Que nous aimions jouer au football ou regarder des matches, ne doit pas nous empêcher de porter un regard rationnel sur cette manifestation sportive.
1) La FIFA
La Coupe du Monde est organisée par la Fédération Internationale de Football Amateur. Cette FIFA représente un miroir assez fidèle de la mondialisation libérale. Prenons le cas de son président :
- il fut poussé vers le secrétariat général puis la présidence par l’ancien patron d’Adidas Horst Dammler. ("Monsieur Blatter fut nommé secrétaire général, tout simplement grâce à Horst Dammler ... Blatter était son laquais" autobiographie de l’homme d’affaires André Guelfi, ancien associé de Dammler, condamné dans l’affaire ELF).
- il fut élu grâce à 918 000 euros de pots de vin versés à une vingtaine de membres influents (source "Comment ils ont truqué la partie ?" du Britannique David Yallop ).
- il "gère la FIFA comme une dictature" (Le Monde du 28 mai 2002) dit son ancien secrétaire général Zen Ruffinen qui dénonce emplois fictifs, financements déguisés et soupçons de corruption.
- 11 membres du Comité exécutif de la FIFA sur 24 ont porté plainte contre Sepp Blatter pour "détournement de fonds".
A trois semaines de l’ouverture de la Coupe du Monde, la FIFA s’enfonce dans les tourbillons d’une affaire aux relents semblables à la célèbre "affaire Clearstream". La FIFA a saisi le tribunal de Zurich ( où est installé son siège) pour que soit interdit de publication et de distribution le livre "Carton rouge, les dessous troublants de la FIFA". L’auteur y relate un virement pharaonique " au noir à un haut responsable du football" pour l’obtention de droits de retransmission télé. Ce sera notre sujet de demain.
2) Les droits télé pour la Coupe du Monde
Nous retrouverons naturellement Sepp Blatter, président de la FIFA. Les droits pour la retransmission télévisée des matches de 2002 et 2006 ont rapporté 2300 millions dee dollars. La chaîne brésilienne Globo a payé par exemple 60 de ces millions. Pas de problème, me direz-vous ; beaucoup de Brésiliens adorent le football. Si ! Il y a problème ! Ces 60 millions ne sont jamais parvenus dans les caisses de la FIFA.
Qui était chargé d’assurer le parrainage sportif mondial et la collecte de ces fonds ? La compagnie ISL (International Sports and Leisures), créée par Horst Dammler, ancien patron d’Adidas et de Blatter. Drôle de société : "Ses comptes n’étaient pas publiés, ce qui permettait de dissimuler de nombreuses opérations comptables, en particulier celles qui servaient au blanchiment d’argent. De même, les contrats ne faisaient l’objet d’aucun appel d’offres ... En Mai 2001, les mondes du sport et de la finance découvrent qu’ISL Worldwide possède une caisse noire sur un compte bancaire" dans le paradis fiscal du Liechstenstein (Le Mond diplomatique).
Pour Michel Zen Ruffinen, secrétaire général de la FIFA, aujourd’hui fâché avec le président, le montant total des manoeuvres frauduleuses sous l’égide de Sepp Blatter atteint 550 millions d’euros en 2002.
Il ne faut pas être surpris par de telles sommes. Prenons le cas de notre pays.
Pour être "parrain" de l’équipe de France, lors de la Coupe du Monde 2006, Adidas, Carrefour, Crédit Agricole et Canal + ont payé chacun 4 millions d’euros.
Pour être "partenaires", Coca Cola, RTL, Ferrero, SFR et Toyota ont versé chacun entre 1 million et 1,3 million d’euros. Viennent ensuite les "fournisseurs" se délestant de 400 000 à 500 000 euros.
Ces sponsors s’étant généralement engagés sur 4 ans, les sommes seront touchées par les dirigeants du foot, indépendamment de la réussite des Bleus lors de la Coupe du Monde.
Deux spots de quelques secondes sur TF1 lors de la finale, si la France est qualifiée, vont coûter 500 000 euros.
3) L’argent fou du sport
Le football ne représente qu’une facette de la planète financière du sport. La revue "L’expansion" de cette semaine donne quelques informations sur "L’argent fou du sport".
- Combien gagne Zinedine Zidane par jour ? 40 000 euros
- Quelle est la prime attribuée au cheval gagnant du Prix d’Amérique ? 500 000 euros
- Quel est le loyer d’une grande loge du stade de France pour 3 ans ? 600 000 euros
- Quel est le chiffre d’affaires quotidien du Real Madrid ? 800 000 euros
- Combien verse BNP Paribas pour parrainer Roland Garros ? 8 000 000 millions d’euros
- Combien paie chaque année Emirates Airlines pour donner son nom au stade d’Arsenal (Grande Bretagne) ? 8 millions d’euros
- Quel est le prix moyen d’un sponsoring maillot en Ligue1 en France ? 11 millions d’euros
- Combien gagne chaque année Tiger Wood, le golfeur ? 80 millions d’euros
- Combien dépense Renault chaque année en Formule 1 ? 240 millions d’euros...
Revenons au football. En France, la loi Buffet avait formellement interdit aux clubs sportifs l’accés aux marchés financiers. En février 2002, 8 clubs de Ligue 1 ont déposé une plainte devant la Commission européenne contre cette interdiction d’entrée en Bourse. Voici un peu plus d’un an, la Commission a solennellement demandé au gouvernement frnçais de lever cet interdit.
Même sans cotation en Bourse, de grands fonds d’investissement commencent à s’accaparer du football français. C’est ainsi que le fonds Colony Capital (propriétaire entr’autres des restaurants Buffalo Grill) et Butler capital Partners se sont payé le Paris Saint Germain.
Qu’est-ce qui les attire ? Particulièrement la possibilité de mettre en valeur les stades (restaurants, centres d’affaire, boutiques...). Ainsi, le stade d’Arsenal compte 150 loges louées chacune entre 75000 et 218000 euros l’année, 4 restaurants, 250 buvettes, un énorme mégastore...
Des investisseurs privés construisent sur ce mode un stade à Nice pour 90 millions d’euros. Le consortium Cari Spada exploitera : bureaux, surfaces commerciales, clubs, bars et restaurants.
Dans le même temps, les paris se développent, par internet surtout, et contournent le monopole de la Française des jeux et du PMU.
Comment analyser globalement le rôle et l’évolution du sport dans la société capitaliste ? Nous y reviendrons d’ici la Coupe du Monde.
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