’on va couper et ne pas couper ? Ces choix doivent être démocratiques. C’est insupportable de les voir prendre ces décisions en Conseil de défense, à huis clos. Ils pratiquent l’écologie de classe. On laisse les riches avec leurs jets privés, alors que les 10 % les plus riches dans le monde consomment vingt fois plus d’énergie que les 10 % les plus pauvres, et 187 fois plus de carburant pour leurs déplacements.

Quelles activités ou quelles consommations énergétiques arrêteriez-vous si vous étiez au pouvoir ?

Déjà, on le ferait démocratiquement. Cela doit se discuter au Parlement. Ensuite, on peut commencer par les gaspillages : par exemple, les panneaux publicitaires lumineux qui consomment autant qu’une famille de quatre personnes. Nous sommes partisans d’une écologie populaire. C’est au tour des plus riches de se serrer la ceinture. Les 10 % les plus pauvres sont déjà en situation de sobriété subie. Par exemple, interdire une partie des vols intérieurs d’une durée inférieure à trois ou quatre heures afin de privilégier le train. Nous prendrions des mesures d’urgence pour offrir des alternatives avant d’interdire, quand le gouvernement fait l’inverse. Cela suppose de rendre le train et les transports en commun gratuits par exemple. Ce n’est pas avec des petits gestes qu’on réglera le problème. Ce sont des questions systémiques. Savez-vous l’année dernière combien de logements ont été sortis de la catégorie « passoire thermique » ? 2 500, alors qu’il en faut 700 000 par an. À ce rythme-là, on aura tout rénové dans 1 900 ans !

Faut-il rendre obligatoire la rénovation énergétique des bâtiments ?

Oui, je suis d’accord avec l’interdiction effective de louer des passoires énergétiques – ce que ne fait pas la loi climat votée l’année dernière. Je suis très favorable aux interdictions et aux encadrements pour empêcher les plus riches de vivre au-dessus de nos moyens. On dit que c’est punitif, mais non : les incitations, avec le marché et sa bonne main qui ferait que tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes, ça a toujours conduit au désastre. C’est leur inaction et le chaos du marché qui rend l’écologie punitive. Quand tout est marchandisé et privé, on est privé de tout !

Comptez-vous voter la loi d’accélération des énergies renouvelables et cela fait-il débat au sein de la LFI ?

Non, ça ne fait pas débat. Nous ne comptons pas la voter. La première chose qui nous déplaît fortement dans ce projet de loi, c’est une sorte d’état urgence énergétique. Il donne des pouvoirs très forts à l’exécutif.

Pourtant vous êtes pour la planification et plus de pouvoir à l’État, non ?

Mais on peut planifier en le faisant démocratiquement ! On ne peut pas accepter que des choix se fassent sans choix démocratique. C’est la condition de l’acceptabilité. Sinon ça ne fonctionnera pas. Pour remplacer le nucléaire par des renouvelables, il faut de la sobriété et de l’efficacité énergétique. Et donc des débats démocratiques. Le projet de loi sur les renouvelables veut neutraliser la non-régression du droit de l’environnement, et faciliter les dérogations à l’interdiction de détruire les espèces protégées. Nous ne sommes pas d’accord.

Le problème, ce n’est pas le droit de l’environnement. C’est le non-investissement dans les énergies renouvelables. La question, c’est la volonté politique, la formation, et la protection des filières industrielles. Or, Emmanuel Macron est celui qui a bradé les filières des renouvelables : cession de la branche Énergie marine d’Alstom à General Electric, cession de la branche éolien offshore d’Areva à Siemens. Enfin, le plus problématique dans ce projet, c’est surtout ce qu’il n’y a pas : zéro mesure sur l’efficacité et la sobriété énergétique, et pas de remise en cause de la libéralisation du marché.

Vous assumez de planter le développement des énergies renouvelables en ne votant pas la loi ?

C’est une question un peu bizarre. Vous pensez vraiment que détricoter le droit de l’environnement, c’est ce qui permettra de développer les renouvelables ? Ce n’est pas vrai. Pourquoi la France n’a qu’un seul parc éolien en mer ? Ça fait combien de temps que les Insoumis parlent des énergies marines ? Cette loi est un enfumage total. Vous croyez vraiment qu’ils vont développer les renouvelables alors qu’ils sont en train d’annoncer un nouveau programme nucléaire ?

Ne pas voter cette loi ne risque-t-il pas de conforter le nucléaire ?

Cette loi va aggraver la situation. Et Macron conforte de toute façon le nucléaire. Ils ne font que repousser les échéances. Si vous voulez développer les énergies renouvelables, vous devez développer l’anticipation des choses. Par exemple, pour planifier, vous avez besoin d’un acteur indispensable : Météo France, qui a en réalité perdu un quart de ses effectifs en dix ans et un tiers de ses implantations territoriales. Tant qu’on continuera à mettre de l’argent dans le nucléaire, vous ne pourrez pas développer les renouvelables. C’est voué à l’échec. Il n’y a pas assez d’argent pour faire les deux.

J’entends les macronistes nous reprocher de crier trop fort, mais ils ne veulent surtout rien entendre à ce qu’on dit !

Le PCF et le PS sont-ils sur cette ligne ?

