Gestion sanitaire du Coronavirus : l’enjeu politique fondamental et névralgique du seuil critique

samedi 19 septembre 2020.
 

Seuil critique et basculement du système.

La qualité de la prise en charge matérielle et organisationnelle de la crise sanitaire du Coronavirus met en cause la crédibilité du pouvoir politique et le système économique sur lequel il s’appuie.

Le seuil critique de la capacité de soins du système hospitalier constitue la pierre angulaire de cette crédibilité qui devient alors une bataille politique où les médias dominants doivent continuer à jouer leur rôle de fabricants du consentement dans la perpétuation du système en place.

Le pouvoir politique en place se préoccupe-t-il vraiment de la vie, de la santé de la population qui l’a élu ?

La réponse à cette question dépend de la politique concrète menée par le gouvernement et du niveau d’information et de conscience politique des citoyens. Ce niveau d’information et de conscience est en partie déterminé par la qualité de l’information et de l’action idéologique des grands médias qui ne sont pas indépendants du pouvoir économique et politique.

Pour une bonne partie de la population, la corrélation entre le nombre de morts dues, par exemple, aux accidents de travail, à des suicides résultant du stress au travail ou du chômage, etc. et la politique médico–sociale du gouvernement n’est pas évidente.

D’une manière plus globale, le fait qu’un enfant de moins de 15 ans meurt toutes les cinq secondes dans le monde, faute de soins et d’alimentation (source en annexe) n’est pas corrélée aux politiques des multinationales elles-mêmes soutenues par les gouvernements libéraux placés au pouvoir par les électorats de droite ou sociaux-démocrates.

Une majorité de la population, sous informée ne fait pas d’efforts pour établir ces corrélations puisque la mort qui frappe ces suicidés, ces chômeurs et ces enfants ne semble pas la menacer directement.

Mais cette déficience de perception est en train de changer avec le problème posé par la pénurie de masques.

Il existe évidemment une corrélation entre le manque de masques et un certain nombre de décès notamment de soignants dans les hôpitaux et de personnes âgées dans les EHPAD.

Mais cette corrélation est brouillée par le pouvoir et les médias faisant croire que le port du masque n’est pas indispensable si l’on respecte les distances.

Or des rapports parlementaires de 2005 concernant la politique à suivre en cas d’épidémie indiquaient en s’appuyant sur les différents organismes de protection sanitaire en France que le port du masque était indispensable. (Voir enquête sur les origines de la pénurie de masques du magazine La Tribune en annexe). L’Académie de médecine à encore récemment réaffirmé cette position.

Actuellement des avis contradictoires sont savamment entretenus par les médias pour créer la confusion. Certains représentants politiques expliquent ce mensonge pour justifier la pénurie de masques.

C’est en partie vrai, mais la raison fondamentale est autre : pour ne pas paraître comme criminel, il est nécessaire pour le pouvoir de cacher la corrélation entre la survenue de centaines et peut-être de milliers de décès et le défaut de masques, d’autant que, dans ce cas, chaque individu se sent menacé par une mort possible.

On comprend ainsi mieux toutes les gesticulations médiatiques sur l’efficacité relative des masques et leur inefficacité en cas de mauvaise utilisation, etc. Pour créer une diversion sur la responsabilité politique du pouvoir concernant la pénurie de lits et de matériel, les médias, au service de celui-ci accompagné des réseaux sociaux, focalise l’attention sur la polémique concernant l’utilisation de l’Hydrochloroquine

Ainsi par exemple, voit-on Macron, sous les feux des projecteurs, rendre visite le 09/04/2020 au professeur Didier Raoult. Une émission de 1h30 (rediffusée une seconde fois la même soirée) sur BFMTV le 30/04/2020 avec une troisième diffusion le 1er mai. Et pendant que l’on parle du super équipement de l’Institut hospitalier universitaire du professeur Raoul et des milliers de tests effectués en ce lieu, on ne parle pas de la clochardisation de l’hôpital public sous-équipé et travaillant sous stress permanent. Et un petit sondage sur les réseaux sociaux fera dire aux journalistes : la France est toujours coupée en deux vis-à-vis du professeur Raoul ! Que l’on puisse avoir un avis indépendant ne s’inscrivant pas dans ce diktat paraît donc impensable !

Et la polémique s’amplifie avec la menace du conseil nationale de l’ordre de suspendre le professeur Raoul et les généralistes prescrivant hydroxychloroquine.

On aura donc compris la manip médiatique : la quantité de décès ne serait donc pas due essentiellement aux carences sanitaires citées ci-dessus mais à la prescription ou non prescription de ce médicament d’efficacité controversé dans le milieu scientifique.

À défaut d’avoir trouvé un bouc émissaire responsable de la crise, le pouvoir et les médias ont organisé une grande diversion.

Ces corrélations sont en revanche claires pour les soignants, les citoyens engagés dans des syndicats, des associations humanitaires ou des organisations politiques réellement de gauche.