Je ne sais pas. On va en discuter en interne. Politiquement, cette loi est un enjeu important pour nous car ça va être l’occasion de parler d’enjeux énergétiques, et de l’énorme déni de démocratie. On a décidé de ne pas mettre sous le tapis les divergences entre nous. Le nucléaire est l’une d’entre elles. Si on vote différemment, ce ne sera ni un scoop ni sur la base d’une analyse politique si différente. Jusqu’à preuve du contraire, la Nupes n’est pas un parti unique mais une coalition.

Sur le budget, vous ne le voterez pas, même s’il y a l’introduction d’une taxe sur les superprofits ?

Bien sûr que non, nous ne le voterons pas. Quant à la question des superprofits, on attend de voir : une hypothétique taxation peut prendre des formes très différentes. Mais si cela va dans notre sens, alors on votera l’amendement, comme quand on a voté la déconjugalisation de l’allocation adultes handicapés (AAH) que nous proposions depuis cinq ans, alors que la majorité l’avait refusé six fois lors de la dernière mandature.

Votre groupe est passé de 17 à 75 députés : cela vous contraint-il à adapter votre stratégie ? Faut-il revoir l’organisation du groupe, par exemple en acceptant l’existence de « courants » au sein de LFI ?

D’abord, je suis très fière de notre groupe Insoumis. Quasiment tout le monde a pris la parole en hémicycle (73 sur 75) au cours des quatre premières semaines, ce qui est un exploit. Notre groupe est le plus divers en termes d’origines militantes et de parcours de vie. On y trouve des syndicalistes, des associatifs, mais aussi la première femme de ménage et la première ouvrière agricole élues à l’Assemblée nationale. En même temps, nous avons une cohérence politique qui vient de tout le travail programmatique effectué durant la présidentielle et les législatives. Elle est la plus forte de tous les groupes de l’Assemblée. Évidemment, il faut débattre, mais on s’accorde sur l’essentiel sans être forcés et on sait pourquoi on passe des heures et des heures dans l’hémicycle.

Certains, y compris en interne, jugent qu’il faudrait adopter un comportement un peu adouci sur la forme, tout en restant intransigeant sur le fond.

J’entends les macronistes nous reprocher de crier trop fort, mais c’est surtout qu’ils ne veulent rien entendre à ce qu’on dit ! Que l’on soit 17 ou 75, je ne vois pas pourquoi on changerait de stratégie ou pourquoi on arrêterait de faire du bruit. Les députés du Rassemblement national ont beau être « encravatés » et surjouer le calme, cela ne les empêche pas de porter des idées fascistes. Ils passent d’ailleurs leur temps à taper sur leur pupitre en séance, ce qui étouffe complètement le débat et révèle au grand jour leur antiparlementarisme primaire. Les journées parlementaires du groupe [qui se tiendront les 22 et 23 septembre – ndlr] seront aussi l’occasion d’un débat interne sur notre stratégie.

Pensez-vous qu’il faut jouer davantage le jeu de la coconstruction des lois ?

Notre rôle, c’est d’arracher ce qu’on peut. C’est ce qu’on a fait quand on a arraché la fin du passe sanitaire, mais aussi quelques amendements qui paraissent un peu anecdotiques mais qui changent quand même la vie des gens – par exemple, celui qui interdit de demander des compléments de loyers pour les 2 millions de personnes qui habitent dans des appartements avec les sanitaires sur le palier. Après, les lois qui s’annoncent, et je ne parle même pas de la réforme des retraites dont on nous dit qu’elle pourrait passer par un amendement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, sont une telle attaque contre le peuple que notre rôle est de résister et d’organiser, dans la rue aussi, cette résistance.

Avant les vacances, vous avez été confrontés, à LFI, à plusieurs affaires délicates de violences sexistes et sexuelles (VSS). Qu’avez-vous prévu au sein du groupe pour prévenir ces violences ?

En plus de la cellule qui existe au sein du mouvement – et qui est perfectible –, nous organiserons, côté groupe, une formation sur les VSS aux journées parlementaires. La formation sera conduite par le cabinet Egaé, et je tiens à ce que tous les députés soient présents. Nous sommes par ailleurs en train de travailler à un système de cellule ad hoc pour l’Assemblée, qui permettra de traiter les alertes en termes de ressources humaines et les VSS, mais on n’a pas encore tranché sur la manière de faire, notamment sur l’internalisation ou l’externalisation de la cellule. Il est possible qu’il y ait une coordination de la Nupes sur ce sujet.

Jean-Luc Mélenchon s’est rendu à plusieurs réunions de votre groupe avant les vacances. Doit-il continuer à venir ?

Oui, parce qu’il a réuni huit millions de voix à la présidentielle, parce qu’il nous a représentés trois fois à la présidentielle, et parce qu’il a une solide expérience de parlementaire… Il doit évidemment continuer à avoir un rôle. Il est d’ailleurs invité à nos journées parlementaires. Certes, on doit penser l’articulation. Mais nous sommes des militants politiques, on ne peut pas agir sans théorie. Or, ces moments d’échanges et son analyse de la situation politique instable que nous vivons permettent de replacer le groupe parlementaire dans un paysage plus large. Ceux qui ne verraient en nous que des marionnettes sont au mieux pathétiques, au pire sexistes. Jean-Luc Mélenchon ne vient pas nous dire ce qu’on doit penser, c’est une discussion entre militants. D’autant que la vie politique est devenue un compte à rebours de la dissolution. Nous sommes plus que jamais prêts à prendre le pouvoir.

Jade Bourgery, Pauline Graulle et Jade Lindgaard


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