Ce qui est redoutable pour un gouvernement, c’est qu’une majorité de la population considère que celui-ci n’accorde pas une grande importance à la vie et fait passer avant d’autres priorités : économie, conservation du pouvoir, prestige, etc. Pour un tel gouvernement, cela signifierait qu’il n’accorde pas ou très peu d’importance à la mort des individus composant la population.

Et c’est sur cette question que se situe tout l’enjeu politique de la crise sanitaire actuelle de 2020.

Le pire pour le gouvernement en place et notamment celui de Macron, serait que des centaines ou des de milliers de personnes meurent du Coronavirus sans soins.

Ainsi, tous les moyens du bord vont-ils être mis en œuvre pour qu’une telle situation ne surviennent pas.

Cette situation sensible de MSS (mortalité sans soins) dépend notamment d’un certain seuil S de capacité d’accueil dans les hôpitaux.

Celle-ci dépend du nombre de lits pour 1000 habitants, du nombre de lits de service de réanimation de soins intensifs pour 1000 habitants, du nombre de respirateurs pour 1000 habitants, des quantités de médicaments disponibles, et surtout du nombre et de la qualification des personnels soignants.

Lorsque ce seuil S est trop bas en raison de politique de restriction budgétaire antérieure détériorant les conditions de travail et d’accueil dans les hôpitaux, le gouvernement doit mettre en œuvre différents moyens pour que la vague des admissions de malades ne dépasse pas ce seuil critique pour sa crédibilité et sa survie politique.

Pour maintenir la vague de malades à un niveau inférieur au seuil S, il faut utiliser massivement des masques, des tests et, à défaut de moyens, le confinement comme c’était le cas au Moyen Âge.

Avec les moyens suffisants, le confinement ne devrait concerner qu’une très petite partie de la population.

Des pays disposent des meilleures capacités d’accueil comme Monaco, le Japon, la Corée du Nord (13,2 lits pour 1000 habitants), la Corée du Sud (11,5 lits pour 1000 habitants), la situation est au départ plus facile à gérer que dans un pays comme la France (6,4 lits pour 1000 habitants ; 20e rang mondial) ou les USA (2,9 lits pour 1000 habitants au rang 76).

Le fait que les gouvernements français aient supprimé 100 000 lits ces 20 dernières années, malgré les décès que cela a pu entraîner, notamment avec la situation catastrophique des urgences, n’est pas apparu comme criminel pour une large majorité de la population.

Même remarque pour la pénurie de médecins généralistes, de psychiatres et certaines spécialités médicales.

Mais avec la crise actuelle, cette perception est en train de changer. Le manque de matériel sanitaire, le manque total de compétence dans l’organisation au travail, notamment la lenteur des prises de décision (voir annexe) pour aggrave encore cette perception négative.

Il devient maintenant difficile de croire pour une partie croissante de la population, que le seul motif du gouvernement soit d’éviter que les soignants soient submergés alors qu’ils l’étaient déjà auparavant comme en ont témoigné la multitude des mouvements de protestation à tous les niveaux de la hiérarchie médicale ces deux dernières années. Le gouvernement était resté sourd, ou presque, à ces cri de détresse du corps médical.

Non, ce qui motive le gouvernement, c’est d’existence massive de MSS provoquant l’indignation de la partie la plus inculte politiquement de la population et qui est numériquement non négligeable.

C’est cette population naïve qui ne trouvait rien à redire sur l’utilisation des LBD et sur les mutilations occasionnées par leur utilisation contre les Gilets jaunes. C’est cette population qui reste peu sensible au cri d’alarme des services d’urgence. C’est cette population qui trouve normal que l’état d’urgence soit intégré dans le droit commun.

Mais le consentement fondé sur l’ignorance a ses limites : il serait difficile pour une telle population d’admettre que des milliers de personnes meurent, les services de soins étant dans l’incapacité de pouvoir les soigner, même partiellement.

C’est ce seuil critique S de centaines de milliers de Morts de type MSS qui constitue l’enjeu politique majeur de la situation actuelle puisque ce seuil dépassé, le gouvernement en place serait jugé criminel et éventuellement aussi les gouvernements l’ayant précédé. Et dans ce cas, c’est tout le système économique et politique qui est remis en cause par une large majorité de la population.

Remarquons que ce seuil critique commence à être atteint lorsqu’un tri des personnes âgées de plus de 75 ans sont exclus de la réanimation. Voir article du Canard enchaîné repris par un blog auquel on peut accéder par le lien suivant :

https://alt-rev.com/2020/04/30/pers...

Le gouvernement marche donc sur une ligne de crête : s’il confine trop longtemps, les conséquences économiques pour le patronat notamment deviennent trop importantes.

Si le confinement est trop court, un rebond de l’épidémie est possible provoquant ainsi un dépassement du seuil S et même une pénurie de main-d’œuvre en raison d’un nombre considérable de salariés en arrêt de travail. Le dit confinement doit donc se faire dans cette optique par à-coups, en contrôlant semaine après semaine le nombre d’arrivées et de départ dans les hôpitaux.

Il est bien évident que sans la suppression massive de lits et de postes de soignants ces dernières années, avec un équipement à la hauteur du nombre de respirateurs, de masques et de tests, une telle situation, de surcroît très coûteuse financièrement pour l’économie, n’aurait pas eu lieu.

À cette insuffisance de moyens, s’ajoute une incompétence technique à gouverner, en l’occurrence à planifier une politique sanitaire d’urgence et surtout un aveuglement fanatique de nature idéologique.

Ainsi, prisonnier de cet obscurantisme néolibéral, le gouvernement refuse de permettre à l’État de donner des ordres aux entreprises privées, aux laboratoires privés (notamment vétérinaires) pour fabriquer le matériel nécessaire, même si cela coûte des centaines de morts.

Il est donc clair ici, que leur monde idéologique fantasmatique hors-sol surplombe et écrase une réalité matérielle et sociale qui leur échappe. Avec une telle représentation mentale technocratique, comptable et asservie à des puissances financières, il est impossible que ces libéraux puissent changer leur vision du monde. Il est certain que pour eux, le « monde d’après » sera le même que le « monde d’avant » la crise actuelle. Ces gens ne peuvent « changer de logiciel » puisque celui-ci est le seul qui donne un sens à leur existence notamment à leur « réussite sociale ».

Pour faire croire à une population plus ou moins naïve qu’il se préoccupe de la réalité, le président se transforme en acteur récitant des textes mis au point par des techniciens de la communication et du marketing politique, analysant les attentes d’un public relativement crédule. On adule ici médecins et infirmières considérées comme des héros, on admire des enseignants pour leur dévouement, leur inventivité, leur incroyable imagination, etc. mais la comédie sonne de plus en plus faux même pour les citoyens les plus naïfs.

Annexe documentaire

Covid-19, 1er Mai : Bas les masques ! - Un appel de soignant.e.s pour construire un mouvement populaire !

Un enfant meurt toutes les cinq secondes dans le monde. Unicef https://www.unicef.fr/article/un-en... le plongeon des capacités hospitalières depuis 1980. Source : Magazine Alternatives économiques https://blogs.alternatives-economiq...

Comment expliquer la volonté des gouvernements d’affaiblir l’hôpital public en France ? http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

Frédéric Pierru : "Dans l’après-Covid, on jugera la gestion de l’hôpital comme une vraie folie" Source : Le média.tv https://www.lemediatv.fr/articles/e...

Article deux France info à l’occasion des élections présidentielles de 2017. Les directeurs d’hôpitaux présentaient aux candidats un plan d’urgence pour l’hôpital et la médecine libérale en 50 points laissé lettre morte Manque de moyens, urgences saturées, lits insuffisants... Les directeurs d’hôpitaux publics interpellent les candidats à l’élection présidentielle https://www.francetvinfo.fr/sante/h... COVID 19 : oui, la lenteur de l’État a tué. Source : le média.tv https://www.youtube.com/watch?v=9fB...

La France en pénurie de masques : aux origines des décisions d’État Source : La Tribune https://www.latribune.fr/opinions/t... EHPAD : silence on meurt ! http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

Décès aux urgences : des dysfonctionnements exacerbés par manque de moyens. Source : Le Figaro https://www.latribune.fr/opinions/t... Quand le budget de la santé diminue, la mortalité augmente Source : le Figaro https://sante.lefigaro.fr/article/q... Cet article rend compte du travail d’une équipe de chercheurs en Angleterre : ils ont constaté que les restrictions budgétaires sur la santé en 2010 ont provoqué entre 2012 et 2014 un surcroît de 45 000 décès notamment liés au « virage ambulatoire ».

Nombre de lits pour 1000 habitants. Comparaisons internationales. https://www.indexmundi.com/g/r.aspx...

Dominique Vidal : « A l’hôpital, on fait le tri entre les personnes âgées et les autres : c’est quasi eugéniste » http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

Visite de Macron au professeur Raoul. https://www.lexpress.fr/actualite/s... https://www.lexpress.fr/actualite/s...

Le Grand Raoult Source : le média.tv https://www.youtube.com/watch?v=Ae7... On apprend, entre autres, que si Didier Raoult n’a pas signé de contrats personnels avec des firmes pharmaceutiques, il n’en reste pas moins vrai que Sanofi (qui fabrique de l’hydroxy chloroquine) et Bio Mérieux (producteur de tests) ont financé son laboratoire dès sa fondation.

Feuilleton sur la polémique de l’hydroxy chloroquine : la molécule qui m’a rendu Source : le média. https://www.lemediatv.fr/articles/e...

Les actions de protestation :

Plainte déposée par 600 médecins contre le premier ministre et la ministre de la santé. 243 000 signatures au 26/03/2020 de soutien. https://www.ouest-france.fr/sante/v...

Plainte déposée contre la garde des sceaux sur le manque de protection sanitaire dans les prisons. Des enquêtes parlementaire proposées par différents courants politiques. https://fr.news.yahoo.com/coronavir...

Protestation des soignants à domicile à Perpignan sur le manque de blouses et de masques. source : La Libre vie https://www.lalibre.be/planete/sant...

Hervé Debonrivage


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